Approche criminologie de la délinquance juvénile

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Transcription de la présentation:

Approche criminologie de la délinquance juvénile Pierre Thys (PhD) Prof. Ecole de Criminologie – Faculté de Droit ULg Directeur communautaire CFFJ St Hubert

Objectif de l’intervention Compléter l’approche sociologique Par une approche forcément très succincte De quelques éléments de psychologie du passage à l’acte Evitant la question : « pourquoi cela arrive », qui fait la part trop belle à des hypothèses et à des reconstructions a posteriori Au bénéfice d’une réflexion sur : « comment cela se produit ». Parce que le « comment » révèle bien la détermination et la préparation

Un cas exemplatif et banal : le couteau Des cas de la vie quotidienne : Bagarre à l’arrêt de bus, sac-jacking et coups à une personne qui intervient, etc. Celui qui frappe avec une arme blanche C’est d’abord quelqu’un qui a un couteau sur lui Cela reflète un processus mental préalable, par lequel on justifie la détention et le port, Et par lequel on anticipe l’usage : ce n’est jamais le mouchoir qui sort de la poche à la place du couteau (idem dans d’autres cas comme la violence conjugale p.ex.)

La préparation mentale est une constante Le passage à l’acte résulte d’un processus mental et non d’une simple impulsion. L’affirmation d’avoir « vu rouge » porte sur la phase finale de déclenchement et ne rend pas compte du processus. La préparation mentale à une action est commune aux autres actions humaines, et la violence n’en diffère pas = anticipation mentale (Sutter) Mais si l’individu criminel anticipe mentalement ce qu’il pourrait faire, il donne également à l’acte futur une légitimité morale.

Criminogenèse Le processus de maturation se nomme la criminogenèse et il se mûrit en trois phases aboutissant à l’acte 1. Assentiment inefficace 2. Assentiment formulé Éviction de la honte et de la culpabilité Préparation opérationnelle = détermination + outils 3. Crise déclenchante

 1.- La violence n’est jamais « irrationnelle » L’acte de violence correspond à ce que l’individu trouve le plus adéquat de faire Avec les moyens intellectuels, émotionnels et physiques qui sont les siens = concept de « rationalité limitée » (Boudon, Crozier et Friedberg) L’individu a toujours une raison au moins d’agir, mais il arrive évidemment qu’il ne souhaite pas la dire au juge ou aux enquêteurs ; Et il arrive également que les raisons soient plus complexes et que les capacités de compréhension de soi restent peu développées

 2.- La compétence et la répétition Ce qui a été fait une fois peut être refait … plus facilement et en mieux, comme tout comportement, pourvu qu’on y trouve : 1. Un intérêt (calcul coût-bénéfice) 2. Des opportunités L’acte délinctueux obéit à tous les processus de l’apprentissage  amélioration par répétition et désir de mieux faire la prochaine fois Il crée aussi une habitude motrice qui se substitue à la mentalisation ou l’évite l’acte porte en lui sa répétabilité mais dans le cas de la violence, la répétition génère la brutalisation

 3. l’acte violent crée une rupture L’acte de violence modifie le rapport de l’individu à lui-même et aux autres : Il isole de ceux qui ne l’ont jamais fait et lorsque l’acte est grave, il crée des conditions irréversibles : que faire de pire ? Pourquoi dès lors renoncer ? Il rapproche de la communauté de ceux qui « osent », et peut conduire à une forme d’orgueil

 4. La question du plaisir dans la violence La violence répétitive suscite l’ennui, comme toute activité humaine et donc elle porte en elle le désir de renouveler, de faire autrement, de rechercher une émotion plus puissante  élément renforçant la répétition mais aussi la brutalisation Le constat de la puissance, voir la peur chez autrui, cela peut entrer en ligne de compte  élément renforçant la répétition Augmenter les niveaux de violence, c’est un moyen : D’exprimer sa toute-puissance D’éviter la remise en question de soi (si je m’arrête c’est que j’ai eu tort) D’éviter le risque de l’identification à la victime : la cruauté renforce le processus de déshumanisation, parfois jusqu’à détruire l’apparence humaine du mort

Conclusion La conduite violente unique peut être l’expression d’une perte transitoire du contrôle de soi sous l’effet de facteurs sociaux, affectifs, émotionnels. La conduite violente répétée obéit aux règles du renforcement : l’effet produit a tendance à être recherché pour lui-même Le sentiment de puissance et l’évitement des difficultés de dialogue et négociation avec autrui sont des incitants Le plaisir n’en est pas absent et conduit à la brutalisation progressive Pour ces formes de violence répétée, il n’est pas nécessaire de postuler la pathologie mentale ou la déresponsabilisation La préparation, le calcul, l’opportunité, la détermination et les outils suffisent

Sources & suggestions bibliographiques THYS P., La pratique de la liberté surveillée, Paris, L’Harmattan, 1998. KORN M., Ces crimes qu’on dit d’amour, Paris, L’Harmattan, 2003. BORN M., Psychologie de la délinquance, Bruxelles, De Boeck, 2005. THYS P., Criminels de guerre, Etude criminologique, Paris, L’Harmattan, 2007.