Histoire de la Psychologie Scientifique Pr. Claude Bonnet Université Louis Pasteur (Strasbourg 1) Faculté de Psychologie et des Sciences de l’Education bonnet@ipb.u-strasbg.fr
Introduction I.LesOrigines historiques de la Psychologie scientifique 1.1 Les sources philosophiques 1.2 Naissance de la psychologie expérimentale en Allemagne 1.3 La psychologie scientifique en Angleterre 1.4 La psychologie scientifique en France 1.5 La psychologie scientifique aux USA II La Psychologie scientifique au XXme siècle 2.1 Etat des lieux 2.2 Le béhaviorisme 2.3 La Gestalttheorie III La Psychologie Cognitive 3.1 Contexte scientifique 3.2 Débuts du cognitivisme 3.3 Problématique du Traitement de l’Information 3.4 Cerveau et Esprit 3.5 Connexionnisme Conclusions
BIBLIOGRAPHIE BORING E.G. (1929 & 1950) A history of experimental Psychology. New York, Appleton Century. FRAISSE P. (1963) L'évolution de la Psychologie Expérimentale. In P. Fraisse & J. Piaget (Eds.) Traité de Psychologie expérimentale. Vol 1. Paris, Presses Universitaires de France. GARDNER H. (1993) Histoire de la Révolution Cognitive. Paris, Payot. GHIGLIONE R. & RICHARD J.-F. Cours de Psychologie. Paris Dunod. LE NY J.-F., GINESTE M.-D. (Eds.) (1995) La Psychologie. Paris, Larousse, coll. Textes essentiels. MARINE C., ESCRIBE C. (1998) Histoire de la Psychologie générale : du béhaviorisme au cognitivisme. Paris, In Press. NICOLAS S. (1998) Les origines de la psychologie cognitive. In J.-L. Roulin (Ed.) Psychologie Cognitive. Paris Editions Bréal. NICOLAS S. (2001) Histoire de la Psychologie. Paris, Dunod, les topos. PAICHELER G. (1992) L’invention de la Psychologie moderne. Paris, Editions L’Harmattan. PAROT F., RICHELLE M. (1992) Introduction à la Psychologie : Histoire et Méthodes. Paris, Presses Universitaires de France. VIGNAUX G. (1991) Les Sciences cognitives. Paris, Le Livre de Poche. Grand Dictionnaire de la Psychologie.(1991) Paris, Larousse. Dictionnaire fondamental de la Psychologie. (1997) Paris, Larousse. http://lpe.psycho.univ-paris5.fr/membres/nicolas/nicolas.francais.html
1.1 Les sources philosophiques
« …toutes les sciences particulières qui existent aujourd'hui sont sorties d'une double source: de la philosophie et de l'art” (Ribot, 1870) "La Science et la Philosophie sont restées longtemps confondues. Ce qui caractérise la Science, c'est l'appel à la vérification, la subordination de la théorie aux faits, l'esprit expérimental, tandis que la Philosophie se satisfait dans une cohérence logique interne et se limite progressivement aux problèmes qui ne peuvent pas être soumis au contrôle de l'expérience." (p.3). Henri Piéron (1942) Psychologie expérimentale
Galileo Galilée (1564-1642) Les bases de la démarche scientifique ont été posées par Galileo Galilei (Galilée) (1564-1642) qui fonda ses recherches sur l’observation et l’expérimentation. Il réagit ainsi contre les méthodes d’étude en vigueur et qui reposaient essentiellement sur la lecture d’Aristote (384-322 <notre ère). La méthode scientifique consiste à considérer les choses de l’extérieur: problème de l’objectivité. Les mathématiques sont l’instrument de l’établissement de lois. Les qualités de ce que nous percevons sont relatives aux sens (exemples: la couleur, le poids). Les propriétés vraies, objectives, sont le résultat de mesures. Il n’y a pas d’intention, ni de finalité dans la nature. Elle est mue par des mécanismes. Rupture entre la nature et son créateur. Question : la conception mécaniste de Galilée peut-elle s’étendre à l’homme et à l’étude de son psychisme ?
