L’Europe économique et monétaire ESH Camille Vernet Nicolas Danglade
La construction « économique » européenne Du traité de Rome à l’Acte unique : 2 temps : 3 questions - Stimuler les échanges ? - Stimuler la croissance - Faire disparaître les « frontières » (réaliser l’intégration parfaite) La politique européenne de la concurrence La PAC
La construction « monétaire » européenne Le rapport Werner et la crise du système de Bretton Woods : l’UEM un projet ancien Le serpent monétaire et le système monétaire européen Le passage au marché unique pousse au passage à l’euro Les critères de convergence et la coordination de certaines politiques nationales
Le fonctionnement de l’UEM : intégration, hétérogénéité et crise Une double dynamique : convergence des niveaux de vie par tête vs divergence des structures productives Une crise : crise des dettes souveraines Une explication : l’UEM pousse à l’hétérogénéité croissante des économies et n’apporte pas de réponse lorsque cette hétérogénéité se transforme en crise
1. La construction d’une Europe « sans frontières intérieures » : le projet de marché unique et ses conséquences Du traité de Rome à l’Acte unique Les conséquences de l’instauration du marché unique sur l’intégration économique et la croissance
1. 1 Du Traité de Rome à l’Acte unique 1. 1 1.1 Du Traité de Rome à l’Acte unique 1.1.1 Le Traité de Rome: de l’Union douanière à l’eurosclérose L’Union douanière : ZLE + tarif commun (réalisé en 1968) + PAC Élargissements années 1970 et 1980
Europe (début 1980) toujours fragmentée du projet de marché commun, deux libertés : circulation des marchandises et actifs (salariés + certains indépendants) Pas de circulation services, capitaux et professions libérales Circulation des marchandises freinées par les pratiques protectionnistes : essor du protectionnisme non tarifaire (normes et quota) + utilisation article 6 et 19 du Gatt) Soutien aux champions nationaux (subvention) La récession économique = pousse les pays européens à chercher des solutions nationales
1.1.2 L’Acte Unique (1986) et la finalisation du marché commun Rapport Delors (1985) : nécessité de mettre en œuvre les 4 libertés Rapport Checcini (1988) : mesurer le coût de la non-Europe Penser le passage de la CEE à l’UE puis à l’UM L’Acte unique et le traité de Maastricht : une solution « européenne » aux difficultés que connaissent tous les pays de la CEE; faire reculer les solutions « nationales » protectionnistes
Marchandises : suppression contrôles douaniers avec uniformisation des procédures administratives Application du principe de reconnaissance mutuelle des normes nationales (arrêt Cassis de Dijon 1979)
Hommes et Capital Liberté des mouvements de capitaux (1992) Espace Schengen (1993)
Services Libéralisation de nombreuses activités sauf (santé, sécurité sociale …); Déréglementation des activités de réseau (énergie, transport, télécommunication, poste …) : - Suppression monopole public Suppression marché en monopole
1.2 Les conséquences de l’instauration du marché unique 1.2.1 L’impact sur les échanges communautaires et l’intégration des économies 1.2.2 L’impact sur la croissance 1.2.3 Une économie toujours fragmentée ? L’Europe sans frontières intérieures ?
1.2.1 L’impact sur les échanges communautaires et l’intégration des économies
1.2.2 L’impact sur la croissance
Les gains attendus du passage au marché unique DIPP Recul des contrôles administratifs Hausse de la concurrence Choix de localisation Effet de rationalisation Baisse des coûts de transaction Économie d’échelle / innovation Baisse des prix Hausse de la demande Diversité de l’offre Gains d’efficience : avec la même quantité de facteurs, la production est supérieure
