Mise en œuvre d ’une POLITIQUE DE LA CONCURRENCE Séminaire pour cadres Module 7: Le contrôle des abus de domination
Objectifs Décrire les principes de l’interdiction des abus de domination Définir une « position dominante » Préciser, à travers des exemples, comment établir un abus de domination Expliquer la particularité de la notion de dépendance économique en matière de concurrence Politique de la concurrence 7.2
Le contrôle des abus de domination Seuls les abus de positions dominantes sont condamnables et non pas les positions dominantes en tant que telles Politique de la concurrence 7.3
DEFINITION DE LA POSITION DOMINANTE « L ’expression "position dominante" sur le marché désigne une situation où une entreprise, soit seule, soit avec quelques autres entreprises, est en mesure de dominer le marché considéré d’un bien ou service ou d’un groupe de biens ou services particuliers » Politique de la concurrence 7.4
Pour contrôler les abus de position dominante 1) déterminer la position dominante délimiter le marché pertinent constater la puissance économique de l’entreprise sur ce marché 2) identifier l’abus 3) évaluer son impact sur la concurrence Politique de la concurrence 7.5
Puissance économique sur le marché La part de marché présumée caractérisant une position dominante détenue par une entreprise sur un marché considéré peut être évaluée à un taux défini à l’avance à 25 %, à 30 %, 40 %, voire à 65 %. De tels chiffres sont avancés dans différentes législations en vigueur. Cependant, il paraît plus prudent d’affirmer que la puissance sur un marché s’apprécie selon un faisceau de critères, sans qu’il soit possible de privilégier l’un ou l’autre de ces critères, ces critères pris isolément (y compris la part de marché de l’entité économique considérée) n’étant pas suffisants pour caractériser une position dominante. On peut donc à cet égard distinguer des indices propres à la structure des marchés, et des critères liés à la structure de l’entreprise en cause. Politique de la concurrence 7.6
Puissance économique sur le marché (suite) indices propres à la structure des marchés Il s’agira principalement de se livrer aux analyses ci-après pour vérifier le caractère concurrentiel du marché. – Déterminer le degré de concentration de l’offre : il s’agit de décompter le nombre d’entreprises opérant sur le marché en distinguant éventuellement la situation avant les pratiques ou l’opération et après renforcement : il sera difficile de détecter une position dominante dans un marché très atomisé et dans lequel l’entreprise en cause n’a qu’une part infime de ce marché, mais si cette entreprise est forte dans ce marché atomisé, l’indice est clair. Inversement, dans un marché oligopolistique, tout dépendra encore plus des parts respectives. À cette fin la méthode de l’indice Herfindahl peut être utilisée. Politique de la concurrence 7.7
Indice de Herfindahl Principe: Faire la somme des parts de chacun des opérateurs sur le marché considéré, élevée au carré Soit un marché de 10 acteurs détenant chacun 10% des parts: 10x102=1000 points Soit un marché de 6 acteurs détenant pour quatre (4) d’entre eux 20% et deux (2), 10% des parts: 4x202 + 2x102 =1800 points Soit un marché de 3 acteurs détenant respectivement 30%, 20% et 50% des parts: 302 + 202 + 502 =3800 points Analyse: moins de 1000 points pas de problèmes à signaler entre 1000 et 1800 points problèmes possibles Plus de 1800 points problèmes sérieux compte tenu de la concentration du marché Politique de la concurrence 7.8
Puissance économique sur le marché (suite) indices propres à la structure des marchés (suite) Puis affiner en examinant l’éventuelle disparition d’un concurrent significatif ; - vérifier les parts de marché des offreurs, leur évolution, puis le niveau des parts de marché cumulées pour les deux premiers concurrents constituant un duopole éventuel ; - l’absence de pression concurrentielle exercée par les concurrents restants en vérifiant leurs parts de marché, leurs ventes, la zone de vente et le rayon d’action ; - les barrières à l’entrée ; - l’existence de comportements parallèles anticoncurrentiels ; - l’évolution des prix ; - l’existence de liens structurels : commerciaux, technologiques, financiers, autres (familiaux) ; Politique de la concurrence 7.9
