ANIMAUX TRANSGENIQUES Prof. Dr. Emile Didier FIOGBE Département de Zoologie Faculté des Sciences et Techniques Université d’Abomey-Calavi
- DEFINITION - HISTORIQUE - Comment crée-t-on des animaux transgéniques? - À quoi servent les animaux transgéniques? - De quels animaux se sert-on dans ces expériences ? - Conséquences de la transgenèse
DEFINITION Un animal transgénique est un animal génétiquement modifié, c’est-à-dire un animal vivant dont le patrimoine génétique a été modifié par l'Homme. Un animal transgénique est donc un animal au génome duquel a été introduit par transgénèse un ou plusieurs gènes. génétiquement modifiépatrimoine génétique animalgénome transgénèsegènes Les animaux transgéniques ont été mis au point dans le but d'obtenir des produits animaux nouveaux. Par exemple, on a créé des porcs transgéniques ayant une croissance plus rapide et dont la viande est de meilleure qualité. Ces porcs utilisent également plus efficacement les aliments et résistent aux maladies courantes. On a également mis au point des moutons transgéniques qui donnent une laine de meilleure qualité et auxquels il n'est pas nécessaire d'administrer les suppléments alimentaires habituels que sont les acides aminés soufrés.
HISTORIQUE Contrairement aux plantes transgéniques, qui font la une des journaux à l’occasion, les animaux transgéniques restent dans l’ombre. Il faut dire que la grande majorité d’entre eux n'en sont encore qu’au stade de la recherche et du développement. En 1980 est développé le premier animal transgénique. Il s'agit d'une souris qui sécrète une plus grande quantité d’hormone de croissance. Sa taille est similaire à celle d’un petit rat. La première plante transgénique est développée un an plus tard. En plus de la recherche fondamentale, la transgénèse est appliquée aux animaux d’élevage. Certains animaux transgéniques servent à fabriquer des produits thérapeutiques et d’autres pourraient être utilisés comme donneurs d’organes.1980hormone de croissancerattransgénèse Dès 1985, des chercheurs du ministère de l’agriculture des États-Unis (USDA) réussissaient à générer des porcs sur-exprimant l’hormone de croissance. L'objectif est de créer des animaux plus maigres et plus musclés. L’objectif a été atteint, mais les porcs sont alors plus sensibles à certaines maladies, comme les pneumonies et l’arthrite. Le projet est alors abandonné.1985États-Unishormone de croissancepneumoniesarthrite
Des travaux similaires sont actuellement en cours chez le poisson. Par exemple, en 2001, une compagnie a déposé aux autorités américaines une demande de commercialisation pour un saumon transgénique exprimant un surplus d'hormone de croissance. Ainsi il atteint sa taille adulte plus rapidement, sans toutefois la dépasser. La demande de commercialisation est toujours à l’étude.2001saumon Toujours en 2001, des chercheurs de l’Université de Guelph ont inséré chez le porc un gène bactérien qui exprime la phytase dans les glandes salivaires. La raison de cette insertion est la nature de cette enzyme qui aide à mieux absorber le phosphore contenu dans la moulée.2001Université de Guelphbactérienphytaseglandes salivairesenzymephosphore Contrairement aux animaux polygastriques (ex. vaches et chèvres), les animaux monogastriques, dont les porcs, ne sont pas des hôtes pour les micro- organismes qui sécrètent cette enzyme. Ainsi, pour maximiser leur croissance, du phosphore doit être ajouté à leur alimentation. Conséquemment, le lisier qu’ils produisent en contient beaucoup. Or, ce rejet de phosphore constitue le facteur de pollution principal de la filière porcine.micro- organismesphosphorelisierpollution
En effet, il provoque, à forte dose, l’eutrophisation des lacs. Quant à eux, les porcs modifiés « EnviropigsMC » rejettent jusqu’à 75% moins de phosphore dans leur lisier que les porcs non modifiés. En 2012, L'Université de Guelph annonçait qu'elle arrêtait les recherches sur ce porc GM « Enviropigeutrophisation Une entreprise canadienne de biotechnologie, Nexia Biotechnologies, a créé des chèvres transgéniques qui, selon elle, conviennent parfaitement pour la production efficace et bon marché de produits pharmaceutiques. À l'automne 1998, Nexia a annoncé la naissance au Canada de Willow, la première chèvre transgénique capable de produire dans son lait une protéine susceptible de se révéler d'une importance vitale. La protéine thérapeutique que Willow produira est actuellement gardée secrète pour des raisons commerciales. La société utilise également des chèvres pour produire des biofilaments - un matériau solide semblable à de l'acier qui peut servir dans des projets techniques portant sur des matériaux de pointe.
