Grands principes et réalité… ONCOGERIATRIE Grands principes et réalité… Jean-François Alexandra Sce de Médecine Interne. Bichat-Claude Bernard UCOG HUPNVS
Pourquoi?
Démographie
Démographie
Espérance de vie FEMMES HOMMES A la naissance 83 ans 75 ans A 65 ans
Perspectives 2050 1998 (Homme) 2050 (Homme) 1998 (Femme) 2050 (Femme) Espérance de vie à la naissance 74.6 ans 82.2ans 81.6 ans 90.4 ans Probabilité d’atteindre 60 ans 83%. 91%, 92% 97.6% Espérance de vie à 60 ans 20 ans 26.17 ans 25.1 ans 31.5 ans Probabilité d’atteindre 85 ans 26% 56% 52.% 82% Espérance de vie à 85 ans 5.2 ans 6.97 ans 6.5 ans 8.97 ans
Chiffres sans commentaire… 42000 nouveaux cas de cancer du sein: 25%>75 ans Incidence de 54/100 000 cancer de l’ovaire dans la tranche 75-79 ans
Sous représentation dans les essais cliniques (entre 2005 et 2006) Jco Cancer jnci Nb articles 258 58 17 Age moyen 59,4 % Etudes stratifiées sur l’âge 21% 29% 41% % Etudes analysant l’âge 24% 35% % Etudes discutant l’âge 15,5 13,8 35,3
Ethique? Eléments de réponse Arguments Pro Arguments contra Volonté des patients affirmée Possibilités médicales certaines malgré les nombreuses zones d’incertitudes qui subsistent Emergence d’une discipline médicale dédiée Futilité? Coût?
Evolution des dépenses de santé au cours de la vie Mezzarobba et al CNAMTS 2011 Les dépenses de santé s’accroissent avec la proximité de la mort. 10 à 30 % de l’ensemble des dépenses au cours de la dernière année de vie Dernier mois de vie =28 % des remboursements de la dernière année. Une fois prise en compte la proximité de la mort, l’effet de l’âge sur les dépenses de santé est moindre. Ce n’est pas être vieux qui coute cher, c’est l’approche de la mort. L’argument économique pourrait être retourné à tout malade grave!
Modalités d’évaluation Qui traiter? Modalités d’évaluation
Pourquoi cette question? Mêmes modalités de vieillissement ?
L’âge ne signifie rien… Grande hétérogénéité de la population âgée (état de santé: comorbidités, lieu de vie, statut social) Hétérogénéité de la prise en charge et de l’offre de soins +++
Qui traiter: Indice de Karnofsky? 100% – normal, no complaints, no signs of disease 90% – capable of normal activity, few symptoms or signs of disease 80% – normal activity with some difficulty, some symptoms or signs 70% – caring for self, not capable of normal activity or work 60% – requiring some help, can take care of most personal requirements 50% – requires help often, requires frequent medical care 40% – disabled, requires special care and help 30% – severely disabled, hospital admission indicated but no risk of death 20% – very ill, urgently requiring admission, requires supportive measures or treatment 10% – moribund, rapidly progressive fatal disease processes 0% – death.
