Dépistage et traitement du syndrome d’apnées obstructives du sommeil (SAOS) Anne-Sophie Veyer Centre Hospitalier Spécialisé en Pneumologie 94 Chevilly Larue
2 à 5% de la population adulte, soit 1 à 3 millions de la population française. Sa prévalence est estimée à 2% chez la femme et 4% chez l’homme.
Le syndrome d’apnées du sommeil pour vous?
dans une population de médecins généralistes Le SAOS dans une population de médecins généralistes SAOS. Etude de pratiques en médecine générale. Une enquête descriptive auprès de 108 praticiens militaires. S. Ballivet de Régloix. 2009
Facteurs de risque cités: Obésité 100% L’hygiène de vie 56%: alcool, tabac, médicaments, position dans le lit L’anatomie 30%: dysmorphie faciale, obstacle ORL (hypertrophie amygdalienne), gros cou
Signes cliniques cités: • somnolence 73% • ronflement 73% • asthénie 65% • apnées 60% • HTA 29% • réveils nocturnes 17% • céphalées 15% • troubles psychiques 10% • obésité 10% • nycturie rare • RGO rare
Complications citées (1): Cardiovasculaires 67%: HTA, cardiopathies ischémiques, AVC Troubles de vigilance 47% Troubles de l’humeur 33% Accidents de la voie publique 28% Altérations des fonctions intellectuelles 18% Sociopathie 14%
Complications citées (2): Altération des performances physiques 5% Mort subite 5% Troubles respiratoires 4% Troubles sexuels 3% Autres 8% : retentissement sur la vie quotidienne, céphalée, contrainte du traitement, mauvais sommeil, syndrome métabolique
La prise en charge citée: Consultation spécialisée (ORL, pneumo ou neuro): 100% Prise en charge diététique: 53% Diagnostic par: enregistrement du sommeil: 87% saturation en O2 nocturne: 12% Affirmation du diagnostic par: le nombre d’apnées: 67% la variation de la saturation en O2: 31% Ttt par ventilation en pression positive: 62%
Dans la littérature: 3 études 1- The Occurrence of Sleep-Disordered Breathing among Middle-Aged Adults Young 1993 602 patients de 30 à 60 ans. Diagnostic par PSN. Le SAOS est plus fréquent chez l’homme. Pour les hommes, plus fréquent entre 40 à 49 ans. Pour les femmes, entre 50 à 60 ans. L’obésité est un facteur de risque significatif. Les ronfleurs habituels ont un score d’apnées plus élevé. Les porteurs de SAOS sont plus somnolents.
La somnolence seule n’est pas corrélée au score d’apnées. 2- Obstructive Sleep Apnea–Hypopnea and Related Clinical Features in a Population-based Sample of Subjects Aged 30 to 70 Yr. J. Duran 2001 2794 patients de 30 à 70 ans. Diagnostic par PSN. L’association Apnée + Ronflements + SpO2<90% pendant 30% du temps de sommeil est significativement associée au score d’apnées indépendamment de l’âge et du sexe. La somnolence seule n’est pas corrélée au score d’apnées. L’HTA est significativement corrélée au score d’apnées indépendamment d’autres facrteurs.
Les principaux symptômes de SAOS retenus sont: 3- Prévalence des symptômes du syndrome d'apnées du sommeil. Étude dans une population française d'âge moyen. Meslier 2007 4442 patients de 33 à 69 ans. Pas de PSN. Les principaux symptômes de SAOS retenus sont: ronflement + somnolence diurne et/ou apnées constatées. Ils sont retrouvés dans 7,5% de la population. Les facteurs de risque reliés sont: le sexe, l’âge, l’IMC, l’état de santé ressentie comme médiocre et l’usage de tranquillisants et chez l’homme, l’HTA et la consommation alcoolo-tabagique. D’autres symptômes orientent la suspicion de SAOS: le sommeil agité, les réveils fréquents au cours de la nuit, un réveil matinal difficile et des céphalées matinales.
