Chapitre 2 La monnaie et le financement de l’économie ESH ECE 1 Camille Vernet 2017-2018 Nicolas Danglade
3 parties 1. Le financement de l’économie 2. La monnaie : création monétaire et évolution des formes de la monnaie 3. La monnaie dans les théories économique
1. Le financement de l’économie 1.1. Le rôle du système financier 1.2 Les modalités de financement de l’économie 1.3 Les avantages de l’intermédiation financière 1.4 Les limites du financement intermédié
1.1 Le rôle du système financier Le système financier : ensemble des institutions qui rendent possibles le financement des acteurs économiques Il existe des acteurs à besoin de financement et des acteurs à capacité de financement Un système financier permet d’orienter les ressources des acteurs à capacité vers les acteurs à besoin de financement
Le système financier permet l’allocation des ressources financières Acteurs économiques à capacité de financement Acteurs économiques à besoin de financement Système financier Le système financier permet l’allocation des ressources financières
En absence de système financier Que font les agents à capacité de financement de leurs ressources ? Comment se financent les agents à besoin de financement ? Mauvaise allocation des ressources financières
Qui sont généralement les agents à capacité de financement ? Qui sont généralement les agents à besoin de financement ? Ménages ? Entreprises ? Administrations ?
1.2 Les modalités de financement de l’économie Intro : quelques rappels 1.2.1 Distinguer financement direct et financement intermédié 1.2.2 Le financement intermédié peut prendre plusieurs formes
Cette épargne est utilisée pour investir : autofinancement Après répartition primaire et redistribution, les agents privés (ménages, entreprises) possèdent une épargne brute Cette épargne est utilisée pour investir : autofinancement Lorsque le montant de cette épargne > dépenses d’investissement Lorsque le montant de cette épargne < dépenses d’investissement Situation de besoin ou de capacité de financement ? Situation de besoin ou de capacité de financement ?
Comment financer des agents à besoin de financement ? Quelles modalités ?
1.2.1 Distinguer financement direct et financement intermédié Typologie proposé par Gurley & Shaw (1960) Trois types d’agents économiques : Agents à besoin de financement Agents à capacité de financement Intermédiaires financiers
Deux formes de financement Agents à capacité de financement Agents à capacité de financement Achètent directement les actifs émis les AE à besoin de financement Intermédiaire Agents à besoin de financement Agents à besoin de financement
Rappel: les actifs financiers ? Les actions ? Les obligations ?
Rappel: les actifs financiers ? Les actions ? Les obligations ? Titre de propriété de l’entreprise L’actionnaire fournit du capital à l’entreprise Elle l’utilise pour financer ses besoins d’investissement Rémunération : les dividendes (part des bénéfices) Emprunt (émis par une entreprise ou l’Etat) Rémunération : intérêts Le capital emprunté est remboursé à la fin du prêt obligataire
1.2.2 Le financement intermédié peut prendre plusieurs formes Typologie de Mario Dehove : Intermédiation de bilan Intermédiation de marché Intermédiation de création monétaire
Rappel : le bilan comptable Actif du bilan : On y trouve ce que « possède » l’AE Passif du bilan : On y trouve ce que « doit » l’AE La valeur de son local La valeur des machines Les créances qu’il possède sur d’autres agents …. Le capital apporté par les actionnaires Les dettes de l’entreprise ….
L’intermédiation de bilan (ou de crédit) Les crédits sont des prêts de l’IF à des AE à besoin de financement : ces agents ont une dette vis-à-vis de l’IF; L’IF a une créance vis-à-vis de ces agents; Les crédits accordés par l’IF sont enregistrés à son actif Les dépôts sont confiés à l’IF qui doit pouvoir les restituer = les dépôts sont au passif de l’IF
L’intermédiation de marché l’IF achète des actifs auprès d’AE à besoin de financement = enregistrement à son actif Généralement des obligations : l’IF s’endette auprès d’AE à capacité de financement = enregistrement à son passif
L’intermédiation de création monétaire L’intermédiaire crée de la monnaie = seules les banques peuvent le faire
Les banques dans l’intermédiation
En résumé: deux formes d’intermédiation Agents à capacité de financement Agents à capacité de financement Emission de titres achetés par agents à capacité de financement dépôts Intermédiaire Intermédiaire Emission de titres achetés par l’intermédiaire financier Prêts Agents à besoin de financement Agents à besoin de financement
Intermédiation de crédit Intermédiation de marché Agents à capacité de financement Agents à capacité de financement Emission de titres achetés par agents à capacité de financement dépôts Intermédiaire Intermédiaire Emission de titres achetés par l’intermédiaire financier Prêts Agents à besoin de financement Agents à besoin de financement
Synthèse des modalités de financement Auto-financement Système financier Financement direct Financement indirect ou intermédié Intermédiation de crédit Intermédiation de création monétaire Intermédiation de marché
1.3 Les avantages de l’intermédiation Quels les inconvénients de la finance directe ? Quelles réponses apportent l’intermédiation à ces inconvénients ?
