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Les diapositives changent au clic de la souris

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Présentation au sujet: "Les diapositives changent au clic de la souris"— Transcription de la présentation:

1 Les diapositives changent au clic de la souris
Daniel Villaperla vous présente les Poèmes dis lors des tournois de bridge des « ANGES » 3/12 au 21/12/2006 Attendez que la musique de Mozart démarre et prenez le temps d’apprécier les textes poétiques que vous aimez dans cette sélection… Les diapositives changent au clic de la souris

2 Je t’aime comme une rivière de soleils Tu m’as faite en reflets d’arc-en-ciel Sertie dans tes pensées je prends confiance J’aborde alors la vie comme on soulève un voile Je t’aime plus que mes volières d’étoiles Plus que la fièvre et l’orage de l’enfance Plus que la raison et que l’hérésie Je t’aime et j’ai peur des mots dits Puisque tu m’as couverte de tes bras Puisque tu m’as volé mon âme Et mes prairies et mes vergers Tu m’épines comme un rosier Et tu me fais mal comme un vin amer Tes doux murmures d’or se fondent en fer Tu me déchires et m’enchevêtres Tu me brisures tout mon être Tu froisses mes ailes de soie Tissées d’ardeur et puis d’effroi Je te rends tes baisers comme des salves Et ta voix m’ensevelit dans ses sables J’ai si peur de ton pouvoir sur mes pleurs Mon paradis tremble. Que fais-tu de mon coeur ? Laureline Amanieux

3 Le mini-paradis terrestre Hubert Mordrain
Tout au fond de mon jardin Se dressent quelques sapins, Qui dominent le paysage vallonné, De ma si jolie Franche-Comté. C' est un endroit accueillant, Ou l' on oublie le temps, L' été, c' est assez chaud et ombragé, L' hiver, le climat y est rude et glacé. Bien planqué en haut de mon perchoir, J' aperçois parfois au loin, sangliers et brocards, Qui galopent à travers champs en direction des bois, Pour échapper à notre civilisation et ses ignobles lois. Dans le ciel bleu et désert, Des tourterelles passent dans les airs, Rejoignant ainsi leur nid douillet, Perché tout en haut d' une futaie. Ici, rien ni personne ne me dérange, Il y règne un calme et une douceur étrange, Un sorte de qualité de vie, Qui n' existe pas, c'est sûr, à Paris. En voyant ces quelques merveilles de la nature, Je souhaite que jamais elles ne disparaissent dans le futur... Une fois encore, je dois quitter mon mini paradis, Mais j' y reviendrai très bientôt, c' est promis. Le mini-paradis terrestre Hubert Mordrain

4 Mon bel automne Marie Sambre De toutes les saisons qui sculptent la nature, Chacune, à sa façon, impose son allure, Sa luminosité et son tempérament, Inséparables sœurs, silhouettes du temps. Mais de l'automne seul, les charmes me fascinent, Dans l'ocre de ses yeux, je plonge et m'enracine. Je pose, avec douceur, à ses pieds flamboyants Les chaudes rêveries de mon corps rayonnant. Dans ma main, quelques feuilles aux nervures abîmées, Par des passants absents aux foulées assassines, S'éparpillent tranquilles en bouquets sublimés. Dans la chaleur feutrée des forêts clandestines, Je pénètre en mon fort comme une eau dans sa source, Puiser, à l'intérieur, de nouvelles ressources.

5 Morine Je t'ai rêvé une autre terre Un nouveau souffle, un nouvel air L'envie d'un espace infini Où le temps ne s'utilise qu'à la vie Un pays où la montagne plonge en mer Je t'ai rêvé ce désert que je nomme vert Et où le vent caresse la lande au soir venu Les teintes y sont moirées, le plaisir absolu Je guiderais tes pas vers des endroits interdis Près des cascades où les elfes jouent et rient Des nymphes et des naïades qui s'y baignent Spectacle que les biches assoiffées dédaignent Et ta main dans la mienne, spectateurs assidus Nous veillerons jusqu'à l'aube ces moments défendus… Je t'ai rêvé une autre terre Un nouveau souffle, un nouvel air L'envie d'un espace infini Où le temps ne s'utilise qu'à la vie Et ta main dans la mienne, voyageurs assidus Nous veillerons jusqu'à l'aube ces moments défendus…

