Enseignements Dirigés d’Immuno-Dermatologie François Launay Service de Dermatologie Hôpital Purpan
Cas clinique n°1 Une femme de 75 ans est adressée aux urgences pour des lésions à type de placards urticariformes, éczématiformes, prurigineux et surmontés de bulles évoluant depuis 3 semaines. ATCD : aucun Traitement en cours : aucun
Cas clinique n°1 Quel diagnostic évoquez-vous ? Et pourquoi ? Pemphigoïde bulleuse Sexe féminin Âge avancé Éruption polymorphe eczématiforme et urticariforme, prurit +++ Bulles tendues et érosions post-bulleuses Absence d’atteinte muqueuse
Cas clinique n°1 Comment le confirmez-vous ? NFS : hyperéosinophilie IFD : recherche d’IgG + complément linéaire le long de la JDE IFI : recherche d’Ac circulants anti-membrane basale Histologie : bulle sous épidermique sans acantholyse avec infiltrat inflammatoire dermique à prédominance de PNE
Cas clinique n°1 Quelle est votre prise en charge thérapeutique ? Hospitalisation en Dermatologie Compter, percer et désinfecter les bulles Cartographie bactérienne Matelas anti-escarrhes, interface Alimentation hyperprotidique Dermocorticoïde très fort classe IV 20 grammes X 2 / jour avec décroissance progressive
Cas clinique n°1 En l’absence d’amélioration, quelles sont vos alternatives thérapeutiques ? Corticothérapie générale 0.5 à 1 mg / jour Associée à : Régime hyperprotidique, pauvre en sucres rapides et en sel Apports vitamine D3 et calcium Biphosphonate Contrôle régulier tolérance du ttmt (glycémie, BES, TG, CT, TA) +/- immunosuppresseur : MTX, azathioprine, mycophénolate mofétyl
Cas clinique n°1 Quel est le pronostic de cette pathologie ? 30 à 40 % de mortalité à 1 an par complication iatrogénique, infectieuses, thrombœmboliques, syndrome de glissement… Et si on changeait le marquage en IFD… On retrouve un marquage de type IgA au sommet des papilles dermiques chez un sujet jeune qui se gratte de façon symétrique sur les coudes, les lombes, les fesses et les genoux et qui se plaint de diarrhées…A l’examen on constate des érosions post-bulleuses.
Cas clinique n°1 Quel diagnostic évoquez-vous ? Dermatite herpétiforme car : Sujet jeune Prurit Lésions post-bulleuses symétriques Association à diarrhées (entéropathie au gluten)
Cas clinique n°1 Quelle est votre prise en charge ? Versant exploration : Recherche d’Ac anti-transglutaminase, anti-réticuline, anti-endomysium Fibroscopie oesogastroduodénale avec biopsie à la recherche d’une atrophie villositaire Recherche de signe de malabsorption : perte de poids, EPP (albumine, protéine), dosage vit A, B, C, D, CT, TG, phosphocalcique sang Versant thérapeutique : Régime sans gluten (diminue le risque de lymphome du grêle + amélioration des signes digestifs et cutanés) Si insuffisant : disulone (anémie hémolytique) en surveillant tgo/tgp/NFS/méthémoglobinémie/ urée, créat
Cas clinique n°2 Une femme de 70 ans vous consulte pour une érythrodermie squameuse ATCD : Cirrhose sur VHC post-transfusionnelle HTA Carcinomes Basocellulaires multiples opérés Psoriasis
Cas clinique n°2 Quels sont les facteurs déclenchants/favorisant le psoriasis ? Stress Médicaments : INF, lithium, β bloquant, APS, corticothérapie générale, IEC, Sartans Alcool, tabac Infections : strepto A, VIH
Cas clinique n°2 Énumérer tous les traitements disponibles pour le psoriasis Traitements locaux : Bains et émollients Dermocorticoïdes Dérivés de la vitamine D Traitements d’exceptions (ac salycilique, rétinoïde topique) Photothérapies : UVB à spectre étroit PUVAthérapie (balnéoPUVA, rétiPUVA, PUVA) Traitements systémiques Rétinoïde Méthotrexate Cyclosporine Biologiques
Cas clinique n°2 Les traitements locaux sont indiqués seuls dans les psoriasis très limités (<10 à 15% de la surface corporelle) ou en association aux traitements systémiques dans les psoriasis plus sévères Utiles pour décaper les lésions, soulager le prurit, réduire la xérose et les crevasses : Bains d’amidon 1 fois par jour Application de crèmes émolientes 1 à 2 fois par jour type Cold cream ou Dexeryl Seuls ces traitements peuvent améliorer les scores de sévérité de 30 à 40% en quelques semaines
