Sémiologie des troubles de la mémoire Dr Mamadou Habib THIAM Professeur Titulaire
Introduction La mémoire permet l’ordonnancement du comportement intellectuel d’un individu en fonction d’une expérience antérieurement vécue. Elle est le fait de mémorer, de conserver et de remémorer des informations.
Introduction De nombreux processus cognitifs permettent ces différentes étapes : processus d’intégration, d’engrammation (mémoriser), processus de stockage (conserver), processus de remémoration (restituer).
Introduction La pathologie de la mémoire comprend : les amnésies, les libérations mnésiques les paramnésies.
Amnésies L’amnésie est une difficulté, voire une impossibilité pour un sujet d’acquérir (mémorisation), de conserver (stockage), et ou d’utiliser (rappel) des expériences ou des événements constituant des informations.
Amnésies L’amnésie est dite : d’évocation quand le rappel des souvenirs antérieurement fixés est impossible ; systématique lorsqu’elle concerne un groupe d’idées ; localisée ou lacunaire lorsqu’elle se rapporte à une période de temps donnée ; parcellaire quand elle apporte sur des faits fragmentaires très localisés.
De nombreuses formes cliniques d’amnésie peuvent être distinguées :
Amnésie antérograde (de fixation) Elle est appelée aussi amnésie de mémoration ou d’intégration. C’est une incapacité à fixer de nouveaux souvenirs avec conservation des informations anciennes.
Amnésie antérograde (de fixation) A partir d’une certaine date (la survenue des troubles mnésiques), aucun souvenir ou aucune information ne peut plus se fixer. Cette amnésie contraste avec la conservation du capital mnésique ancien.
Amnésie antérograde (de fixation) L’exemple clinique le plus caractéristique de cette amnésie antérograde est représenté par le syndrome de Korsakoff. Dans ce cas sont associés à l’amnésie de fixation : des fabulations, des fausses reconnaissances, une anosognosie (méconnaissance de ses propres troubles), une désorientation temporo-spatiale, parfois des symptômes de confusion mentale et des signes neurologiques polynévritiques, en particulier au niveau des membres inférieurs.
Amnésie antérograde (de fixation) Un autre type d’amnésie antérograde est constitué par l’ictus amnésique : c’est une installation brutale des troubles mnésiques pour une durée de quelques minutes à quelques heures, chez des sujets âgés de plus de 50 ans.
Amnésie antérograde (de fixation) Elle est caractérisée par une amnésie antérograde, une mémoire immédiate conservée, ne s’accompagnant pas d’autres atteintes neurologiques et disparaissant sans laisser aucun déficit. L’accès est souvent unique.
Amnésie antérograde (de fixation) L’amnésie de fixation peut s’observer aussi dans le syndrome démentiel, en particulier la forme appelée presbyophrénie qui associe : une détérioration intellectuelle, une fabulation et une désorientation temporospatiale.
Amnésie rétrograde (d’évocation) C’est une impossibilité de restituer un souvenir qui a été normalement fixé. Elle est rarement isolée, souvent associer à une amnésie antérograde. Le malade ne peut plus faire un récit de son passé. Le passé lointain est mieux conservé (loi de Ribot : les faits les plus anciens sont les plus longtemps conservés).
Amnésie antérorétrograde C’est la plus fréquente, porte à la fois sur les souvenirs nouveaux et les souvenirs anciens. Elle se traduit par : une désorientation de plus en plus intense, de fausses reconnaissances, des erreurs de dates, le rabâchage du passé, des réminiscences, parfois des souvenirs exacts mais non situés à leur date dans le passé, les fabulations sont rares, la sémiologie est surtout déficitaire.
Amnésie élective Elle porte sur un secteur particulier des souvenirs : Elle peut être simple : oubli d’un nom, de titres de romans ou de films, d’un numéro de téléphone, etc. Elle peut être complexe : concernant les souvenirs liés à une période déterminée, caractérisée par un trou dans le récit du passé.
Amnésie élective Il existe des formes particulières : amnésie de l’enfance, amnésie lacunaire du syndrome de conversion. Ces amnésies électives en raison d’un oubli sous-tendu par un mécanisme dynamique psychopathologique sont classées dans une catégorie dite d’amnésie psychogène.
Amnésie élective Proximité sémiologique avec l’amnésie périodique qui se manifeste sous forme : d’états seconds (troubles de la vigilance caractérisés par une réduction du champ de conscience avec obnubilation légère et comportements inhabituels),
Amnésie élective Proximité sémiologique avec l’amnésie périodique qui se manifeste sous forme : d’états crépusculaires (obnubilation générale plus ou moins accentuée, avec désorientation et défaut de suite dans les idées, entrecoupée par de courtes phases de lucidité relative),
Amnésie élective Proximité sémiologique avec l’amnésie périodique qui se manifeste sous forme : de transes (états modifiés de conscience, se traduisant par une baisse de la sensibilité aux stimuli et une perte de contact transitoire et plus ou moins totale avec le monde extérieur, accompagnées de comportements automatiques, d’exaltation ou d’euphorie),
Amnésie élective Proximité sémiologique avec l’amnésie périodique qui se manifeste sous forme : d’accès somnambuliques (activités physiques plus ou moins coordonnées pendant le sommeil) alternant avec la personnalité vigile du sujet. Le patient ne garde aucun souvenir de l’état second.
Amnésie élective Une autre amnésie, dite psychogène, est l’amnésie post-traumatique. Elle se rencontre chez les sujets victimes d’un choc émotionnel violent d’ordre : physique (une maladie grave, catastrophe naturelle, agression sexuelle) ou psychique (guerre : névrose de guerre, deuil, séparation). L’amnésie porte sur l’événement traumatisant.