6 Un rêve Leïla Zhour

7 Un rêve Leïla Zhour J'ai rêvé que j'étais un cheval Enfant de feu et de lumière sous une robe noire Mustang au fil des vents et des espaces sous la bannière des horizons J'ai rêvé que j'étais un cheval Seigneur ancien surgi de roches brutes Les crins écrus et drus gorgés de forêts blanches, de steppes Petit mongol tenace, obstiné J'ai rêvé, cheval J'étais insatiable d'air et de lumière Je courais jusqu'à des seuils infinis Jusqu'à tomber ivre Et fou, fou d'être, seulement J'allais à la rencontre d'une ultime porte Arche oubliée des ruines de la peur Et moi, pauvre fol mais fier, oh si fier encore Sous un portique de ciel pur J'ai vu la mort m'attendre à bras ouverts Son regard sans haine épousait mon pas Caressait mon souffle Se faisait main douce sur mon dos J'ai vu la mort ainsi et j'étais cheval J'étais le poney fugitif et insouciant des seuils J'ai rêvé de steppes mongoles J'ai rêvé de plaines américaines J'ai rêvé de déserts africains J'ai rêvé tous les lieux infinis où dissoudre ma propre fin J'étais cheval Et plus loin encore J'étais seule, immense et minuscule Flocon des steppes Fleur de prairie Grain d'or livré au vent J'étais l'inégalable cheval rupestre Ou bien mustang aux larges taches d'éternité Et tout m'était écrin Tout était cette immensité en moi Interminable chevelure de monde flottante sur mon col J'étais cheval Robuste et libre J'étais sans fin, sans peine Cheval-oiseau saoulé de vent Cheval-serpent ivre de terre Seule et multiple D'hier et d'aujourd'hui J'étais l'ocre et le bleu La terre et l'eau J'ai fait un rêve fou où j'étais cheval J'avais rejoint l'inaccessible Traversé les remparts du devenir Dépassé l'immuable aussi J'étais moi, immortelle aux couleurs de roche Gravée à même l'âme du monde Mais fluide, étirée sans limite jusqu'aux ailleurs les plus lointains Et libre Libre à jamais

8 Parfois Franz Seguin Parfois la vie s'envole de nos lèvres comme des oiseaux de mer alors la fleur reste vide et nous sentons les mains du passé nous étreindre comme des enfants heureux qui ne reviendront plus. Et nous buvons le café amer des années pour rallumer une présence au fond du coeur pour que renaissent ceux qui sont partis ceux qui nous ont laissé là perdus dans l'outre-vie Et le ciel qui était nôtre reste désert les portes des jours se referment contre nos amours inutiles gisantes sous les pierres La fête lentement s'en est allée danser plus loin et nous parcourons les forêts du souvenir sur le sable froid des sentiers non-retour sentiers de nos pauvres enfances de passage Il poudre partout sur des dalles aussi vaines que les larmes aussi mortes que les tendres étreintes de ceux que nous avons déjà tenus dans nos mains un jour

9 Sonnet à Marie Alfred de Musset Ainsi, quand la fleur printanière Dans les bois va s'épanouir, Au premier souffle de zéphyr Elle sourit avec mystère; et sa tige fraîche et légère, sentant son calice s'ouvrir, Jusque dans le sein de la terre Frémit de joie et de désir. Ainsi, quand ma douce Marie Entrouve sa lèvre chérie, Et lève, en chantant, ses yeux bleus, Dans l'harmonie et la lumière Son âme semble toute entière Monter en tremblant vers les Cieux.

10 La Naissance d'Aphrodite José Maria de Hérédia
Farouches, ignorants des rires et des jeux, Les Immortels siégeaient sur l'Olympe neigeux. Mais le ciel fit pleuvoir la virile rosée ; L'Océan s'entr'ouvrit, et dans sa nudité Radieuse, émergeant de l'écume embrasée, Dans le sang d'Ouranos fleurit Aphrodité. Avant tout, le Chaos enveloppait les mondes Où roulaient sans mesure et l'Espace et le Temps ; Puis Gaia, favorable à ses fils les Titans, Leur prêta son grand sein aux mamelles fécondes. Ils tombèrent. Le Styx les couvrit de ses ondes. Et jamais, sous l'éther foudroyé, le Printemps N'avait fait resplendir les soleils éclatants, Ni l'Eté généreux mûri les moissons blondes.

11 Rêverie Elisa Mercoeur Qu'importe qu'en un jour on dépense une vie Si l'on doit en aimant épuiser tout son coeur, Et doucement penché sur la coupe remplie Si l'on doit goûter le nectar du bonheur. Est il besoin toujours qu'on achève l'année? Le souffle d'aujourd'hui flétrit la fleur d'hier; Je ne veux pas de rose inodore et fanée; C'est assez d'un printemps, je ne veux pas d'hiver. Une heure vaut un siècle alors qu'elle est passée; Mais l'ombre n'est jamais une soeur du matin Je veux me reposer avant d'être lassée; Je ne veux qu'essayer quelques pas du chemin.

12 La vie Chiccagioia La vie une petite fleur une corolle légère remuée par le vent qui ne parle pas ne sonne pas et fait silence mais dont le parfum se répand dans l'air don inattendu pour celui qui passe ainsi va la vie qui t'accorde un petit cadeau non demandé