Questions philosophiques récurrentes Dualisme et Monisme La psychologie de l’âme : dualisme : Platon (428-347<JC), Aristote (384-322 <JC), René Descartes (1596-1650). L’âme rationnelle est une entité distincte du corps. Le monisme spiritualiste : Benedictus de Spinoza (1632-1677), Gottfried Leibniz (1646-1716), George Berkeley (1685-1753). Le monisme matérialiste : Démocrite (460-370 avant), Epicure (341-270 avant), Lucrèce (98-55 avant), Denis Diderot (1713-1784), Julien Offray de La Mettrie (1709-1751) . Inné et Acquis Pour Descartes la raison est innée. La psychologie des Facultés : Christian von Wolf (1679–1754) et Thomas Ried (1710-1796), Franz-Joseph Gall (1758-1828) et la phrénologie. L’empirisme anglais : John Locke (1632-1704), David Hume (1711-1776).
René Descartes (1596-1650) le débat du dualisme L'explication scientifique des phénomènes consiste à décrire les mécanismes de leur apparition et de leur déroulement. Descartes restreindra cette conception mécaniste au fonctionnement du corps humain et à celui des animaux (notion de réflexe). L'âme, source de la pensée et de la raison, échappe à la pensée mécaniste. Les animaux n'ayant pas d'âme ne sont que des machines. Discours de la Méthode (1637) N'admettre en sciences que la raison. Il veut tirer toute vérité de la méditation du moi sans recourir à aucune aide externe, ni de l'autorité, ni de la tradition, ni de l'objet d'expérience. Les idées ne sont pas révélées mais le fruit de la raison. Elles sont innées puisque d’origine divine (l’homme qui déraisonne ne peut qu’être un possédé). Le moi, c'est-à-dire l'âme, par laquelle je suis ce que je suis, est entièrement distincte du corps (dualisme). La raison est la seule chose qui nous distingue des bêtes.
Réactions au dualisme Benedictus de Spinoza (1632-1677): le mental et le physique ne sont que des aspects d’une même réalité, d’une même substance : Dieu. Il identifie Dieu à la Nature. La Nature est le tout du réel. Le spinozisme est un monisme radical: tout être participe de l'être, et du même être, qui est la Nature. Ethique (1677). Gottfried Leibniz (1646-1716) suggère que l’esprit et le corps fonctionnent en parallèle comme deux horloges synchronisées. Leur harmonie est préétablie au moment de la création par Dieu. Leibniz a vu dans le monde, non pas une machine, ainsi que le voulait Descartes, mais un tout plein de vie, avec lequel nous sommes en relation par une foule de petites perceptions. Nouveaux Essais sur l'entendement humain (1704, publiés en 1765). La machine à calculer de Leibniz (1694)
George Berkeley (1685-1753) l’immatérialisme nie la possibilité qu’existe une substance matérielle sans esprit, sans pensée. Ce que nous pensons être le corps n’est que la perception du corps. C’est une forme de monisme immatérialiste. combat l'empirisme de Locke, lequel lui paraît faire trop confiance aux vieilles théories de l'abstraction. En particulier, l'idée d'une matière existant en soi – et qui fonderait la réalité de nos perceptions – est une abstraction indémontrable. l'essence des objets consiste en ce qu'ils sont perçus. Les choses et les sensation sont connues comme idées: («être c'est être perçu»). Essay toward a New Theory of Vision (1709) Treatise Concerning the Principles of Human Knowledge (1710)
Isaac Newton (1643-1727) Continuateur de Galilée dans sa pensée mécaniste. Formation en philosophie, mathématique; découvre le calcul différentiel et intégral. Découvre la décomposition de la lumière blanche. Formule la loi de la gravitation universelle et de l’attraction entre les corps. La science est l’énoncé de lois et non la recherche de l’explication des phénomènes (positivisme).
