« Le stockage de Carbone : comment »

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Transcription de la présentation:

« Le stockage de Carbone : comment » Christian ROUSSEAU, agriculteur à Montgenost, ex-Président délégué à l’agriculture et l’innovation, VIVESCIA, administrateur de l’IAD

LA SPIRALE DE DEGRADATION DE L’ENVIRONNEMENT

Céréales : 27 agriculteurs Polyculture élevage : 52 agriculteurs Proposition de systèmes de cultures innovants Etude basée sur le suivi de 79 fermes en France Evaluation des résultats sur la plateforme internet www.indiciades.net (IAD) Répartition de l’échantillon Céréales : 27 agriculteurs Polyculture élevage : 52 agriculteurs CADRE DE L’ETUDE

Hypothèse de départ sur le potentiel de stockage du carbone Etude INRA 2013 CADRE DE L’ETUDE

MESURE DU STOCKAGE CARBONE Utilisation du Bilan Humique Source : INRA, Dupuis, Hénin, 1945 Source IAD Adaptation du Bilan Humique par l’équation de Machet (INRA, 1990) Nécessité de prendre en compte l’intensité du travail du sol (Wylleman, 1999) Adaptation d’un coefficient W de correction du K2 (IAD) à partir des résultats de Boigneville ( INRA et Arvalis E. Attard, 2011) Source IAD MESURE DU STOCKAGE CARBONE

MESURE DU STOCKAGE CARBONE Equation de Machet (1990) k2 = 1200 (0,2*T-1) / [(A+200)*(0,3 CaCO3 +200)] 1200 = coefficient 0,2 x T – 1 facteur de correction lié au climat A = la teneur en argile (%0) + 200 0.3 (coefficient) x CaCO3 (%0) = teneur en calcaire +200 (coefficient) L’équation de Machet présente finalement une très bonne amélioration du modèle de bilan humique de Dupuis Hénin qui calcule la minéralisation de la MO, le K2 en fonction de la texture du sol et de la température locale. Equation de Machet améliorée avec le travail du sol (Wylleman, 1999; E. Attard, 2011) k2 = [1200 (0,2*10,8-1) / ((242+200)*(0,3*6+200))]*W W = coefficient relatif à l’intensité du travail du sol à partir des résultats (E.Attard, 2011), proposition issue du travail de l’IAD MESURE DU STOCKAGE CARBONE

Bilans de séquestration de carbone selon les pratiques culturales L = Labour TCS = Techniques Culturales Simplifiées SD/SCV = Semis Direct / Semis sous Couvert Végétal + = stockage de carbone - = déstockage de carbone 27 céréaliers 52 éleveurs

PREMIERES OBSERVATIONS Les pratiques agricoles n’ont pas toutes les mêmes performances Le Labour, peu présent dans l’échantillon, ne séquestre pas de carbone. Les Techniques Culturales Simplifiées (TCS), encore présentes à 15% chez les céréaliers, et 54% chez les éleveurs ont des résultats contrastés : Perte de carbone pour au moins la moitié des pratiques TCS Gains de carbone pour l’autre partie des pratiques Le Semis direct (SD) et le semis direct sur couvert végétal (SCV) présentent un bon potentiel pour 74% des céréaliers, et 34% des éleveurs où cette pratique est moins présente. Cependant, parmi les SD / SCV, tous ne séquestrent pas de carbone : 11% des céréaliers et 6% des éleveurs. La séquestration du carbone est dépendante d’autres pratiques en plus de celles liées au travail du sol. PREMIERES OBSERVATIONS

ANALYSE DES ROTATIONS Les rotations : Elles sont + ou – longues : 3 ans et + Très peu de rotations sont sans couverts végétaux : Seulement 15% des rotations ≤ 3 ans 0% des rotations de 4 ans 8% des rotations ≥ 5 ans Une grande majorité des systèmes stockent du carbone, sauf : 22% des rotations ≤ 3 ans (18 % avec couvert et 4 % sans couvert) 31% des rotations de 4 ans, dont toutes utilisent des couverts 34% des rotations ≥ 5ans, dont 3 % sont sans couverts. La longueur de la rotation, avec ou sans couverts, n’est pas un indicateur suffisant pour apprécier la séquestration de carbone dans les sols. Cependant, il existe réellement un avantage aux couverts qui semblent efficients dans ≈ 70% des cas ANALYSE DES ROTATIONS

ANALYSE DES ROTATIONS Le stockage de carbone et les rotations : Dans le cas des rotations courtes ≤ 3 ans : 22 % des rotations perdent du carbone Dès que l’on cultive plus de 2 céréales, une perte de carbone est possible dès que l’on exporte des pailles L’introduction d’une culture autre que céréalière est un facteur favorable (protéagineux, légumineuse à graine, colza) L’allongement des rotations au-delà de 3 ans : Une succession exclusivement céréalière est un facteur à risque, surtout si l’on exporte des pailles. La prairie temporaire constitue un facteur d’amélioration, mais cela dépend énormément des conditions de gestion des systèmes (15% de perte de carbone avec des PT et une rotation de plus de 5 ans). Les pratiques agricoles doivent être analysées de manière fine : travail du sol, couverture, restitution des pailles, gestion des couverts, rendement des couverts … ANALYSE DES ROTATIONS

Résultats sans changement de pratiques 79 agriculteurs Projection des pratiques actuelles sur 30 ans Tous les agriculteurs ne séquestrent pas de carbone Résultats sans changement de pratiques

Projection des pratiques actuelles sur 30 ans 56 agriculteurs qui séquestrent du carbone 33 agriculteurs en polyculture-élevage qui séquestrent du carbone Les agriculteurs qui stockent du carbone font largement mieux qu’une hypothèse à 4 pour 1000 Résultats sans changement de pratiques