Qui traiter: performance status? 0 – Asymptomatic (Fully active, able to carry on all predisease activities without restriction) 1 – Symptomatic but completely ambulatory (Restricted in physically strenuous activity but ambulatory and able to carry out work of a light or sedentary nature. For example, light housework, office work) 2 – Symptomatic, <50% in bed during the day (Ambulatory and capable of all self care but unable to carry out any work activities. Up and about more than 50% of waking hours) 3 – Symptomatic, >50% in bed, but not bedbound (Capable of only limited self-care, confined to bed or chair 50% or more of waking hours) 4 – Bedbound (Completely disabled. Cannot carry on any self-care. Totally confined to bed or chair) 5 – Death
Evaluation gériatrique Qui traiter: Evaluation gériatrique standardisée (EGS)? Balducci et al JCO 2000 Evaluation gériatrique Patient autonome Absence de comorbidités Une dépendance fonctionnelle (IADL) Et/ou 1 à 2 comorbidités Patient dépendant Comorbidités ≥ 3 1 syndrome gériatrique évolutif Groupe harmonieux Groupe intermédiaire Groupe très fragile EV EV liée au cancer EV< EV liée au cancer Traitement standard Traitement adapté Soins palliatifs
Comment évaluer: PS/Karnofsky/EGS? 269 patients PS<2: 13%>2 comorbidités 10% limitation ADL 38% limitation IADL 28% MMSE<24/30 31% depression probable (GDS) Repetto et al JCO 2002 60 patients ADK prostate. Karnofsky>60: 50% risque de chute 45% tbles cognitifs 33% depression 65% dénutris Terret et al JCO 2004
Pondération de l’EGS: Fragilité Age> 85 ans >1 syndrome gériatrique > 3 comorbidités: rénales, hépatiques, cardio-respiratoire, neurologique, hématologique, rhumatologique Poly-médication Isolement social >1 dépendance: Incontinence Transfert Alimentation Toilette Habillage Cohen et al NEJM 2002
Qu’est ce qu’un syndrome gériatrique? Démence Syndrome confusionnel Dépression Incontinence Chute Ostéopathie fragilisante Dénutrition sévère
Ce qui n’est pas qu’un syndrome gériatrique…
Balducci revisited Evaluation Groupes 1&2 Très fragiles harmonieux intermédiaire réadaptation oui non Ttt conventionnel Soins de confort Ttt adapté
But de l’évaluation Identifier les conditions réversibles qui peuvent interférer avec le traitement Estimer l’espérance de vie Apporter un langage commun pour générer des essais thérapeutiques Suppose une interaction étroite entre gériatres et oncologues…Enjeu culturel de l’intégration du gériatre dans les RCP.
Preuve du concept: amélioration de la survie Mc Corkle et al JAGS 2002 Chirurgie carcinologique entre 60 et 92 ans Intervention gériatrique Prise en charge standard Nb patients 190 185 Décès 22% 28% Stade avancé 38% 25% Survie à 2 ans 67% 40%
Preuve du concept: modification des pratiques V Girre et al Gerontol 2008 105 patients 70 ans (âge médian : 79 ans) Cancer métastatique dans 57% des cas Stratégie thérapeutique modifiée dans 38% des cas après l’évaluation gériatrique: dans 55% : schéma chimiothérapique initial modifié dans 14% : chimiothérapie annulée
Dimensions pratiques de l’évaluation
Facteurs prédictifs de la tolérance Extermann et al JCO 2007 Dénutrition: le MNA = facteur prédictif de décès précoce chez les patients âgés traités par chimiothérapie Dépression Perte d’autonomie PS
Échelle prédictive de toxicité à la chimiothérapie étude GERCOR - GEPOG Les fonctions cognitives 1- Date du jour et nom de la ville de l’hôpital 2- Répétition de 3 mots (immédiat et différé) Les capacités d’autonomie 3- Aide pour : Téléphoner Prendre des médicaments Faire les courses Préparer les repas Conduire ou utiliser les moyens de transports Entretenir la maison 4- Appui monopodal Les comorbidités 5- Hospitalisation récente dans l’année précédente 6- Polymédication > 5 Les fonctions biologiques 7- Clearance de la créatinine > 30 ml/mn 8 - Albuminémie L’estime de soi et l’environnement 9- Vous sentez-vous souvent triste ou déprimé? 10- Présence de l’entourage (aidant ou famille)
Structurer l’EGS 3 axes: Capacités fonctionnelles État physique et psychique Paramètres socio- environnementaux
Paramètres socio-environnementaux Social : situation familiale (statut marital, nbr et proximité des enfants) aidant naturel principal aides professionnelles (auxiliaire de vie, IDE, portage des repas, téléalarme) et informelles (amis, voisins) conditions de ressources protection sociale (ALD, mutuelle) protection juridique (curatelle, tutelle) niveau éducatif et professions exercées Environnemental : conditions de logement proximité des lieux de soins aides matérielles
