LES BRÛLURES graves Introduction . Physiopathologie Diagnostic positif Diagnostics associés Prise en charge pré hospitalière Prise en charge hospitalière Brûlures particulières Brûlures par ingestion de substances caustiques ( la prise en charge en milieu spécialisé ne sera pas traitée) Cours IFSI Montbéliard 15 mai 2008 Docteur Danielle Tartary PHAR
Introduction La brûlure est définie comme la destruction traumatique de la peau et des tissus sous jacents par un processus qui est thermique ( 90%), électrique ( 5%), chimique, mécanique ( dermo abrasion ) ou exceptionnellement radioactif. À la maison ( 70%) , au travail (20%), suicides, trafic … Incidence élevée: - 150 000 personnes/an en France sont concernées - 3500 victimes prises en charge par les centres anti brûlés français 5000 victimes dans les hôpitaux et cliniques 30% enfants ( 1à 4 ans ) En 1950 mortalité 50% si SCB 50% , actuellement si SCB 90% Séquelles esthétiques ,sociales et fonctionnelles importantes
Physiopathologie Localement: zone de nécrose et destruction des cellules Régional : Destruction cellulaire réaction inflammatoire aigu avec libération de substances vaso actives ( histamine, sérotonine, kinines…………) Profonds désordres capillaires avec fuite liquidienne et protéique du secteur vasculaire vers le secteur intersticiel ( 3ème secteur = oedèmes ) A distance de la brûlure: Exportation de la réaction inflammatoire suraigu et création d’un état de SIRS ( syndrome réactionnel inflammatoire systémique) ( hyper perméabilité capillaire dans les tissus sains non brûlés) Conséquences: Choc du brûlé = Fuite liquidienne ( plasmorragie : albumine, eau et électrolytes) = choc hypovolémique avec hémoconcentration
Physiopathologie Par la suite ( hors cours ) Modifications endocriniennes: ( hormones du stress: catécholamines,Glucagon, cortisol) Nutritionnelles: dénutrition , diabète de stress Métaboliques: hyper métabolisme Dépression immunitaire Le risque infectieux est majeur à tous les stades ! ( plus d’un décès sur 2 chez les brûlés graves sont d’origine infectieuse)
Diagnostic positif Cinq paramètres: 1.Superficie 2.Profondeur 3.Localisation des lésions 4.Association à intoxications ou traumatismes 5.Les antécédents de la victime
La superficie de la surface corporelle brûlée ( SCB) Règle des 9 de Wallace Valide chez adulte En centre antibrûlés: table de Lund et Browder ( en fonction de l’âge) -tête à la naissance = 19 %, adulte = 7% -paume main = 0,5% , avec les doigts = 1% GUIDE pour la réanimation hydro électrolytique initiale 2. La profondeur de la brûlure 3 degrés La distinction immédiate entre les différents stades est souvent source d’erreurs et en fait de peu d’intérêts pour le traitement initial.
En pratique: Estimation de la surface : à la compresse -mouillée d’antiseptique -en frottant les zones douteuses -la fumée s’en va -la peau reste en place: pas brûlé ou 1er degré -la peau se décolle: brûlure sans préjugé de la profondeur Estimation de la profondeur: à l’aiguille -scarification d’un millimètre de profondeur -saignement immédiat: superficiel -saignement retardé:pas superficiel -pas de saignement du tout:profond
3. La localisation Cervico faciale : -L’œdème peut compromettre la liberté des voies aériennes supérieures ( asphyxie progressive, intubation difficile) -lésions oculaires ( œdème en bandeau des paupières)) -Brûlures des voies aériennes ( flammes, vapeurs brûlantes), ( larynx : voix rauque ) -Encombrement par la suie des fumées d’incendie( expectorations noires) -Lésions pulmonaires par Blast après explosion Périnée: risque infectieux anaérobies et sondage urinaire précoce (œdème) Lésions circulaires ( membres ): effet garrot : ischémie et compression ( avis chirurgical : incision de décharge avant 6 h)
Mortalité et morbidité - Intoxication au CO et cyanures ( incendie ) 4. Associations Mortalité et morbidité - Intoxication au CO et cyanures ( incendie ) - Traumatismes viscéraux et orthopédiques: projection de la victime lors accidents électriques, blast lors explosion (poumons et tympans à vérifier), hémorragies ( hémoconcentration habituelle lors d’une brûlure, si hématocrite bas , il faut suspecter une hémorragie associée) Fracture masquée par œdème 5.Les antécédents du patient Diabète Insuffisance respiratoire ou cardiaque… Risque de décompensation