L’empirisme anglais Thomas Hobbes (1588-1679): toute connaissance vient de l’extérieur, il n’existe pas d’idées innées. Les sens sont mis en mouvement à partir d'une excitation extérieure, mouvement transmis au cerveau et au cœur, d'où part un mouvement en sens inverse, dont le début (conatus) est la sensation. The Leviathan (1660). John Locke (1632-1704) - Essay concerning Human Understanding (1690): les idées résultent des sensations que nous éprouvons. Elles se combinent entre elles pour donner des idées plus générales, par un seul mécanisme, l'association. David Hume (1711-1776) A Treatise of Human Nature (1739) explicite les lois de l’association : - la contiguïté spatiale et temporelle - la ressemblance - la relation de cause à effet.
Essay concerning Human Understanding (1690) John Locke (1632-1704) Essay concerning Human Understanding (1690) Rejette l’innéisme des idées de Platon comme de Descartes. L’esprit est au départ une table rase. Les sens remplissent notre esprit de diverses idées. L'esprit se rendant peu à peu ces idées familières les place dans sa mémoire, et leur donne des noms. Ensuite, il vient à se représenter d'autres idées, qu'il abstrait de celles-là, et il apprend l'usage des noms généraux. L'expérience sensorielle ne suffit pas pour savoir. Il faut aussi que l'esprit agisse activement sur cette expérience. La réflexion est indispensable. Les idées complexes sont formées par l'esprit, par construction et composition, à partir des idées simples. Comme la gravitation est le mécanisme qui règle les rapports entre les corps célestes (Newton), l’association est le mécanisme qui règle les rapports entre les idées. Les différences entre les idées des gens ne viennent pas de différences entre leurs capacités à percevoir ou libérer leurs idées innées, mais de différences d'expérience.
Monisme matérialiste L’autre forme de monisme est matérialiste : il n’existe qu’une seule substance, la matière. Le matérialisme a des racines anciennes : Démocrite (460-370 <notre ère), Epicure (341-270 < notre ère) Lucrèce (98-55 < notre ère) Il resurgit au XVIIIme siècle : Denis Diderot (1713-1784) : Encyclopédie (1751) Condillac (Etienne Bonnot;1715-1780) :Traité des sensations (1754) LaMettrie (Julian Offray de 1709-1751) L'homme-machine (1748) : l’âme a une étendue, elle est matérielle De nos jours Jean-Pierre Changeux : L’homme neuronal (1987)
Racines philosophiques de la psychologie scientifique La conception Galiléenne s’est progressivement imposée dans toutes les sciences. Sciences (dites) exactes comme la physique, l’astronomie, puis les sciences naturelles comme la biologie, la botanique et… la psychologie. Galilée (1564-1642) en Italie, Francis Bacon (1561-1626) en Angleterre, René Descartes (1596-1650) en France, autant de noms qui marquent l'avènement d'une nouvelle façon de connaître combinant le travail expérimental et la conceptualisation mathématique. Emmanuel Kant (1724-1804) déniait à la psychologie la possibilité de devenir scientifique: elle ne peut donner lieu à des formulations mathématiques ni à des expérimentations. Critique de la raison pure (1782)
1.2 Naissance de la psychologie expérimentale en Allemagne
Psychologie scientifique en Allemagne J.F. Herbart (1776-1841) – La Psychologie comme science fondée sur l’expérience, la métaphysique et les mathématiques (1824)- oppose à Kant que les phénomènes mentaux ne sont pas unidimensionnels; ils ne varient pas que selon le temps, mais aussi en intensité et en qualité. Fechner démontre que les phénomènes mentaux peuvent être systématiquement manipulés par l’expérimentation. Lire Théodule Ribot (1875) La psychologie allemande contemporaine Herman von Helmholtz (1821-1894) : Handbuch der physiologischen Optik (1856-1866) partage avec Müller la théorie de l‘énergie spécifique des nerfs. Pour lui, la perception est active, et implique des processus d‘inférence inconsciente.
Herman von Helmholtz (1821-1894) Puisque la vitesse de propagation des influx dans les nerfs est finie et mesurable, la pensée ne peut pas être instantanée (contre Kant). L’individu construit sa connaissance de l’espace comme le montrent les expériences de distorsion prismatique. L’espace n’est donc pas inné (contre Kant). La perception implique l’appel (inférences inconscientes) à des connaissances antérieures pour interpréter les données de nos sens.