Puissance économique sur le marché (suite) indices propres à la structure des marchés (suite) - les caractéristiques du marché susceptibles d’inciter à des comportements parallèles : la maturité du marché, l’absence d’innovation technique, l’homogénéité du produit, la transparence des prix, la similarité des coûts, la barrière à l’entrée, la faible élasticité de la demande par rapport au prix, le faible pouvoir économique des acheteurs ; - les taux d’investissement ; - les taux d’utilisation et le niveau de charge des usines de production, des centres de distribution ; - la concurrence au niveau de la demande, ceci conduit à observer le poids des acheteurs, le comportement des acheteurs, les commandes avant les faits en cause et après (par exemple lorsque ses clients diversifient leur type d’achat) ; - l’importance des marques (recherche et développement). Politique de la concurrence 7.10
Puissance économique sur le marché (suite) indices propres à la structure de l’entreprise en cause Il s’agira principalement de se livrer aux analyses ci-après. – Analyser la position financière de l’entreprise, ses comptes, son appartenance à un groupe, ses investissements … ; – Analyser sa situation par rapport à la technologie, sa détention de brevets, de savoir-faire, son avance par rapport à ses concurrents ; – Evaluer ses forces de production, nombre d’usines… ; – Analyser ses moyens d’approvisionnement en amont (matières premières, produits semi-finis…) et sa dépendance ou force vis-à-vis de ses fournisseurs ; – Évaluer sa force dans l’appareil de distribution : possession d’un réseau propre ou participation ou intégration dans un réseau partagé Politique de la concurrence 7.11
Les abus de positions dominantes Quelques remarques préalables s’imposent. Il est conséquent de ne dresser qu’une liste exemplative, non absolue, d’abus de position dominante car les mêmes faits peuvent être ou ne pas être abusifs, selon les circonstances : - si les faits sont mis en œuvre par des entreprises en position dominante ou pas ; - mais aussi en fonction d’une reconnaissance d’une possibilité raisonnable qu’une entreprise, même en position dominante, peut avoir à protéger son intérêt, non pas pour renforcer sa position, mais pour la préserver.. Politique de la concurrence 7.12
Les abus de positions dominantes (suite) Ce que des concurrents d’une entreprise en position dominante dénoncent ne constitue donc pas forcément une exploitation abusive de cette position. L’exemple le plus caractéristique peut être donné avec la détention d’un droit exclusif (un brevet d’invention notamment, ou un monopole public) par une entreprise en position dominante sur le marché sur lequel, porte le droit, droit dont elle peut déroger au profit de tiers : elle peut elle-même utiliser ce droit, qui par nature lui permet de contrôler l’accès au marché par les tiers concurrents, à condition de le faire « raisonnablement ». Politique de la concurrence 7.13
Les abus de positions dominantes (suite) Bien entendu, un lien doit être établi entre cette position dominante et l’abus présumé. Toutefois, une entreprise peut s’avérer être en position dominante sur un marché, mais abuser de cette position sur un marché voisin, connexe, amont ou aval. Quelques affaires ont donné l’occasion à des autorités de la concurrence de préciser ce concept. Politique de la concurrence 7.14
Les abus de positions dominantes (suite) Exemple : L’organisme chargé de distribuer la presse en France (Nouvelles Messageries de la Presse Parisienne) et donc en position dominante sur ce marché a été sanctionné par le Conseil français pour abus de cette position pour avoir imposé aux distributeurs d’acheter et d’utiliser ses propres présentoirs (en menuiserie) sur lesquels ils devaient disposer les journaux, alors que n’importe quel menuisier aurait été capable d’en fabriquer. Politique de la concurrence 7.15
Les abus de positions dominantes (suite) La Commission européenne a suivi un raisonnement similaire pour exiger quand même un lien de connexité entre les deux marchés et dans le cas où l’entreprise, sans être dans une position dominante dans le marché voisin, y détient néanmoins une position forte («prééminente »). Politique de la concurrence 7.16
Les abus de positions dominantes (suite) Exemple : Dans l’affaire Tetra Pak, la Commission européenne avait constaté une position dominante de cette entreprise sur le marché de mise en conditionnement de produits alimentaires liquides aseptiques (lait, jus de fruits…) et une position prééminente (« assimilable à la détention d’une position dominante ») sur les marchés de conditionnement non aseptique (jus de fruits, soupes…). La technologie des deux marchés aseptiques et non aseptiques était certes différente, mais voisine, rendant les marchés connexes. Politique de la concurrence 7.17