Résultats sans changement de pratiques Résultats éleveurs : stockage de carbone moyen Stockage moyen annuel de C Polyculture-Elevage : 0,95 tC/ha/an Mais un fort écart type variant du simple au double entre 0,6 et 1,3 tC/ha/an Stockage moyen annuel de N : 0,095 t/ha/an de N ou 95 UN/ha/an Résultats céréaliers : stockage de carbone moyen Stockage moyen annuel de C par les céréaliers : 0,7 tC/ha/an Mais fort écart type variant du simple au double entre 0,5 et 1 tC/ha/an Stockage moyen annuel d’azote : 0,07 t/ha/an de N soit 70 UN/ha/an Résultats sans changement de pratiques

Résultats sans changement de pratiques 56 agriculteurs qui séquestrent du carbone Résultats sans changement de pratiques

Le cercle vertueux

SCV et stockage Carbone Les agriculteurs en SCV et le stockage du carbone Les agriculteurs qui pratiquent le semis direct stockent globalement plus de carbone que les agriculteurs qui travaillent le sol. Seulement 6 % des agriculteurs en SD et SCV ne stockent pas de carbone, ce qui est peu vis-à-vis des agriculteurs en TCS dont plus de 40 % n’améliorent pas l’état du sol. La problématique «stockage du carbone» se construit avec un raisonnement agronomique qui doit cumuler de nombreux avantages : restitution élevée de biomasse fraiche au sol, pas ou peu de travail du sol. SCV et stockage Carbone

Bonnes pratiques pour la séquestration du carbone Du semis direct plutôt que des TCS, voire sous couvert végétal. Pailles laissées au sol. Apport d’azote organique (fumier, lisier, compost, …), avec avantage au lisier (avec restitution des pailles). Rotation Courte ou longue Diversité des espèces : graminées, légumineuses, oléagineuses, … Beaucoup de maïs, principalement grain (pailles restituées) Double culture Couvert végétal entre deux cultures principales : Pas de sol nu Détruit et laissé au sol, si récolte, compensation par les pailles Composé de plusieurs espèces, graminées et légumineuses (féverole, radis, avoine, …) Bonnes pratiques pour la séquestration du carbone

Commentaires Conclusion Plusieurs facteurs, indépendants des agriculteurs, jouent un rôle important dans le stockage du carbone, notamment la température moyenne annuelle et le type de sol (argileux, calcaire, limoneux, sableux, …). Leurs variations peuvent provoquer d’importantes modifications dans le stockage du carbone. Le taux initial de matière organique influence également le stockage du carbone : Globalement, plus le taux de MO est faible, plus il est « facile » de stocker et inversement. Conclusion Pour que l’agriculture stocke du carbone, il faut orienter les pratiques vers : minimum de perturbation du sol, maximum de production de matière végétale, maximum de restitution de biomasse, systématiser les couvertures vivantes, utiliser les capacités des légumineuses à fixer de l’azote atmosphérique. Ces pratiques rendent l’agriculture compatible avec le respect de l’environnement et l’augmentation de la biodiversité : rétention d’azote dans le profil, - augmentation de l’activité biologique

La séquestration de carbone dans les sols s’accompagne aussi de séquestration d’azote. L’humus est une construction biologique alliant le carbone et l’azote à hauteur 10 % d’azote par rapport au carbone présent. Ainsi, les plans de fertilisation qui encadrent les épandages d’azote pourraient s’avérer inopérants dans une politique de séquestration du carbone. En effet, si la séquestration de carbone équivaut à 700 kg par ha, alors l’ammonification récupère 70 unités de nitrates qui sont soustraits du lessivage, mais qui manquent aussi pour la croissance des cultures. Ainsi, entre une agriculture qui perd de la MO dans le sol, par exemple 700 kg de carbone, et une autre qui en gagne la même quantité, il pourrait y avoir jusqu’à 150 UN/ha de différence dans le sol, lié à la séquestration ou à la minéralisation de l’humus. Les différences productives seraient alors énormes. Pour un même plan de fumure à 210 unités d’azote, le systèmes de culture séquestrant 700 kg de carbone manquera de 70 unités d’azote, soit un rendement limité à 140 UN/ha (-30 %). De plus, la limitation du rendement limite aussi la restitution des pailles et conditionne une mauvaise croissance des couverts (des restitutions en moins !). Azote et eau

Cette situation sera problématique à plus d’un titre : la notion habituellement admise « fertiliser = polluer » s’avère fausse. Il faudra changer de logiciel pour l’agriculture qui s’engage dans la séquestration de carbone. La réglementation qui bloque les apports d’azote en zone vulnérable sera un handicap pour la séquestration du carbone : il pourrait manquer d’azote pour construire l’humus et assurer simultanément la production agricole. Il faudra donc augmenter la fertilisation azotée selon la quantité de carbone que stocke le sol. Les tests montrent que les besoins d’azote augmentent entre 70 et 95 UN/ha/an. Les élevages stockent plus de carbone et ont besoin de plus d’azote (95 UN/ha/an) que les céréaliers (70 UN/ha/an). Le changement de pratiques devra s’accompagner d’une politique de dérogation adaptée : Par exemple, augmenter les apports organiques, car ils sont déjà présents sur les fermes et constituent la ressource la moins chère, Favoriser l’introduction des légumineuses sous toutes les formes dans les systèmes de cultures. Les bonnes pratiques doivent être listées afin d’éviter les faux messages et de permettre à la recherche agronomique de produire les références adéquates en lien avec les agriculteurs innovants.