Enquête ENFAMS (Enfants et familles sans logement) Emmanuelle Guyavarch, Pour l’équipe ENFAMS CNLE - 16 octobre 2014

A l’origine… Source des données : 115 de Paris – Aloha-4D

Le projet Enfams Initié dès 2010 à partir du constat de l’évolution des prises en charge familiales au 115 de Paris En France, inquiétude des opérationnels mais invisibilité scientifique des familles sans logement Mise en place d’une série d’enquêtes qualitatives (entretiens, enquête ethnographique par immersion, archives) Des thèses en cours (Observatoire et Inserm) Une enquête quantitative pluridisciplinaire

Les objectifs de l’enquête quantitative Estimer la taille de la population et décrire les caractéristiques sociodémographiques des familles sans logement Caractériser les conditions de vie et les parcours des familles Décrire l’état de santé des mères et des enfants et comparer les prévalences avec la population générale Décrire l’impact des conditions de vie sur la santé et la vie quotidienne des parents et des enfants

La population d’étude Echantillon : L’enquête : Familles comprenant au moins un enfant de moins de 13 ans Vivant en CHU, CHRS, hôtel social, CADA Hébergées en Ile-de-France Parlant une des 17 langues de l’enquête L’enquête : 1er semestre 2013 Familles rencontrées par un binôme eq+psy puis par une IDE 801 familles enquêtées (N=10 280 -> 35 000 personnes) Durée médiane d’enquête : 3h (+ 30 à 45’ IDE) Autorisations CPP + CCTIRS + CNIL 5

QUI SONT LES FAMILLES SANS LOGEMENT ? Profils, conditions de vie, parcours…

Lieux de vie des familles : département et type de structure

pays d’origine et statut administratif Profils des familles : pays d’origine et statut administratif Plus de 9 parents sur 10 déclarent être nés à l’étranger. Arrivés en France depuis 5,2 ans en moyenne. Variation selon le pays d’origine *régularisés : réfugiés, carte de résidant de 10 ans avec autorisation de travail, dispense légale de titre de séjour (UE) Ensemble Afrique : 63%

Raisons de la migration : trois principaux motifs Modalités principales (plusieurs réponses possibles) ENFAMS Menaces (échapper à la guerre, l’insécurité, à des troubles politiques, sauver sa vie, fuir un mariage forcé, protéger son enfant de l’excision…) 35% Pour raison économique 32% Pour raison familiale 24% Pour raison médicale 6% ELIPA : détenteurs d’un titre de séjour permanent et signataires d’un contrat d’accueil et d’intégration (pas de DA au moment de l’enquête)  Variations selon l’origine géographique et le statut administratif

Le parcours résidentiel : avant l’entrée dans le dispositif d’hébergement migrants : 2,3 ans en moyenne entre l’arrivée en France et le premier épisode sans domicile / dans 32% des cas : SD dès l’arrivée en France ensemble : avant d’entrer dans le dispositif d’hébergement, 45% des personnes interrogées vivaient en France chez un tiers, 29% arrivaient de l’étranger, 13% vivaient en France dans leur propre logement ou celui de leur conjoint

Le parcours résidentiel : la première expérience sans domicile Sans enfant Avec enfant

Le parcours résidentiel : la vie sans domicile SD depuis 2,9 ans en moyenne variable selon le statut administratif (4 ans pour les personnes en situation régulière et les TDS ; 2,5 ans pour les personnes en voie de régul ; 2 ans pour les français ; 1,5 ans pour les DA) Depuis qu’ils sont SD, 15% des enquêtés ont passé au moins une nuit dans la rue (11% des enquêtés ont passé au moins une nuit dans la rue avec leur enfant) Au total, dans 40% dans cas les parents étaient SD avant la naissance de l’enfant tiré TAS ; variation selon l’âge : 84% pour les enfants de moins de 1 an, 53% pour tous les 0-5 ans 11% pour les 6 ans et +

La mobilité résidentielle : le nombre de déménagements 4,3 déménagements en moyenne (de 0 à 25) 2,2 déménagements par an nombre de déménagements fortement lié à la durée de vie SD (3,8 déménagements par an si présents depuis 1 à 2 ans ; 1,0 déménagement par an si présents depuis au moins 4 ans) nombre de déménagements fortement lié au type d’hébergement et à l’hébergeur

