Soins infirmiers en hématologie Anémies et polyglobulies Docteur M. LENOBLE
Sémiologie en hématologie Trois lignées principales Lignée rouge, ou érythrocytaire Va de l’érythroblaste (moelle osseuse) Au globule rouge (ou érythrocyte, ou hématie) Lignée blanche, ou leucocytaire Inclut les polynucléaires, les lymphocytes, les monocytes Lignée plaquettaire, ou mégacaryocytaire Dr M. Lenoble 2004
Dr M. Lenoble 2004 Hématopoïèse normale Chez l’adulte sain, elle se produit dans la moelle osseuse (c’est la partie molle et graisseuse de « l’os à moelle »). Tout part d’une cellule souche (stem = tige en anglais) pluripotente (= à potentialités multiples). On sait qu’elles existent grâce aux cultures de moelle, mais il est impossible de les reconnaître au microscope. La cellule souche s’engage, sous l’effet de diverses molécules chimiques porteuses de « messages » (des « ordres » donnés aux cellules) dans un double processus : division cellulaire (prolifération) et différenciation (acquisition de caractères et de fonctions spécifiques et spécialisés). Plus on descend dans le schéma, plus la cellule est différenciée. Plus elle est différenciée, moins elle est capable de se diviser. A la dernière ligne et l’avant-dernière ligne du schéma, il n’y a plus que des cellules bien différenciées, ou même de simples débris de cytoplasme (thrombocytes ou plaquettes). Le globule rouge n’est qu’un simple « sac » rempli d’hémoglobine et de matériel nécessaire à son fonctionnement : il ne peut pas se diviser, car il a perdu son noyau. A l’état normal, seules les cellules différenciées des deux dernières lignes sont présentes dans le sang circulant. Les autres (les précurseurs) ne se voient que dans la moelle osseuse. Dr M. Lenoble 2004 Docteur M. LENOBLE
Sémiologie et pathologie de la lignée érythrocytaire Anomalies quantitatives A définir par le taux d’Hb plutôt que par le nombre de globules rouges Excès = polyglobulie Manque = anémie Dr M. Lenoble 2004
Sémiologie et pathologie de la lignée érythrocytaire Polyglobulie Hb > 16 g/dl chez une femme 17 g/dl chez un homme Secondaire si réaction à une autre cause Si les tissus manquent d’oxygène, l’organisme fabrique plus d’hématies : par exemple insuffisance respiratoire chronique Primitive si la cause est dans la moelle osseuse Maladie de Vaquez Dr M. Lenoble 2004
Sémiologie et pathologie de la lignée érythrocytaire Anémie Hb < 11 g/dl chez la femme 12 g/dl chez l’homme Conséquence : manque d’oxygène pour les tissus (hypoxie) Tachycardie, dyspnée d’effort, fatigue, étourdissements, voire syncope Pâleur (conjonctives, ongles…) Œdèmes des membres inférieurs Dr M. Lenoble 2004
Sémiologie et pathologie de la lignée érythrocytaire Anémie Conséquences d’autant plus graves : que l’anémie est importante et qu’elle s’installe rapidement Les anémies par carence en fer sont souvent bien supportées Dr M. Lenoble 2004
Mécanismes des anémies Par défaut de production Manque de matériaux : carences Programme génétique déficient : maladies héréditaires de l’hémoglobine Moelle osseuse malade Pauvre : aplasies, érythroblastopénies Envahie : leucémies, myélomes, lymphomes, métastases… Mauvaise maturation : syndromes myélodysplasiques Par excès de pertes Hémorragies Hémolyses Dr M. Lenoble 2004
Mécanismes des anémies Les anémies par défaut de production sont non régénératives Le nombre de réticulocytes* circulants est bas Les anémies par excès de pertes sont régénératives Le nombre de réticulocytes* circulants est élevé * Réticulocyte = globule rouge ayant encore des débris de noyau, visibles par une coloration spéciale (ne fait pas partie de la numération globulaire « standard ») Normalement, on n’en trouve pas beaucoup dans le sang Dr M. Lenoble 2004
Anémies par carence La fabrication des globules rouges nécessite des matériaux spécifiques Si ces matériaux manquent, une anémie s’installe Il faut beaucoup de fer (constituant essentiel de l’Hb) Et des vitamines : vitamine B12, acide folique Dr M. Lenoble 2004