13 L'étalon Leïla Zhour

14 L'étalon Leïla Zhour Je suis né sur cette terre de parents importés
L'étalon Leïla Zhour Je suis né sur cette terre de parents importés. Ma tête est blanche et noire Et toute ma robe porte ces larges taches de neige et de basalte. Je suis né dans une plaine immense et verte Où coulait en chantant une rivière ardente, froide Qui parfumait l'air de douceur et de promesse. Dans les graminées hautes qui chatouillaient mes jambes, J'ai appris les brumes claires où percent au loin des sommets, J'ai appris la transhumance des chevaux libérés de l'homme. J'ai su les plages de graves qui bordaient les gués, J'ai su le goût poivré des herbes courtes dans les marches de l'Ouest, J'ai su la fadeur jaune des horizons brûlés de l'été finissant Et j'ai porté en moi ces libres espaces où j'étais roi, Sans craindre rien. Puis des hommes sont venus tourner autour de mon troupeau. Ils ont poussé mes pairs dans une passe sans issue Et ils ont fait surgir des cordes qui ont serré nos encolures Et nous avons appris à nous soumettre pour ne plus souffrir, Pour ne plus sentir la brûlure du lasso et de la peur, Pour apaiser nos souffles rauques et nos coeurs tremblants. Alors ce furent des fers pour nos sabots et des lanières sur nos bouches Et une sangle à nos aisselles pour ceux qui volaient notre course. Nous eûmes des frères et des amours dans les corrals qui nous piégeaient Et plus jamais nous ne connûmes l'errance sans but dans la nuit claire. Ce furent aussi les chants des hommes et leurs caresses, Ce furent les mots si doux qu'ils murmurèrent à mon oreille Pour me faire oublier ma joie perdue et l'entrave à mon galop. Et j'ai sillonné ce pays qui n'était plus ma terre ! Et j'ai convoyé avec les miens d'immenses troupeaux mugissants ! J'ai porté sur mon dos un homme qui était bon etjuste, Mais qui pesait sur mes épaules de toute la liberté qu'il me volait. Une nuit cependant elle me revint. Au long de mes flancs pie, les vents glacés Descendus en bouillonnant des hauteurs inviolées, M'ont prêté leur puissance, leur plénitude. Les barres de l'enclos sont redevenues paille, Herbe sauvage où il fait bon courir. Ai-je bondi au secret de la nuit, Illuminé dans la splendeur de mon essence révélée ? Ai-je couru vers l'Ouest où la lumière s'estompe Comme vers un phare planté en terre de promesses ? Moi seul sais encore aujourd'hui l'éblouissante joie qui m'a saisi. Pourtant il m'apparaît aussi que j'avais été libre parmi mes pairs, Et je suis seul et libre encore mais mes frères sont restés. Et le poids de la selle encore en ma mémoire arque mon dos et ma révolte Quand, seul désormais, je repasse les gués Où j'avais tant rêvé l'ivresse interminable De l'éternelle transhumance des chevaux libres des plaines sauvages.

15 D'avoir osé t'aimer Madeleine Chambon De quel étrange amour Est fait, celui dont je t’aime : Sera-ce- celui ci, Que mes désirs consument ! Dois-je me protéger De tous ses sortilèges ? Attendre un paradis Dont les portes se ferment. Dois-je espérer en vain Ce pouvoir qui élève Et m’avouer vaincue D’avoir osé t’aimer Pour mieux pouvoir te perdre.

16 Adolescence Franz Seguin J’ai souvenir de toi, petite adolescente Qui m’alluma des feux, voilée sous ta pudeur Effluve d’un parfum qui m’allait droit au cœur Tu étais toute neuve en ta beauté naissante Nos yeux à demi clos brillaient dans la soupente Où nous étions allés à l’abri des voyeurs Tes lèvres frémissaient enluneillées d’ardeurs Et j’effleurai tes seins nouvelets dans l’attente Comme un aimant surgi de ta peau lumineuse Ton corps me suppliait dans sa douceur fiévreuse Et appelait mes mains sous ta blouse de soie Le cœur hypnotisé sans pouvoir reculer Tu restais suspendue à l'amour qui foudroie Et moi qui craignais trop pour te déshabiller

17 Vie Sehne Muller Éclatante et gonflée, la rose se développe
Vie Sehne Muller Éclatante et gonflée, la rose se développe. Le temps passe, la rose passe, Son parfum s'estompe, sa couleur s'atténue, Le bouton de rose timide s'est étalé, Craquelé, marqué par le temps qui passe. La rose est dans les pages, La vie est dans les pages. Les pages tournent et le livre se referme, Sur un long, long silence... Le silence d'une vie qui passe. Lauranne

18 Tes yeux sombres Yves Brillon Tu as des nébuleuses au fond des yeux des galaxies en n'en plus finir qui s'étendent à l'infini à la vitesse du son elles me fixent m'entraînent hors de moi loin de mon univers aux limites du monde dans une folle ronde celle de l'amour celle du non-retour plus loin que les lendemains déjà devenus ceux d'hier capture ma main celle que je te tends qui a tant de tendresse prends-moi moi qui me consume de passion dans la déraison d'un regard le tien qui m'a foudroyé un jour qui m'a retenu pour toujours au bord de l'abîme où j'allais m'engloutir m'abîmer dans le néant

19 Le clair de lune Aloysius Bertrand
A l'heure qui sépare un jour d'un autre jour, quand la cité dort silencieuse, je m'éveillai une nuit d'hiver en sursaut, comme si j'eusse ouï prononcer mon nom auprès de moi. Ma chambre était à demi obscure; la lune, vêtue d'une robe vaporeuse comme une blanche fée, gardait mon sommeil et me souriait à travers les vitraux. Une ronde nocturne passait dans la rue; un chien sans asile hurlait dans le carrefour désert, et le grillon chantait dans mon foyer. Bientôt ces bruits s'affaiblirent par degrés : la ronde nocturne s'était éloignée; on avait ouvert une porte au pauvre chien abandonné; et le grillon, las de chanter, s'était endormi. Et moi, à peine sorti d'un rêve, les yeux encore éblouis des merveilles d'un autre monde, tout ce qui m'entourait était un second rêve pour moi. Oh ! qu'il est doux de s'éveiller au milieu de la nuit, quand la lune, qui se glisse mystérieusement jusqu'à votre couche, vous éveille avec un mélancolique baiser! Le clair de lune Aloysius Bertrand