1.2.3 Une économie toujours fragmentée ?
Source: Trésor-Eco octobre 2015 « Pourquoi et comment approfondir aujourd'hui le marché intérieur européen »
Des secteurs où l’intégration reste incomplète Les actifs: très faible mobilité du travail (8 fois plus faible qu’aux Etats-Unis) Les services : 70% du PIB Hétérogénéité des réglementations nationales dans certains métiers Des industries de réseaux de taille nationale et non européenne Les capitaux : peu d’acteurs paneuropéens et absence d’un marché unique de l’émission de dette publique
2. Les politiques économiques « communautaires »: la politique de la concurrence et la PAC 2.1 La politique de la concurrence Réalisation du marché unique = - Éliminer les entraves à la concurrence - Mises en place par les entreprises ou par les Etats
La politique de la concurrence Contrôler les pratiques anti-concurrentielles des entreprises: formation de cartels et abus de position dominante Contrôler les fusions et les concentration afin de maintenir un degré de concurrence sur les marchés Contrôler les aides publiques (qui favorisent certaines entreprises au détriment des autres)
La politique de la concurrence Cartels (des ascenseurs, 2007) et abus de position dominante (Treta Park, 1991 ou Microsoft ) Contrôler les fusions et les concentration (refus fusion Aer Lingus et Ryanair; environ 0,5% de refus) Contrôler les aides publiques (subvention de la France à SNCM; tax ruling du Luxembourg ou des Pays-Bas)
Mais la politique de la concurrence doit également tenir compte Tout les ententes ne sont pas nocives : - Le partage de certains coûts fixes peut être bénéfique pour les consommateurs - La recherche d’externalités positives Toutes les aides publiques ne sont pas condamnées - aides aux PME, à la R&D, au développement durable, à l’emploi de personnes handicapées La degré de concurrence ne dépend pas du nombre d’entreprises présentes sur le marché mais de la « contestabilité » des marchés
La politique de la concurrence doit réaliser un arbitrage Si elle n’intervient pas : Abus, cartel, disparition de la concurrence, aides déloyales Si elle intervient trop, elle empêche: La coopétition L’intervention de l’Etat pour limiter les défaillances de marché
2.2 La PAC Créée en 1957 (Traité de Rome) Mise en œuvre en 1962 Premiers objectifs: autonomie alimentaire et modernisation monde rural Fonctionnement: rationalisation de l’activité sur le modèle de la CECA
Un marché administré Il existe un prix garanti (fixé de manière administrative) Lorsque le coût de production dépasse le prix garanti, les producteurs perçoivent une subvention (ils vendent à un prix inférieur à leur coût de production) Pour les produits importés = des taxes permettent de mettre le prix des produits au niveau des prix garantis
Crise de la PAC: à partir du début des années 1980 Contestation du poids de la PAC dans le budget de la CEE Le mécanisme des prix garanti et des subvention pousse à la surproduction Les conséquences environnementales d’une agriculture productiviste Une demande croissante d’intégrer l’agriculture dans les négociations multilatérales = ces demandes poussent à une libéralisation du secteur agricole et à davantage de prise en compte de l’environnement
La réforme Mac Sharry (1992) Baisser les prix garantis pour les faire converger vers les prix mondiaux Baisser les subventions aux exportations Baisser les surfaces agricoles (effet pervers : la qualité des récoltes augmente et la production agricole croît)
Réforme de 2003 Contexte d’ouverture vers le PECO Gel du budget de la PAC Découplage entre montant des aides et production réalisée (calcul des aides suivant un historique) En 2013: les aides représentent près de 85% des revenus des revenus agricoles Libéralisation des prix = disparition progressive du modèle d’agriculture administrée des années 1960/1980
Réforme de 2003 Disparition progressive du modèle d’agriculture administrée des années 1960/1980 Prise en compte de l’agriculture verte: depuis 2015, existence d’un « paiement vert »; Depuis 2007 (Traité de Lisbonne) une compétence partagée UE/Etats membres : co-financement du développement rural
La PAC Jusqu’aux années 1980 : une politique de prix administrés et de soutien direct ; protégée de la concurrence étrangère À partir des années 1980/1990: basculement vers une libéralisation progressive, une prise en compte de la question environnementale et un gel des dépenses globales dans le budget de l’UE; la PAC devient une compétence partagée;
3. La monnaie unique et le passage à l’UEM 3.1 L’intégration monétaire avant la monnaie unique 3.2 le passage au marché unique pousse à l’unification monétaire