Définition de la brûlure grave SCB 25 % chez l’adulte et 20% aux âges extrêmes de la vie Brûlure 3ème degré sur plus de 10% SC Brûlures cervico faciales Brûlures par inhalation et traumatismes associés Brûlures chez un patient ASA II ou plus
Diagnostics associés Bilan complet des lésions: Incombe au relais hospitalier initial, avant le transfert Bilan complet des lésions: guidé par les circonstances de l’accident La douleur due à la brûlure peut masquer une symptomatologie associée en particulier lors d’un incendie ou d’une explosion: Traumatisme crânien ou AVC scanner cérébral Fractures de la colonne vertébrale ou des membres RX Blast: tympans à vérifier et RX poumons Hémorragie par lésions thoraco abdominales échographie -Brûlures circulaires des membres : Paresthésies, température locale , palpation des pouls, Surveillance fréquente ( oedèmes qui augmentent) Avis chirurgical pour incisions de décharge à faire dans les 6 premières heures
-Troubles de la conscience associés Un brûlé est en principe conscient. Penser à rechercher : Intoxication au CO: Déchet principal de la combustion des matières organiques Y penser si brûlures par flammes en milieu clos dosage HbCO > 5% , traitement oxygénothérapie fort débit ou OHB Intoxication cyanhydrique: CN est produit par la combustion du polyuréthane, de la laine, soie et nylon Taux de CN > 0,1 mg/l ( ne pas attendre le résultat) Y penser si acidose lactique , traitement spécifique par hydroxocobalamine : 5gr chez adulte , 50 mg/kg chez enfant
Prise en charge pré hospitalière Intervention large du SMUR en cas de brûlure Les vêtements : À retirer s’ils sont imbibés de liquides chauds ou caustiques Sauf s’ils adhérent aux lésions Retirer les bagues et bijoux avant que l’œdème des doigts s’installe Le refroidissement de la brûlure: .15 min avec une eau 15°/20° est recommandé Pour brûlure récente ( dans les 15 min ) Y renoncer si trop étendue ( hypothermie du patient, enfant ) .Water ou Hydro gel : même critères = refroidissement et premier pansement . 20 min si brûlure chimique. Envelopper la victime dans champs stériles ( ou propres), puis dans une couverture d’isolation thermique ( réchauffement)
Prise en charge pré hospitalière La perfusion Précoce dés que SCB > 15 % ( 10 % enfant ) Une voie d’abord veineuse périphérique de bon calibre Règle de base en urgence : 20ml/kg RINGER LACTATE la première heure En zone saine ou en zone brûlée
Analgésie C’est la première demande du patient, précoce Morphine par voie veineuse dilution 1mg/1ml ( 1mg dans une seringue de 10ml) 1 à 2 mg IVD/ 5min ( maxi 2mg/10kg) L’analgésie est le plus souvent obtenue pour une dose 0, 1 mg/kg Son utilisation impose une évaluation continue de la douleur, de la sédation et de la fonction respiratoire ( FR > 10/min) Voie sous cutanée ou intramusculaire est possible mais efficacité plus Aléatoire En absence de Morphine , le Nubain* peut être utilisé. Kétamine: 10mg/kg voie intramusculaire ou intra rectale ( enfant ) Antalgiques mineurs ( Paracétamol ) et Mélange N02/02 en adjuvant et permettent de diminuer les doses de morphine Morphiniques de synthèse et benzodiazépines si le patient est sous ventilation mécanique
Oxygénothérapie Systématique: dette en oxygène (L’ hypovolémie diminue le transport de l’oxygène , la consommation est majorée par le stress, la douleur et les éventuelles lésions respiratoires) Recours à la ventilation mécanique: -détresse respiratoire par brûlure pulmonaire ou traumatismes associés -coma -brûlures cervico faciales profondes Anesthésie: à séquence rapide , lepto curares autorisés à ce stade
