Histoire de la Guerre froide

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Transcription de la présentation:

Histoire de la Guerre froide Neuvième cours : La fin de la Guerre froide (1985-1991)

Neuvième cours : La fin de la Guerre froide (1985-1991) 1 – Évolution intérieure 2 – La « nouvelle mentalité politique » de Gorbatchev 3 – La défaite soviétique en Afghanistan 4 – L’effondrement soviétique et le monde

1 – Évolution intérieure À la mort de Brejnev, Andropov lui succède et opère des changements importants. D’abord, il exclut les individus les plus détestés. Sans toucher à la structure du régime, il lance une campagne anticorruption, ce qui a l’avantage de ne pas dresser contre lui la nomenklatura, tout en suscitant un certain espoir dans la population. Le slogan des 15 mois de règne d’Andropov sera « Так жить нельзя !» En février 1984, Andropov décède et Tchernenko lui succède. Le règne de celui-ci n’est digne de mention qu’en tant qu’illustration du compromis entre le clan des conservateurs et celui des puritains qui conduira à la prise de contrôle du parti et de l’État par l’équipe de « jeunes » politiciens dirigée par Gorbatchev, lequel succède à Tchernenko en mars 1985.

Le processus de succession de 1982 à 1985 était bien préparé Le processus de succession de 1982 à 1985 était bien préparé. Dès 1979, les principaux clans du PCUS s’entendent pour répartir les responsabilités à la mort de Brejnev. L’arrivée d’Andropov était déjà prévue, de même que le fait que Tchernenko devait lui succéder. De même, à l’arrivée de Tchernenko, Gorbatchev, l’homme de confiance d’Andropov, devait devenir le numéro deux, en attendant qu’il occupe le poste de secrétaire général à la disparition de Tchernenko. Cependant, même avant la mort de Konstantin Tchernenko, Gorbatchev est très actif. Les maladies du secrétaire général l’obligent à se tenir loin de la direction de l’État et dans ce contexte, c’est le numéro deux qui occupe le plus d’espace. Gorbatchev a réalisé un excellent travail de réécriture de son rôle et de ses actions au cours de la période 1985-1991, réussissant à se présenter à la postérité comme un réformateur ayant planifié logiquement la succession de réformes qui prennent place à partir de 1986.

Dans les faits, l’improvisation domine l’action du secrétaire général, les insuffisances de chaque réforme obligeant la direction politique à aller plus loin. Surtout, à son arrivée à la tête du parti en 1985, la politique de Gorbatchev s’inscrit dans la logique du clan des puritains : l’accélération et la loi-sèche, par exemple, ont été initiées dès 1982 par Andropov. Les vrais réformateurs occupent une place importante seulement en 1986 et 1987. Ils sont mis de l’avant par Gorbatchev pour contrer l’influence des conservateurs. Dès 1987, ils perdent leur importance et si la politique de réformes ne s’infléchit pas à ce moment, c’est simplement que le parti et l’État sont contraints à aller de l’avant à cause de la situation économique désastreuse et surtout, à cause de l’irruption d’un acteur qui n’avait jamais joué de rôle en URSS : la société civile. C’est elle qui oblige la direction du pays à ouvrir davantage le système.

De vrais réformateurs : Boris Eltsine et Alexandre Yakovlev

Dans l’historiographie occidentale, l’ensemble des réformes porte le nom de Perestroïka. Dans les faits, ce terme ne qualifie que la deuxième vague de réformes (celle de 1987), qui concerne uniquement les aspects économiques. C’est la Glasnost (rapports État société) en 1986, qui marque la première ouverture, alors que la Démocratisatsia (1988) en constitue le volet politique.

2 – La « nouvelle mentalité politique » de Gorbatchev Dès sa prise de fonction, Gorbatchev manifeste son désir de repenser la doctrine internationale de l’URSS, en la faisant reposer sur des bases entièrement nouvelles : 1 – rejet du dogme de l’opposition fondamentale entre les deux systèmes; 2 – reconnaissance de l’unité du monde; 3 – reconnaissance de l’impossibilité de régler les conflits par la force; 4 – reconnaissance de la nécessité de régler les conflits en tenant compte des intérêts de tous; 5 – abandon de l’internationalisme prolétarien; 6 – primauté de l’individu sur les classes, nationalités, etc.