En résumé Symptômes: Somnolence, Ronflement, Apnées constatées Facteurs de risque: obésité, homme Complication: HTA
D’autres symptômes de SAOS Moins caractéristiques, de fréquence variable dans la littérature. Manifestations nocturnes : nycturie pillow spot bouche sèche sueurs Manifestations diurnes : troubles des fonctions intellectuelles (concentration, mémoire) troubles de l’humeur (de la simple irritabilité à la dépression) RGO troubles sexuels (baisse de libido, troubles d’érection)
Profil type du patient apnéique Homme De plus de 50 ans Surcharge pondérale HTA Gros ronfleur Somnolent /asthénique Apnées constatées
Impression clinique Méta-analyse. Ross 2000 Peu spécifique: 60 % Peu sensible: 50 % valeur prédictive positive 8 %, valeur prédictive négative 92 % pour une prévalence de 3 %
Les questionnaires: Aide au diagnostic
Questionnaire de somnolence d’EPWORTH Vous arrive-t-il de somnoler ou de vous endormir (dans la journée) dans les situations suivantes : aucune chance (0) faible chance (1) chance moyenne (2) forte chance (3) Pendant que vous êtes occuper à lire un document Devant la télévision ou au cinéma Assis inactif dans un lieu public (salle d'attente, théâtre, cours, congrès ...) Passager, depuis au moins une heure sans interruptions, d'une voiture ou d'un transport (train, bus, avion, métro…) Allongé pour une sieste, lorsque les circonstances le permettent En position assise au cours d'une conversation (ou au téléphone) avec un proche Tranquillement assis à table à la fin d'un repas sans alcool Au volant d'une voiture immobilisée depuis quelques minutes dans un embouteillage Epworth ≥9: risque de somnolence
questionnaire de Berlin Taille (m) ____ Poids (kg)____Âge____Homme / Femme. CATÉGORIE 1 CATÉGORIE 2 1. Ronflez-vous? 6. Etes-vous souvent fatigué après avoir dormi? .Oui . Non . Ne sais pas . Presque tous les jour . 3-4 fois/semaine 2. Votre ronflement est : . 1-2 fois/semaine . 1-2 fois/mois . Légèrement plus fort que la respiration . Fort comme la parole 7. À l’état éveillé, vous sentez-vous fatigué? . Plus fort que la parole . Presque tous les jours . 3-4 fois/semaine . S’entend d’une pièce voisine 3. Fréquence du ronflement . Presque tous les jours . 3-4 fois/semaine 8. Vous êtes-vous déjà assoupi en conduisant? . 1-2 fois/semaine . 1-2 fois/mois . Oui . Non . Jamais 9. Avec quelle fréquence cela se produit-il? 4. Votre ronflement gêne-t-il les autres? . Oui . Non . Ne sais pas 5. A-t-on remarqué que vous arrêtez de respirer pendant votre sommeil? CATÉGORIE 3 10. Êtes-vous hypertendu?
Questionnaire de Berlin Haut risque de SAOS : 2 catégories ou plus ont un score positif. Faible risque de SAOS : 0 ou 1 catégorie a un score positif. Sa validité: Pour un IAH=10/h: sensibilité 62,5%, spécificité 53%, VPP 38,4%, VPN 74,2%. Pour un IAH=15/h: sensibilité 67,5%, spécificité 52%, VPP 25%, VPN 84,7%.
Définition du SAOS Apnée: arrêt respiratoire ≥ 10 secondes Hypopnée: diminution du flux respiratoire de plus de 50%, ≥ 10s, avec désaturation de la SpO2 ≥ 3% SAOS si index d’apnées-hypopnées ≥ 5/heure SAOS léger = IAH de 6 à 15/ h SAOS modéré = IAH de 16 à 30/ h SAOS sévère = IAH > 30/ h
Physiopathologie
Moyens diagnostic Polysomnographie Polygraphie respiratoire Dépistage: Apnea Link
SAOS: une cascade pathologique Pendant le sommeil (relâchement musculaire) Collapsus et obstruction des VAS (ronflement) Apnées et hypopnées (>5/ H) Eveils inconscients Efforts respiratoires Fragmentation et allégement Stress cardiaque du sommeil (hypertonie sympathique) Somnolence diurne , troubles cognitifs HTA, AVC, Angor
Complications du SAOS Mortalité Risques cardiovasculaires : HTA Coronaropathie Troubles du rythme AVC HTAP
Complications (2) Accidents du travail Accidents de la route: 2 à 7 fois plus Troubles cognitifs et mnésiques
Décompensation d’un problème respiratoire Complications (3) Décompensation d’un problème respiratoire BPCO = overlap syndrome IRC restrictive Pariétale Neuromusculaire Syndrome d’obésité-hypoventilation