Autres mesures sur les lieux Administration d’hydroxocobalamine ( Cyanokit) (Antidote de l’acide cyanhydrique) Contexte d’incendie en espace clos Pour les patients en instabilité hémodynamique avec troubles du rythme cardiaque ou en arrêt cardiaque 5g pour l’adulte ( 70mg/kg enfant ) Faire les prélèvements sanguins avant ( CO, CN) + O2 qui reste le meilleure antidote de l’intoxication par les fumées d’incendie Suivant les conditions du transport ( longueur ou avion ): Intubation facile Sonde gastrique Sonde urinaire ( lésion du périné)
Brûlures : gravité surface
Brûlures: gravité surface
Brûlures: profondeur Symptômes Évolution Premier degré Érythème douloureux ( coup de soleil ) Guérison en 48 h Desquamation 2ème degré superficiel ( membrane basale non atteinte) Phlyctènes extensives, paroi épaisses, socle suintant, douloureux Guérison en 15 à 21 j Troubles de pigmentation 2ème degré profond (respect annexes:poils et glandes sébacées) Douleur moindre Anesthésie partielle, phanères adhérents Vitropression + 3sem pour guérison Cicatrices mauvaises ( hypertrophiques) 3ème degré profond ( derme détruit) Couleur blanc nacré,rouge vif ou brun noir, texture cuir,phanères non adhérents Greffe dermo-épidermique
Prise en charge hospitalière Hôpital général en premier lieu , relai avant transfert secondaire vers le centre spécialisé ou lieu d’hospitalisation de la victime C’est là que seront évaluées les lésions de façon complète Local propre et chaud Toujours penser au risque infectieux Evaluation de la gravité de la brûlure: (Surface, profondeur (difficile), localisation,lésions associées et pathologies antérieures)
Scores pronostiques en centre spécialisé Indice UBS: United Burn Standard =Surface brûlée en % + 3 fois le 3éme degré en % 100 à 150 UBS brûlure grave 150 à 400 UBS brûlure gravissime Score de BAUX : Surface brûlée en % + age Si > 100 : décès probable Indice de Baux modifié: SCB+ (Nbre années > 50 ans)x2 Pas de marqueur biologique
Prise en charge hospitalière Standard: pouls, TA, température, Sa02, FR, conscience, diurèse Oxygénothérapie: masque facial ou intubation si indication, voir trachéotomie Voie veineuse:périphériques, centrale si > 30% ou lésions associées -sonde urinaire: indication large ( surveillance ) précoce ( périnée ) -sonde gastrique: nutrition entérale précoce.troubles conscience. -réchauffement: température ambiante, couverture survie -prélèvements sanguins: à renouveler toutes les 4h NFS+plaquettes ( hémoconcentration , but hématocrite < 55% ) Iono sg , protidémie ( albuminémie ): Albumine si < 20 gr/l GDS + Lactate, Dosage HbCO CPK ( rhabdomyolyse ) Rx Thorax : lésion type OAP,inhalation, Pneumothorax
Traitement à l’hôpital Correction de l’hypovolémie Ringer Lactate ( cristalloïde le plus proche du plasma, légérement hypotonique , doit être Remplacé par sérum physiologique si traumatisme cranien associé) Remplissage vx des 24 premières heures : 20 ml/kg H1 H0 à H8: 2ml/kg/% SCB, puis 1ml/kg/% SCB Remarque: Colloïdes et Amidons possible , < 1000ml/j Albumine: après H8 si brûlure > 30% et Albuminémie< 20 gr/l Le traitement est guidée par la surveillance plus que par des formules ! TTT associés: -douleur : Paracétamol, morphiniques + pour EVA < 3 -antibiothérapie: non systématique ( anti anaérobies : oui , si périnée, souillures., par pénicilline G ? ) -lésions associées ( intox. Cyanure,CO, chirurgical: escarrotomie ..)
Traitement local aux urgences enlever le pansement s’il en existe après lavage des mains et port de gants non stériles -lavage savon antiseptique (Hibiscrub* Bétadine*) -rasage des zones brûlées et adjacente, enlever les débris -Mise à plat des phlyctènes et des morceaux de peau qui se détachent -rinçage à l’eau ( robinet ou stérile ? ) -si transfert: contacter le centre spécialisé pour soins locaux , ne pas faire de soins qui modifient l’aspect ( Eosine, Flammazine…) Enveloppement dans champs chirurgicaux stériles -pansement occlusif avec vaseline/ tulle ( superficielle et < 24h ) ou avec Flammazinesi brûlures profondes et > 24 h ( allergie Sulfamides) -compresses stériles, bandage ( filet tubulaire ) -vérification validité protection antitétanique ( sinon Ig spécifiques+ VAT) -brûlures > 24 h : prélèvement bactériologique avant lavage -brûlures circulaires : CS chirurgien , escarrotomies de décharge ?