3. 1 L’intégration monétaire avant la monnaie unique 3. 1 3.1 L’intégration monétaire avant la monnaie unique 3.1.1 L’UEM, un projet ancien : le rapport Werner Contexte : crise du système de Bretton Woods Rapport Werner (1970) : - Conserver un régime de change fixe - Création d’une union monétaire et d’une Banque centrale sur le modèle de la Fed - coordonner les politiques budgétaires - des transferts entre Etats (des plus riches vers les plus pauvres) sur le modèle US En résumé = aller vers une UEM
Échec du Plan Werner Rapport accepté par ECOFIN en 1971 mais jamais mis en œuvre Les français ne veulent pas d’une politique monétaire indépendante du pouvoir politique Les allemands ne veulent pas d’une politique monétaire trop dépendante du pouvoir politique (laxisme et inflation) = = Conflit idéologique Fr/All
3.1.2 Le serpent monétaire et le SME La crise du SMI pousse les européens à agir: 1971 : les Etats-Unis suspendent la convertibilité or du dollar Les accords du Smithonian institut (1973) : conserver un régime de change fixe autour du dollar avec des bandes de fluctuations de +/-2,25% Ces bandes sont trop larges pour les européens = création du serpent monétaire Echec : les anglais (1974) puis les français (1976) sortent du serpent monétaire (les écarts d’inflation les poussent à dévaluer leurs monnaies)
Le Système monétaire européen À partir de la fin des années 1970, la position française se rapproche de la position allemande en matière d’inflation et de maîtrise des comptes publics Création du SME : Élaboration d’un panier de monnaies européennes sur lequel sont ancrées les monnaies nationales Unité de compte européenne : l’ECU - Possible dévaluation au sein du SME après accord avec les autres Etats membres
Quel problème pose le passage au marché unique ? 3.2 Le passage au marché unique pousse à l’unification monétaire 3.2.1 « One market, one money » ? Premier argument : Quel problème pose le passage au marché unique ? La libéralisation des mouvements de capitaux rend impossible le fait d’avoir simultanément une politique monétaire autonome et un régime de change fixe = le triangle des incompatibilités (Mundell) adapté au cas européen par Padoa-Schioppa
Premier argument : Le passage à la monnaie unique s’explique car les européens libèrent la circulation des capitaux et perdent alors l’autonomie de leurs politiques monétaires
Deuxième argument : les nombreuses crises de change dans le cadre du SME Si la politique monétaire apparaît comme non crédible Les investisseurs anticipent une dévaluation : sortie des capitaux La banque centrale défend la parité de sa monnaie : hausse des taux et épuisement des réserves Jusqu’au moment où le coût devient trop important = passage au change flottant / abandon change fixe / la Grande Bretagne quitte le SME en 1993 Jusqu’au moment où la spéculation cesse : cas français / mais au prix d’une politique monétaire totalement ancrée sur l’Allemagne
Troisième argument : le rôle de l’UM dans l’intégration économique Les « monétaristes » (Fr): le passage à la monnaie unique va stimuler l’intégration des économies et leur convergence Versus la position des « économistes » allemands : pour passer à la monnaie unique il faut des économies déjà proches les unes des autres Consensus : des critères de convergences « nominaux » pour décider qui entre dans l’euro
Union monétaire Des changes fixes durs irrévocables Mais une politique monétaire de nouveau autonome Déplacée à un niveau « supérieur » La question est alors de savoir si cette politique convient à tous les pays membres (problématique de la zone monétaire optimale ?)
Quel lien avec le rapport Werner ?
Le rapport Delors (1985) puis le Commission Delors (1989) Aller vers l’UEM : 3 étapes Mais différence avec le rapport Werner : Pas de budget européen capable de réaliser des transferts entre régions riches et pauvres Interdiction des transferts entre Etats Interdiction de monétiser la dette publique Contrôle de l’inflation Indépendance de la BCE = influence allemande (importance de la règle)
3.2.2 Le passage à la monnaie: critères de convergence et PSC Règles de finances publiques limite du déficit et de la dette publique Interdiction de monétiser la dette Interdiction des transferts entre Etats Critères de convergence « nominaux » - Stabilité des prix - Convergence des taux d’intérêt stabilité du taux de change
Règles de finances publiques ? (rappels) Pas de monétisation de la dette publique = éviter inflation Pas de bail-out = éviter aléa moral Limite du déficit public = avec une monnaie unique les effets des émissions de dette publique sur les taux d’intérêt sont trop faibles pour agir comme des garde-fous = éviter passager clandestin
4. Le fonctionnement de l’UEM : de la convergence à la crise de l’euro 4.1 Une double dynamique jusqu’à la fin de la décennie 2000 : convergence des niveaux de vie mais divergence des structures productives 4.2 De l’endettement extérieur croissant à la crise des dettes souveraines 4.3 La crise des dettes souveraines: une crise du fonctionnement de la zone euro 4.4 Quelles voies de sortie pour la zone euro ? Quel avenir pour l’UE?