Anémies par carence en fer Les plus fréquentes Notamment chez les femmes Les globules rouges deviennent petits (microcytose) Ils sont pâles (hypochromie) Cause principale : les petits saignements répétés Règles abondantes, petits saignements digestifs, épistaxis répétées… Favorisée par le manque d’apport (viandes) Fréquence chez le nourrisson alimenté au lait et aux farines Le diagnostic d’anémie par carence en fer est en général facile : les globules rouges sont anormalement petits (VGM < 80 3), les globules blancs sont normaux, les plaquettes sont normales ou un peu augmentées, l’examen clinique ne montre rien d’autre que les signes d’anémie. L’anémie est souvent bien supportée et on est souvent étonné de voir un patient avec peu de symptômes alors que l’Hb est très basse (5 ou 6 g, parfois moins). Le diagnostic est confirmé par le dosage de la ferritine. Le taux est le reflet des réserves de fer, qui se trouvent surtout dans le foie et dans la rate. Le traitement est le fer par la bouche. Il permet de réparer l’anémie en quelques semaines, mais il faut le poursuivre pendant plusieurs mois pour reconstituer les réserves, surtout si la cause persiste (règles abondantes, notamment). Le régime alimentaire est secondaire par rapport à l’apport de fer médicamenteux. Il est inutile de donner du fer injectable. Dr M. Lenoble 2004 Docteur M. LENOBLE
Anémies par carence en fer Diagnostic en principe facile Anémie hypochrome microcytaire Les autres lignées ne sont pas touchées Le taux de ferritine est effondré Eviter de transfuser Traitement de plusieurs mois par le fer Il faut absolument trouver la cause Le diagnostic d’anémie par carence en fer est en général facile : les globules rouges sont anormalement petits (VGM < 80 3), les globules blancs sont normaux, les plaquettes sont normales ou un peu augmentées, l’examen clinique ne montre rien d’autre que les signes d’anémie. L’anémie est souvent bien supportée et on est souvent étonné de voir un patient avec peu de symptômes alors que l’Hb est très basse (5 ou 6 g, parfois moins). Le diagnostic est confirmé par le dosage de la ferritine. Le taux est le reflet des réserves de fer, qui se trouvent surtout dans le foie et dans la rate. Le traitement est le fer par la bouche. Il permet de réparer l’anémie en quelques semaines, mais il faut le poursuivre pendant plusieurs mois pour reconstituer les réserves, surtout si la cause persiste (règles abondantes, notamment). Le régime alimentaire est secondaire par rapport à l’apport de fer médicamenteux. Il est inutile de donner du fer injectable. Dr M. Lenoble 2004 Docteur M. LENOBLE
Anémies inflammatoires Ressemblent aux anémies par carence en fer Mais la cause est un défaut d’utilisation du fer, dû au syndrome inflammatoire Exemples : polyarthrite rhumatoïde, infection prolongée, maladie de Hodgkin… Le taux sanguin de ferritine est augmenté Dr M. Lenoble 2004
Anémies par carence en vitamine B12 Jamais par carence d’apport Les GR deviennent gros (macrocytose) La cause de la carence est dans l’estomac… Anémie de Biermer (pas de facteur intrinsèque) Gastrectomie …Ou dans l’intestin grêle Maladie de Crohn Résection intestinale La maladie de Biermer est la plus typique des carences en vitamine B12. Elle est due à un anticorps anti-facteur intrinsèque. Le facteur intrinsèque se conjugue normalement à la vitamine B12 dans l’estomac. Le complexe facteur intrinsèque-vitamine B12 est ensuite absorbé dans l’iléon terminal (l’extrémité de l’intestin grêle). Le traitement repose sur l’injection de vitamine B12 par voie intramusculaire (car la vitamine B12 ne peut être absorbée sans facteur intrinsèque). Le traitement doit être continué à vie. Dr M. Lenoble 2004 Docteur M. LENOBLE
Anémies par carence en acide folique Mêmes caractéristiques que l’anémie par carence en vitamine B12 (macrocytose) Mais causes différentes : carences d’apport fréquentes (fruits frais, légumes verts) L’acide folique est détruit par la cuisson Fréquence++ chez le sujet âgé, dénutri, anorexique, alcoolique… Dr M. Lenoble 2004
Anémies hémolytiques par anomalie héréditaire de l’hémoglobine Thalassémies Défaut de synthèse de chaînes de l’hémoglobine Peuvent être alpha ou bêta Peu ou pas de signes si hétérozygote Thalassémie mineure = polyglobulie microcytaire avec Hb normale Grave si homozygote Thalassémie majeure ou maladie de Cooley Dr M. Lenoble 2004
