Protozooses digestives Jean MENOTTI Laboratoire de Parasitologie-Mycologie Hôpital Saint-Louis AP-HP / Université Paris Diderot
Classification protozoaires digestifs Amibes Entamoeba histolytica Flagellés Giardia intestinalis Coccidies Cryptosporidies Cystoiospora belli Sarcocystis hominis Cyclospora
Amibiase Ensemble de troubles causés par Entamoeba histolytica. Protozoaire Les autres amibes digestives Entamoeba dispar, Entamoeba coli, Entamoeba hartmanni, Pseudolimax butschlii, Endolimax nana ne sont pas (ou très peu) pathogènes
Amibiase : cycle Phase digestive, au niveau du colon : amibiase intestinale Risque de dissémination par voie sanguine et de localisations extra-digestives : foie, poumon, cerveau Plusieurs formes parasitaires : formes végétatives mobiles et kystes
Formes parasitaires Trophozoïtes (ou formes végétatives) 20 - 40 microns Mobiles (pseudopodes) Fragiles Localisées au niveau du colon Peuvent se transformer en formes végétatives hématophages Envahissement de la paroi colique et diffusion par voie sanguine (amibiase hépatique, pulmonaire…) Kystes (= formes de résistance) 12-15 microns 4 noyaux Eliminés dans les selles Directement infectants Très résistants
Amibiase : distribution géographique L ’amibiase est cosmopolite, particulièrement dans les pays chauds à niveau d’hygiène bas.
Amibiase : contamination Toujours à partir de kystes Eau sale Aliments consommés crus, souillés par des kystes Mains sales d’un porteur (auto-infestation possible) Contaminations familiales et interhumaines Rôle des mouches et des cafards dans la dissémination Rôle des conditions d’hygiène +++
Amibiase intestinale Amibiase intestinale aiguë = dysenterie amibienne Incubation : silencieuse ou douleurs abdominales ou diarrhée apyrétique Période d’état diarrhée glairo-sanglantes (5 à 20 selles) douleurs abdominales : épreinte, ténesme Pas de fièvre déshydratation, amaigrissement, asthénie Formes chroniques Douleur abdominales Diarrhée
Physiopathologie de l’amibiase intestinale aiguë Invasion de la muqueuse intestinale par des formes végétatives hématophages
Amibiase hépatique La complication extra-intestinale la plus fréquente Toujours au décours d’une amibiase intestinale, qui peut être passée inaperçue Peut sembler primitive Consécutive au passage sanguin de formes hématophages Hépatite amibienne présuppurative début brutal douleur hypochondre droit en bretelle hépatomégalie fièvre 38 39° altération de l’état général Abcès amibien altération de l ’état général grande oscillation de température VS élevée hyperleucocytose à polynucléaires neutrophiles hépatomégalie syndrome pulmonaire base droite
Amibiase hépatique Abcès amibien Radio : image en dôme, en brioche Echographie : zone hypoéchogène Tomodensitométrie : zones hypodenses parenchymateuses Ponction : pus chocolat sans amibe Bonne évolution sous traitement
Autres manifestations cliniques de l’amibiase Amoebome = pseudotumeur parasitaire du colon (caecum ou sigmoïde). Rare Amibiase pulmonaire, cérébrale, cutanée : localisations peu fréquentes
Diagnostic biologique de l’amibiase Pas d’hyperéosinophilie Amibiase intestinale : Examen parasitologique des selles fraîchement émises (pas de charbon, Bismuth, huile….) Mise en évidence des formes végétatives et des kystes. Impossible de différencier E. histolytica et E. dispar (identification moléculaire nécessaire) Présence éventuelle de formes végétatives hématophages Amibiase extra-intestinale : Sérologie +++ L’examen de selle peut être négatif !!
Traitement et prévention de l’amibiase Amoebicides de contact : tiliquinol + tilbroquinol (Intétrix®) Amoebicides tissulaires : dérivés imidazolés Métronidazole (Flagyl®) Tinidazole (Fasigyne®) Secnidazole (Flagentyl®) Ponction de l’abcès Prévention : Hygiène individuelle et collective
Giardiose Protozoose intestinale due à un flagellé: Giardia lamblia ou Giardia intestinalis Parasitose cosmopolite fréquente Contamination par ingestion d’eau contenant des kystes Contamination « directe » (mains sales), Epidémies familiales
Giardia duodenalis : formes parasitaires Flagellé parasite Multiplication extracellulaire asexuée sous forme végétative, mobile (taille: 10-20 microns) Intestin grêle Formation de kystes (8 à 10 microns, forme ovalaire) Emission dans les selles de formes végétatives et de kystes directement contaminants
Giardiose : clinique, épidémiologie, diagnostic, traitement Clinique : diarrhée, douleurs abdominales. Pas de localisation extra digestive Prévalence : 1,3% dans la population française. 4,9% chez l’enfant (crèche) Epidémiologie : endémique + épidémique (crèches, collectivités, épidémies familiales) Diagnostic : Examen parasitologique des selles : mise en évidence des kystes et des formes végétatives Traitement : métronidazole, tinidazole ou secnidazole
Coccidioses intestinales Dues à la présence dans la muqueuse de l’intestin grêle de coccidies (protozoaires appartenant à l’embranchement des Apicomplexa) : Cryptosporidium Cystoisospora belli Sarcocystis hominis Cyclospora cayetanensis Cryptosporidium et Cystoisospora belli redoutables chez immunodéprimés
