LA GESTION DES RISQUES OPERATIONNELS Présentation du 12.05.2012 – Laurent Oudin
1-DEFINITION DES RISQUES OPERATIONNELS
Une définition des risques opérationnels Risque de pertes provenant de l’inadéquation ou de la défaillance de procédures internes, de personnes, de systèmes ou faisant suite à des événements externes. Cette définition inclut les risques juridiques, fiscaux, réglementaires et compliance. Elle exclut les risques stratégiques.
Une définition des risques opérationnels Une définition qui peut varier d’un établissement à un autre (inclut ou non risque de réputation). Des risques qui concernent l’ensemble du personnel d’une société / d’un établissement. Des risques qui ont des causes aussi bien internes qu’externes. Des risques qui ne sont pas toujours mesurables et qui n’ont pas de modèle d’évaluation. Des risques qui ont pris en importance (en matière de suivi, d’exigence de fonds propres) ces dernières années. Une appréciation des risques qui s’appuie en partie sur l’expérience, le vécu et le bon sens.
2-LES DIMENSIONS DES RISQUES OPERATIONNELS
Un référentiel des risques opérationnels La définition est large et il est nécessaire de construire un référentiel de catégories de risques opérationnels pour: Clarifier les différentes dimensions des risques opérationnels Préciser les points d’attention en matière de surveillance et contrôle des risques opérationnels Avoir une compréhension commune par l’ensemble des collaborateurs d’un établissement. Le référentiel est propre à chaque établissement. Illustration des différentes dimensions par un exemple: les catégories (règlementaires) définies par Bâle 2.
Les catégories de Bâle 2 Catégorie d’évènement générateur de perte 1 Fraude interne 2 Fraude externe 3 Poste de travail 4 Clients, produits et pratiques commerciales 5 Dommage aux actifs corporels 6 Interruption d’activité et dysfonctionnement de systèmes 7 Exécution, livraison et gestion des processus
1-Fraude interne Pertes résultant d’actes visant à détourner des biens ou à contourner des lois, des règles ou des dispositions internes (avec implication d’une partie interne à l’entreprise). Exemples: Transactions non autorisées Abus de confiance Corruption
2-Fraude externe Pertes résultant d’actes visant à détourner des biens ou à contourner des lois, des règles ou des dispositions internes (sans implication d’une partie interne à l’entreprise). Exemples: Falsification de chèques Dommages dus au piratage informatique (préjudice financier consécutif par exemple à l’utilisation d’une carte de crédit volée)
3-Poste de travail Pertes résultant d’actes contraires aux dispositions légales du travail ou aux conventions relatives à la sécurité ou à la santé (du personnel). Risques liés à la gestion des Ressources Humaines. Exemples: Pertes liées à des grèves Infractions aux dispositions à la sécurité et à la santé du personnel Dommages et intérêts versés au titre d’actions en discrimination Harcèlement
4-Clients, produits et pratiques commerciales Pertes résultant d’un manquement, par inattention ou par négligence, à des obligations envers des clients et pertes résultant de la nature et de la structure de certains produits. Exemples: Non respect du devoir d’information de la clientèle Distribution à la clientèle d’un produit non autorisé à celle-ci Violation du secret professionnel
5-Dommage aux actifs corporels Pertes résultant de dommages causés à des actifs physiques par des catastrophes naturelles ou d’autres évènements. Exemples: Incendie Vandalisme Terrorisme
6-Interruptions d’activité et dysfonctionnement de systèmes Pertes résultant de perturbations de l’activité ou de problèmes liés à des systèmes techniques. Exemples: Panne d’électricité Dysfonctionnement d’un programme informatique Problème de télécommunication (forte perturbation du réseau)
7-Exécution, livraison et gestion des processus Pertes résultant d’un problème dans le traitement d’une transaction ou dans la gestion des processus; pertes subies dans le cadre des relations avec les partenaires commerciaux, les fournisseurs, etc. Exemples: Erreur de saisie de données Erreur comptable Non-exécution d’une tâche Rapport / document inadéquat remis à des externes (ayant entraîné une perte) Manque de documentation d’entrée en relation avec un client Prestation déficiente de partenaires commerciaux Litiges avec des fournisseurs
Un constat et des exemples historiques Constat: les grandes pertes historiques dans le milieu bancaire résultent du risque opérationnel. Quelques exemples: La faillite de Barings (1995): faillite suite à des positions en futures trop importantes, incapacité à répondre aux appels de marge, concentration de plusieurs fonctions sur une seule et même personne. L’affaire Kerviel à la Société Générale (2008): grosse perte sur des positions sur futures, un homme qui connaissait (trop) bien les systèmes front-to-back, des signaux d’alarme pris à la légère.
