Estimation de la fraude fiscale en Belgique Hafsatou Diallo Güngör Karakaya Danièle Meulders Robert Plasman Diallo et al.(2010), L’estimation de.

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Estimation de la fraude fiscale en Belgique Hafsatou Diallo Güngör Karakaya Danièle Meulders Robert Plasman Diallo et al.(2010), L’estimation de la fraude fiscale en Belgique, Working Paper DULBEA, Research Report , n°10.06.RR, May , www.dulbea.be Département d’économie appliquée de l’Université Libre de Bruxelles (DULBEA)

Définition de la fraude fiscale Différentes définitions et différents concepts: confusion dans la terminologie Economie souterraine ou travail au noir, économie informelle, économie illicite, économie parallèle, fraude fiscale, fraude sociale, évasion fiscale… Concepts très différents qui ne sont pas toujours définis avec précision Fraude fiscale: défaut de déclaration de revenus afin d’éviter la taxation

Mesure de la fraude fiscale Par essence, phénomène très difficile à quantifier Aucune estimation n’est exempte de biais Toutes sont basées sur des hypothèses fortes qui ne sont pas toujours clairement énoncées

Données disponibles pour estimer la fraude fiscale Existence de données Qualité des données Disponibilité des données

Méthodes de quantification de la fraude fiscale Approches directes - Enquêtes - Contrôle fiscal indirectes Monétaire - Encaisses monétaires/dépôts à vue - Transactions monétaires/PIB - Lien entre la demande de monnaie le niveau de taxation Non monétaire - (Dynamic) Multiple Indicators and Multiple Causes (DY-MIMIC)  : l’économie souterraine dépend de plusieurs causes et affecte plusieurs variables macroéconomiques - Consommation d’électricité - Divergence entre les séries statistiques de sources différentes

Méthodes directes Enquêtes Sondage relatif aux activités économiques et aux comportements des individus: travail non déclaré, achat de biens et services non facturés, budgets… Informations détaillées et précises Qualité des estimations: Taille et représentativité des échantillons Qualité du questionnaire , …. Ginsburgh et al (1987)

Méthodes directes Contrôle fiscal Comparaison entre le revenu des contribuables obtenu par les services de contrôle et le revenu déclaré Echantillon non représentatif de la population Ne reflète qu’une fraction de l’économie souterraine

Méthodes indirectes Monétaire Ratio encaisses monétaires/dépôts à vue et ratio transactions/dépôts L’augmentation de ces ratios est attribuée à une poussée de l’économie souterraine. Hypothèses irréalistes : Les transactions dans l’économie souterraine se font en espèce uniquement, La vitesse de circulation de la monnaie est la même dans l’économie souterraine et dans l’économie officielle Il a existé d’une période pendant laquelle l’économie souterraine était négligeable: période de référence L’évolution des ratios peut-être causée par d’autres facteurs

Méthodes indirectes Monétaire Demande de monnaie Estimation économétrique de la demande d’encaisses selon différents schémas fiscaux Hypothèses irréalistes (transactions dans l’économie souterraine en espèce uniquement, vitesse de circulation de la monnaie similaire) Suppose que l’unique cause de l’économie souterraine est le poids de la taxation Suppose une relation stable et connue entre l’offre de monnaie et les variables explicatives ->étude de Geermons et Mont (1987) : 17-18%

Méthodes indirectes Non monétaire DYMIMIC Estimation économétrique basées sur: Les causes de l’économie souterraine: poids de la taxation, réglementation , le chômage, attitude, revenu…. Les effets de l’ économie souterraine: heures de travail hebdomadaires, taux d’activité masculins, croissance du PIB… Fiabilité de la classification des variables: causes ou effets ? Suppose l’existence d’une corrélation positive entre l’économie souterraine, le chômage et le poids de la taxation et de la réglementation Instabilité des coefficients estimés qui sont sensibles à la taille de l’échantillon et aux spécificités du modèle ->Etude de Frey et Weck (1984) : économie souterraine en % du PIB1: 12.1% (1978) ->Etude de Schneider (2009): 18.3%-22.5% (1989 -2007)

Méthodes indirectes Non monétaire Consommation d’électricité Estimation économétrique basée sur l’existence d’une relation positive entre la consommation d’électricité des ménages et l’économie souterraine Suppose que les activités occultes nécessitent toujours une consommation importante d’électricité Suppose que seul le secteur domestique est sujet à la fraude ->Lacko (2000): économie souterraine en % du PIB: 19.8% (1990)

Méthodes indirectes Non monétaire Divergences entre séries statistiques Comparaison entre le revenu déclaré et les données correspondantes de la comptabilité nationale. la validité des estimations repose sur l’indépendance entre les modes de collecte de l’information Suppose que les différentes façons d’appréhender le revenu sont exemptes d’erreurs -> Frank (1998) : perte de recettes due à la fraude 3.7% - 7.4% (1970-1997)