Cas clinique n°2 Corticoïdes locaux : En pommade pour les lésions sèches et épaisses, en crème (dans les plis et sur lésions suintantes) ou en lotion sur le cuir chevelu Corticoïdes d’activité forte (classe II) pour le corps type Diprosone, Flixovate) Risque d’atrophie et de télangiectasies surtout sur le visage, risque de tachyphylaxie et de passage systémique Surtout pour le cuir chevelu et pour les plis Sur le reste du corps traitement de courte durée (4 à 8 semaines) Compter les tubes utilisés Les dermocorticoïdes ne sont pas un traitement pertinent des psoriasis en plaques étendus
Cas clinique n°2 Dérivés de la vitamine D3 Action antiproliférative et immunomodulatrice Deux molécules : calcipotriol (Daivonex, 2 appl/j) et tacalcitol (Apsor 1 appl/j) Efficace sans limitation de durée Irritation 10 à 15%, surtout visage et plis Pas plus de 100g/semaine Action synergique avec les dermocorticoïdes (Daivobet : 1appl/ j 4 semaines maximum)
Cas clinique n°2 Photothérapie : UVB à spectre étroit (TL01) : sans prise de psoralène, traitement de 20 à 30 séances à raison de 3/semaine. 70 à 80 % de bons résultats PUVA thérapie : association d’un psoralène photosensibilisant (Méladinine) en cps à prendre 2 heures avant et d’une irradiation par les UVA. Traitement de 20 à 30 séances à raison de 3/semaine. 80 à 85% de bons résultats.
Cas clinique n°2 Précautions : Comptabiliser la dose reçue (pas plus de 150 à 200 séances dans une vie) Protection des yeux (port de lunettes de soleil pendant 24h après PUVA) Attention aux médicaments photosensibilisants Surveillance prolongée de la peau (risque augmentée de cancer) Examen ophtalmologique préalable pour PUVA (rôle cataractogène controversé des psoralènes)
Cas clinique n°2 Rétinoides oraux : Dérivés de la vitamine A, non immunosuppresseurs, effet antiprolifératif et immunomodulateur Acitrétine (Soriatane), par voie orale en 1 prise à la dose de 10 à 60 mg/j en général Contre-indiqué sauf exception chez la femme en âge de procréer du fait du risque tératogène majeur persistant 2 ans après l’arrêt du traitement (stockage dans les graisses) Effets secondaires : sécheresse peau et muqueuses; hyperlipidémie, hépatopathie rare Meilleures indications : psoriasis pustuleux, kératodermie palmo-plantaire, psoriasis de l’enfant, associations avec UV, érythrodermie psoriasique (faible dose)
Cas clinique n°2 Méthotrexate ( Novatrex) : Inhibiteur de la dihydrofolate réductase, effet immunomodulateur puissant Utilisé à faible dose (10 à 30 mg/sem) en une prise hebdomadaire orale ou intramusculaire Supplémentation en folates (Spéciafoldine 1/j) Surveillance biologique stricte hebdomadaire puis mensuelle Toxicité hématologique et hépatique (fibrose) Interactions médicamenteuses (aspirine, bactrim) et potentialisation de la toxicité hépatique par l’alcool. Bon traitement des formes sévères de psoriasis cutané et/ou articulaire
Cas clinique n°2 Cyclosporine : AMM dans les psoriasis sévères réfractaires de l‘adulte Permet de passer un cap, en traitement court de 4 à 6 mois 2.5 à 5 mg/kg/j Très efficace dans les formes pustuleuses Habituellement bien tolérée chez le sujet jeune non obèse Risque d‘atteinte rénale et d‘HTA en cas d‘utilisation prolongée, risque néoplasique cutané si beaucoup de PUVA préalable Relais nécessaire par traitements locaux ou par autre traitement systémique
Cas clinique n°2 - Photothérapie Agents Biologiques : - Méthotrexate Psoriasis en plaque « modéré à sévère » (AMM Européenne) « grave » (commission de transparence) » en échec* » à au moins deux traitements systémiques parmi : - Photothérapie - Méthotrexate - Cyclosporine Psoriasis grave : au moins 30% surface corporelle ou retentissement psychosocial important Procédure du médicament d’exception, prescription hospitalière initiale et semestrielle, réservée au spécialiste *Échec : intolérance, inefficacité, effet secondaire, contre-indication