Cryptosporidiose Protozoaire (coccidie) intestinal Multiplication intracellulaire asexuée et sexuée à la surface des entérocytes. Emission d’oocystes directement contaminants Contamination : par ingestion d’oocystes. Espèces : Cryptosporidium parvum (zoonose) C. hominis (~ strictement humain) Autres espèces : C. felis, C. canis, C. meleagridis, C.muris… Parasitisme des entérocytes par C. parvum. Photo A. Bonnin. ANOFEL
Cycle de Cryptosporidium spp. Contamination par ingestion d’oocystes par l’intermédiaire des mains, de l’eau, d’aliments souillés (+ rarement par inhalation) oocystes (contenant 4 sporozoïtes) directement infestants
Epidémiologie et clinique de la cryptosporidiose Contamination de l’environnement par des oocystes Rôle des animaux d’élevage +++ Épidémies dues à la contamination des ressources d’eau Clinique : Sujet immunocompétent : Diarrhée spontanément résolutive en 2 à 3 semaines Durée et gravité des symptômes plus marquées chez l’enfant et personne âgée Rares localisations extra digestives Sujet immunodéprimé (VIH+, greffé rénal…) : Diarrhée chronique, malabsorption, cachexie Localisations biliaires Prévalence : 0,3% dans la population française. 3% chez sujets VIH+
Diagnostic et traitement de la cryptosporidiose Examen des selles par microscopie optique (coloration de Ziehl-Neelsen modifiée) : mise en évidence des oocystes Histologie PCR Identification spécifique : PCR-RFLP, séquençage Traitement : Nitazoxanide, paromomycine : efficacité partielle Reconstitution immunitaire +++ Penser à demander cette recherche sur la prescription !!!! car elle n’est pas faite systématiquement Photos A. Bonnin, J.F. Pays. ANOFEL
Prévention de la cryptosporidiose chez l'immunodéprimé Chimioprophylaxie : Non justifiée car peu efficace Reconstitution immunitaire : Très forte diminution de la prévalence de la cryptosporidiose chez les patients VIH+ depuis 1996 Prévention de la primo-infection : Prévention collective par la protection des ressources (eau, aliments) Prévention individuelle par recommandations hygiéno-diététiques
Principales épidémies de cryptosporidioses dues à l'eau de boisson Année Lieu Nb de sujets contaminés Origine 1987 Georgie 12 960 Rivière 1992 Oregon 15 000 1993 Wisconsin 403 000 Réservoir 1994 Japon 461 Puits 1989 Angleterre 5 000 2001 France 480 Réseau USA Asie Europe Source : Roze et coll.
Cryptosporidiose : épidémie de Milwaukee Relation entre le nombre de cas et la contamination du réservoir Nord
Contamination des moules par Cryptosporidium Lieu d ’étude: La Corogne (Espagne) Isolement de Cryptosporidum Uniquement dans les sites proches des estuaires Pas de relargage d’oocystes après 48 heures en eau propre Cryptosporidium parvum Source: Gomez-Bautista et coll. Applied Environ. Microbiol. 2000
Isosporose à Cystoisospora belli Coccidiose intestinale Multiplication intracellulaire Emission d’oocystes immatures Clinique: Diarrhée aiguë et chronique Epidémiologie: Endémique (zones tropicales) Zoonose: non Diagnostic Microscopie optique Traitement: Cotrimoxazole, fluoroquinolones Macrolides ? Oocyste immature (G) et sporulé (D) de C. belli Photo P. Marty, Poitiers. ANOFEL
Cycle de Cystoisospora belli Contamination par ingestion d’oocystes matures libérant 2 sporocystes contenant chacun 4 sporozoïtes Schizogonie : trophozoïte schizonte contenant de nombreux mérozoïtes Gamogonie : gamétocyte mâle et femelle oocyste émis dans les selles maturation dans le milieu extérieur
Cystoisospora belli
Sarcocystose à Sarcocystis hominis Parasite hétéroxène : schizogonie chez le bœuf ou le porc (hôtes intermédiaires) mérozoïtes dans le tissu musculaire gamogonie chez l’homme (hôte définitif) oocyste subit une maturation complète dans l’intestin 2 sporocystes infestants (contenant chacun 4 sporozoïtes) émis dans les selles Affection cosmopolite
Sarcocystose à Sarcocystis hominis Clinique : asymptomatique sauf terrain fragilisé Diagnostic : présence de sporocystes dans les selles Traitement (dans les cas graves) : cf. isosporosose Photo ANOFEL J.-F. Pays
Cyclosporose à Cyclospora cayetanensis Coccidiose intestinale : Multiplication intracellulaire Emission d’oocystes Clinique : Diarrhées explosives et aqueuses douleurs abdominales, myalgies, céphalées, fébricule. Pas de localisation extra-digestive. Diagnostic : Microscopie optique (UV). Epidémiologie : Endémique + épidémique Consommation de fruits Zoonose ? Traitement : Cotrimoxazole, fluoroquinolones Oocystes de C. cayetanensis. Photos S. Bretagne. ANOFEL
Cycle de Cyclospora cayetanensis Après maturation dans le milieu extérieur, les oocystes renferment 2 sporocystes contenant chacun 2 sporozoïtes Répartition géographique : Asie du Sud-Est, Amérique du Nord et du Sud, Afrique, Europe
Diarrhées parasitaires chez patient immunocompétent oocyste kyste Cryptosporidies Coloration Ziehl-Neelsen oocyste oo F.V. Giardia duodenalis Cyclospora
Parasites digestifs chez l’immunodéprimé Cryptosporidies Coloration Ziehl-Neelsen Microsporidies : coloration trichrome Cryptosporidies : anapath Isospora belli