Rien de neuf dans ces principes, qui constituent la base du pacifisme depuis Kant, la nouveauté étant que l’URSS en fasse les bases de sa politique étrangère. Pour bien marquer le changement, Chevardnadze succède alors à Gromyko. Trois axes seront ainsi élaborés : 1 – Normalisation des relations est-ouest par le biais du désarmement; 2 – élimination des conflits régionaux; 3 – établissement des relations diplomatiques envers les différents États sans tenir compte de leur système politique. Dans les relations soviéto-américaines, cela se traduit par des rencontres bilatérales annuelles, qui donneront des résultats très concrets, autant en ce qui concerne le désarmement, qu’au plan politique ou économique.

Gorbatchev et Chevernadze

À partir de 1988, les dogmes idéologiques sont remplacés par un pragmatisme assumé, les difficultés économiques soviétiques poussant l’URSS à se rapprocher de l’Occident. En 1987, le pacte de Varsovie propose à l’OTAN une fusion des structures à terme. En 1989, l’URSS réduit unilatéralement ses forces armées de 500 000 hommes et retranche 15 % à son budget militaire. Ces différentes actions détendent instantanément les relations internationales et permettent d’enterrer la guerre froide.

3 — La défaite soviétique en Afghanistan Seule la maîtrise du ciel permettait aux forces soviétiques de dominer le territoire : si les maquisards réussissaient à interdire le ciel à l'aviation ennemie, leurs montagnes redeviendraient impénétrables. Dès l'automne 1985, les pilotes soviétiques commençaient à craindre l'arrivée des dards américains, à redouter leur présence possible dans les vallées. L'administration Reagan devait livrer les premiers missiles Stinger en mars 1986. L'usage des missiles se généralisa au printemps de 1987, avec des conséquences catastrophiques. Rustiques, infaillibles, et faciles à manier, les missiles SOL-AIR commencèrent à abattre un appareil soviétique par jour durant l'été de 1987.

La perte de la maîtrise du ciel replongea les troupes d'occupation dans les conditions d'un combat archaïque. L'infanterie soviétique n'osait plus se risquer dans les défilés ou le long des routes où s'embusquaient les maquisards. Les maquisards se risquaient de semaine en semaine toujours plus bas, jusque dans les vallées et les plaines. L'initiative de la guerre passa entre les mains des rebelles. Dès la fin de l'été 1987, des véhicules bourrés de mitrailleuses et de munitions roulaient depuis la frontière sans plus craindre d'attaques vers les fortins gouvernementaux que les différents groupes harcelaient. L'apparition des missiles rendait vulnérables non plus les seuls convois sur la route, mais aussi les fortins. Avec ses hélicoptères cloués au sol, en novembre 1987 se profila pour l'état-major russe une menace précise : celle de la chute d'une forteresse majeure, Khôst, aux abords de la frontière pakistanaise.

Les maquisards mitraillèrent la forteresse pendant des semaines sans discontinuer. Pour sauver la garnison, les Soviétiques durent se résoudre à envoyer leurs chars rouvrir la route sans couverture aérienne, sous le feu des crêtes. Les Soviétiques, malgré des pertes considérables, purent disperser les concentrations ennemies et lever le siège à la fin de janvier 1988. L'état-major soviétique avait donc encore prouvé sa capacité à se cramponner dans toutes ses forteresses, mais depuis l’arrivée des Stingers, toute possibilité de conquête des montagnes se trouvait exclue. La stratégie des déportations pour isoler et asphyxier les maquis était interdite, car contrecarrée par les missiles. Les Soviétiques ne pouvaient plus que se résigner à une passivité stagnante. Au courant de l'année 1988-1989, le ministère de la Défense soviétique allait reconnaître la perte de plus de 13 000 de ses soldats dans le conflit afghan, et une dépense de 5 milliards de roubles par an.