Anémies hémolytiques par anomalie héréditaire de l’hémoglobine Drépanocytose Un seul acide aminé de l’Hb est changé (Hb S) Peu ou pas de signes si hétérozygote Grave si homozygote Déformation des hématies en faux (hématie falciforme) Blocage dans les petits vaisseaux : crises aiguës douloureuses (os), nécrose des épiphyses, retentissement possible dans tous les organes Dr M. Lenoble 2004 Docteur M. LENOBLE
Anémies hémolytiques par anomalie héréditaire de l’hémoglobine Retenir Thalassémie = maladie des « blancs » (Pourtour de la Méditerranée, fréquence en Italie et au Maghreb, Asie) Drépanocytose = maladie des « noirs » (Afrique subsaharienne, Caraïbes, Guadeloupe et Martinique) Dr M. Lenoble 2004 Docteur M. LENOBLE
Anémies hémolytiques par anomalie héréditaire de la paroi Maladie de Minkowski-Chauffard La membrane du globule rouge est anormale Les hématies sont sphériques et non en forme de disque biconcave (sphérocytose héréditaire) Elles sont détruites prématurément dans la rate Guérison par la splénectomie Autosomique dominant (les hétérozygotes sont malades) Dr M. Lenoble 2004 Docteur M. LENOBLE
Anémie hémolytique par anomalie enzymatique héréditaire La plus fréquente : le déficit en G6PD Forme typique : le favisme Hémolyse déclenchée par les oxydants Fèves Médicaments divers Liste à porter sur soi Dr M. Lenoble 2004
Anémies hémolytiques immunologiques Destruction des globules rouges par des anticorps qui se fixent sur les antigènes de la paroi et l’endommagent (avec l’aide du complément) Les anticorps peuvent être apportés de l’extérieur : accident transfusionnel ABO Dr M. Lenoble 2004
Anémies hémolytiques immunologiques Les anticorps peuvent être d’origine maternelle et traverser le placenta : maladie hémolytique du nouveau-né Notamment incompatibilité Rhésus (Rh) Les anticorps anti-D de la mère Rh- détruisent les globules rouges Rh+ du fœtus (in utero) Le père est Rh+ Prévention par les Ig anti-D dans les suites du premier accouchement Dr M. Lenoble 2004
Anémies hémolytiques immunologiques Les anticorps peuvent être fabriqués par le sujet lui-même contre ses propres globules rouges Ce sont des auto-anticorps Anémie hémolytique auto-immune Diagnostic par le test de Coombs Formes aiguës : post-infectieuses Formes chroniques Dr M. Lenoble 2004
Anémies hémolytiques toxiques et infectieuses Septicémie à Clostridium perfringens Leptospirose ictéro-hémorragique Paludisme Venin de serpent Champignons toxiques Saturnisme, arsenic, naphtalène Etc. Dr M. Lenoble 2004
Anémies hémolytiques de cause « mécanique » Présence de débris de globules rouges = schizocytes Valves cardiaques mécaniques Microangiopathie Syndrome hémolytique et urémique Purpura thrombotique thrombocytopénique Le contexte permet le diagnostic Dr M. Lenoble 2004
Anémies par défaut de production Dites aussi d’origine centrale Arégénératives = pas d’accélération de la production par la moelle pour compenser le déficit Aplasie médullaire : toutes les lignées sont touchées (pancytopénie) Erythroblastopénie : seuls les érythroblastes manquent (rare) Myélodysplasie (= « moelle mal fichue ») : défaut de maturation des lignées sanguines Dr M. Lenoble 2004
Anémies par défaut de production 1. Aplasie médullaire Idiopathique : rare Traitement par greffe de moelle si sévère Beaucoup plus fréquente : aplasie après chimiothérapie anticancéreuse Dr M. Lenoble 2004
Anémies par défaut de production par envahissement de la moelle osseuse Toutes les lignées sont touchées Leucémies aiguës (mais non les leucémies chroniques) Fibrose (myélofibrose primitive) Myélome Métastases de cancers (poumon, prostate, sein) Dr M. Lenoble 2004
Anémies par défaut de production 3. Défaut de production par myélodysplasie Synonyme : anémie réfractaire Toutes les lignées sont touchées Mais de façon variable Anémie + risque infectieux + risque hémorragique Aucun traitement réellement efficace Transfusions pour maintenir Hb > 8 g/dl environ Evolution possible vers leucémie aiguë Maladie fréquente chez les sujets âgés Dr M. Lenoble 2004