Amnésie lacunaire C’est un oubli portant sur une portion limitée du passé. Les souvenirs anciens et récents sont normaux. La lacune mnésique se présente comme si une époque déterminée n’avait pas été vécue par le patient.
Amnésie lacunaire On distingue deux types d’amnésies lacunaires : dans le premier type, le malade définit parfaitement le commencement et la fin de la période lacunaire, les bords en sont nets ; dans le deuxième, les bords sont flous en raison d’un état d’obnubilation à l’origine d’un souvenir vague.
Amnésie retardée postconfusionnelle Elle es appelée aussi « amnésie de Maxwell » C’est un tableau clinique d’accroissement d’une amnésie contrastant avec l’amélioration psychique d’un patient ayant présenté un syndrome confusionnel.
Amnésie retardée postconfusionnelle Il s’agit de patients qui conservent, dans la suite immédiate de leur période confusionnelle, la mémoire des faits et de leur état mais qui perdent dans les jours qui suivent ces souvenirs. Il ne reste que la lacune amnésique banale postconfusionnelle.
Libérations mnésiques Ecmnésie ou hallucination du passé Hypermnésie Vision panoramique de l’existence Dreamy state Capacités mnésiques prodigieuses
Ecmnésie ou hallucination du passé C’est une réminiscence intense d’une situation passée avec les propos et les gestes correspondants. Les souvenirs anciens sont convertis en expérience vécue. Le passé est vécu comme présent.
Ecmnésie ou hallucination du passé Cette reviviscence des souvenirs anciens est souvent mal critiquée par le patient qui admet la transposition et adapte son activité à la situation de ce passé qu’il éprouve. Parfois le patient se croit redevenu enfant, adopte le langage et les attitudes de cet âge.
Ecmnésie ou hallucination du passé Il ne s’agit pas d’un «simple délire de la mémoire» mais d’une véritable ecbiose, c’est-à-dire la reviviscence d’un état vital global du passé. Pris en eux-mêmes, ces souvenirs sont exacts mais ils sont mal localisés dans le temps ou dans l’espace.
Hypermnésie C’est l’exaltation incoercible des souvenirs avec réactualisation d’évènements passés.
Vision panoramique de l’existence C’est une réminiscence rapide d’évènements importants de la vie, comme un scénario défilant à grande vitesse.
Dreamy state Le dreamy state est un état proche de la vision panoramique de l’existence, décrit chez des sujets épileptiques. Il se traduit par un état oniroïde paroxystique comportant une certaine obnubilation avec impression d’étrangeté, de bizarre, de déjà vu, de non réel.
Dreamy state Sont associés aussi une désorientation temporo-spatiale, des phénomènes hallucinatoires visuels plutôt fragmentaires et panoramiques. Apparaissent des afflux brusques de souvenirs anciens allant jusqu'à l’ecmnésie paroxystique.
Capacités mnésiques prodigieuses Elles sont décrites dans certaines formes d’autisme. Il s’agit d’une hypertrophie sélective de la mémoire des chiffres, des dates, des noms propres, etc.
Paramnésies Les paramnésies sont des productions imaginaires plus ou moins riches, prises pour des souvenirs. Ce sont des falsifications de la mémoire où le présent est pris pour le passé (contrairement à l’ecmnésie). Fausses reconnaissances Fabulation Illusions des sosies ou syndrome de Capgras Illusion de Fregoli Négation des souvenirs et illusion du jamais vu
Fausses reconnaissances C’est une identification erronée de personnes ou de lieux : Le patient croit avoir été déjà en présence de telle situation, de telle personne (déjà vu, déjà vécu) ou n’avoir jamais été en présence d’eux (jamais vu).
Fausses reconnaissances Le patient identifie la personne qu’il voit avec des êtres déjà connus familiers ou non, chers ou détestés. Les faux reconnus sont souvent identifiés à des personnages fréquentés dans la jeunesse et incorporés comme des acteurs supposés du délire.
Fabulation C’est la création de récits imaginaires et fantaisistes riches avec des détails très circonstanciés, mobiles et changeants d’un jour à l’autre et compensateurs du déficit mnésique. Cette fabulation est souvent provoquée et dirigée par l’interrogatoire (suggestibilité). Elle est parfois appelée délire d’imagination ou délire de mémoire.
Fabulation Cette production imaginaire est racontée par son auteur comme s’il s’agissait de faits exacts qu’il aurait vécus. Cette tendance à réinventer est souvent peu convaincante car le patient ne cherche pas à persuader ses interlocuteurs mais tente de pallier sa perte de mémoire par des souvenirs fictifs.
Illusions des sosies ou syndrome de Capgras C’est un trouble l’identification des personnes familières se manifestant par une négation de leur identité et la croyance délirante qu’elles ont été remplacées par un double.
Illusion de Fregoli Dans l’illusion de Fregoli, le patient croit voir la même personne sous divers déguisements.
Négation des souvenirs et illusion du jamais vu C’est la négation des souvenirs est le négativisme mnésique. Le sujet nie l’existence d’un souvenir. L’illusion du jamais vu s’oppose à la fausse réminiscence ou illusion du déjà vu. Elle consiste en une conviction d’un état nouveau qui a en réalité été antérieurement qu’une « répétition ». Il existe une proximité sémiologique entre l’illusion du jamais vu et le négativisme mnésique, car dans les deux cas le malade nie l’existence du souvenir.
FIN