Les abus de positions dominantes (suite) Les faits susceptibles d’entraîner la qualification d’exploitation abusive de position dominante sont divers. Ce peut être des comportements, mais aussi des clauses d’un accord ; ce peut être le résultat de l’addition de plusieurs comportements simultanés ou successifs dans le temps ; ce peut être une clause ou un ensemble de clause. Politique de la concurrence 7.18
Les abus de positions dominantes (suite) Exemple : La société Tétra Pak déjà citée s’est vu reprocher à la fois une politique de commercialisation visant à restreindre l’offre, un cloisonnement des marchés nationaux, l’imposition de plusieurs clauses contractuelles aux utilisateurs des produits de Tetra Pak (contenants en carton, machines à fermer les boîtes en cartons) pour fidéliser ces utilisateurs et donc d’écarter la concurrence potentielle, la subordination des approvisionnements en machines (achat ou location) à la fourniture des cartons, la pratique de prix discriminatoires entre utilisateurs de territoires différents. Chacun de ces griefs, pris séparément n’aurait peut-être pas constitué une pratique d’exploitation abusive, ou certainement pas une sanction élevée, mais mis en perspective, l’ensemble de ces pratiques démontrait une politique très néfaste pour la concurrence ce qui a valu à l’entreprise l’une des sanctions les plus fortes imposées à une seule entreprise (75millions d’écus). Politique de la concurrence 7.19
Les abus de positions dominantes (suite) L’ensemble de principes et de règles équitables convenus au niveau multilatéral pour le contrôle des pratiques commerciales restrictives de la CNUCED donne une liste d’actes ou de comportements dont les entreprises devraient s’abstraire « quand, par l’abus ou l’acquisition et l’abus d’une position dominante de force sur le marché, ils limitent l’accès aux marchés ou de toute autre manière, restreignent indûment la concurrence, portant ou risquant de porter préjudice au commerce international, en particulier au commerce des pays en développement ». Politique de la concurrence 7.20
Les abus de positions dominantes (suite) Les législations dressent donc généralement une liste d’abus interdits, mais une telle liste n’est que limitative ; le droit communautaire européen a inspiré plusieurs législations nationales (française, d’autres États de l’Union, mais aussi tunisienne, algérienne et ivoirienne) et donne quelques cas exemplaires de pratiques abusives (article 82 du traité) ; ces pratiques peuvent notamment consister à : Politique de la concurrence 7.21
Les abus de positions dominantes (suite) « a) Imposer de façon directe ou indirecte les prix d’achat ou de vente ou d’autres conditions de transaction non équitables ; b) Limiter la production, les débouchés, ou le développement technique au préjudice des consommateurs ; c) Appliquer à l’égard de partenaires commerciaux des conditions inégales à des prestations équivalentes, en leur infligeant de ce fait un désavantage dans la concurrence ; d) Subordonner la conclusion de contrats à l’acceptation, par les partenaires, de prestations supplémentaires qui par leur nature ou selon les usages commerciaux, n’ont pas de lien avec l’objet de ces contrats. » Politique de la concurrence 7.22
Les abus de positions dominantes (suite) Liste des principaux abus de position dominante : – imposition de prix ; – pratiques de prix discriminatoires ; – conditions de transaction non équitables ; – pratique de prix de prédation, c’est-à-dire de prix inférieurs au prix coûtant (coûts marginaux) destinés à l’éviction de concurrents ; – refus de vente ou de prestations de services ; Politique de la concurrence 7.23
Les abus de positions dominantes (suite) – limitation de la production, – limitation des débouchés, – restrictions à l’importation, – restrictions à l’exportation, – blocage de technologies ; – acquisition de licence exclusive de brevet ou de savoir-faire ; – subordination de vente ou d’approvisionnement à des achats ou prestations complémentaires. Politique de la concurrence 7.24