Restait à Gorbatchev à trouver une porte de sortie honorable Restait à Gorbatchev à trouver une porte de sortie honorable. Dès 1986, des indices devenus très clairs semblent traduire le désir de Gorbatchev de s'extraire du guêpier afghan. L'enlisement politique de l'expédition afghane, la menace militaire pointant à l'horizon, le différend causé par le coup de Kaboul avec la communauté internationale, tout cela rendait fort lourd pour Gorbatchev l'héritage de Brejnev en Asie. Malgré son redoublement de violence sur le terrain entre 1984 et 1986, l'Armée rouge n'avait pu briser définitivement l'échine de la Résistance avant l'arrivée des Stingers, lesquels mettraient un terme à l'aventure militaire. Faute d'avoir gagné, Gorbatchev se devait de terminer la guerre rapidement, pour que l'équipée restât attachée au seul nom de son prédécesseur. Il s'efforçait de sauver un élément encore viable de la stratégie brejnévienne : gagner du temps pour renforcer l'armée et le gouvernement afghans, afin qu’ils puissent tenir seuls face aux maquisards.

Pour fléchir la détermination des moudjahidines, Gorbatchev avait inauguré sa politique afghane en 1985. Le 14 octobre, Karmal lance une campagne de réconciliation nationale. Le caractère socialiste du régime est mis en sourdine, Karmal met l'accent sur l'identité islamique, nationaliste de son gouvernement et offre la paix aux chefs des tribus, les invitant à se rallier. Les combattants rejettent son offre avec mépris. Mais Gorbatchev persévère. Le 4 mai 1986, Karmal est contraint de démissionner. Son successeur est un jeune médecin qui s'appelle Nadjibollah. Issu du Partcham, il exige l'unité de tous les communistes et réitère l'appel de son prédécesseur en faveur de la « réconciliation nationale », allant jusqu'à proposer un cessez-le-feu le 15 janvier 1987, et plaçant la nouvelle Constitution proclamée le 29 novembre 1987 sous l'invocation de « Dieu clément et miséricordieux. »

En vain. La Résistance rejette toutes les offres En vain. La Résistance rejette toutes les offres. De janvier 1980 à mai 1986, Nadjibollah avait été directeur de la police secrète de Kaboul. Son détestable passé le rend incapable de toute velléité d'indépendance vis-à-vis des Soviétiques. Alors que le gouvernement multiplie les appels à la paix tout en tapissant le pays de bombes, Gorbatchev esquisse les premiers gestes d'un retrait militaire, en séduisant et désorientant l'opinion occidentale : le 10 octobre 1986, Gorbatchev annonce le retrait de six régiments de Hérat. L’occupation enlisée ne compensait plus l'hostilité américaine, chinoise, européenne et islamique provoquée par le coup de Kaboul, opprobre international encore renouvelé par la condamnation record (123 voix contre 19 avec 11 abstentions) prononcée aux Nations Unies le 10 novembre 1987. Le 15 février 1988, Gorbatchev annonce le retrait des troupes soviétiques du territoire afghan dans un délai d'un an, soit le 15 février 1989, sur la base d'un accord qui serait signé avec les États-Unis et le Pakistan à Genève, les 14 et 15 avril 1988.

Aucun observateur ne nie la réalité du retrait à partir du 15 avril 1988; la moitié du corps expéditionnaire a déjà quitté à la mi-août 1988, et si le mouvement de troupes est gelé durant quelques semaines d'automne 1988, il reprend pour s'achever le 15 février 1989. Tout au plus la Résistance évoque-t-elle en mars 1989 le maintien à Kaboul de troupes d'élite, camouflées dans des uniformes afghans, pour expliquer ses propres échecs. Mais le fait est là : l'armée soviétique a reculé devant la résistance islamique, même si le régime de Nadjibollah réussit à se maintenir au pouvoir dans toutes les villes afghanes pendant les premiers mois qui suivent le retrait.