20 Paysage Charles Baudelaire Je veux, pour composer chastement mes églogues, Coucher auprès du ciel, comme les astrologues, Et, voisin des clochers, écouter en rêvant Leurs hymnes solennels emportés par le vent. Les deux mains au menton, du haut de ma mansarde, Je verrai l'atelier qui chante et qui bavarde; Les tuyaux, les clochers, ces mâts de la cité, Et les grands ciels qui font rêver d'éternité. Il est doux, à travers les brumes, de voir naître L'étoile dans l'azur, la lampe à la fenêtre, Les fleuves de charbon monter au firmament Et la lune verser son pâle enchantement. Je verrai les printemps, les étés, les automnes; Et quand viendra l'hiver aux neiges monotones, Je fermerai partout portières et volets Pour bâtir dans la nuit mes féeriques palais. Alors je rêverai des horizons bleuâtres, Des jardins, des jets d'eau pleurant dans les albâtres, Des baisers, des oiseaux chantant soir et matin, Et tout ce que l'Idylle a de plus enfantin. L'Émeute, tempêtant vainement à ma vitre, Ne fera pas lever mon front de mon pupitre; Car je serai plongé dans cette volupté D'évoquer le Printemps avec ma volonté, De tirer un soleil de mon cœur, et de faire De mes pensers brûlants une tiède atmosphère.

21 Un jour, à Kharkov, dans un quartier populaire, (O cette Russie méridionale, où toutes les femmes Avec leur châle blanc sur la tête, ont des airs de Madone !) Je vis une jeune femme revenir de la fontaine Portant, à la mode de là-bas, comme du temps d'Ovide, Deux seaux suspendus aux extrémités d'un bois En équilibre sur le cou et les épaules. Et je vis un enfant en haillons s'approcher d'elle et lui parler. Alors, inclinant aimablement son corps à droite, Elle fit en sorte que le seau plein d'eau pure touchât le pavé Au niveau des lèvres de l'enfant qui s'était mis à genoux pour boire. Un matin, à Rotterdam, sur le quai des Boompjes, (C'était le 18 septembre 1900, vers huit heures), J'observais deux jeunes filles qui se rendaient à leurs ateliers ; Et en face d'un des grands ponts de fer, elles se dirent au revoir, Leurs routes n'étant pas les mêmes. Elles s'embrassèrent tendrement; leurs mains tremblantes Voulaient et ne voulaient pas se séparer ; leurs bouches S'éloignaient douloureusement pour se rapprocher aussitôt Tandis que leurs yeux fixes se contemplaient... Ainsi elles se tinrent un long moment tout près l'une de l'autre, Debout et immobiles au milieu des passants affairés, Tandis que les remorqueurs grondaient sur le fleuve, Et que des trains manoeuvraient en sifflant sur les ponts de fer. Valery Larbaud

22 C Emmanuel Blas C… la troisième lettre de l’alphabet C… le début de la vérité C… toujours pour commencer Je pourrais imaginer Je pourrais m’efforcer Je pourrais arrêter de dire C C… comme ma chérie C… comme une mélodie C… apprendre à chanter C… toujours pour commencer Je pourrais apprendre à t’aimer Je pourrais du moins essayer Je pourrais arrêter de dire C C… la vérité Je pourrais apprendre l’alphabet Je pourrais te le réciter Par cœur, par cœur.

23 Si SEHNE MULLER   Si le ciel venait te chanter La chanson de tes rêves dorés, Tu pourrais t'endormir Sans pleurer et sans souffrir.   Si la nuit de ses bras te tiendrait Plus de peurs, plus de regrets Tu pourrais t'endormir Sans pleurer et sans souffrir.

24 Hier j'ai pensé à toi Louve Mathieu Hier j'ai pensé à toi dans ce quartier de lune quartier de lune que le monde est petit que la terre est grande quartier de lune croissant de pomme un ciel affamé un jour quand le fleuve sur mes joues sera tari je pourrai parler sans m'étouffer et te le dire dessine-moi un petit prince fais-moi une clôture donne-moi à boire je pourrai alors me tourner vers le soleil entre deux eaux je fais l'étoile pour le ciel