Méthodes indirectes Non monétaire 2) Comparaison entre le taux théorique de la TVA et le taux effectif ne portent que sur les activités marchandes ne prend en considération que l’économie au noir intégrée (entreprises officielles) ->Bizeur (1996): 15.37% (1993) -> Caridi et Passerini (2001):15.56% (1995)

Economie non observée dans les comptes nationaux L'économie au noir reprise dans les comptes nationaux englobe des transactions ou activités (partiellement) dissimulées qui doivent être incluses dans le calcul du PIB, elle est calculée - en extrapolant les données administratives et les résultats des sondages et autres enquêtes sur la base d’un registre des entreprises; -en appliquant le plus précisément possible les définitions du SEC 1995 Peu de transparence dans les estimations Certains postes sont calculés de manière résiduelle Définition restrictive

Estimations en pourcentage du PIB Auteurs Année Economie souterraine Perte en recettes fiscales Méthodes Geermons et Mont (1987) 1985 17-18 5,7 – 6 Demande de monnaie Lacko (2000) 1990 19,8 6,60 Consommation d'électricité Frey et Weck (1984) 1978 12,1 4,03 MIMIC Schneider (2009) 1989-90 19,3 6,43 DYMIMIC 1997-98 22,5 7,50 2003 21,4 7,33 2007 18,3 6,10 Bizeur (1996) 1993 15,37 5,12 TVA: Taux théoriques vs. Taux effectifs Caridi et Passerini (2001) 1995 15,56 5,19 TVA: Taux théoriques vx. Taux effectifs Frank (1998) 1970 3,7 Comptes nat. vs Revenus déclarés 1975 4,2 1997 5,1 - 7,4 BNB (2010) 1997-2007 3,7-3,9 1 - 1,5 L’Economie au noir dans les comptes nationaux

Positionnement de la Belgique

Variables explicatives -Niveau de la taxation -Moralité fiscale -Contrôle fiscal

Nos estimations de la fraude fiscale 2 méthodes : Méthode basée sur l’enquête sur les budgets des ménages 2006 : on compare les revenus de l’enquête sur les budgets des ménages aux revenus déclarés au fisc. Cette méthode permet de calculer directement la fraude fiscale et les pertes en recettes qui en découlent.

Revenus enquête budgets des ménages Revenus déclarés au fisc 151.344.602.661 149.492.975.886 Revenu disponible après ajustements Revenu total net imposable Dépenses déductibles + dépenses pour acquisition du revenu brut 4.600.000.000 Revenu brut 154.092.975.886 - 47.790.302.000 Impôts payés sur le revenu total net imposable 106.302.673.886 45.041.928.775 Revenu non déclaré Recettes fiscales non perçues : 20,2 milliards € (6,3% du PIB) Taux marginal d’imposition X 45%

Difficultés liées à cette méthode Disponibilité des données détaillées: -pour appliquer des taux de taxation qui tiendraient compte du niveau de revenu des contribuables -de mieux cerner les revenus qui ne seraient pas taxés du fait de la législation fiscale (sous estimation fiscale) -de procéder à des estimations par classes de revenu ou par groupe socio professionnel Représentativité de l’enquête - Les ménages aux revenus les plus élevés et aux revenus les plus bas ne participent pas à l’enquête Possibilité: comparer les données détaillées des deux sources et procéder à des estimations affinées et détaillées

Méthode basée sur l’écart entre le taux effectif et le taux théorique de TVA : - taux effectif (TE) = rapport entre la TVA perçue et la consommation finale (comptabilité nationale) - taux théorique (TT) = rapport entre la TVA qui aurait dû être perçue en l’absence de fraude et la consommation finale Principe : (TT – TE) / TE = perte en pourcentage des recettes de TVA Puisque toute la production (officielle et souterraine) est destinée à être vendue, cette perte peut également être interprétée comme l’économie au noir en pourcentage de l’économie marchande

- Taux de prélèvements moyen = 50% (OCDE statistics data) - TT = 16.77% (TT – TE) / TE = 18.8% - TE = 14.12% L’économie au noir est estimée à 14% (=18.8% x 0.75) de la valeur ajoutée totale (PIB), soit 48 milliards € (18.8% x 0.75) étant donné que la fraude est limitée dans l’économie non marchande Hypothèses : - Taux de prélèvements moyen = 50% (OCDE statistics data) - Part des impôts dans les prélèvements : environ 2/3 (OCDE, 2009) Résultats : prélèvements non perçus par l’Etat = 24 milliards € (6,9% du PIB) recettes fiscales non perçues = 16 milliards € (4,6% du PIB) recettes sociales non perçues = 8 milliards € (2,3% du PIB)

Conclusions Aucune méthodologie d’estimation de la fraude n’est exempte de biais Nos estimations : pertes de recettes fiscales entre 16-20 milliards d’euros, soit environ 5-6% du PIB Problème : qualité et disponibilité des données Nécessité d’étudier le phénomène, de mesurer son évolution