Les modifications génétiques ne s’appliquent pas seulement aux animaux d’élevage. En effet, depuis 2004 une compagnie américaine commercialise un poisson rouge fluorescent (GlofishMC). Ce dernier exprime un gène de fluorescence provenant d’un corail.2004fluorescentcorail Aussi, dernièrement, un lapin fluorescent a été exposé dans un musée européen en tant qu’objet d’art
Comment crée-t-on des animaux transgéniques? Les animaux sont constitués de milliards de cellules. La production d'un animal transgénique doté dans chaque cellule d'un nouveau morceau identique d'ADN semble à première vue un processus fort laborieux! Heureusement, les scientifiques peuvent tirer parti d'une caractéristique fondamentale du développement animal : il est possible de déterminer de quelle cellule proviennent toutes les cellules d'un animal donné. En d'autres termes, chaque animal est né d'une seule cellule, qui s'est divisée et redivisée pour finalement produire les milliards de cellules qui le constituent.
La création d'animaux transgéniques est plus complexe que la production de bactéries ou de plantes transgéniques. Les bactéries transgéniques sont relativement faciles à produire, étant donné qu'elles sont unicellulaires. Cela signifie qu'on n'a pas à s'assurer de la présence du nouvel ADN dans toutes les cellules de l'organisme, comme c'est le cas pour les organismes pluricellulaires transgéniques. Pour de nombreux types de plantes, les biotechnologues peuvent amener une cellule de plante transgénique à donner naissance à une plante transgénique. 1 Toutefois, pour créer des animaux transgéniques, il faut modifier les cellules germinales. 2 Les cellules germinales (comme l'ovule et le spermatozoïde) sont les seules cellules animales capables de donner naissance à une nouvelle progéniture. D'autres cellules dans l'animal (appelées cellules somatiques comme les cellules du sang, de la peau, du cerveau ou du coeur) ne sont pas capables de donner naissance à de nouveaux animaux qui deviendront adultes.
Pour produire un animal transgénique, on peut entre autres avoir recours à la micro-injection. Le nouvel ADN est injecté directement dans un ovule fécondé (zygote) avant qu'il ne commence à se diviser. Le nouvel ADN s'intègre dans un chromosome dans le noyau et sera dès lors présent dans chaque cellule de l'animal qui en résultera. Le nouvel ADN sera également présent dans les cellules germinales de l'animal qui en résultera, ce qui signifie que le nouvel ADN sera transmis à nombre de descendants de cet animal. La micro-injection est un processus aléatoire. Il se peut que l'ADN injecté ne s'intègre pas du tout au chromosome du zygote. Aucune des cellules de l'organisme résultant ne possédera alors le nouvel ADN. À l'occasion, le nouvel ADN ne s'intègre pas au chromosome avant la division de la cellule. Il en résulte un animal mosaïque, qui contient le nouveau gène dans certaines de ses cellules, mais pas dans l'ensemble. Lors de l'injection de l'ADN, il n'existe aucune façon de prédire l'endroit du noyau où il s'intégrera.
En général, l'ADN injecté contient un gène qui code pour une protéine particulière destinée à s'exprimer dans l'animal. De nombreuses régions d'un chromosome donné sont inaccessibles aux enzymes responsables de l'amorce de l'expression génique. L'emplacement de ces régions varie en fonction du type de cellule et permet de s'assurer que seuls les gènes appropriés sont « actifs » dans toute cellule donnée. Si le transgène s'intègre dans l'une de ces régions inaccessibles, la protéine associée ne sera pas produite ou sera peut-être produite uniquement dans certains types de cellules. En conséquence, les animaux produits à l'aide de cette méthode doivent faire l'objet de tests approfondis visant à déterminer si : a) toutes les cellules de l'animal contiennent le transgène; b) tous les types de cellules voulus produisent la protéine du gène.
EXEMPLES D’ANIMAUX TRANSGENIQUES
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À quoi servent les animaux transgéniques? Sujets d'expérimentation pour des maladies en recherche médicale Création des animaux transgéniques porteurs de maladies héréditaires similaires à certaines de celles qui affectent les humains. Les chercheurs utilisent ces animaux pour mieux comprendre la progression, les étapes et les symptômes d'une maladie. Ces animaux peuvent également être utiles pour sélectionner de nouvelles thérapies ou de nouveaux médicaments de manière plus sûre et peu coûteuse. La majorité des animaux transgéniques créés à cette fin sont des souris, car elles sont petites et faciles à manipuler et à soigner. Cependant, d'autres animaux comme des rats, des lapins et des porcs ont également servi à modéliser des maladies. Par exemple, des chercheurs d'Harvard ont été les premiers à créer une « oncosouris », qui est susceptible de développer le cancer du sein ou des ganglions lymphatiques.