25 Le Regard d'Aphrodite Michèle Brodowicz La campagne s’endort
Le Regard d'Aphrodite Michèle Brodowicz   La campagne s’endort. Le temps est immobile. Saignent en silence les ondes de l’étang, Écoulements de sang, traces indélébiles Des sanglots d’un ciel mourant en se noyant. L’ombre des grands arbres se couche sur la berge : Esprits vêtus de noir, spectres de l’enfance Tapis au fond de l’âme, leur maison, leur auberge Qui, au détour d’un soir, surgissent du silence. Au loin, les montagnes endeuillées par la nuit, Entre ciel et eau, plantent leurs doigts d’épines Dans l’Olympe sanguine, en ce jour qui s’enfuit, Et l’empêche de choir dans les eaux purpurines. Il n’est plus bel instant qu’un coucher de soleil ; Quand nos yeux se plongent dans la mer sidérale D’un univers serein où le Beau émerveille, Nous sommes l’Univers, la Nature triomphale. Ils sont doux ces moments où, rempli de ciel, Le cœur ourlé d’amour contemple l’infini, Sublime l’horizon et voit l’essentiel, Se penche sur le Temps et sourit à la vie. Sur l’âme se pose le regard d’Aphrodite ; D’un battement de cils, elle charme les rêveurs, Rassure les enfants que la frayeur habite Et parfume les draps aux senteurs du bonheur.

26 Sonnet d'Oaristys Charles Cros   Tu me fis d'imprévus et fantasques aveux Un soir que tu t'étais royalement parée, Haut coiffée, et ruban ponceau dans tes cheveux Qui couronnaient ton front de leur flamme dorée.   Tu m'avais dit « Je suis à toi si tu me veux » ; Et, frémissante, à mes baisers tu t'es livrée. Sur ta gorge glacée et sur tes flancs nerveux Les frissons de Vénus perlaient ta peau nacrée. L'odeur de tes cheveux, la blancheur de tes dents, Tes souples soubresauts et tes soupirs grondants, Tes baisers inquiets de lionne joueuse   M'ont, à la fois, donné la peur et le désir De voir finir, après l'éblouissant plaisir, Par l'éternelle mort, la nuit tumultueuse.  

27 Je me ferai pour toi … Natacha Dubuc
Pour toi, je me ferai reine Pour que tu ne m’oublis Je me ferai fleur de ta vie Pour toi, je ferai La Seine Comme ce cour d’eau Dans ta vie, je serai ce qui a de plus beau Pour toi, je me ferai déesse Pour que tu te souviennes Que je suis tienne Pour toi je me ferai sagesse Pour que tu apprécies Je ferai authentique ma vie Pour toi, je me ferai mère Pour que tes enfants Soient comme moi et toi dorénavant Pour toi, je ferai ta femme Pour te montrer l’amour Que j’ai pour toi sans aucun détour Pour toi, je ferai passion Pour te montrer mon affection Sans aucune prétention Pour toi, je ferai ton soleil Pour que tu me vois à chacun de tes réveille Comme l’amour qui est plus fort que la veille Pour toi, je me ferai tout ce que tu voudras Mais sache que malgré tous ça Je resterai toujours MOI Je me ferai pour toi … Natacha Dubuc

28 DANS LE COEUR D'UNE FEMME Dunmore   Des fontaines de satin et des rivières de soie De la force dans mes mains, du velours dans ma voix Des sols nus et fertiles, cultivables au sourire Une terre accueillante, tout un monde à bâtir Des oeuvres d'art à peindre aux couleurs vraies et claires Des nuits chaudes et douces sans tempêtes ni éclairs Des formules magiques pour faire sécher les pleurs Une myriade de clés pour devenir empereur Une couronne, un trône, un long règne à créer Une souveraineté qui m'était destinée   Tout ce que j'ai trouvé dans les yeux d'une femme Tout ce que j'ai perdu dans le cœur d'une femme

29 Les couleurs de la vie Chiccagioia Avec les couleurs de la vie j'ai peint le rêve de mon coeur, il est tissé d'étés silencieux et somnolents, d'automnes friands de raisin et de vendanges, d'hivers tout en flocons avec un arbre de Noël. Mais me manquent les couleurs d'un autre printemps, celui que je cherchais quand je t'ai rencontré.

30 Le Poète Alfred de Musset
Puisque l'oiseau des bois voltige et chante encore Sur la branche où ses oeufs sont brisés dans le nid ; Puisque la fleur des champs entr'ouverte à l'aurore, Voyant sur la pelouse une autre fleur éclore, S'incline sans murmure et tombe avec la nuit ; Puisqu'au fond des forêts, sous les toits de verdure, On entend le bois mort craquer dans le sentier, Et puisqu'en traversant l'immortelle nature, L'homme n'a su trouver de science qui dure, Que de marcher toujours et toujours oublier ; Puisque, jusqu'aux rochers, tout se change en poussière Puisque tout meurt ce soir pour revivre demain ; Puisque c'est un engrais que le meurtre et la guerre ; Puisque sur une tombe on voit sortir de terre Le brin d'herbe sacré qui nous donne le pain ; Ô Muse ! que m'importe ou la mort ou la vie ? J'aime, et je veux pâlir ; j'aime et je veux souffrir ; J'aime, et pour un baiser je donne mon génie ; J'aime, et je veux sentir sur ma joue amaigrie Ruisseler une source impossible à tarir. J'aime, et je veux chanter la joie et la paresse, Ma folle expérience et mes soucis d'un jour, Et je veux raconter et répéter sans cesse Qu'après avoir juré de vivre sans maîtresse, J'ai fait serment de vivre et de mourir d'amour. Le Poète Alfred de Musset