Les abus de positions dominantes (suite) Quelques exemples peuvent être présentés de ces pratiques, condamnées par des autorités de la concurrence. 1. Les fixations de prix ou d’autres conditions non équitables Une entreprise dispose, lorsqu’elle détermine sa politique des prix et ses conditions d’achat ou de vente d’une marge de manœuvre qui est fonction de sa puissance économique sur le marché ; cette marge est plus importante lorsqu’elle détient une position dominante. Dans ce dernier cas, les prix et les conditions ne seront plus déterminés par les mécanismes de marché. La tentation est grande d’exploiter abusivement la rente de situation que lui donne sa position dominante. Sa responsabilité sera d’autant plus grande de ne pas en abuser. Politique de la concurrence 7.25
Les abus de positions dominantes (suite) i) Elle peut ainsi en tant que demandeur imposer à ses fournisseurs des prix abusivement bas, s’octroyant un avantage sur ses concurrents horizontaux. ii) De même, en tant qu’offreur, elle peut imposer à ses clients et utilisateurs des prix anormalement et inéquitablement élevés ; bien entendu, c’est seulement en cas de position très forte ou en cas de pénurie que ce schéma est possible, sinon, le risque est grand pour l’entreprise de perdre des clients au profit de concurrents émergents sur le marché. En tout état de cause, à court terme une telle politique se fait au détriment du consommateur. Politique de la concurrence 7.26
Les abus de positions dominantes (suite) Il est à noter que la simple constatation d’écarts importants entre les prix pratiqués pour un produit soit entre deux périodes ou entre deux clients, ou entre deux territoires, ne suffit pas en soi ; il convient d’examiner la structure des coûts pour vérifier la disproportion excessive éventuelle entre le coût effectivement supporté et le prix effectivement demandé. Face à une disproportion excessive constatée par une autorité de contrôle, l’on peut admettre que c’est à l’entreprise de démontrer que la divergence de prix repose sur des éléments objectifs autres que la finalité d’écarter du marché un concurrent. Politique de la concurrence 7.27
Les abus de positions dominantes (suite) Dans l’affaire United Brands, une entreprise importatrice de bananes avait été confondue de pratiques de prix anormalement élevés dans certains territoires ; des disparités atteignant 100 % avaient été constatés. La Cour de justice avait estimé qu’un écart même important ne suffit pas, mais qu’il faut apprécier les disproportions excessives entre les structures de coûts et le prix réclamé. Politique de la concurrence 7.28
Les abus de positions dominantes (suite) Dans une autre affaire, l’affaire Tournier, concernant des prestations de services (en matière de propriété intellectuelle et d’enregistrement de droits voisins portant sur la musique), la Cour a considéré qu’une différence de tarif pour une même prestation, pratiquée par une entreprise en position dominante constatée après comparaison homogène constitue un indice d’un abus et qu’il appartient à cette entreprise de prouver qu’elle s’est fondée sur des divergences objectives dans les situations des territoires et clients pour lesquels elle a demandé des prix très différents. Le prix plus élevé constitue par conséquent un indice qu’il faut confronter avec les justifications de cette pratique pour déterminer si une exploitation abusive a lieu. Politique de la concurrence 7.29
Les abus de positions dominantes (suite) iii) Enfin, toujours en tant qu’offreur, l’entreprise en position dominante peut pratiquer des prix anormalement bas qui peuvent éliminer les concurrents. La question est de savoir quel est « un prix anormalement bas ». Les autorités de la concurrence peuvent retenir la notion de « prix inférieurs à la moyenne des coûts variables » : en ce cas, chaque unité vendue entraîne une perte pour l’entreprise. Pour une entreprise en position dominante, cela ne peut que signifier, selon une rationalité économique, la volonté d’éliminer un concurrent. Politique de la concurrence 7.30
Les abus de positions dominantes (suite) 2. Les conditions inégales pour des prestations équivalentes Une politique qui tend à appliquer des conditions inégales pour des prestations équivalentes traduit une exploitation abusive. C’est le cas par exemple d’une politique de rabais dits « de fidélité » qui contrairement à des rabais quantitatifs, autorisés, visent à conserver artificiellement, sans contrepartie, des clients, de telle sorte que des concurrents ne puissent les attirer. Un rabais de fidélité se caractérise par le fait qu’il n’est pas fondé sur des différences de coûts et de charges que le producteur supporterait en fonction de quantités produites et distribuées. Politique de la concurrence 7.31