Cas clinique n°2 - Hypersensibilité au produit Contre-indications : - Tuberculose et autres infections sévères (septicémie) - Infection évolutive - Insuffisance cardiaque congestive modérée ou sévère (Remicade) - Immunodéficience
Cas clinique n°2 Mécanisme d‘action : Inhibition du TNF alpha qui est une cytokine importante jouant un rôle dans : - L‘activation des lymphocytes T et la sécretion de cytokines proinflammatoires - L‘activation et la migration des cellules de Langerhans - L‘expression de molécules d‘adhésion par l‘endothélium - La prolifération des kératinocytes Inhibition de LFA-1(CD11a) : adhésion et migration cutanée des lymphocytes T activés (par l‘interaction LFA-1 et ICAM-1)
Cas clinique n°2 Enbrel (Etanercept) : Proteine de fusion chimérique composée d‘un fragment Fc d‘une IgG humaine et du domaine extracellulaire du récepteur du TNF alpha humain Bloque le TNF alpha soluble, faible immunogénicité Remicade (Infliximab) : Anticorps monoclonal chimérique anti-TNF alpha (Fc humain et Fab murin) Bloque le TNF alpha soluble et son récepteur, immunogénicité forte Raptiva (Efalizumab) : anticorps monoclonal chimérique anti-LFA1
Cas clinique n°2 Effets secondaires rares mais graves (anti-TNF) Excès d’immunosuppression Infections systémiques sévères : tuberculoses, septicémies Syndrômes lymphoprolifératifs Autres types de cancers Atteintes neurologiques démyelinisantes : SEP, névrites optiques (0.01 à 0.1%) Aggravation d’une insuffisance cardiaque Hépatopathies, lupus induits
Cas clinique n°2 En fonction de toutes ces informations quel(s) traitement(s) pouvez vous proposer à cette patiente ? Rétinoïdes oraux Biothérapies
Cas clinique n°2 Citez les formes graves de psoriasis : Erythrodermie psoriasique : psoriasis généralisé >90% de la surface corporelle. Desquamation abondante, troubles hydro-electrolytiques, frissons, risque de surinfection. A hospitaliser Psoriasis arthropathique : 20 à 30%, plusieurs tableaux Oligo ou monoarthrite Polyarthrite périphérique, asymétrique, atteinte des IPD Rhumatisme psoriasique axial avec atteinte vertébrale et sacro-iliaque Psoriasis pustuleux : d’emblée ou sur un pso en plaques Psoriasis pustuleux palmoplantaire (tabac++) Psoriasis pustuleux généralisé : début brutal avec AEG et fièvre, peut être favorisé par médicaments (sevrage corticoïdes, cyclo)
Cas clinique n°3 Mme E vous amène son enfant de 9 mois pour la dermatose suivante. L’interrogatoire vous apprend que cette dermatose évolue depuis l’âge de 2 mois par poussées Elle est désespérée…
Cas clinique n°3 Quel est votre diagnostic ? Dermatite atopique Quels sont les critères qui permettent de faire le diagnostic ? Un prurit Et au moins trois des critères suivants : Début avant 2 ans Des antécédents de lésions des convexités Des antécédents personnels d’asthme ou de rhume des foins Une peau sèche généralisée Des lésions d’eczéma des plis
Cas clinique n°3 Quel(s) traitement(s) préconisez-vous ? Préventif : Aucun traitement préventif n’a fait la preuve de son efficacité L’éviction du tabac est importante Sont traditionnellement recommandés : Allaitement maternel prolongé Diversification alimentaire tardive pour œuf, poisson, fruits exotiques, huile arachide Eviter les aéroallergènes domestiques (acariens, jouets en peluche, animaux domestiques) : controversé ++++ Emollients (Cold cream, Dexeryl) Permettent de réduire la sécheresse et les anomalies de la barrière cutanée Peuvent éviter les poussées chez 30-40% des patients Curatif : Dermocorticoïdes Une application par jour en traitement d’attaque (1 à 3 semaines) Corticoide de classe II/III sur le corps et de classe III sur le visage En traitement d’entretien, privilégier les traitements discontinus 2 à 3 fois par semaine le week end Quantité à ne pas dépasser : 30 à 60 g par mois chez l’enfant