31 DESEQUILIBRISTES Dunmore Dis-moi la haine, pourquoi es-tu si laide
DESEQUILIBRISTES Dunmore     Dis-moi la haine, pourquoi es-tu si laide ? Et bien la joie, parce que tu es belle. Dis-moi le rêve, pourquoi es-tu si bon ? Et bien le cauchemar, parce que tu es cruel.   Dis-moi la honte, pourquoi es-tu si forte ? Et bien la fierté, parce que tu es brève. Dis-moi le monde, pourquoi es-tu pressé ? Et bien la genèse, parce que tout s'achève.   Dis-moi l'ennemi pourquoi es-tu si dur ? Et bien l'ami, parce que tu es tendre. Dis-moi l'oreille, pourquoi es-tu fermée ? Et bien la bouche, parce que je pourrais t'entendre.

32 PLEURER Matthias Vincenot   Je dirai à l’oiseau de se poser sur toi Et puis aux papillons de venir t’entourer   Je leur dirai tout ça Je te promets   Je dirai au soleil de venir t’éclairer Je dirai aux oiseaux de jouer avec toi   Mais je t’en prie, ne pleure pas Tu as le temps pour ça   J’ordonnerai au vent, le soir, de te bercer Et je dirai aux fleurs de sentir bon pour toi   Tu ne penseras plus à pleurer Et moi je serai là, tout près

33 Après les fables Liza Depuis que vous êtes partis tous les deux il y a des jours où je retombe en enfance et de nouveau je goûte après quelques décennies les sensations chagrines de la petite fille qui s'était endormie après les fables et se réveillait en découvrant la peur d'être restée seule

34 ÎLES Hatouara Blaise Cendras
Elle ne connaît pas les modes européennes Crépus et d'un noir bleuâtre ses cheveux sont relevés à la japonaise et retenus par des épingles en corail Elle est nue sous son kimono de soie Nue jusqu'aux coudes Lèvres fortes Yeux langoureux Nez droit Teint couleur de cuivre clair Seins menus Hanches opulentes Il y a en elle une vivacité une franchise des mouvements et des gestes Un jeune regard d'animal charmant Sa science : la grammaire de la démarche Elle nage comme on écrit un roman de 400 pages Infatigable Hautaine Aisée Belle prose soutenue Elle capture de tout petits poissons qu'elle met dans le creux de sa bouche Puis elle plonge hardiment Elle file entre les coraux et les varechs polycolores Pour reparaître bientôt à la surface Souriante Tenant à la main deux grosses dorades au ventre d'argent Toute fière d'une robe de soie bleue toute neuve de ses babouches brodées d'or d'un joli collier de corail qu'on vient de lui donner le matin même Elle m'apporte un panier de crabes épineux et fantasques et de ces grosse crevettes des mers tropicales que l'on appelle des « caraques » et qui sont longues comme la main ÎLES Hatouara Blaise Cendras

35 Apparition Mallarmé La lune s'attristait
Apparition Mallarmé   La lune s'attristait. Des séraphins en pleurs Rêvant, l'archet aux doigts, dans le calme des fleurs Vaporeuses, tiraient de mourantes violes De blancs sanglots glissant sur l'azur des corolles. - C'était le jour béni de ton premier baiser. Ma songerie aimant à me martyriser S'enivrait savamment du parfum de tristesse Que même sans regret et sans déboire laisse La cueillaison d'un Rêve au coeur qui l'a cueilli. J'errais donc, l'oeil rivé sur le pavé vieilli Quand avec du soleil aux cheveux, dans la rue Et dans le soir, tu m'es en riant apparue Et j'ai cru voir la fée au chapeau de clarté Qui jadis sur mes beaux sommeils d'enfant gâté Passait, laissant toujours de ses mains mal fermées Neiger de blancs bouquets d'étoiles parfumées.

36 Origines Boris Vian C'était l'été
Origines Boris Vian   C'était l'été... Dalida devant sa coiffeuse Peignant ses lourds cheveux. L'ivoire luisait La masse fauve et que l'air sec électrisait Tombait sur son épaule en draperie soyeuse...   D'un flacon de cristal, l'habile ensorceleuse Répandit sur ses seins ce parfum qui grisait... Au contact de la peau se volatilisait L'odeur lourde des lis et de la tubéreuse...   Et son amant rentra. De la sentir si belle Il bondit, fou d'amour, et se rua sur elle Cédant à son désir, Dalila se donnait... Or il vint que neuf mois après cette aventure - Ce délai semble nécessaire à la nature - Naquit, en ce temps-là, le premier sansonnet...

