Trouble Anxiété Généralisée Pr Ag Lilia Zaghdoudi Fekih
Introduction L’anxiété fait partie du registre émotionnel normal de l’être humain « Peur sans objet », crainte d’un danger imprécis, d’un sentiment pénible d’attente Le caractère pathologique doit être évalué à partir de critères diagnostiques aussi précis que possible Il existe de véritables maladies de « l’anxiété »: persistance dans le temps, retentissement Trouble Anxiété Généralisée: troubles anxieux (DSM IV)
Données épidémiologiques Toutes les études épidémiologiques en population générale confirment la forte prévalence sur la vie: environ 4-6% Prévalence 2 fois plus élevée chez les femmes que chez les hommes Fréquence élevée en médecine générale avec variation selon l’organisation des soins Facteurs de risque: divorce, veuvage, chômage, séparation
Quand évoquer un TAG? Plusieurs types de situations doivent alerter le praticien: -plaintes somatiques multiples et/ou récurrentes, non expliquées totalement par une maladie organique -demandes d’examens répétées qui ne rassurent pas le patient -demandes de traitements répétées ou de prescriptions que l’on ne parvient pas à modifier
Quand évoquer un TAG? -des réactions excessives à des évènements de vie -des comportements que l’entourage ou que le patient décrivent comme anormaux et gênants sans forcement les rattacher eux-mêmes à l’anxiété Une fois le TAG suspecté ⇛ chercher en détail les critères diagnostiques
Clinique Principales caractéristiques: anxiété et soucis excessifs Les soucis sont très proches des préoccupations et des inquiétudes quotidiennes (travail, santé, famille…) ou d’activités banales (manquer le bus) Cette inquiétude est par contre: -permanente -durable: au moins six mois
Clinique -incontrôlable -dirigée sur au moins deux thèmes différents Les domaines les plus fréquemment concernés: -maladies, santé, risque d’accidents (soi même ou ses proches) -argents, finances -travail ou école -problèmes familiaux, domestiques, relationnels -Autres: rater un RDV, survenue d’une guerre, mal transmettre une information importante, casser des objets
Critères diagnostiques Les critères du DSM-IV sont recommandés dans la pratique courante Le sujet ayant un TAG présente pendant une durée de 6 mois au moins, une anxiété sévère/des soucis excessifs, incontrôlables, chroniques ave impression permanente de nervosité, tension et des symptômes physiques à l’origine d’une détresse importante
Critères diagnostiques En plus de l’anxiété/soucis chroniques, 3 symptômes au moins sur les 6 des groupes tension motrice et hypervigilance sont requis pour le diagnostic: 1-tension motrice: fatigue, tension musculaire, agitation ou surexcitation 2-hypervigilance: difficultés de concentration, troubles du sommeil, irritabilité
Critères diagnostiques 3-troubles associés: mains froides humides, bouche sèche, sueurs, nausées ou diarrhée, pollakiurie, difficultés à avaler ou sensation de boule dans la gorge, tremblements, contractions, douleurs, endolorissement musculaire, syndrome du colon irritable, céphalées
Pour récapituler Les éléments qui doivent faire évoquer la possibilité d’un TAG sont: -La persistance des symptômes sur une durée longue -Leur résistance aux traitements habituels -Négativité des examens étiologiques différentiels
Diagnostic différentiel Anxiété normale: qui n’est pas perçue comme une souffrance par le sujet qui a le sentiment de garder le contrôle des soucis, transitoire, à thème unique et sans retentissement sur le fonctionnement socio-professionnel Anxiété due à la prise de café ou de médicaments anxiogènes, à l’abus de substances psychoactives dont l’alcool ou à leur sevrage Anxiété secondaire à une maladie organique grave (cancer), à un évènement stressant ou à un trouble de l’adaptation
Diagnostic différentiel Anxiété liée à une affection médicale générale: hyperthyroidie, phéochromocytome, hypoglycémie, hyperparathyroidie Anxiété liée à un autre trouble anxieux: trouble panique, phobies, TOC, stress aigu Anxiété liée à une dépression ou à un trouble psychotique, aux troubles somatoformes, à l’hypochondrie, à un trouble de la personnalité
Le diagnostic de TAG peut être difficile en raison de la comorbidité aux troubles cités: 9/10 association avec d’autres troubles psychopathologiques En cas de facteur de comorbidité complexe ou de doute diagnostique, le recours au spécialiste est recommandé
Evolution Il s’agit d’un trouble chronique Apparition au début de l’âge adulte: 18-35 ans puis augmentation importante de l’incidence avec l’âge Le TAG apparait comme le trouble anxieux le plus fréquent chez le sujet âgé Evolution sur de nombreuses années, fluctuante, à rechutes, aggravation en périodes de stress Périodes de rémission possibles sur plusieurs mois ou plusieurs années
