Picasso, « Guernica », 1937, 352cm X 782cm, Madrid
Sur la gauche, un taureau à l'encolure retournée. Juste devant, une femme hurle sa douleur avec un enfant dans ses bras. Au centre, un cheval s'effondre, transpercé par une lance. En bas du tableau, un guerrier coupé en deux, main gauche ouverte, main droite crispée sur une arme cassée. Tout à droite, une femme transformée en torche tombe dans le vide. En dessous, le corps d'une autre femme, avec un pied difforme, continue le mouvement, s'affalant sur le cheval.
D'une fenêtre apparue de nulle part, sort une tête avec un bras vengeur tenant une torche. Ses seins sont cloutés. Une ampoule, qui éclaire violemment, casse l'ombre. Quatre flammes lui font un écho lugubre à droite. Sur une table, agonise un oiseau frappé par une lumière violente. La lumière ne vient ni de l'intérieur, ni de l'extérieur. Il est impossible de savoir le moment de la journée. La lumière vient de l'intensité de la scène : les personnages sont clairs, le décor est sombre. Il n'y a pas de couleurs : le tableau est en noir et blanc. C'est ce qui donne la puissance dramatique au tableau.
On peut diviser le tableau en trois pans : 1/ le taureau et la femme à gauche, 2/ le cheval et l'apparition au centre, 3/ la femme torche à droite. Ils sont reliés par le guerrier au sol à gauche et la femme qui s'effondre à droite. Des triangles organisent ensuite le tableau.
L'œuvre de Picasso déforme les personnages, les transformant en monstres, ce qui est habituel dans la peinture expressionniste. La particularité de Guernica est que ces monstres ne renvoient pas à un rêve ou à l'inconscient, mais bien à une réalité. Au lieu de peindre la souffrance particulière d'une mère, d'une femme, d'un guerrier, Picasso montre la souffrance de toutes les mères dépossédées, de tous les guerriers vaincus, de toutes les femmes brulées vives. C'est une allégorie. Picasso a voulu exprimer dans cette œuvre le démembrement du monde en proie aux horreurs de la guerre.