37 La passion... Halina Poswiatowska   la passion c'est ce que le violon chantait enfermé dans sa boîte obscure étouffante comme la nuit marqué par les ongles des étoiles à l'intérieur d'une coquille de lumière elle vit dans tes mots de grenade douce elle a un parfum de pêche de soleil capturé dans le vert filet de l'arbre elle est mûre penché au-dessus de l'herbe brûlée par le soleil lourde prête à tomber dans mes mains ouvertes et moi - en une langue étrangère j'enseigne aux lèvres fermées ce mot étroit comme la mort - amour

38 le corps féminin est une cathédrale Halina Poswiatowska
Je te souris. Qu'est-ce qu'un sourire? Une lumière envoyée à une étoile par une étoile. Une odeur qui lie les herbes en prairie bourdonnante. Une douce couleur la couleur verte de mes yeux s'emmêle dans tes doigts. Tu tiens dans ta main le corps tout chuchotant de la prairie. Le contour de l'herbe étroit et âpre raconte mes yeux qui regardent à l'infini. Tu me souris. hier j'écrivais des poèmes comme je distribue aujourd'hui les baisers mes baisers sont moins chers mes poèmes de plus en plus rares maintenant j'écris des poèmes seulement quand la couleur d'une fleur me blesse ou lorsqu'une chauve-souris dans son vol nocturne frôle ma joue j'embrasse en toute saison j'embrasse des étudiants des médecins des poètes rencontrés au hasard ensuite ils en font des poèmes comme moi je distribue les baisers par poignées à l'étourdie à la hâte mon Dieu aie Pitié de moi pourquoi m'as-tu créée à la dissemblance des pierres dures je suis emplie de tes mystères je change l'eau en vin du désir le vin - je le change en flamme de sang Dieu de ma douleur d'un souffle de satin habille le nid vide de mon cœur doucement - sans froisser les ailes insuffle en moi l'oiseau dont la voix argentine est tendresse toutes les fois que le veux vivre je crie quand la vie me quitte je me colle à elle je lui dis – vie ne t'en va pas encore sa main chaude dans la mienne mes lèvres à son oreille je chuchote vie - comme si la vie était quelqu'un qu'on aime et qui veut partir - je me pends à son cou je crie je mourrai si tu pars le corps féminin est une cathédrale Halina Poswiatowska

39 Tu as raison Louve Mathieu Tu as raison tu as raison tu as raison Je revois je sens... je suis de trop je ne suis pas des leurs pas de place pas de place pour moi je dois me faire petite très petite qu'on m'oublie qu'on arrête de me sentir de me voir... presque à mourir pour survivre... sur la glace j'ai appris à vivre je ne sais pas la douceur de la mer de ces pays peuplés de vieilles pierres de ces gens dont le passé court les anciens livres mon livre à moi est tracé dans les sentiers dans les écorces des arbres dans le vent... moi je sais que je viens de la neige, du nord. c'est là que mes ancêtres ont écrit.

40 Love dream Sonia A tes côtés, je t'observe tandis que tu dors d'un sommeil paisible. Pour entendre ton souffle, les battements de ton coeur, je me rapproche de toi. Dors-tu vraiment ou fais-tu semblant ? Ta main me répond en cherchant mes courbes sous le pyjama. Tu lèves la tête et avec tes lèvres scelles les miennes éveillant mon ardeur. Saveur de la peau, fruit de la passion, effluves de désir... fugace plaisir d'un instant qui fuit... tu n'es qu'un rêve !

41 Le goût du péché Agrodolce Quelle est la couleur du péché ? Elle prend le rouge de ta bouche, plonge dans la flamme du désir, s'échappe de la chaleur de ton corps collé à mon flanc. Quel est le parfum du péché ? Il s'imprègne de ta peau, capture ta présence, mélange nos essences en une fragrance enivrante. Quel est le goût du péché ? Il a la délicatesse de tes baisers, la saveur exquise de ta chair, il est aigre-doux comme mon tourment. Je t'en prie,offre-moi l'enfer !

42 La lettre Blaise Cendrars Tu m'as dit si tu m'écris Ne tape pas tout à la machine Ajoute une ligne de ta main Un mot un rien oh pas grand-chose Oui oui oui oui oui oui oui oui Ma Remington est belle pourtant Je l'aime beaucoup et travaille bien Mon écriture est nette est claire On voit très bien que c'est moi qui l'ai tapée Il y a des blancs que je suis seul à savoir faire Vois donc l'oeil qu'a ma page Pourtant, pour te faire plaisir j'ajoute à l'encre Deux trois mots Et une grosse tache d'encre Pour que tu ne puisses pas les lire.

43 Prémices Agnès Schnell Un semblant de nid, sauvage, informel
Prémices Agnès Schnell Un semblant de nid, sauvage, informel. Un nid naturel. Elle vient ici lorsque l’attention des autres se relâche et qu’ils l’oublient, qu’ils oublient jusqu’à son existence. Elle vient ici chaque jour. Elle grimpe sur une fourche de l’arbre, non la première, trop basse, mais la seconde bien plus éloignée du sol, ce qui lui permet d’avoir une vue d’ensemble. Le tout proche pourrait présenter peu d’intérêt pour une personne quelconque, mais le tout proche, c’est son antre, son secret, c’est un endroit où elle dépose ses rêves éveillés, ce vagabondage entre la conscience en veilleuse et la porte entrouverte de l’imaginaire… Le tout proche paraît banal, il est bruissant de mystères, de confidences indiscrètes. Il est sien...