Les inconvénients de la finance directe a) La finance directe génère des coûts de transaction Le prêteur « ultime » doit chercher un emprunteur « ultime », contrôler sa qualité, contrôler les remboursements … or : Cette recherche prend du temps L’emprunteur en sait toujours plus que le prêteur = asymétrie d’information = risques de comportements opportunistes = Le temps de recherche + les asymétries d’information = incitation / désincitation à l’investissement ?
b) Le prêteur ultime et l’emprunteur ultime peuvent ne pas être d’accord sur les termes de l’échange (durée, montant …) : il n’y pas de double concordance des désirs
c) Un épargnant qui achète un titre perd tout lorsque la valeur de ce titre chute (exemple : emprunts russes)
L’intermédiation: une solution aux limites de la finance directe a) Le passage par un intermédiaire fait disparaître ces coûts de transaction En effet : l’activité des IF consiste à collecter des informations sur les emprunteurs et donc à connaître leur « qualité » = réduire asymétrie d’information Conclusion : Tant que les coûts de gestion par l’IF sont inférieurs aux coûts de transaction alors intermédiation est privilégiée
b) L’intermédiaire réalise une transformation d’échéance : entre les dépôts des prêteurs, qui peuvent être retirés à court terme, et les prêts des emprunteurs, qui sont généralement des prêts de long terme. Il garde à son passif ? Il garde à son actif ?
c) les intermédiaires financiers qui pratiquent l’intermédiation de marché mutualisent les risques en se procurant des actifs d’origine diverse
d) Les intermédiaires financiers (banques) fournissent et gèrent les instruments de paiement
Avantages de l’intermédiation 4) Les banques gèrent les moyens de paiement et les règlements Les inconvénients de la finance directe Passer directement par le marché = coûts de transaction (recherche info, …) 1) L’IF possède des informations sur les emprunteurs et fait gagner du temps Asymétrie d’information : risque de comportements opportunistes des emprunteurs Absence de concordance des désirs 2) L’IF pratique la transformation d’échéances Faible diversification du risque pour les prêteurs 3) L’IF diversifie ses achats de titres = mutualisation
1.3.4 Le poids de l’intermédiation dans le financement de l’économie aujourd’hui Part des intermédiaires financiers dans la collecte d’’épargne (Jézabel Couppey-Soubeyran): 80% en France 65% aux Etats-Unis Les agents à capacité de financement passent-ils majoritairement par le financement directe/indirect ? Peut-on parler de désintermédiation de la finance ?
Mais deux types d’intermédiation Dans les pays anglo-saxons : place prépondérante d’une intermédiation de marché = on assiste au développement conjoint des marchés financiers et des intermédiaires financiers Dans les pays d’Europe continentale : place encore prépondérante d’une intermédiation de crédit
1.4 Les limites du financement intermédié Il existe des crises de l’intermédiation : deux cas le risque d’insolvabilité de l’intermédiaire le risque d’illiquidité de l’intermédiaire
1.4.1 Le risque d’insolvabilité de l’intermédiaire financier Pourquoi un intermédiaire deviendrait-il insolvable (faillite) ? Rappel : qu’est-ce qu’un bilan ?
Le bilan d’un IF Actif Passif Dans ce bilan où place-t-on : Les Crédits aux agents à besoin de financement ? Les Titres achetés aux agents à besoin de financement ?
Le bilan d’un IF Actif Passif Crédits (aux agents à besoin de financement); Titres achetés (aux agents à besoin de financement) Que se passe-t-il (dans le bilan) si : Les emprunteurs ne remboursent plus leurs crédits? les titres acquis par l’IF ne valent plus rien parce que leurs valeurs chutent en bourse ?
On distingue deux sources d’insolvabilité : le risque de bilan Le risque de marché
Insolvabilité : situation où l’actif (ce qu’elle possède) de la banque se dégrade et ne couvre plus le passif (ce qu’elle doit) Le risque de bilan = les emprunteurs ne remboursent plus (défaillance) Le risque de marché = les titres acquis ne valent plus rien
Quelle est la conséquence de l’essor de l’intermédiation de marché sur la nature des risques qui touchent les banques ?
1.4.2 Le risque d’illiquidité de l’IF Ce type de risque est intrinsèque à l’activité de l’IF (il est inhérent à son activité)
L’IF prête « long » à des agents à besoin de financement Pour financer ces prêts : ils récoltent des dépôts « courts » des agents à capacité de financement Que se passe-t-il si les agents à capacité de financement veulent récupérer leurs dépôts avant l’échéance des prêts accordés ?
L’IF doit trouver de la liquidité pour restituer ses dépôts aux agents qui ont confié leur épargne Comment ?
