Chapitre 9 – Limites d’une politique de relance autonome (1981-1982)
Volonté clairement affichée de redonner un rôle plus fort à l’État : Élection de François Mitterand en mai 1981, qui devient le premier Président de gauche depuis la création de la Ve République. Ce fut un évènement considérable, car le programme économique et social de la gauche se veut en rupture avec la politique de rigueur des plans Barre. Volonté clairement affichée de redonner un rôle plus fort à l’État : Nationalisations Refonte de la planification Priorité à la lutte contre le chômage. La méfiance internationale des investisseurs à l’égard du gouvernement socialiste est telle que la fuite des capitaux entraîne une 1ère dévaluation du franc dès octobre 1981.
Section 1 – Une politique de relance Le gouvernement de Pierre Mauroy met très rapidement en œuvre une politique de relance : qui vise à endiguer la progression du chômage et doit devancer la reprise mondiale en favorisant la demande intérieure 1.1- Relance par la consommation Relèvement des bas revenus dont la propension à consommer est la plus élevée Pour faire jouer le multiplicateur keynésien
Le relèvement des revenus concerne à la fois : les revenus salariaux ↑ du SMIC de 10 %, dès le 3 juin 1981 puis 8 revalorisations jusqu’en 1983 ↑ totale nominale de 38 %, qui concerne 1,5 million de personnes pour compenser, ↓ des cotisations patronales sur les bas salaires et les revenus de transfert ↑ des prestations familiales de 25 % en juillet, et de nouveau au début de l’année 1982 ↑ de l’allocation-logement ↑ des prestations vieillesse (↑ du minimum vieillesse de 62 % en 2 ans) Au total, le revenu disponible brut (RDB) des ménages progresse plus vite que le PIB.
1.2- Lutte contre le chômage La priorité devient la lutte contre le chômage et non plus contre l’inflation. Cela passe par la création de 225 000 emplois publics en 2 ans : 133 000 sur le budget de l’Etat 64 000 dans les collectivités locales 28 000 dans le secteur hospitalier Ainsi que par une pol. de ↓ de la population active : Abaissement de l’âge de la retraite à 60 ans (en mars 1982) Développement des préretraites à 55 ans Embauche de 160 000 jeunes en Contrat de solidarité en 1982-1983 78 000 jeunes bénéficient d’une formation dans le cadre du plan avenir-jeunes
Ces mesures dites actives de politique de l’emploi ne font en fait que reprendre assez largement des dispositifs déjà introduits dans le cadre des plans Barre (pacte national pour l’emploi). Réduction de la durée légale du travail de 40 à 39 heures (1er février 1982) : mais faible impact sur l’emploi en raison des gains de productivité 1983 : les demandes administratives de licenciements doivent être accompagnées de propositions de reclassement
Section 2 – Réforme en profondeur du droit du travail Avec les 3 lois Auroux de 1982, qui visent à développer la « citoyenneté dans l’entreprise » par une refonte du droit du travail dans 3 directions : La liberté des travailleurs Règlements intérieurs limités, élaborés après consultation des représentants du personnel et soumis à l’inspection du travail La liberté d’expression dans l’entreprise Via les comités d’entreprise et d’établissement (qui existent, à présent et dans une certaine mesure, au niveau européen) La réforme des comités d’hygiène et de sécurité des conditions de travail.
Section 3 – Les nationalisations La loi du 11 février 1982 conduit à la nationalisation des plus grandes entreprises françaises : Usinor et Sacilor (sidérurgie) Rhône-Poulenc (chimie) Saint-Gobain (verre) Péchiney, Thomson-Brandt, Companie générale d’électricité 2 participations majoritaires : Matra et Dassault Dans le secteur bancaire, les nationalisations concernent : de nombreuses banque de dépôt (CIC, Crédit du Nord, CCF…) mais aussi des banques d’affaires, à la différence de 1945 (Banque Rotschild, et 2 compagnies financières Paribas, Suez). L’État contrôle alors : 16 % de l’emploi 17 % de la valeur ajoutée 27 % des exportations 22 % des importations 95 % du crédit.
Le nouveau secteur public devient le fer de lance industriel et financier : grâce au développement des contrats de plan Etat-entreprise autonomie de gestion accordée aux entreprises qui adoptent les orientations stratégiques du plan et à la loi de modernisation du secteur public (prévoyant l’élection de représentants des salariés dans les conseils d’administration) qui consacrent le rôle de modernisation de l’économie de l’État actionnaire. Le secteur bancaire et financier nationalisé contribue au développement des PME-PMI : par une politique de crédits privilégiés qui profite de la création des CODEVI (comptes pour le développement industriel) et des livrets d’épargne populaire.
Section 4 – L’accroissement des. déséquilibres impose un Section 4 – L’accroissement des déséquilibres impose un changement de politique La politique de relance a des effets relativement positifs sur la croissance et l’emploi mais détériore la situation : des finances publiques et sociales et des échanges extérieurs 1.1- La détérioration des comptes L’accélération des dépenses publiques entraîne une ↑ rapide des déficits et de l’endettement public. Du fait de la ↑ des revenus de transfert, les 1ères mesures de redressement des comptes sociaux doivent être prises dès l’automne 1981 :
Profonde dégradation des comptes extérieurs, c’est-à-dire : Assurance-chômage majoration exceptionnelle de l’IR (1 %) Contribution de solidarité des fonctionnaires pour le financement de l’UNEDIC émission d’un emprunt de 6 milliards de francs ↓ du taux et de la durée d’indemnisation Assurance-maladie relèvement des cotisations réforme hospitalière (ex. forfait hospitalier…). Profonde dégradation des comptes extérieurs, c’est-à-dire : de la balance commerciale et de la balance des paiements Parce qu’elle a été menée avec décalage par rapports aux autres pays et dans un contexte international plutôt récessif : la politique de relance de la demande intérieure favorise surtout les importations tandis que les exportations ↑ peu et contribue à relancer les économies des principaux partenaires commerciaux de la France, notamment l’Allemagne.
Conclusion La relance Mauroy aura clairement montré les limites d’une pol. de relance autonome menée par un pays de taille moyenne en éco. ouverte. Le tournant de la rigueur de 1982-1983 annonce la nouvelle politique économique contemporaine, dont les principes seront intangibles malgré les changements de gouvernements et de majorité. Annonce d’une nouvelle dévaluation du franc, le 6 juin 1982, au moment où s’achève la réunion du G7 à Versailles. Adoption d’un plan de lutte contre l’inflation, qui relègue au 2nd plan la lutte contre le chômage. La politique économique française va alors passer à la logique de la désinflation compétitive, avec 3 priorités : Stabilité du franc Réduction de l’inflation Maîtrise des déficits extérieurs et budgétaires.