44 Puis, le second plan. Elle a vue sur les jardins, une vue en enfilade sur l’arrière des maisons. Elle peut observer sans être vue, écouter les chants d’une voisine, les disputes chez une autre, les bruits familiers d’une journée qui commence, qui se poursuit ou s’achève. Plus loin encore, le mur d’enceinte ou les toits. A gauche, le mur de briques rouges, saignant de toutes les écorchures qu’elle lui a faites en grimpant. A droite, les toits, les chambres où elle a parfois une vue en plongée, quand les fenêtres sont ouvertes, l’été. Sous le couvert des branches feuillues, elle sait qu’on ne peut pas la voir. Pourtant, chaque fois qu’elle surprend l’interdit, elle a un gros coup dans la poitrine, un affolement soudain de son rythme cardiaque. L’autre jour, elle a surpris Zulma, une voisine âgée, enfin, âgée selon elle. Zulma était nue, entièrement nue et se regardait dans un miroir. Elle se présentait de trois quarts, de profil, de face et passait une main caressante sur les parties de son corps qu’elle observait. Longuement, lentement, elle se caressait. Elle avait insisté sur ses seins, sur le bas de son ventre et paraissait si absente. Elle, dans son arbre, savait qu’elle ne devait pas regarder, qu’elle violait une intimité. Mais le gros corps blanc de Zulma la fascinait. Elle aimait le trouble qui montait en elle et qu’elle sentait si fervent, si bouillonnant au dedans. Elle en avait vu des choses de son abri. Vu ? Non, deviné, supposé plutôt, car le mur ou un montant de lit ou une fenêtre pas assez ouverte masquaient souvent les scènes. Mais elle imaginait, elle savait imaginer et ces choses entrevues seulement étaient bien plus passionnantes que ce qu’elle aurait pu voir, observer de près. Elle s’assied, soit dans le Y formé par la rencontre de deux branches, soit à califourchon sur l’une d’elles, la plus faible pour qu’elle puisse bien la serrer entre ses cuisses. Entre l’arbre et elle recommence chaque jour le même rituel, la lente exploration qui la laissera sans voix, sans force, qui noiera son regard et cernera ses paupières. Les autres ne comprendront pas son silence, son émoi, la violence de son émoi. Ils ne comprendront pas ses retraits et se contenteront de ses quelques mots monosyllabiques. A quoi bon leur dire, à quoi bon partager ces élans, ces poussées de vertige, ce tumulte de sa chair ? Elle s’assied donc sur l’arbre, les genoux ramenés sur sa poitrine et enserrés de ses bras ou les jambes pendantes, à califourchon, les pieds dans le vide. C’est cette position qu’elle préfère, mais elle ne se l’accorde pas toujours car l’attente, le désir de la branche est bien plus délicieux que la satisfaction immédiate. Elle frotte sa joue contre les branches, mâche quelques feuilles. Elle caresse les aspérités, les nœuds, toutes les petites excroissances invisibles pour l’œil, sensibles pour le bout de ses doigts. Elle aime ce contact d’une peau végétale, vivante, avec sa peau. Ses doigts apprennent la caresse, sa peau apprend le désir, la volupté. Du bout des doigts, elle entoure une blessure de l’arbre, elle trace de petits cercles de plus en plus réduits, de plus en plus proches de la cicatrice. Elle frôle la surface jusqu’aux lèvres blessées. Elle aime sentir les fibres brisées, reconstituées, elle palpe une autre texture, la chair réparée de l’arbre. Parfois un peu de gomme ou de sève suinte. Elle en prélève de son index gauche, qu’elle suce avec volupté. Le goût est fade, cireux, grumeleux aussi. Du sang d’arbre qu’elle déguste… Elle n’en abuse pas. Dans sa hâte à grimper, elle se blesse souvent aux aspérités du bois. Parfois, elle se griffe volontairement et offre à l’arbre un peu de son sang humain. Elle le dépose sur les lèvres de la cicatrice, comme un baume qui va pénétrer lentement. Elle attend une réponse, une invite à la communion. De ses jambes, elle entoure la branche et essaie de faire corps le plus possible avec le bois. Elle ferme les yeux. Elle se balance alors d’avant en arrière. Son sexe d’enfant s’écrase contre l’arbre, elle sent une douleur, une brûlure et imagine d’autres douleurs, d’autres brûlures qui lui sont interdites, parce qu’elle est petite, bien trop petite… Mais elle pressent, elle sait la chose avant d’en connaître le mot. Ce contact lui est volupté, jouissance. Elle ferme les yeux et touche l’écorce, elle ferme les yeux, psalmodie une prière païenne profonde, monocorde, une prière de jubilation. Elle se dénude et peau contre écorce se donne à l’arbre. Tout en elle est aux aguets, elle est animale, végétale, primitive. Elle est l’explosion, la source, la rivière, elle est le miel, la sève, le sang, elle est la main et la caresse, elle est la branche, le liber mis à nu par elle, elle est la brûlure, ce point de chaleur en haut de l’aine, elle est rythme, pulsation, pulsion. Elle est le plaisir goûté en solitaire… Il lui plaît que son arbre soit un pêcher.

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Musique de Mozart : Romance du Concerto pour piano et orchestre N°20 K.466 Poèmes et photos Internet Daniel janvier Ce diaporama poèmes n°7 est strictement privé. Il est à usage non commercial.


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