Ces oncosouris renferment certains gènes délétères qui provoquent le cancer (oncogène). On utilise maintenant les oncosouris dans le monde entier pour mettre à l'essai des médicaments et des thérapies contre ces deux types de cancer. D'autres modèles animaux ont été mis au point pour des maladies comme le sida, la cardiopathie, la fibrose kystique et le diabète. Bien que les maladies modélisées ressemblent de manière frappante à celles qui affectent les humains, en raison de différences entre l'espèce humaine et les souris, il existe certaines limites quant à l'utilisation de ces animaux en tant que modèles pertinents de la maladie humaine. Par exemple, les souris créées pour contracter la fibrose kystique ont un taux de mortalité postnatal bien plus élevé que les êtres humains atteints de la maladie. Par ailleurs, les êtres humains qui en sont atteints attrapent de graves maladies respiratoires - chose que l'on n'a pas observée chez les souris ayant la fibrose kystique. En raison de ces différences, les scientifiques doivent être très prudents lorsqu'ils tirent des conclusions sur l'évolution ou le traitement d'une maladie humaine à la lumière des preuves tirées de l'étude d'animaux transgéniques pris comme modèles.
Autres applications de la transgenèse Etude de la structure du gène Les organismes transgéniques ont été mis au point pour étudier la structure du gène et sa fonction. Par exemple, les poissons zèbres constituent d'excellents modèles pour étudier comment sont activés les gènes dans le développement de l'embryon. Le fait de comprendre le développement embryonnaire de ce poisson vertébré permet également de mieux comprendre le développement humain, puisque le développement du poisson et celui de l'homme sont en fait fort similaires. Les gènes de développement du poisson zèbre semblent avoir des « cognats » humains - des gènes humains ayant des séquences et fonctions similaires. Par ailleurs, les animaux transgéniques servent à l'étude d'une fonction d'un gène, car ils permettent d'observer les effets que ces changements génétiques particuliers peuvent avoir sur les caractéristiques de l'animal dans son ensemble.
Production de médicaments Dans de nombreux cas, les médicaments administrés pour le traitement d'une maladie sont simplement des protéines humaines. Par exemple, le diabète résulte d'une incapacité des cellules pancréatiques à produire une protéine appelée insuline. Actuellement, on traite les diabétiques en leur injectant de l'insuline obtenue soit d'un donneur humain en bonne santé ou de cultures de bactéries génétiquement modifiées (transgéniques) qui sécrètent la protéine. Il est très coûteux d'obtenir les protéines à administrer sous forme de médicaments à d'autres humains, et de nombreuses protéines humaines complexes ne peuvent être produites adéquatement par des bactéries. C'est pourquoi les animaux transgéniques, qui peuvent produire de manière relativement bon marché des protéines humaines complexes dans leur lait, commencent à être utilisés pour la production de certaines protéines humaines. Par exemple, on a créé des chèvres transgéniques qui produisent une protéine anticoagulante appelée antithrombine humaine III (ATIII), qui en est actuellement au stade des essais cliniques aux
États-Unis et en Europe. Le médicament peut être administré aux patients subissant un pontage aorto- coronarien par greffe, un type de chirurgie à coeur ouvert. Une entreprise canadienne de biotechnologie, Nexia Biotechnologies, a créé des chèvres transgéniques qui, selon elle, conviennent parfaitement pour la production efficace et bon marché de produits pharmaceutiques. À l'automne 1998, Nexia a annoncé la naissance au Canada de Willow, la première chèvre transgénique capable de produire dans son lait une protéine susceptible de se révéler d'une importance vitale. La société utilise également des chèvres pour produire des biofilaments - un matériau solide semblable à de l'acier qui peut servir dans des projets techniques portant sur des matériaux de pointe. En Écosse, l'entreprise PPL Therapeutics a produit Polly, une brebis transgénique porteuse du gène humain codant pour une protéine appelée facteur IX. On espère que Polly produira dans son lait la protéine, qui pourra ensuite être extraite et utilisée pour traiter les hémophiles, dépourvus de cet important facteur de coagulation sanguine.
Produits animaux nouveaux Les animaux transgéniques ont été mis au point dans le but d'obtenir des produits animaux nouveaux. Par exemple, on a créé des porcs transgéniques ayant une croissance plus rapide et dont la viande est de meilleure qualité. Ces porcs utilisent également plus efficacement les aliments et résistent aux maladies courantes. On a également mis au point des moutons transgéniques qui donnent une laine de meilleure qualité et auxquels il n'est pas nécessaire d'administrer les suppléments alimentaires habituels que sont les acides aminés soufrés. En vue d'intensifier la production aquicole, on a mis au point des saumons coho et de l'Atlantique, des barbues de rivière, des bars d'Amérique, des truites arc-en-ciel et d'autres poissons, qui possèdent un gène pour l'hormone de croissance et d'autres facteurs de croissance. On a observé chez ces poissons une vitesse de croissance plus élevée (en général de l'ordre de 30 à 60 p. 100).