Traitements 5 types: Intervention comportementale Pression Positive Continue (PPC) Orthèses endo-buccales Chirurgie Médicaments
1. Interventions comportementales Réduction du surpoids Thérapies positionnelles Suppression alcool, tabac, sédatif
2. La Pression Positive Continue Sullivan 1983 Traitement de référence des SAOS modérés à sévères Problématique essentielle: tolérance et observance
PPC : mécanismes d’action Attelle pneumatique : diamètre des voies aériennes supérieures volume pulmonaire pression requise si tendance au collapsus (poids, alcool, sédatifs, stades de sommeil)
PPC : modes et humidification Modes: constant piloté ou auto ajusté flexible (pression expiratoire) double niveau de pression auto asservie (ASV) Humidificateur à air chaud intégré ou non
Interfaces: masques et harnais
Effets du traitement par PPC Hauts niveau de preuve: IAH (<10) Somnolence Faibles niveaux de preuve: qualité de vie stades profonds de sommeil fonctions cognitives TA diurne et nocturne risque cardiovasculaire accidents de voiture AC/FA après cardioversion FEVG si Insuffisance cardiaque médiateurs de l’inflammation insulinorésistance
Effets secondaires de la PPC Dus au masque: Fuites inconfort, bruit, conjonctivite Blessures et marques cutanées Sécheresse buccale Claustrophobie Symptômes nasaux: Epistaxis Congestion/obstruction Douleur Rhinite/ rhinorrhée Autres: Intolérance à la pression Aérophagie
Acceptation et adhésion à la PPC Acceptation de la PPC = accepter de faire l’essai de PPC: 50 à 85% Adhésion à la PPC = observance d’au moins 4 heures /nuit, 70% des nuits: # 70% à 3 ans
PPC: conclusion Meilleur traitement du SAOS modéré à sévère. Le bénéfice clinique est le plus souvent rapidement évident et supérieur à la contrainte. L’adhésion au long cours est meilleure que celle des médicaments dans les autres maladies chroniques. L’amélioration de l’observance relève souvent d’aménagements techniques. La prise en charge éducative peut permettre aux patients de mieux supporter la PPC.
3. orthèses d’avancée mandibulaire Mécanismes d’action: Augmentation du calibre des voies aériennes supérieures Diminution du risque de collapsus des voies aériennes supérieures par mise en tension de la paroi pharyngée
OAM les plus courantes en France Orthèse type O.R.M. - Traction Orthèse type Herbst - Propulsion
Effets secondaires des OAM (1) Fréquents: Douleurs dentaires, gingivales Engourdissement articulaire et sensation de perte de l’occlusion Hypersalivation Sécheresse buccale
Effets secondaires des OAM (2) Effets secondaires orthodontiques: peu fréquents si avancée ≤ 6mm A long terme (≥5 ans): risque de version antéropostérieure des incisives Pas de pathologie articulaire si avancée progressive
Facteurs prédictifs d’efficacité Facteurs de succès: Femmes Apnées positionnelles SAOS légers Facteurs d’échec: Mauvais état et/ou hygiène dentaire Avancée mandibulaire volontaire ≤ 5 mm Obésité (IMC > 35 kg/m2)
Orthèses:conclusions Les OAM améliorent significativement les paramètres respiratoires et la qualité du sommeil chez les porteurs de SAOS légers voire modérés. Les OAM sont indiquées dans ces types de SAOS en première intention. Véritable alternative en cas de mauvaise tolérance à la PPC.
4. Chirurgie Fosses nasales: désobstruction par turbinectomie Sur le squelette: ostéotomie d’avancée mandibulaire en cas de rétromandibulie. Sur les tissus mous: amygdalectomie, uvulopharyngoplastie, réduction de base de langue. Indication: SAOS léger à modéré, sans comorbidité cardiovasculaire ni obésité. Obstacle évident. Effets secondaires: douleur, paresthésies pharyngées, RGO.
5. Médicaments Acétazolamide, Protriptyline, Paroxétine, Médroxyprogestérone, Théophylline, Buspirone, etc…. aucune efficacité démontrée. Modafinil : psychostimulant, indiqué en cas de somnolence excessive dans les SAOS bien corrigés par la PPC.
Conclusions SAOS fréquent et avec obésité. Symptômes variés mais surtout somnolence. Diagnostic clinique possible mais nécessité de confirmation polygraphique. Associé aux maladies cardiovasculaires. Traitement efficace mais contraignant.