4.1 Une double dynamique jusqu’à la fin de la décennie 2000 : convergence des niveaux de vie mais divergence des structures productives
4.1.1 La dynamique de convergence des niveaux de vie
Une croissance plus rapide dans les pays du Sud: rattrapage
Des taux de croissance supérieurs dans les pays du Sud : rattrapage
4.1.2 La dynamique de divergence des structures productives
La désindustrialisation plus rapide des pays du Sud
Les activités à forte VA s’agglomèrent davantage
Lien entre : déséquilibre courant et désindustrialisation ?
4.1.3 Comment expliquer double dynamique ? L’intégration économique et monétaire Baisse des coûts de transaction = phénomène d’agglomération (hausse inégalités régionales) Stimule les échanges (biens, services et capitaux) et le rattrapage des économies en retard Apparition d’écarts de croissance: demande plus dynamique au Sud Impact sur les niveaux de vie par tête : convergence Impact sur l’inflation: divergence (hétérogénéité des structure éco )
Quel mécanisme se met en place avec la hausse de l’inflation (inflation plus importante au Sud) ?
L’intégration économique et monétaire Une politique monétaire unique : un seul taux d’intérêt nominal Apparition d’écarts de croissance: plus élevée au Sud 3’ 3 1 2 Impact sur les niveaux de vie par tête : convergence Impact sur l’inflation: divergence Écarts de taux d’intérêt réels 4 CSU augmentent plus vite Dégradation des performances commerciales : désindustrialisation + déficit balance courante 5 7 Économie besoin de financement Compétitivité prix recule 6
Europe du Sud / Europe du Nord Une demande intérieure : +30% Europe du Sud contre +15% Europe du Nord Inflation : +1 pt de plus au Sud Coût salariale unitaire (dépend salaire + productivité) : +38% en Grèce entre 2002 et 2010 contre +17% en moyenne Évolution part de l’industrie : recul plus important au Sud
En résumé : des économies plus hétérogènes L’hétérogénéité est la conséquence « normale » de l’UEM: Le déficit extérieur de certaines économies provient des écarts de taux d’intérêt réel qui stimulent des écarts de CSU et dégradent la compétitivité prix (positionnement bas de gamme) Perte de compétitivité prix accentuée par la concurrence par des PECO Les déséquilibres courants sont financer par les flux de capitaux Mais aussi des politiques nationales : Des politiques de contrôle du CSU au Nord (Loi Hartz en Allemagne) qui accentue les excédents commerc. du Nord Une allocation déficiente des capitaux au Sud : les capitaux sont alloués vers des secteurs à faible PGF qui ne stimulent pas la croissance potentielle
Le financement des déséquilibres extérieurs Économie en besoin de financement Économie en capacité de financement Les dépenses sont supérieures aux revenus Les revenus sont supérieures aux dépenses L’économie emprunte à des agents non résidents L’économie prête à des agents non résidents
4.2 De l’endettement extérieur croissant à la crise des dettes souveraines : le cas grec Les économies en besoin de financement = hausse de l’endettement auprès d’agents non résidents Risque ? Un sudden stop