Les abus de positions dominantes (suite) La société Michelin présente et en position dominante sur le marché des pneumatiques pour poids lourds aux Pays-Bas a été sanctionnée par la Commission européenne pour avoir pratiqué des rabais à des distributeurs et revendeurs de pneus à un niveau tel et selon des modalités propre à décourager ces revendeurs de s’approvisionner auprès d’autres manufacturiers de pneumatiques, neufs et réchappés (rabais de fidélité favorisant les revendeurs qui s’engageaient à long terme sur des quantités importantes). Politique de la concurrence 7.32
Les abus de positions dominantes (suite) 3. Les limitations de la production et des débouchés ou du progrès technologique Une entreprise en position dominante devrait être poursuivie s’il s’avérait qu’elle faisait pression sur des distributeurs pour imposer une politique quantitative propre à maintenir un prix élevé, ou à ne pas livrer dans tel ou tel territoire dans un but similaire. Politique de la concurrence 7.33
Les abus de positions dominantes (suite) Dans une des plus célèbres affaires de position dominante analysée par la Cour de justice des Communautés européenne (Suiker Unie, mettant en cause des raffineries de sucre), il avait été notamment constaté que sans équivoque des pressions avaient été exercées sur les négociants pour qu’ils se plient à la politique d’exportation restrictive de l’entreprise, sous peine de ne pas se voir attribuer la quantité commandée. Politique de la concurrence 7.34
Les abus de positions dominantes (suite) Dans une affaire de placement de main-d'œuvre pour l’activité de laquelle une entreprise avait reçu une exclusivité, la même Cour avait considéré que l’entreprise ainsi en position dominante exploiterait abusivement sa position si elle n’était pas « en mesure de répondre à la demande du marché, puisqu’il en résulte un limitation de prestations de service au préjudice des demandeurs de ladite prestation ». Politique de la concurrence 7.35
Les abus de positions dominantes (suite) De même, une entreprise en position dominante qui mettrait en œuvre une politique pour bloquer le progrès technologique soit en limitant l’accès à sa propre technologie, soit en rachetant des brevets pour éviter que des concurrents les utilisent pour concurrencer ses propres produits exploiterait abusivement sa situation. Bien entendu, une telle conclusion ne serait possible qu’après examen au cas par cas, en vérifiant l’atteinte à l’un des trois paramètres de la concurrence. Politique de la concurrence 7.36
Les abus de positions dominantes (suite) 4. Refus de fourniture de produits ou de prestations de services Il ne faut pas confondre à cet égard, un refus de vente de produits ou de prestations de services qui serait interdit ou réglementé dans le cadre d’une législation de nature pénale ou en faveur d’une protection des consommateurs. Un refus de vente dans le cadre d’une politique de la concurrence n’est en principe pas répréhensible en soi, il ne l’est que s’il a des incidences sur la concurrence et, de ce fait, il ne peut en avoir que lorsqu’il émane d’une entreprise en position dominante car en ce cas, celui à qui un refus est opposé n’a pas de solution de recours. Politique de la concurrence 7.37
Les abus de positions dominantes (suite) Néanmoins, un refus de vente ou de prestations de services de la part d’une entreprise en position dominante n’est pas répréhensible si l’entreprise parvient à démontrer que le refus est fondé suite à une demande anormale ou en raison d’un non respect d’usages commerciaux du demandeur. Politique de la concurrence 7.38
Notion de dépendance économique Une dépendance économique recouvre la situation de fait dans laquelle se trouve une entreprise A dans sa relation avec une entreprise B, cliente ou fournisseur, caractérisée par une position de puissance telle de B par rapport à A, que A ne peut que s’y soustraire Politique de la concurrence 7.39
Notion de dépendance économique (suite) La notion de dépendance économique n’est pas présente dans toutes les législations de la concurrence, en tant que telle, sous cette appellation. En réalité, elle constitue en quelque sorte le verso de la position dominante : le droit de la concurrence est utilisé non pas du point de vue de la situation du dominant (notion traditionnelle) mais de celle du dominé. Politique de la concurrence 7.40