4 – L’effondrement soviétique et le monde Le rapprochement américano-soviétique conduit à la résolution de nombreux conflits régionaux. Dans la foulée du sommet de 1987, Reagan accepte de couper le financement aux moudjahidines afghans, ce qui permet à l’URSS de retirer ses troupes du sol afghan. À la même époque, l’URSS retire ses soldats de Mongolie et fait aussi pression auprès des Vietnamiens pour mettre fin à l’intervention de ceux-ci au Cambodge. Ces actions visent à un rapprochement avec la Chine. En juin 1989, la visite de Gorbatchev à Pékin enterre la hache de guerre entre les deux pays et conduit à la normalisation de leurs relations.

En 1991 sont signés les accords de Madrid, prévoyant la mise en place d’un État palestinien et conduisant théoriquement à la fin de l’état de guerre entre Israël et ses voisins. L’URSS se retire aussi d’autres conflits régionaux, en Angola, au Mozambique, au Nicaragua et en Éthiopie, ce qui conduit à la normalisation graduelle de la situation dans ces pays. L’URSS réduit considérablement l’aide internationale et retire son soutien à certains dictateurs peu fréquentables, au premier chef, Kadhafi et Saddam Hussein. En 1990, l’URSS soutient activement les puissances occidentales dans leurs actions contre le régime irakien, allant même jusqu’à voter en faveur de l’intervention de 1991. Ces actions de l’URSS font baisser la tension internationale et conduisent à l’établissement de relations normales entre l’URSS et des pays de la sphère d’influence américaine, au premier chef Israël, Corée du Sud, Taiwan, etc.

Ce désengagement de l’URSS a aussi lieu dans son glacis : en 1989, les soldats soviétiques se retirent des PECO, dont les régimes vont un à un s’effondrer. D’abord en Pologne, en 1989, puis en Tchécoslovaquie, en Hongrie, en Bulgarie. À la suite du démantèlement du mur de Berlin en 1989, un référendum tenu en 1990 entérine la réunification de l’Allemagne. Le gouvernement change aussi en Mongolie et le Vietnam s’engage sur la voie des réformes. En Europe de l’est, les nouvelles forces au pouvoir engagent des processus de réformes économiques, en même temps qu’elles cherchent à se détourner rapidement de l’URSS. La rupture des liens économiques de l’URSS avec ces États porte un coup très dur à l’économie soviétique et va conduire aussi à une détérioration de la situation politique à l’intérieur. Au printemps 1991, le COMECON et le Pacte de Varsovie sont officiellement dissous.

Le rapprochement est-ouest conduit à un véritable désarmement, par l’élimination d’une importante partie des arsenaux nucléaires soviétiques et américains. De même, cela conduit à l’intégration de plus en plus poussée de l’URSS et des États est-européens aux structures économiques et politiques internationales. Toutes ces conséquences ont un résultat majeur : le changement de la structure des rapports internationaux, la fin de la bipolarité et sa conséquence, le développement de l’hégémonie américaine. Sur le plan intérieur, la perte pour l’URSS de sa position stratégique va anéantir le prestige du système et conduire au développement de crises majeures Pour le tiers-monde, la disparition de l’URSS va permettre de régler les conflits internes, mais va aussi affaiblir la position de ces États.

Ces facteurs auront pour effet d’obliger la révision de la posture stratégique de la Russie, puissance nucléaire et militaire considérable, mais désormais faible politiquement et économiquement. Avec la chute de l’URSS, la Russie récupère les attributs internationaux de l’État défunt : son siège permanent au Conseil de Sécurité, son armement stratégique, de même que ses dettes, qui ont crû de façon extraordinaire dans les dernières années du régime. Héritière, la Russie est donc puissante, mais aussi très affaiblie. C’est pourquoi la politique étrangère de Boris Eltsine sera très semblable à celle de Gorbatchev : disposant d’outils puissants, mais dépourvue de bras pour pouvoir s’en servir, la Russie n’occupera qu’une place de second ordre dans la politique mondiale de 1991 à 2000, sauf exception.