Les familles 3,4 personnes par logement (2-10) La moitié des familles sont monoparentales 57% des enfants sont nés en France ¼ des parents interrogés ont au moins un enfant qui ne vit pas avec eux. Dans 8 cas sur 10 ces enfants vivent dans le pays d’origine du parent enquêté

Des conditions d’hébergement précaires Plus d’une personne sur 5 ne cuisine pas ou ne peut pas cuisiner dans sa structure d’hébergement Au total, dans 41% des cas, au moins un enfant dort dans le lit des parents (50% dans les hôtels) Pbs de literie, de froid, d’humidité, de bruit, de cafards ou autres insectes  Variation selon le type d’hébergement

Des conditions de vie difficiles ¼ des familles sans suivi social 4 familles sur 10 sans prestation sociale 3 familles sur 10 contribuent financièrement à leur hébergement 2 familles sur 10 sans aucun revenu 1 enfant sur 10 n’est pas scolarisé parmi les 6-12 ans Revenu médian : 227 euros/UC par mois 18% des enquêtés ont un emploi ; 31% ne travaillent pas mais cherchent un emploi

LA SANTE DES FAMILLES SANS DOMICILE Santé générale, santé ressentie, recours aux soins, santé mentale, santé nutritionnelle et santé périnatale

L’état de santé des familles : une santé nutritionnelle alarmante L’insécurité alimentaire est majeure 86% des familles (vs 6% IDF) Dimension quantitative, qualitative, psychologique Insécurité légère (33%), modérée (43%), sévère (10%) L’anémie touche la moitié des mères et 1/3 des enfants (vs 9% pop gen fe, 8% enf) Le surpoids et l’obésité concerne 70% des mères (vs 36% pop gen) et 26% des enfants (vs 16% pop gen)

L’état de santé des familles : une santé mentale menacée Dépression prépondérante Touche 29% des mères (idem Samenta, vs 8% en pop gen) Idée suicidaire pour 17% et TS pour 5% Suspicion troubles pour 19% des enfants (vs 8% en pop gen) Essentiellement troubles émotionnels (angoisse séparation, troubles anxieux) et du comportement (trouble attachement, alimentation..) En lien avec la santé mentale de la mère

L’état de santé des familles : une santé périnatale préoccupante Importance des grossesses déclarées tardivement 14% déclarées au 3ème trimestre (vs <5% pop gen) 11% non déclarées Majorité (57%) sans suivi en sortie de maternité Lieu de sortie de maternité : hôtel pour 71% Mobilité résidentielle importante pendant la grossesse (5 fois en mye) 27% des femmes enceintes déclaraient avoir renoncé à des soins médicaux les 12 derniers mois

L’état de santé des familles : le recours aux soins 80% ont consulté dans l’année, 53% en ville (vs 89% pop gen) 1/4 ont renoncé aux soins (soins primaires, vs dentaire ou optique en pop gen) 20% sans couverture maladie + de 40% des femmes sexuellement actives n’utilisent pas de méthode contraceptive (vs 3% pop gen) Recours PMI (<6 ans) : dispositif central 21% ont uniquement recours PMI 6% des enfants n’ont consulté ni généraliste, ni pédiatre, ni PMI dans les 12 derniers mois

En guise de conclusion sur l’enquête Familles SD : population jusqu’ici peu étudiée, en grande précarité Logée essentiellement en hôtel (politique de mise à l’abri, souvent sans accompagnement) Une mobilité importante et contrainte, qui a un fort impact sur la vie quotidienne et la santé Compétitivité des besoins : se loger -> se nourrir -> se soigner

L’hôtel : des pistes d’amélioration 1/ Améliorer l'existant - Accompagner les personnes vers les équipements locaux (sanitaire et social), - Améliorer la prestation des hôtels (petits déjeuners, espaces collectifs – dont cuisines, mise en place d’ateliers...)   2/ Développer des alternatives - Développer l’hébergement en appartements partagés, - Accroître le nombre de places en CADA ou dans les autres dispositifs spécifiques d’accueil pour les familles demandeuses d’asile, - Créer une offre de résidences d’accueil gérées par les bailleurs sociaux ou les acteurs associatifs 3/ Quand la situation administrative et financière le permet, accélérer les sorties de l’hébergement en hôtel par l’accès au Solibail, au Louez solidaire, aux résidences sociales, au parc social…