4.2.1 L’endettement augmente dans les économies en besoin de financement
4.2.2 Le piège de la dette publique Comment passe-t-on à la crise de la dette ?
La perte de confiance des investisseurs : hausse des spreads Grèce Irlande Portugal Italie
Le piège de la dette publique La défiance des investisseurs se matérialise par une hausse de la prime de risque = hausse coût de l’endettement Dans un contexte de ralentissement économique : hausse dépenses / recul des recettes = aggravation du déficit public Conséquence : L’Etat doit se refinancer pour un montant supérieur à un coût plus élevé Le montant des échéances des remboursements explose La hausse des montants en rembourser creuse le déficit publique = nouvel endettement (il faut emprunter davantage pour rembourser sa dette) Cercle vicieux de la dette publique
Budget Etat grec : environ 50/60 millions €
4.2.3 La Grèce menace de « faire faillite » Incapacité à rembourser ses créanciers Ses créanciers sont essentiellement des investisseurs européens En particulier des intermédiaires financiers d’Europe du Nord (pays à capacité de financement) Une crainte : la faillite grecque peut entraîner une faillite des banques européennes
Comment sortir de cette situation ? Le dette grecque va « changer de main » Elle passe de créanciers privés à des créanciers « publics » : - Les Etats membres de la zone euro - Le FMI - La BCE (plus tard)
Comment sortir de cette situation ? 3 plans d’aide successifs Les Etats membres de la zone euro : prêt bilatéraux sans versement des intérêts = respect du no bail-out Création du Fonds européen de Stabilité financière (2010), remplacé en 2012 par le MES Le FMI La BCE : achat de titres publics détenus par des créanciers privés
En 2015, les créanciers de la Grèce
4.2.4 Un choc de demande négatif qui frappe toute l’UE
Les contreparties de ces aides Réduire le champ de la dépense publique Augmenter les recettes publiques = un important choc de demande négatif
Hausse impôts et baisse des dépenses publiques Dévaluation « interne » Baisse déficits publics et excédents en 2015 Choc de demande négatif Baisse des importations Déflation (2013-2015) Recul du déficit extérieur Baisse de la croissance et de la croissance potentielle Le ratio (dette/PIB) ne bouge pas Recul du besoin de financement
Le choc de demande négatif se diffuse dans toute l’UE En 2010, les Etats européens qui ont réagit à la crise de 2008 en laissant se creuser les déficits ont peur que la défiance se diffuse de la Grèce vers chez eux Simultanément, tous les pays cherchent à se « protéger » en pratiquant une politique de « consolidation budgétaire » Choc de demande négatif global
4.2.5 Quel avenir pour la dette grecque ? Un futur Grexit ?
Quel avenir pour la dette grecque ? Un futur Grexit ? La Grèce ne paie pas d’intérêt sur les prêts bilatéraux jusqu’en 2022; maturité 30 ans La Grèce ne paie pas d’intérêt sur les prêts du MES jusqu’en 2023; maturité 30 ans La BCE reverse à la Grèce les intérêts qu’elle perçoit La Grèce ne rembourse en totalité que la FMI Question: la situation de la Grèce peut-elle s’améliorer d’ici 2022 et le début du remboursement des intérêts ?
Quel avenir pour la dette grecque ? Un futur Grexit ? Question: la situation de la Grèce peut-elle s’améliorer d’ici 2022 et le début du remboursement des intérêts ? Pour pouvoir tenir ses échéances d’ici 2022, il faut que la Grèce puisse dégager chaque année d’ici là un surplus budgétaire de 3% à 4% Aujourd’hui, elle est à 2% Conclusion : Le Grexit se reposera en 2022
4.3 La crise des dettes souveraines : une crise de fonctionnement de la zone euro 4.3.1 Un triple constat : l’UEM provoque des crises L’UEM creuse l’hétérogénéité entre les économies européennes = déséquilibre balance courante (= risque sudden stop) Les politiques de coordination (notamment le PSC) n’ont pas permis d’éviter des dérapages de finances publiques : finalement la coordination « coercitive » ne l’est pas tant que ça Des pays ayant parfaitement suivi le PCS ont également été touchés : le champ de la coordination des politiques est mal défini
4.3.2 Les solutions utilisées pour faire face à la crise sont inefficaces et affectent la croissance : Les pays qui ont été soutenus par l’UE et le FMI = des politiques d’austérité / dévaluation interne = impact négatif sur la croissance potentielle Les pays qui ont eu peur de voir la défiance les contaminer = des politiques de consolidation budgétaire La solution européenne intergouvernementale : signature du TSCG = « officialise » l’usage des politiques de consolidation budgétaire Or les études montrent que le multiplicateur budgétaire est fort quand l’output gap est élevé