La surveillance Surveillance générale : -FR, TA …. -diurèse: 0,5 à 1ml/kg/h -hématocrite ( 50% environ), Protidémie ( >35 g/l), apport Na ! -T° et réchauffement -disparition acidose lactique = bon signe efficacité -tolérance au remplissage vasculaire -glycémie ( sécrétion insuline inhibée, sécrétion glucagon stimulée à la phase initiale du choc : hyperglycémie fréquente) Surveillance d’une brûlure de faible gravité: -pansement Flammazine : toutes les 24 h -les tulles imprégnés de silver sulfadiazine ( Urgotulle *) permettent de refaire le pansement tous les 2 j -mise en place d’une membrane type Comfeel* permet de diminuer le nombre de pansement et de les rendre moins douloureux ( non adhésif )
Ambulatoire ? Les conditions: -surface < 10% adulte -pas de 3ème degré, pas de brûlure électrique -pas de brûlure circulaire des membres -pas de problème fonctionnel majeur ( mains, pieds ) -pas de brûlures en milieu clos ( risque respiratoire secondaire) -pas de tare particulière ( éthylisme, diabète) -patient peut venir en consultations externes -condition de vie : hygiène ( surinfection secondaire), isolement Les consignes: -boissons abondantes ( salée, type Vichy ) -thrombo prophylaxie ( HBPM) si mobilité réduite ( pieds) Bio gaze : sur grandes surfaces chez enfant: risque convulsion ( camphre ) -cicatrisation en 15j à 3S , sinon CS ( surinfection , greffe à faire )
Brûlures particulières Brûlures électriques: Brûlures+ électrisation 1000 volts et projection de la victime risque de rhabdomyolyse (CPK) risque cardiaque ( ECG et surveillance ECG, enzymes CPK, troponine) risque IRA ( iono, créatinine, diurèse..) Hospitalisation obligatoire sous scope Brûlures chimiques: Brûlures+ absorption du produit chimique au niveau de la plaie et pouvant avoir une action générale ( acide fluorhydriquehypocalcémiearrêt cardiaque) ( antirouille) CAP à contacter , déshabillage , lavage à grande eau ( 15 à 20min), usage d’absorbant de produit neutralisant possible Lavage oculaire: Sérum physiologique 20min ! ( flacon + tubulure de perfusion )
Brûlures par ingestion de caustiques Suicidaire ou accidentelle Eau de Javel , Soude caustique ( Destop* ), Acides Ramassage: Pas d’antidote Pas de manœuvres émétisantes Pas de sonde gastrique Évaluer le toxique ( quantité, heure de l’ingestion,concentration …) Rechercher une poly intoxication Oxyénothérapie Pas d’intubation ( sauf détresse vitale ) : intubation difficile, gênant ensuite l’évaluation des lésions
CAT à l’hôpital Clinique: perforation œsophage perforation gastrique détresse respiratoire ( obstruction VAS, inhalation, lésions directes ) lésions ORL Para clinique: -radio thorax, scanner (pas d’opacification digestive ) -endoscopie digestive en urgence , à répéter -endoscopie trachéo bronchique = stades des lésions, pronostic vital et indications chirurgicales en urgence -biologie complète avec recherche toxicologique ( sang + urine ) Remarques: -Risque intubation difficile et estomac plein ( à la fin de l’endoscopie ? ) -Pas de VVC jugulaire ou sous clavière gauche ( voie d’abord chirurgicale) -Extubation prudente ( œdème périglottique): cuff-leak test ? (ventilation de quelques secondes autour de la sonde, ballonnet dégonflé et extrémité de la sonde obstruée )
Le traitement chirurgical La chirurgie : lourde et en urgence Trachéotomie, oesophagectomie…. …. Jéjunostomie systématique pour réalimentation entérale précoce Complications fréquentes : Respiratoires et infectieuses ( médiastinite). Séquelles fréquentes : sténose digestive, pharyngée… Nutrition : -Cas bénin ( non opéré ) : alimentation dés la disparition des symptômes -Parentérale stricte au début ( fibroscopie de contrôle ) -Entérale par jéjunostomie en attendant la plastie oesophagienne TTT associés: -antalgiques -prise en charge psychiatrique