Cas clinique n°3 Quels sont les effets secondaires de ce traitement ? Atrophie cutanée; vergétures Télangiectasies Infections cutanées Rosacée Freination de l’axe hypothalamo-hypophysaire en cas d’utilisation de corticoides puissants au long cours chez l’enfant Cataracte et glaucome (rare, si application périoculaire prolongée)
Cas clinique n°3 La maman revient vous voir 1 mois plus tard : le traitement en marche pas. Quelles sont les causes possibles de l’absence d’efficacité ? Quantité utilisée insuffisante (règle de la phalangette) Surinfection bactérienne : antibiothérapie Allergie de contact aux corticoïdes : patch tests Formes sévères
Cas clinique n°3 Vous revoyez cet enfant quelques années plus tard, en poussée. Elle est maintenant âgée de 5 ans. Sa maman ne veut plus de corticoïde sur le peau. Quel traitement pouvez-vous lui proposer ? Inhibiteur de la calcineurine type Protopic (tacrolims) = Macrolides lactones dérivés de champignons telluriques (Streptomyces) Agissent spécifiquement sur les lymphocytes T et les mastocytes et Inhibent la transcription des cytokines Pas d’atrophie cutanée ni d’amincissement de la barrière épidermique Passage systémique moins important que les corticoïdes du fait de leur poids moléculaire élevé Pour les formes modérées à sévères de DA, surtout localisations au cou et au visage (adulte et enfant > 2 ans) Protopic pommade à 0.1 et 0.03%, prescription par spécialiste
Cas clinique n°3 À l’age de 18 ans, vous revoyez cette patiente toujours très embêtée par sa DA. Quel option thérapeutique choisir ? Cyclosporine AMM dans les DA sévères réfractaires de l‘adulte Permet de passer un cap, de casser le cours évolutif de la maladie Cure de 6 mois à 1 an 2.5 à 5 mg/kg/j Habituellement bien tolérée chez le sujet jeune Risque de dépendance psychologique Relais nécessaire par traitements locaux Surveillance tensionnelle et fonction rénale
Cas clinique n°3 Vous revoyez cette patiente quelques jours plus tard avec cette éruption : son petit ami à un herpès labial. Quel est votre diagnostic ? Eczéma herpeticum
Cas clinique n°3 Quelle est votre prise en charge ? Examen ophtalmologique en urgence pour savoir si kératite herpétique Hospitalisation Arrêt de la cyclosporine Perfusion de zovirax IV (acyclovir)
Cas clinique n°4 Une femme de 50 ans sans ATCD ni traitement vous consulte pour une dermatose des 2 pieds, très prurigineuse, par endroit vésiculeuse, apparue 2 semaines après l’achat de nouvelles chaussures.
Cas clinique n°4 Quel est vote diagnostic ? Eczéma de contact Réalisez-vous une biopsie pour le confirmer ? Non Quel examen demandez-vous ? Patch tests Quel est votre traitement ? Eviction de l’allergène +++ Dermocortcoïde
Cas clinique n°5 Monsieur U vous consulte pour une éruption survenue la veille, de façon brutale, à type de papules et plaques multiples, mobiles et fugaces, extrêmement prurigineuses.
Cas clinique n°5 Quel est votre diagnostic ? Urticaire aigue Réalisez vous des examens complémentaires ? Non Donnez la définition d’une urticaire chronique Urticaire quotidienne pendant 6 semaines
Cas clinique n°5 Citez les différents type d’urticaire physique Dermographisme Urticaire retardée à la pression Urticaire au chaud Urticaire au froid Urticaire aquagénique Urticaire solaire Urticaire cholinergique Urticaire vibratoire
Cas clinique n°5 Quel est votre traitement ? Rassurer le patient Anti-histaminique H1 Le patient vous rappelle l’après midi même, affolé, ses lèvres sont gonflés, il ressent des douleurs abdominales et trouve que sa langue grossit. Quel est votre diagnostic ? Œdème de Quincke
Cas clinique n°5 Quelles mesures thérapeutiques envisagez-vous ? Hospitalisation, transport médicalisé Corticothérapie IV solumédrol Anti-histaminique IV Si signe de détresse respiratoire adrénaline 0.25 à 5 mg SC ou IM sans attendre + O2 + transfert en milieu réanimatoire +/- intubation