Pour expérimenter en psychologie il faut mettre au point des méthodes
La Psychophysique Le fondateur Gustav Theodor Fechner (1801-1887) : Les précurseurs : Pierre Bouguer (1698-1758) : 1729 "Essai d'optique sur la gradation de la lumière“. Charles-Edouard Delezenne (1776-1866) : discrimination des fréquences sonores. Ernst-Heinrich Weber (1795-1888) : discrimination de poids, loi de Weber. Le fondateur Gustav Theodor Fechner (1801-1887) : Éléments de psychophysique (1860). Distingue la psychophysique interne qui a pour objet l'étude des rapports de l'âme avec le corps c'est-à-dire les rapports des phénomènes psychologiques avec les phénomènes physiologiques et la psychophysique externe a pour objet l'étude des rapports de l'âme avec le monde physique, c'est-à-dire les rapports des phénomènes psychologiques avec les phénomènes physiques.
Fechner et la psychophysique La psychophysique externe est devenue la science de la mesure des sensations, celle des rapports entre l'âme et le corps. Dans ce domaine Fechner a reconnu en Weber son principal précurseur. Formule la loi selon laquelle la sensation croit comme le logarithme de l’intensité stimulatrice qui fait du rapport de Weber l’unité de la sensation. Formule et codifie les principales méthodes de mesure des seuils encore utilisées de nos jours. Voir Nicolas, S. (2001). Gustav Theodor Fechner (1801-1887) et les précurseurs français de la psychophysique : Pierre Bouguer (1729) et Charles Delezenne (1828). Psychologie et Histoire, Vol. 2, pp. 86-130. (http://lpe.psycho.univ-paris5.fr/membres/nicolas/nicolas.francais.html)
La méthode soustractive F.C. Donders (1818-1889) Donders, F. C. , hollandais -(1868). On the speed of mental processes. Traduit par W. G. Koster, 1969. Acta Psychologica 30: 412-431 – propose une conception séquentielle du fonctionnement mental. Chronoscope de Hipp La méthode soustractive S → détection → décision→ TRC = 285 ms S → détection → TRS (détection) = 197 ms Durée de l’étape de décision 88 ms
Temps de Réaction En 1796, l’astronome britannique, Nevil Maskelyne chasse son assistant, J. Kinnebrook qui trouvait systématiquement des temps de passage des planètes dans le réticule plus longs que lui. En 1806, Friedrich Bessel démontre des différences systématiques entre astronomes : l’équation personnelle. En 1850, Helmholtz mesure la vitesse de conduction des nerfs et montre qu’elle n’est pas celle de la lumière. En 1860, Donders s’attaque à la question de la mesure de la vitesse de la pensée. Wilhem Wundt s’inspirera des travaux de Donders. J.McK Cattell (1886) The time taken up for cerebral operations Mind, 11, 220-242.
Hermann Ebbinghaus (1850-1909) Über das Gedächtnis (1885) Sur la mémoire http://psychclassics.yorku.ca/Ebbinghaus/ Met au point une méthode d’étude de l’oubli en utilisant des syllabes sans signification. Premier temps : apprentissage d’une liste de syllabes jusqu’à rappel parfait, mesure du temps (Ti). Deuxième temps : délai. Troisième temps : mesure du temps de réapprentissage jusqu’à rappel parfait (Tr). L’économie est mesurée par: (Ti – Tr)/Ti
Wilhelm Wundt (1832-1920) Assistant d‘Helmholtz, il créé le premier laboratoire de Psychologie expérimentale (1879) à Leipzig. Les phénomènes mentaux sont objet de science (naturelle). La méthode expérimentale s‘inspire de celle des sciences naturelles et cherche à isoler et à mesurer les composants des phénomènes complexes, les processus. A côté de l‘introspection utilise le temps de réaction. Les théories de Wundt sont imprégnées d‘associationisme. Ce laboratoire sera un lieu de formation de nombreux psychologues : Cattell, Titchener, Spearman, Külpe, G. Stanley Hall. Wilhelm Wundt Psychologie de la conscience
A la fin du XIXme siècle la psychologie devient scientifique en utilisant la méthode expérimentale et en se séparant ainsi de la philosophie. Elle commence à essaimer dans le monde. La Psychologie scientifique n’est pas l’œuvre d’un seul homme, mais de toute une génération. Aucune science ne se résume à l’œuvre d’un seul homme. Ses méthodes sont diverses. Suscite des résistances à considérer les phénomènes psychiques de l’extérieur (ex. Ecole de Wurtzbourg avec Külpe). Les fondateurs de la psychologie scientifique avaient tous une formation multiple : philosophie, physiologie, mathématique etc. L’objet de la psychologie a évolué : l’âme pour Aristote (384-322 avant): âme végétative, âme sensitive, âme raisonnable, les facultés pour Christian von Wolf (1679–1754) et Thomas Ried (1710-1796), une Psychologie réflexive pour Emmanuel Kant (1724-1804) et enfin une Psychologie de la conscience pour Wilhelm Wundt (1832-1920).