4.3.3 Pourquoi la seule solution pour la Grèce a été la dévaluation interne?
La Grèce est touchée par un choc de demande négatif (crise de la dette souveraine) = chute du PIB = comment relancer l’activité ? Il n’est plus possible d’utiliser le taux de change: pas de dévaluation « externe » La population active est imparfaitement mobile: les régions en croissance n’absorbent pas les chômeurs des autres Il n’est pas possible de relancer le budget en creusant son déficit puisque le financement du déficit est impossible (sudden stop)
Pas prévu par les traités Que faire ? Sortir de l’euro ? La dévaluation = explosion dette extérieure ; impossibilité financer déficit courant = appauvrissement Pas souhaitable Les Etats « riches » transfèrent au « pauvres » des revenus pour maintenir leurs dépenses globales : c’est le principe du fédéralisme budgétaire. Pas prévu par les traités Pratiquer une dévaluation « interne » : amélioration de la compétitivité par la baisse des CSU = rétablir sa balance courante = devenir une économie à capacité de financement
La solution de la dévaluation interne Tout pays en besoin de financement risque le sudden stop Et chaque crise doit conduire à rétablir la balance courante au prix d’une dévaluation interne Au final : aucune économie ne souhaite être en situation de déficit courant = pousse aux politiques non coopératives pour avoir un excédent courant
4.4.4 La zone euro n’est pas une ZMO Les structures économiques sont hétérogènes Si choc : concerne une économie et pas les autres Pas de mobilité des actifs Pas de transferts budgétaires entre régions Seule solution : la dévaluation interne pour rétablir sa balance courante
dumping social et fiscal entre pays européens Chaque Etat essaie d’attirer les « facteurs mobiles »: capital et travail très qualifiés Les écarts de fiscalité et de protection sociale deviennent des « atouts » de la compétitivité d’une économie nationale = dumping social et fiscal entre pays européens
L’UEM : un bilan Une période de rattrapage et de croissance Un creusement de l’hétérogénéité Des crises de balance courante Une coordination déficiente des politiques budgétaires Conséquence : Dévaluation interne Préventif : Stratégie non coopérative Choc de demande négatif : plus de croissance Absence de solidarité
4.4 Quelles voies se sortie pour la zone euro ? Quel avenir pour l’UE ? L’UEM : creuse les différences de structures économiques entre Etats ce qui provoque des déséquilibres des balances courantes ne propose pas de solution autre que la dévaluation interne pour y faire face
4.4 Quelles voies se sortie pour la zone euro ? Quel avenir pour l’UE ? Solutions ? Repli national = solution souverainiste / fin de l’UE Solution fédérale = modèle des Etats-Unis (faire disparaître les problèmes liés à la non optimalité de la zone euro) Solution intermédiaire = plus pragmatique
4.4.1 Sortir de l’UE ? Inconvénients ? Dévaluation Réduire les échanges Réduire surplus du consommateur Augmenter le prix des biens intermédiaires Augmente dette extérieur Avantages ? Tout dépend si le pays participent à Schengen et l’euro si la dévaluation stimule les exportations
4.4.2 Créer deux zones monétaires Avantages : Des économies qui ont des caractéristiques structurelles proches partagent la même monnaie car elles forment une « zone monétaire optimale » Inconvénients: Les pays à monnaie faible manipulent leur monnaie pour gagner en compétitivité ; nécessité d’une coordination des deux politiques monétaires
4.4.3 Une solution intermédiaire Avancer progressivement vers la constitution d’un marché du travail européen Inciter à la mobilité en créant une portabilité des droits Ex: une assurance chômage européenne
4.4.4 Les transferts budgétaires fédéraux Réponse à : Éviter les crises de balance courante dans une zone monétaire non optimale Sous investissement de certains Etats dans le domaine social (éducation & santé) et la R&D, donc dans le capital humain = action sur leur croissance potentielle (France Stratégie) Admettre que l’hétérogénéité des territoires est une conséquence « normale » (Artus) de l’intégration des économies nationales = il faut donc pouvoir la « gérer collectivement » (Crozet)
Patrick Artus et Isabelle Gravet « La crise de l’euro » 2012 Sans cette évolution vers le fédéralisme, il ne peut y avoir qu’éclatement de l’euro, les pays de la zone euro étant pris entre la nécessité d’équilibrer leurs comptes extérieurs et celle de respecter la spécialisation productive conforme à leurs avantages comparatifs et à leurs dotations en facteurs de production. Le fédéralisme est sans conteste la seule réponse possible à la crise actuelle. C’est même la condition sine qua non de toute union monétaire.