Comment ? Il utilise des titres ou des créances qu’il possède à son Actif : Il les vend à d’autres IF Il les met en gage pour se faire prêter des liquidités par d’autres IF Condition : d’autres IF vont lui fournir la liquidité qui lui manque
Mais en période de crise financière et bancaire: les IF ne veulent pas prêter à d’autres IF Les IF ne veulent pas acheter des titres Crise de confiance Le refinancement en liquidité est bloqué : il n’y a plus de transactions Conséquence: un IF qui gère parfaitement ses prêts et qui possède des titres de « bonne qualité » peut ne pas pouvoir se refinancer en liquidité = crise de liquidité
Les risques de l’intermédiation Impact sur le bilan de la Banque (et des IF) enjeux sur le fonctionnement des banques et des IF Si les AE à capacité de financement retirent leurs dépôts Si les AE à besoin de financement ne remboursent pas leurs emprunts (défaillance) Si les actifs achetés sur les marchés perdent leur valeur
Les risques de l’intermédiation Quel risque ? Enjeux sur le fonctionnement des banques et des IF Si les AE à capacité de financement retirent leurs dépôts Risque d’illiquidité Confiance Si les AE à besoin de financement ne remboursent pas leurs emprunts (défaillance) Risque de défaut (insolvabilité) Récolter info sur les emprunteurs Si les actifs achetés sur les marchés perdent leur valeur Risque de marché (insolvabilité) Diversifier ses achats d’actifs
1.4.3 Que faire face aux crises de l’intermédiation ? 1.4.3.1 Que faire après que la crise se soit déclenchée ?
Crise d’illiquidité et crise de solvabilité peuvent se combiner : l’exemple de 1929
La situation des emprunteurs se dégrade : hausse des défauts Ralentissement économique / crise Détériore l’Actif du bilan des intermédiaires financiers (qui prêtent) : crise de solvabilité Détériore la confiance des déposants : Hausse des retraits aux guichets (Bank Run) Détériore la confiance des intermédiaires financiers entre eux : Les prêts entre IF baissent Les IF cessent de prêter aux agents à besoin de financement: Credit Crunch Crise d’illiquidité
9000 banques disparaissent = 15% des dépôts La situation des emprunteurs se dégrade : hausse des défauts Ralentissement économique / crise Exemple : entre 1930 et 1933 9000 banques disparaissent = 15% des dépôts Détériore l’Actif du bilan des intermédiaires financiers (qui prêtent) : crise de solvabilité Détériore la confiance des déposants : Hausse des retraits aux guichets (Bank Run) Détériore la confiance des intermédiaires financiers entre eux : Les prêts entre IF baissent Les IF cessent de prêter aux agents à besoin de financement: Credit Crunch Crise d’illiquidité
La crise bancaire et financière touche l’économie « réelle » Solution ? intervention d’un « prêteur en dernier ressort » (PDR) ?
Le PDR : Banque centrale La banque centrale prête sans conditions aux banques qui le lui demandent : elles peuvent donc obtenir de la liquidité sans difficultés
La politique monétaire de la BC en réaction à la crise de 2008
Le PDR : Etat L’Etat injecte des capitaux dans une banque en la nationalisation (ou en lui prêtant des capitaux)
Les contraintes de l’action du PDR ?
Premier dilemme du PDR (BC) La banque centrale ouvre les « vannes » de la liquidité La banque centrale n’ouvre pas les « vannes » de la liquidité Les banques sont sauvées notamment les moins bien gérées et les moins compétitives Les banques illiquides et insolvables font faillites Credit crunch L’excès de liquidité = maintien en vie des établissements peu rentables = les entreprises zombies
Second dilemme du PDR (Etat) Soit il ne vient en aide qu’aux banques qui « subissent » la crise (crise de liquidité) Soit il vient dans tous les cas en aide à toutes les banques systémiques Les banques mal gérées considèrent qu’elles seront toujours sauvées quoi qu’elles fassent, notamment les TBTF Les banques mal gérées sont abandonnées (doctrine du PDR selon Bagehot) Risque : effet domino qui déstabilise l’ensemble du système financier Ex: Lehman Brothers; crise 1929 Aléa moral : les banques et les IF prennent plus de risques
Banques systémiques et risque d’effet domino : les banques « too big, to fail »
Les inconvénients de l’action du PDR Action de la BC Action de l’Etat Entreprises / banques zombies l’aléa moral Coût du refinancement pour les finances publiques Exemple Crédit Lyonnais (un coût de 10 milliards d’euros) ; creusement du déficit public « Pile les banques gagnent, face le contribuable perd »
Conclusion PDR Le PDR a tendance à intervenir Mais ses interventions produisent autant de problèmes qu’elles n’en résolvent Solution pour éviter les dilemmes du PDR ? Intervenir en amont pour éviter qu’une crise ne se déclenche
1.4.3.2 Agir préventivement pour éviter les crises des IF Créer des assurances pour les dépôts Éviter les bank runs Mettre en place une supervision « prudentielle » des IF (généralement banques et assurances) Supervision « microprudentielle » : Empêcher faillite d’un établissement pour empêcher effet domino Supervision « macroprudentielle »: Empêcher l’instabilité de l’ensemble du système financier
Supervision microprudentielle: Obliger les banques à avoir des réserves de liquidité à la banque centrale Supervision macroprudentielle: Ex: Intervenir pour casser une bulle spéculative sur un marché ou un emballement du marché du crédit