Un constat et des exemples historiques Quelques exemples (suite): Madoff (2008): élaboration d’un système de fraude à grande échelle; contrôle? L’affaire Kweku Adoboli à UBS (2011), une similitute forte avec Société Générale: grosse perte sur des positions sur futures, un homme qui connaissait (trop) bien les systèmes front-to-back, des signaux d’alarme pris à la légère
3-LA GESTION DES RISQUES OPERATIONNELS
Les grands principes de la gestion des risques La gestion des risques opérationnels s’articule en 4 axes: L’identification des risques consiste à déterminer les évènements de risques potentiels et leurs éventuelles causes et conséquences. L’évaluation des risques consiste à apprécier l’impact de l’évènement de risque. La gestion des risques consiste à définir les mesures stratégiques et opérationnelles pour éviter, transférer et / ou réduire la survenance et l’impact des risques. Le contrôle et la surveillance des risques consistent à s’assurer de la cohérence et de l’adéquation du niveau des risques en regard des objectifs fixés, d’analyser les risques afin de s’assurer de l’application de mesures d’atténuation et de mitigation des risques.
Les grands principes de la gestion des risques Un processus continu Identification des risques Gestion des risques intégrée Contrôle des risques Evaluation des risques Gestion des risques
3.1-IDENTIFICATION DES RISQUES OPERATIONNELS
Identification des risques opérationnels Workshop Quelle approche / méthode pratique ou théorique proposeriez-vous pour identifier les risques opérationnels? 2 groupes de travail (15 min. brainstorming, 2 x 5 min. de restitution, 5 min. de partage)
Identification des risques opérationnels - un exemple d’approche Exercice d’auto-évaluation bottom-up « Faire parler » les intervenants métier (ils connaissent généralement le mieux leurs risques) Approche par processus / équilibre à trouver entre trop de détail et pas assez (focaliser sur les activités « critiques ») Recueillir à cette occasion les évaluations des risques et les contrôles en place (1er et 2ème niveau) Croiser les risques identifiés avec les dimensions du référentiel des risques (toutes les dimensions ont-elles été considérées?)
Identification des risques opérationnels - un exemple d’approche Exercice d’auto-évaluation top-down « Faire parler » les responsables (senior management) pour compléter les sensibilités et les expériences avec une vision plus « high level » (par exemple au travers d’un ou plusieurs « brainstormings ») Croiser les risques identifiés avec les dimensions du référentiel des risques (toutes les dimensions ont-elles été considérées?)
Identification des risques opérationnels - un exemple d’approche De manière pratique, rapporter de manière « normée » les résultats obtenus lors des exercices d’auto-évaluation, notamment pour pouvoir les consolider. Le support peut être un outil bureautique ou un développement informatique interne ou l’acquisition d’un logiciel dédié
3.2-EVALUATION DES RISQUES OPERATIONNELS
Evaluation des risques opérationnels Workshop Comment évalueriez-vous les risques opérationnels? quelles dimensions / critères d’appréciation considéreriez-vous? 2 groupes de travail (15 min. brainstorming, 2 x 5 min. de restitution, 5 min. de partage)
Evaluation des risques opérationnels Pourquoi une évaluation? Permet de comparer / ramener en relatif un risque opérationnel par rapport à un autre. Permet de fixer si nécessaire des priorités (projets, ressources humaines) dans la gestion des risques et identifier où sont portés les efforts.
Evaluation des risques opérationnels - un exemple d’approche Estimer une fréquence de survenance Ce peut être une échelle relative plutôt qu’absolue Estimer un impact Ce n’est pas uniquement un impact financier Un impact d’image peut aussi être très dommageable pour une société La difficulté / le challenge réside dans la définition d’une échelle pour chacune de ces dimensions. Il n’y a pas d’échelle absolue mais des sensibilités aux risques différenciées.
Evaluation des risques opérationnels - un exemple d’approche « zone » de surveillance et d’action accrue IMPACT Elevé Moyen Rare Fréquent SURVENANCE
3.3-GESTION DES RISQUES OPERATIONNELS
Gestion des risques opérationnels Une organisation: Une structure dédiée au Risk Management, indépendante des Unités d’affaire (dans le respect d’une bonne gouvernance) Un Comité des risques pour définir une politique et une stratégie des risques, suivre les cas sensibles Des directives et des instructions de travail Des interactions métier (par exemple Audit Interne et Compliance avec le Risk Management).