SAOS et maladies endocriniennes Obésité/syndrome métabolique DNID Hypothyroïdie Acromégalie
Obésité 13% de la population française 25% des sujets obèses souffrent d’apnées du sommeil. 70% des SAOS sont obèses. Un gain de poids de 10% augmente le risque de SAOS de 32%. Effet du SAOS sur l’obésité : Impact sur le métabolisme glucidique par le biais de la privation de sommeil Facteur indépendant de maladie cardiovasculaire (HTA, idm, mort prématuré) Asthénie et ↘ exercice physique La physiopathologie du SAOS chez l’obèse est multifactorielle : - dépôt de graisse sur les parois latérales du pharynx - fatigabilité des muscles dilatateurs du pharynx avec une réversibilité sous CPAP. (prédominance de fibres musculaires de type Iib) - graisse abdominale réduit le volume pulmonaire, réduisant la tension longitudinale des VAS et donc elles sont plus collabables.
Effet du ttt de l’obésité sur le SAOS Chirurgie : réduction pondérale de l’ordre de 30%. - risque péri opératoire de décès. - diminution marquée de l’IAH, avec, dans un pourcentage important de cas, une guérison du SAOS. Régime : réduction pondérale le plus souvent modérée. Effets sur le SAOS souvent modestes, permettant rarement l’arrêt de la PPC. Pas d’acquis définitif. Le SAOS peut récidiver ou s’aggraver des années plus tard, essentiellement en cas de reprise pondérale, et parfois même alors que le poids n’a pas augmenté.
Effet de la PPC sur l’obésité Amélioration du syndrome métabolique dans 20% des cas : ↘ du cholestérol total et HDL, des TG ↘ de l’IMC et de la graisse abdominale Effet sur la leptine élevée chez les SAOS obèses et normalisée sous PPC ↘ de l’épaisseur intima/média. Diminution des risques cardiovasculaires
DNID 6,4% de la population mondiale. Facteurs de risque communs: obésité, âge. La prévalence du SAOS dans le diabète très variable. 48% dans l’étude de Einhor sur 279 diabétiques avec comme facteurs prédictifs l’âge > 62 ans, l’IMC ≥ 30kg/m², l’existence de ronflements et d’apnées constatées par l’entourage. On ne peut pas affirmer aujourd’hui que le SAOS est un facteur de risque de développement d’un diabète. Possibles mécanismes d’action du SAOS sur le métabolisme glucidique et l’insulinirésistance: - augmentation de l’activité sympathique - hypoxie intermittente - fragmentation et la diminution du sommeil - dysrégulation de l’axe hypothalamo-hypophysaire - dysfonction endothéliale - anomalies de production de cytokines et d’adipokines
Effets du ttt du SAOS sur le DNID Il semble que la PPC améliore le contrôle des du diabète par les traitements antidiabétiques. Diminution du risque cardiovasculaire sous PPC.
Hypothyroïdie 3% dans la population générale, prédominant chez la femme. Jusqu’à 25-30% des hypothyroïdiens ont un SAOS. 1 à 3% des SAOS ont une hypothyroïdie. Effet de la PPC: peu d’études ↘de la TSH sans augmentation de T4 après un mois. Réponse rapide de la TRH et secondaire de la TSH. Effet du ttt de l’hypothyroïdie : peu d’études Il semble qu’il puisse y avoir une correction du SAOS sauf si le patient est obèse. Il semble raisonnable d’attendre la correction de l’hypothyroïdie avant de mettre en route une PPC. Physiopathologie : - Infiltration des tissus des VAS par de l’albumine et des mucopolysaccharides - Altération du système de régulation des muscles dilatateurs du pharynx due à la neuromyopathie observée dans l’hypothyroïdie elle-même - Diminution de la réponse ventilatoire - Gros goître
Acromégalie 1/140 000 à 1/250 000. 70% des acromégales ont un SAOS avant traitement. Le SAOS est la principale explication de la fatigue et contribue à l’altération de la qualité de vie. Le ttt de l’acromégalie (analogues de la somatostatine) améliorent la sévérité du SAOS. Mais 40% restent apnéiques après traitement peut être à cause de la persistance d’une surcharge pondérale. Physiopathologie : - modifications du squelette facial, - infiltration des tissus pharyngés, - macroglossie mais aussi le surpoids. - myopathie des muscles dilatateurs du pharynx.