Travaux sur la Perception De nombreux auteurs ont étudié la perception dont les phénomènes ont préoccupé aussi bien les physiciens, que les philosophes. Galilée considère la couleur comme une sensation et non comme une propriété des objets. Descartes et Newton font des travaux d’optique. Berkeley présente la première théorie de la perception de la profondeur. Le rôle des sensations et des perceptions à l’origine des idées est mis en avant chez Locke, Leibniz, Condillac… Un certain nombre de physiciens seront les précurseurs de la psychophysique de la vision. Helmholtz.
1.3 Psychologie scientifique en Angleterre Psychologie comparée homme – animal Charles Darwin (1809-1882), The origin of species (1863):introduit l’idée d’évolution (les espèces ne sont plus fixes) et de continuité phylogénétique entre espèces y compris l’homme. George John Romanes (1848-1894) Animal Intelligence (1892) voit dans l’intelligence animale toutes les composantes de l’intelligence humaine. Conway Lloyd Morgan Introduction to comparative Psychology (1894) recommande de toujours recourir à l’explication la plus simple (non anthropomorphique) pour expliquer les actions des animaux.
Débuts de la psychologie corrélationnelle Francis Galton (1822- 1911), cousin de Darwin, qui s'intéressant à l'hérédité du génie instaura l'usage des statistiques en psychologie. Il cherchait, en s'appuyant sur les idées darwiniennes d'évolution, à corréler divers indices anthropométriques (par ex. volume du cerveau) avec l'intelligence. Défend un point de vue innéiste et prônera l’eugénisme. Charles Spearman (1863-1945) fait sa thèse avec Wundt (1897). Il développe une théorie psychologique qui utilise comme moyen de démonstration des outils statistiques portant sur des corrélations entre épreuves (physiques, mentales, physiologiques, anthropométriques etc.) Le premier professeur de psychologie expérimentale, Bartlett sera nommé en 1931 à l'université de Cambridge
1.4 Psychologie scientifique en France Théodule Ribot (1839-1916). En 1889, le Collège de France (fondé en 1530 par François 1er) créa pour lui une chaire de Psychologie expérimentale et comparée. La notion de comparée fait référence à la psychopathologie. "La psychologie dont il s'agit ici sera donc purement expérimentale : elle n'aura pour objet que les phénomènes, leurs lois et leurs causes immédiates." La Psychologie anglaise contemporaine (1870) La Psychologie allemande contemporaine (1875) Les maladies de la mémoire (1881) L’influence du matérialisme de La Mettrie s’exerça sur de nombreux chercheurs dont Cabanis (1757-1808) qui eut un rôle particulier dans le développement de la psychiatrie en France. En 1802, Rapports du physique et du moral chez l’homme, il écrivait « pour avoir une idée précise des opérations dont résulte la pensée, il est nécessaire de considérer le cerveau comme un organe spécial conçu spécialement pour la produire, comme l’estomac et les intestins son conçus pour réaliser la digestion, le foie pour filtrer la bile… » Cependant le dualisme cartésien va freiner le développement de la psychologie scientifique en France.