En somme, les animaux mutants pourraient rapporter de l'argent dans trois domaines principaux : : pour servir de modèles à des maladies humaines ; pour produire des animaux de ferme qui grandissent et grossissent plus vite. pour créer des animaux modèles pour l'élevage industriel : poulets sans plumes et moutons à croissance rapide. À Cuba, la commercialisation des premières carpes transgéniques est déjà prévue À Harvard (USA), des chercheurs viennent de produire un poulet à quatre cuisses, ce qui permet d'envisager bientôt des porcs à quatre jambons, plus rentables, et sans yeux pour qu'ils bougent moins et consomment moins de calories. Il existe déjà en laboratoire des mouches modifiées grâce à des gènes de souris : leurs yeux poussent désormais au bout des pattes ;
pour produire des gènes, autre tendance inquiétante qui consiste à ajouter des gènes étrangers (la plupart du temps humains) à des animaux agricoles afin que leur urine, leur sang ou leur lait sécrètent des protéines utilisées dans l'industrie pharmaceutique. Des animaux sont manipulés génétiquement dans de nombreux autres buts, par exemple pour des recherches sur la calvitie. De quels animaux se sert-on dans ces expériences ? Bovins, moutons, chèvres, cochons, souris, rats, lapins et poissons ont tous été génétiquement manipulés, et il n'y a aucune raison de croire que l'on s'arrêtera là !
Conséquences de la transgenèse Manipulations génétiques et animaux transgéniques : des bombes à retardement En nombre toujours croissant, les animaux sont les victimes de ces nouvelles formes d'expérimentation : manipulations génétiques, clonage, xénogreffes. Mais en quoi sommes-nous directement concernés - et préoccupés - par ces technologies modernes ? Les manipulations génétiques permettent aux scientifiques d'altérer ou de modifier la constitution génétique d'organismes vivants (animaux et plantes) et de mélanger le matériel génétique de différentes espèces entre elles, par- delà toutes les barrières de la nature
Les manipulations génétiques causent-elles des souffrances ? Oui, de grandes souffrances. Ces biotechnologies sont des techniques encore très imprécises. Des centaines d'animaux peuvent être « créés » pour tenter d'obtenir un seul individu doté de caractéristiques particulières. Quand ils ne sont pas sacrifiés par milliers, on laisse vivre les « rebuts » et les monstres pour mieux comprendre ce qui se passe. Ils peuvent tous souffrir, voire mourir d'effets secondaires inattendus tels que des tumeurs, des malformations cérébrales, des difformités crâniennes ou du squelette, de la stérilité, de l'arthrite et du diabète. Cela représente-t-il beaucoup d'animaux ? Au moins un demi-million d'animaux par an en France. Encore inconnues, il y a une décennie, les manipulations génétiques sont le secteur de l'expérimentation animale qui progresse le plus rapidement. On entend parler de brevetage dans ce domaine Oui, pour toucher des « royalties », les firmes scientifiques affirment parfois avoir « inventé » les animaux qu'elles ont génétiquement modifiés. Comme au temps de Descartes, on donne à ces êtres sensibles le même statut qu'à des machines !
Les xénogreffes La xénotransplantation est le transfert d'organes animaux chez des humains. Sans succès pour l'instant, des chercheurs ont déjà essayé de mettre en place des « pièces de rechange » animales à utiliser quand des morceaux du corps sont endommagés ou tout simplement usés. Que se passe-t-il quand un organe animal est greffé dans un corps humain Il y a un fort « rejet », c'est pourquoi les scientifiques tentent des expériences sur des animaux génétiquement modifiés auxquels on a implanté un peu d'ADN humain, dans le but de « tromper » le système immunitaire, de lui faire croire que l'organe vient de la même espèce. Toutefois, même sans rejet, un organe animal est-il physiologiquement capable de prolonger la vie chez un humain ? Dans des cas de greffes de foies de babouins, les cellules de cet organe ont migré et se sont répandues dans tout le corps humain « xénogreffé », le transformant en « chimère » de deux espèces différentes. Les effets physiques et physiologiques de cette « hybridation » sont inconnus.
Et il y a surtout un risque d'infection du patient - et donc du reste de la population - par des virus et rétrovirus endogènes de singes ou de porcs migrant aussi dans tout l'organisme et impossibles à éliminer. Comparant avec l'origine du sida, de nombreux scientifiques sont effrayés par cette possibilité, évoquant le risque d'un nouveau fléau. Au nom du principe de précaution, le Conseil de l'Europe a voté un sage moratoire sur les xénogreffes le 29 janvier Mais des pays comme la France continuent ces expériences.
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