Introduction sur le droit international public Renaud Vivien (CADTM) Week-end de formation du groupe droit « La dette, obstacle à la souveraineté des peuples » octobre 2010
Plan ● I. Les sources du droit international public ● ● II. Quelques caractéristiques du droit international public ● III. Quelques instruments juridiques utilisés par le CADTM
Les sources primaires de l'article 38 du Statut de la Cour Internationale de Justice (CIJ) 1) Les conventions internationales (bilatérales et multilatérales) : expression la plus poussée de la souveraineté des États Exemples : Traité de Versailles de 1919, Convention de Vienne sur le droit des Traités de 1969 (incompétence, force majeure, etc) ; Charte de l'ONU de 1945, les 2 Pactes sur les droits économiques sociaux et culturels et sur les droits civils et politiques de 1966, Traités de protection des investissements, Traité de libre échange, etc. 2) La coutume internationale : il faut la réunion de 2 éléments (pratique répétée des États et l'opinio juris) Exemples : Pacta sunt servanda, état de nécessité, obligation de réparer les dommages qu'on cause, etc 3) Les Principes généraux du droit international reconnus par les nations civilisées (PGD): Exemples : équité, bonne foi, changement fondamental de circonstances, abus de droit, enrichissement sans cause, etc
Les sources secondaires de l'article 38 de la CIJ 1) les décisions judiciaires. Selon l'article 59 du statut de la CIJ, « la décision de la Cour n'est obligatoire que pour les parties au litige et dans le cas qui a été décidé » 2) la doctrine : Exemple : la doctrine de la dette odieuse formulée en 1927 par le juriste russe Alexander Sack « Si un pouvoir despotique contracte une dette non pas pour les besoins et dans les intérêts de l’État, mais pour fortifier son régime despotique, pour réprimer la population qui le combat, etc., cette dette est odieuse pour la population de l’Etat entier (…). Cette dette n’est pas obligatoire pour la nation ; c’est une dette de régime, une dette personnelle du pouvoir qui l’a contractée, par conséquent elle tombe avec la chute de ce pouvoir. »
Les autres sources du droit international public ● 1) Le jus cogens : interdiction des crimes d'agression, interdiction des crimes contre l'humanité, interdiction de pratiquer la torture, le respect du droit à l'autodétermination ● 2) Les avis consultatifs de la CIJ : ● Exemple: Avis du 25 mars 1951 sur l'interprétation d'un accord entre l'OMS (Organisation Mondiale de la Santé) et l'Egypte: "rien dans le caractère d'une organisation internationale ne justifie qu'on la considère comme une sorte de “super-Etat”. L'organisation internationale est un sujet de droit international lié en tant que tel par toutes les obligations que lui imposent les règles générales du droit international, son acte constitutif ou les accords internationaux auxquels il est parti ».
Les autres sources du droit international public ● Les actes unilatéraux des États: ● - la suspension de paiement de la dette (avec gel des intérêts) : exemples de l'Équateur et de l'Argentine ● - la mise en place d'un audit de la dette (l'Équateur) ● - la répudiation / l'annulation de la dette (le Paraguay, la Norvège) ● - la dénonciation des Traités (l'Équateur) ● - le retrait d'une organisation internationale (la Bolivie, l'Équateur, les États-Unis) ● - la nationalisation (Bolivie, Venezuela) ● - la réquisition (France)
Les autres sources du droit international public 4) Les résolutions des Nations-Unies (du Conseil de Sécurité et de l'Assemblée générale de l'ONU) - différents types de résolutions : recommandation, décision d'action, etc - résolution du Conseil de Sécurité ont une force supérieure à celle de l'AG de l'ONU - parmi les résolution de l'AG : résolution 1803 de 1962 consacrant « la souveraineté permanente des États sur leurs ressources naturelles », la Déclaration universelle des droits de l'homme (DUDH) de 1948, la déclaration sur le droit au développement (DDD) de 1986, etc
Quelques caractéristiques du droit international public 1) Le consentement - principe : L'élaboration et le respect du droit international reposent sur le consentement des États et ne concerneraient pas les acteurs privés. - exceptions : le jus cogens (c'est « une norme impérative de droit international » : article 53 de la Convention de Vienne de 1969), la coutume internationale, les PGD, les décisions judiciaires (mais il y a des exceptions à des exceptions. Ex: Israël). La Banque Mondiale et le FMI sont tenus de respecter toutes les normes adoptées par l'ONU et en particulier les Traités de protection de droits humains.
