Michel de Montaigne IVème partie
Une morale qui naît peut-être d’une grande lassitude de l’être devant les horreurs de la guerre, la barbarie, l’impossibilité d’arrêter les massacres, la faiblesse de l’homme devant la stupidité des hommes. Comme un retrait hors du temps et du monde pour mieux observer et le temps et le monde. Notre morale se fonde sur notre sensibilité. Guerres de religion : source de morale ?
« Je vy en une saison en laquelle nous abondons en exemples incroyables de ce vice, par la licence de noz guerres civiles : et ne voit on rien aux histoires anciennes, de plus extreme, que ce que nous en essayons tous les jours. Mais cela ne m'y a nullement apprivoisé. »
« A peine me pouvoy−je persuader, avant que je l'eusse veu, qu'il se fust trouvé des ames si farouches, qui pour le seul plaisir du meurtre, le voulussent commettre ; hacher et destrancher les membres d'autruy ; aiguiser leur esprit à inventer des tourmens inusitez, et des morts nouvelles, sans inimitié, sans proufit, »
« et pour cette seule fin, de jouïr du plaisant spectacle, des gestes, et mouvemens pitoyables, des gemissemens, et voix lamentables, d'un homme mourant en angoisse. Car voyla l'extreme poinct, où la cruauté puisse atteindre. » Essais II,11
C’est cette même image de corps coupé en deux que Me Badinter avait utilisée pour convaincre de l’horreur de la peine de mort. C’est elle qui effraie Montaigne, qui semble l’arrêter pour écrire et l’enjoindre de réfléchir au sens de la vie, de la morale. Mais c’est encore elle qui peut convaincre Machiavel de la valeur d’un prince. « L’attaquer, le mettre en quartiers…. »