Notion de dépendance économique (suite) Toutefois, pour être certain qu’il n’y ait pas de confusion, et pour être certain de couvrir toutes les circonstances dans rapport dominant-dominé, cette notion et l’infraction qui en découle – l’abus de dépendance économique – ont été introduites dans certains droits en tant qu’incrimination autonome. C’est le cas du droit français de la concurrence par l’article 8 de l’ordonnance du 1er décembre 1986, comme c’était le cas du droit allemand. Politique de la concurrence 7.41
Notion de dépendance économique (suite) En fait, l’introduction de ces dispositions est directement liée à l’évolution des rapports de force entre l’industrie et le commerce, résultant de la concentration de la distribution par la création de grands groupes et de « super-centrales d’achat » et de l’impossibilité de qualifier de telles pratiques sur le fondement des textes précédemment en vigueur. Politique de la concurrence 7.42
Notion de dépendance économique (suite) La plupart des décisions rendues par le Conseil de la concurrence français concernent des situations dans lesquelles des distributeurs se trouvaient en situation de dépendance vis-à-vis de leurs fournisseurs. Pour quelques exemples, on peut citer les décisions relatives à différentes saisines de sociétés de distribution de matériel hi-fi dans leurs relations avec leurs fournisseurs, producteurs ou importateurs de ce type de matériel (Philips, Sony…) ou de distributeurs sur le marché des véhicules à moteur à deux roues, ou encore d’opérateurs sur le marché des programmes de télévision réservés à la diffusion sur les réseaux câblés. Politique de la concurrence 7.43
Notion de dépendance économique (suite) Une autorité de la concurrence peut avoir à examiner des affaires dans lesquelles des fournisseurs pouvaient se trouver en situation de dépendance à l’égard des grandes entreprises de distribution. Ainsi, le Conseil français a alors transposé, en les adaptant, les critères dégagés par la jurisprudence pour caractériser la situation de dépendance économique d’un distributeur par rapport à un fournisseur. Politique de la concurrence 7.44
Notion de dépendance économique (suite) La jurisprudence avait dégagé quatre critères dans ce dernier cas : – la notoriété de la marque ; – la part de marché du fournisseur ; – la part que représentent les produits du fournisseur dans le chiffre d’affaires du distributeur ; – l’absence de solution équivalente. Politique de la concurrence 7.45
Notion de dépendance économique (suite) Dans une décision relative à des pratiques mises en œuvre lors de l’acquisition d’une société de supermarchés par un autre groupe (Cora), l’autorité française a retenu également plusieurs critères pour caractériser l’existence d’une situation de dépendance économique, et notamment : – la part de chiffre d’affaires réalisé par le fournisseur avec le distributeur ; – l’importance du distributeur dans la commercialisation des produits concernés ; Politique de la concurrence 7.46
Notion de dépendance économique (suite) – les facteurs ayant conduit à la concentration des ventes, en examinant s’il s’agissait d’un choix stratégique ou d’une nécessité technique ; – l’existence et la diversité éventuelles de solutions alternatives pour le fournisseur. Politique de la concurrence 7.47
Notion de dépendance économique (suite) S’agissant de ces deux derniers critères, qui ne peuvent donner lieu dans tous les cas à une observation directe, d’autres éléments pouvaient être pris en compte, tels que notamment : – les ressources financières du fournisseur ; – la faiblesse des marges des offreurs sur le marché sur lequel opère ce dernier ; – l’absence de notoriété de la marque du fournisseur ; Politique de la concurrence 7.48
Notion de dépendance économique (suite) – la durée et l’importance de la pratique de politique de partenariat éventuellement nouée avec le distributeur ; – l’importance et la surcapacité d’offre sur le marché de ses produits. Cette notion devrait faire l’objet de jurisprudence pour être affinée, de tels cas pouvant se trouver dans des pays en développement. Politique de la concurrence 7.49
CONCLUSION Pratiques complexe à contrôler Bilan économique nécessaire Politique de la concurrence 7.50