Pierre Janet (1859-1947) succède à Ribot au Collège de France en 1902 : L’Automatisme psychologique (1889) Henri Beaunis (1830-1921) en 1889 fonde le premier laboratoire de psychologie physiologique rattaché à l’EPHE ; Benjamin Bourdon (1860-1943), élève de Wundt, fonde le sien à Rennes en 1896 et Foucault (1865-1947) à Montpellier. Alfred Binet (1857-1911) succéda à Beaunis en 1895 à la tête du laboratoire et créa la même année L’année Psychologique. . Henri Piéron (1881-1964) reprend en 1912 la direction du laboratoire de Binet. Piéron dirigea le Laboratoire de Psychologie expérimentale jusqu'en 1952, date à laquelle il en confia la direction à Paul Fraisse.
1.5 Psychologie scientifique aux Etats-Unis William James (1842-1910) avait passé un an et demi en Allemagne : Principles of Psychology (1890) Il n'a jamais expérimenté lui-même, mais ses étudiants à l'Université d'Harvard figurent parmi les grands noms de la psychologie expérimentale américaine: Stanley Hall (1844-1924) qui étudia auprès de Wundt à Leipzig, Edward Lee Thorndike (1874- 1949) spécialiste de psychologie animale, James Dewey (1859-1952) et Robert S. Woodworth (1869-1962). Le premier laboratoire de psychologie expérimentale américain sera créé par Stanley Hall en 1883 à l'Université John Hopkins de Baltimore. En 1892, on compte déjà 17 laboratoires de psychologie aux USA
Fonctionnalisme et Structuralisme James orienta la psychologie américaine vers le fonctionnalisme, théorie qui définit les entités psychologiques par la fonction adaptative qu'elles exercent. Pour James, les états de conscience sont des activités de l'organisme dont la fonction est de permettre son adaptation à l'environnement. Dans la conduite d’un individu l’unité fondamentale est la fonction, l’acte adapté et non la sensation, ou la réaction. La notion d’adaptation est centrale dans leur conception, notion fondée sur les théories évolutionnistes de Herbert Spenser (1820-1903) et de Darwin (continuité animal-homme). La tradition passe par Galton. Titchener (1867-1927) anglais d’origine, défendra une approche structuraliste, il pratiqua l’introspection expérimentale analytique visant à découvrir et à cataloguer les sensations les plus élémentaires. Trois classes de processus élémentaires ont été distingués : sensations, images et affects. Il s'agit là d'une position dans la tradition de Wundt qui vise à établir des lois générales de l'esprit rendant compte de l'organisation des éléments mentaux entre eux. La position de Thurstone relève aussi de ce structuralisme. Il se situe dans la tradition de l'associationnisme.
Fonctionnalisme et Structuralisme Lange (chez Wundt), avait montré que le temps de réaction pouvait varier selon l'attitude du sujet: avec une attitude motrice, il est plus rapide qu'avec une attitude sensorielle. L'américain Baldwin doutait de cette loi et surtout que le résultat résulte d'une différence d'attitude chez les mêmes sujets. Il pensait qu'il existait des types de sujets (sensoriels vs moteurs), des différences individuelles (fonctionnalisme). Hypothèse contre laquelle s'éleva Titchener. Le structuralisme suppose que l'esprit résulte de la combinaison d'éléments qui se combinent entre eux. La position de Thurstone (psychologie corrélationnelle américaine) relève aussi de ce structuralisme. Il se situe dans la tradition de l'associationnisme.
Résumé Chronologie Galilée (1564-1642) Descartes (1637) Diderot (1751) LaMettrie (1748) Condillac (1754) Broca (1861) Ribot (1870-75) Janet (1889) Binet (1894) Hobbes (1660) Locke (1690) Newton (1704) Berkeley (1710) Hume (1739) Darwin (1863) Galton (1865) Leibniz (1704) Kant (1782) Herbart (1824) Helmholtz (1856) Fechner (1860) Wundt (1879) Spinoza (1677) Donders (1868) James (1890)