Quelques caractéristiques du droit international public 2) Horizontalité - principe : Il n'existe pas de hiérarchie dans le droit international public - exception : la Charte de l'ONU affirme sa primauté sur les autres accords internationaux ; une norme du jus cogens « ne peut être modifiée que par une nouvelle norme du droit international général ayant le même caractère » (article 53 du Traité de Vienne sur le droit des Traité).
Quelques caractéristiques du droit international public 3) la sanction juridique internationale - principe : on ne peut contraindre un État ou une organisation internationale à respecter le droit international (cf la souveraineté) - tempérament : la sanction est économique et politique (cf le rapport de force politique). Certains engagements sont plus contraignants que d'autres (PAS versus les textes de protection des droits humains). Certaines décisions sont plus contraignantes que d'autres (cf les sentences du CIRDI).
Quelques instruments juridiques du CADTM 1) Pour une suspension immédiate du remboursement de la dette et le refus des conditionnalités : - le PIDESC et le PIDCP de force majeure (inscrite dans Traité de Vienne) : il faut la réunion de 3 éléments (irrésistible, imprévisible, extérieur) - état de nécessité (coutume) : c'est une situation de danger pour l’existence de l'État, pour sa survie politique ou sa survie économique. Pour la Commission de droit international de l'ONU, « ce fait aura été l'unique moyen de sauvegarder l'intérêt essentiel de l'État à l'encontre d'un danger grave et imminent » (....) « On ne peut attendre d'un État qu'il ferme ses écoles et universités et ses tribunaux, qu'il abandonne les service publics de telle sorte qu'il livre sa communauté au chaos et à l'anarchie simplement pour ainsi disposer de l'argent pour rembourser ses créanciers étrangers ou nationaux. Il y a des limites à ce qu'on peut raisonnablement attendre d'un État, de la même façon que pour un individu ».
Quelques instruments juridiques du CADTM - la Déclaration universelle des droits de l'homme (DUDH) de la Déclaration sur le droit au développement (DDD) de les résolutions de l'ONU sur la souveraineté des États sur leurs ressources naturelles - rapports de l'ONU comme ceux de l'Expert indépendant de l'ONU sur la dette ou ceux du Conseil des droits de l'homme de l'ONU. Ainsi, la résolution du 23 avril 1999, affirme que « l’exercice des droits fondamentaux de la population des pays débiteurs à l’alimentation, au logement, à l’habillement, à l’emploi, à l’éducation, aux services de santé et à un environnement salubre ne peut être subordonné à l’application de politiques d’ajustement structurels et de réformes économiques liées à la dette ».
Quelque instruments juridiques du CADTM 2) Pour la nullité des dettes illégitimes: - les actes unilatéraux des États - la doctrine de la dette odieuse de le jus cogens - le changement fondamental de circonstances - l'anatocisme - le Traité de Versailles de la Convention de Vienne de la Charte de l'ONU de 1945
Quelques instruments juridiques du CADTM 3) Pour l'abolition de la dette des pays du tiers-monde - abus de droit et enrichissement sans cause (PGD): Les PED ont remboursé l'équivalent de 102 fois ce qu'ils devaient en Entre temps, leur dette a été multipliée par obligation de réparation (coutume): Abolir la dette du tiers- monde est une acte de justice, un début de réparation pour les dommages causés à travers les politiques d'ajustement structurels mises en place au lendemain de la crise de la dette de 1982.