Gestion des risques opérationnels Une culture des risques: La gestion des risques opérationnels concernent tous les collaborateurs d’un établissement Fédérer les collaborateurs autour de principes simples et applicables Condition de réussite: nécessité d’un engagement et d’une sensibilité du Senior Management
Gestion des risques opérationnels Des outils et méthodes: Le Plan de Continuité des Activités (Business Continuity Plan) dans la dimension des dommages et interruptions d’activité Définir les mesures à appliquer pour assurer la continuité opérationnelle des activités « critiques » Identifier les activités critiques / vitales, les ressources minimales y liées (collaborateurs, systèmes) et le temps de recouvrement de ces activités
Gestion des risques opérationnels Des outils et méthodes: La collecte des données et informations liées aux erreurs opérationnelles Pour analyser quantitativement (montant de pertes / gains, nombre d’erreurs) et qualitativement (erreurs localisées sur une activité, des produits, etc.) Pour identifier et définir des mesures ou projets d’amélioration Pour avoir une base de connaissance partagée des erreurs et minimiser leur survenance
Gestion des risques opérationnels Des outils et méthodes: Une cartographie des risques La souscription à certaines assurances Allocation analytique d’exigence de fonds propres aux Unités d’Affaire et de Support (permet de sensibiliser et constitue un indicateur de performance) La prise de connaissance régulière des rapports d’audit interne Des scénarios « What if »
Gestion des risques opérationnels Des outils et méthodes: Une veille active et le recueil des situations à « near risk » Comme sources d’analyse et d’éventuelles mesures / projets d’améliorations Comme sources d’extrapolation d’un risque potentiel à son établissement Pour capitaliser sur une situation vécue
Gestion des risques opérationnels Workshop Quelles sources / vecteurs utiliseriez-vous pour développer une veille active et capter des near risks? 2 groupes de travail (15 min. brainstorming, 2 x 5 min. de restitution, 5 min. de partage)
3.4-CONTRÔLE ET SURVEILLANCE DES RISQUES OPERATIONNELS
Contrôle et surveillance des risques opérationnels Les contrôles de 1er niveau Contrôles opérationnels réalisés par et dans la ligne métier Doivent être inventoriés (nature et objectif du contrôle, fréquence, responsable) et documentés (pour être traçables)
Contrôle et surveillance des risques opérationnels Les contrôles de 2ème niveau Contrôles opérationnels et / ou de supervision réalisés de manière indépendante de la ligne métier Contrôles « différents » de ceux de 1er niveau Doivent être inventoriés (nature et objectif du contrôle, fréquence, responsable) et documentés (pour être traçables)
Contrôle et surveillance des risques opérationnels Contrôles de 1er et 2ème niveau - exemple Dans une salle des marchés, les traders s’assurent en tout temps du respect de leurs limites (1er niveau) Les contrôleurs de risques, indépendants des traders, vérifient ce même respect et rapportent tout dépassement (2ème niveau)
Contrôle et surveillance des risques opérationnels Le backtesting S’assurer que les contrôles en place maintiennent les erreurs opérationnells à un niveau « acceptable » S’assurer de l’efficacité des mesures d’amélioration (par exemple un développement informatique qui a effectivement permet de réduire un taux d’extourne)
Contrôle et surveillance des risques opérationnels Les KRIs (Key Risk Indicators) Capturer ou capter une exposition aux risques opérationnels L’exposition peut être absolue ou relative (détecter une tendance) Le KRI doit être interprétable et facile à mesurer Poser des limites ou des seuils d’alerte L’objectif est de prendre si possible des mesures préventives à la réalisation d’un risque
Contrôle et surveillance des risques opérationnels Les KRIs – quelques exemples Turnover du personnel Taux d’extourne des opérations par le back-office ou des transactions par le front-office (trading) Nombre de pannes informatiques Report des recommandations prioritaires de l’audit
Contrôle et surveillance des risques opérationnels Les reportings Informer du niveau des risques Mettre en évidence les faits significatifs, les tendances, les résultats d’analyse Proposer et suivre des projets ou mesures d’amélioration Pour le Senior Management, peut être une source de décision
Contrôle et surveillance des risques opérationnels La prise de connaissance des recommandations d’audit interne et externe Sources d’information (le plus souvent approche sous un angle opérationnel) Met en évidence les défauts ou défaillances de contrôle Peut donner des axes d’amélioration ou points d’investigation
Principes de bon sens Ne pas s’engager dans une activité, des produits qu’on ne comprend pas, qu’on ne maîtrise pas. Raisonner transversalement / faire intervenir les experts dans les domaines métier qui interagissent. Esprit de curiosité et en éveil (pour contribuer à l’observation de « near risk », chercher à anticiper). Construire un réseau interne et externe. Avoir les réponses / solutions à la gestion des situations à risque potentiel avant qu’elles ne surviennent. Tirer les leçons des situations à risque. Ne jamais cacher une erreur.
Mot de clôture Une bonne gestion des risques est un atout / représente une valeur ajoutée: Elle permet de contribuer au rayonnement d’une société (image, capacité à délivrer un service / un produit de qualité dans les délais). Elle est un avantage concurrentiel. Elle est aux côtés / accompagne le développement du business, tout en étant indépendante, en proposant des solutions.