Evolution Le TAG se complique très souvent d’autres troubles psychiatriques: dépression+++, agoraphobie, attaques de panique Association fréquente avec une surconsommation de médicaments (chez 30%), de benzodiazépines++, d’alcool Complications somatiques fréquentes
Ethiopathogénie Tempérament et environnement: -Tempérament inné marqué par des troubles de l’attachement, une moins bonne gestion des émotions, une hypersensibilité aux menaces -La survenue de séparations précoces, d’évènements stressants -Environnement familial, relation mère- enfant -Pathologie anxieuse chez les parents
Ethiopathogénie Origines physiologiques et biologiques: -Incrimination des neurotransmetteurs (gaba, noradrénaline, sérotonine, neuropeptides..) -Activation de certaines structures cérébrales (système limbique, amygdale) -Les hypothèses neurobiologiques actuelles proposent d’aborder l’anxiété comme une exagération des mécanismes adaptatifs centraux lors de la peur ou de l’anxiété
Ethiopathogénie Théories Freudiennes sur l’angoisse: -L’angoisse est cause du refoulement de pulsions sexuelles -L’angoisse profonde du Moi devient un signal qui met en place des mécanismes de défense dont le refoulement -Les théories psychanalytiques consistent surtout à mettre en lumière les conflits psychiques inconscients
Ethiopathogénie Modèle cognitif: -A.Beck et G.Emery (1985), proposent dans leur théorie des schémas cognitifs que les anxieux ont des croyances erronées concernant la perception comme potentiellement dangereux de l’environnement -Surestimation de la probabilité de survenue d’un évènement négatif -Un intolérance à l’incertitude ⇛Inquiétudes excessives et incontrôlables
Prise en charge C’est une démarche globale de soin intégrant un temps d’information et souvent un suivi plus au moins prolongé Deux traitements ont fait la preuve de leur efficacité: les médicaments et les psychothérapies L’objectif est l’amélioration symptomatique, la réapparition du bien- être et la réduction du handicap social
Mesures générales Etablir un projet thérapeutique au cas par cas, une intervention psychothérapeutique non spécialisée est recommandée dés la 1ère consultation Chercher systématiquement la comorbidité psychiatrique, une addiction aux substances Mesures d’information sur la maladie (causes, traitement), sur les règles hygiéno- diététiques, sur les symptômes somatiques Information sur les médicaments: avantages, inconvénients, sevrage, effets secondaires, délai d’action
Médicaments Les benzodiazépines: -Utiles lors des périodes de recrudescence anxieuse -La prescription doit être limitée dans le temps(inf à 3 mois) -Molécules à demi vie longue -Utiliser la dose minimale efficace, se garder d’exposer le patient aux accidents de sevrage -Faire attention chez sujet âgé
Médicaments Les anti-dépresseurs: Traitement de fond des troubles anxieux, permettent de réduire les doses des benzodiazépines -Venlafaxine LP, paroxétine -Sertraline, escitalopram Le délai d’action est de 3 à 6 semaines Leur utilisation doit être maintenue dans le temps (minimum 6 mois) à fin d’éviter les rechutes
Médicaments Hydroxyzine: dans les cas modérés, moins de risque de dépendance et de sevrage par rapport aux benzodiazépines Buspirone: absence de dépendance physique ou psychique, efficacité contestée
Psychothérapie Thérapies comportementales et cognitives: visent à clarifier les circonstances de survenue des troubles, identifier les pensées irrationnelles -Elles associent la relaxation musculaire appliquée, des expositions répétées à des situations évitées, une restructuration cognitive des interprétations catastrophiques sur les soucis surévalués -Efficacité validée et confirmée par plusieurs études, proposées en première intention
Psychothérapies Psychothérapie analytique: démarche plus personnelle de connaissance de soi, de résolution des conflits inconscients Autres: acupuncture, art-thérapie…..
Conclusion Les patients anxieux connaissent bien les salles d’attentes des médecins généralistes qui les soignent plus souvent que les psy pour plusieurs raisons: -Beaucoup de symptômes sont somatiques -Les patients identifient mal leur trouble psychique -Ils « vivent avec leur anxiété » l’ayant intégrer comme faisant partie de leur personnalité
Conclusion Le praticien doit faire prendre conscience au patient du caractère pathologique de l’anxiété Il doit discerner les comorbidités souvent fréquentes ainsi que le handicap engendré par cette pathologie chronique Face à une situation complexe, une orientation vers une consultation spécialisée est recommandée