EVALUATION FONCTIONNELLE ACTIVITÉS BASALES DE LA VIE QUOTIDIENNE - ADL Transfert
EVALUATION FONCTIONNELLE ACTIVITÉS INSTRUMENTALES DE LA VIE QUOTIDIENNE - IADL Lessive Course Ménage Argent Téléphone Cuisine Transport Traitement
ETAT PHYSIQUE ET PSYCHIQUE LES CO-MORBIDITES ET TRAITEMENT ATCD/ habitudes toxiques Pathologies répertoriées Évaluation du risque iatrogène : liste des médicaments, observance, automédication L’ETAT NUTRITIONNEL: perte de poids (5% du pds en 1 mois ou 10% du pds en 6 mois) IMC (< 21) Albuminémie (<35 g/l) (MNA) EVALUATION DE LA MARCHE ET DE L’EQUILIBRE : nombre de chutes sur les 6 derniers mois get up and go test appui unipodal
ETAT PHYSIQUE ET PSYCHIQUE . FONCTIONS COGNITIVES : plainte mnésique MMS, test des 5 mots, test de l’horloge évaluation neuro-psychologique ETAT THYMIQUE : symptomatologie dépressive GDS ou mini-GDS FONCTIONS SENSORIELLES : appareillage adapté, gêne fonctionnelle FONCTIONS SPHINCTERIENNES : continence urinaire et fécale EVALUATION APPAREIL PAR APPAREIL : cardio-vasculaire, pulmonaire, ostéo-articulaire, neurologique, fonction rénale, état bucco-dentaire, cutanéo-muqueux, sommeil, douleur
Situations complexes
Nutrition: mortalité per-hospitalière et IMC Kamel et al arch int med 2001
Cercle vicieux Dénutrition usuelle dans le cancer (anorexie++) Majoration des toxicités des chimiothérapies: majoration de l’anorexie… Augmentation de la mortalité post-opératoire
MNA (version simplifiée)
Nutrition: risque accru de décès si perte de poids au-dessus de 10 % hypoalbuminémie (<30g/l) score MNA (mini nutritional assessment) < 24 (risque d’autant plus élevé que ce score est bas). Soubeyran ASCO 2007
Recommandations pratiques: dépistage systématique de la dénutrition ; évaluation des apports alimentaires et leur confrontation aux besoins la consultation diététique et le suivi des dénutris ; recherche d’autres facteurs favorisant la dénutrition et la mise en place d’intervention de soutien ; suivi nutritionnel et prévention d’une baisse des apports liés au traitement anticancéreux: enrichissement de l’alimentation, supplémentation orale voire nutrition entérale. Spiro et al Br J Cancer 2006
Troubles cognitifs en oncogériatrie
Une sur-mortalité…: 80 patients de plus de 70 ans atteints de cancer avec troubles cognitifs Vs Groupe contrôle de 172 patients de plus de 70 ans avec cancer sans trouble cognitif Robb et al Crit Rev Oncol Hematol 2009
….à tous les stades Même étude en considérant le stade du cancer Ibid
Impact des troubles cognitifs Plus d’abstention thérapeutique Moins de traitements agressifs Plus d’effets secondaires des traitements: confusion post opératoire ou liée aux diverses molécules (cortisone, anti-émétiques…) Difficultés de recueil du consentement, Evaluation problématique de la qualité de vie
Pourtant: altération cognitive et pronostic vital très dépendants du stade de la maladie Perspective d’un traitement à considérer au cas par cas au terme d’une évaluation stricte des réserves fonctionnelles et de l’étayage social La MA n’est pas une contre indication au traitement d’un cancer!
Polymédication 30% d’hospitalisation du sujet âgé pour iatrogénie: nettoyage systématique de l’ordonnance avant de démarrer un traitement du cancer: en particulier: Psychotropes Anticholinergiques Certains antalgiques (tramadol) …
Exemple
Exemple: senologie Avant la chirurgie : Identifier les risques post-opératoires : essentiellement FdR cardio-vasculaires ou de survenue d’un syndrome confusionnel En cas d’hormonothérapie : Mesurer la densité minérale osseuse et apprécier le risque fracturaire (ATCD de fracture perso ou familial) Mise en place d’un ttt chez l’ostéoporotique après correction d’une carence en vitamine D
Les troubles psycho-comportementaux graves Avant la radiothérapie : rechercher les éléments limitants : Les troubles psycho-comportementaux graves Les déficiences rendant le bon positionnement de la patiente impossible Les difficultés d’accès au service (éloignement géographique, patient étant l’ANP d’un conjoint ayant une démence…) Avant la chimiothérapie adjuvante Apprécier la probabilité de survie de la patiente, dépendant de son âge, de ses co-morbidités et de son statut fonctionnel? Aucun outil parfaitement validé: rcp pluridisciplinaire+++
Conclusion Discipline balbutiante imposant la pluridisciplinarité Des premiers résultats encourageants et une nécessité sociétale Frontière éthique perpétuellement mouvante entre l’acharnement et l’abstention irraisonnée Encore plus de questions que de réponses…