Actinomycose appendiculaire localisée (à propos d’un cas) M.AARAB;I.BENNIS,Y.NARJIS; K.RABBANI; A.LOUZI; R.BENELKHAYAT; B.FINECH Chirurgie viscérale - Marrakech
Introduction Les actinomycoses sont des infections chroniques ou parfois aiguës dues à des bactéries filamenteuses et ramifiées, dues à un bacille à Gram positif, Actinomyces israelii. L’actinomycose de l’appendice est une pathologie rare qui mérite d’être connue, car si le diagnostic est fait en préopératoire on peut se contenter d’une antibiothérapie seule durant six mois. En revanche, une chirurgie suivie d’une antibiothérapie sera indiquée si le diagnostic est établi en peropératoire. Néanmoins, la principale difficulté reste d’évoquer et de confirmer le diagnostic. Nous rapportons ici le cas d’une patiente présentant une actinomycose appendiculaire dont le diagnostic a été réalisé après une prise en charge chirurgicale.
Matériel et méthodes Mlle M.R. âgée de 23 ans était admise pour une douleur de la fosse iliaque droite, une fièvre à 38,7 °C et des frissons qui évoluaient depuis 11 jours. Elle signalait avoir eu une douleur de la fosse iliaque droite durant six mois d’allure subaiguë, spontanément résolutive après de courtes durées de prise d’antibiotiques. L’examen clinique montrait une masse abdominale fixe par rapport au plan profond, douloureuse, de 10 × 15 cm, avec une défense localisée au niveau de la fosse iliaque droite. L’échotomographie abdominopelvienne mettait en évidence un appendice à parois. épaissies, en situation rétrocæcale, associé à une collection de 4 cm de diamètre entourée par une agglutination d’anses. Au niveau biologique, la numération leucocytaire montrait une hyperleucocytose à 19 000 GB/mm3 dont 15 000 de polynucléaires neutrophiles. Il fut décidé de réaliser une laparotomie par Mac Burney qui confirmait l’aspect inflammatoire de l’appendice. Dans les suites, l’évolution clinique et biologique était favorable sous antibiothérapie par amoxicilline intraveineuse. La patiente regagnait son domicile le sixième jour du postopératoire. L’analyse histologique de l’appendice montrait la présence d’une panappendicite aiguë abcédée avec du matériel suppuré sous forme de dépôt fibrinoleucocytaire comportant des polynucléaires neutrophiles altérés avec présence d’amas d’actinomycose (Fig. 1). Une antibiothérapie par amoxicilline était instituée pour une durée de six mois. Après la fin du traitement médical, la patiente était en bon état général sans récidive de son actinomycose.
Résultats C’est une infection rare, peu contagieuse, due le plus souvent à l’Actinomyces israelii qui est un bacille à Gram positif filamenteux, anaérobie strict. Cette bactérie est saprophyte de la cavité buccale, du tractus gastrointestinal et du tractus génital de la femme et ne devient pathogène qu’en cas d’interruption de la barrière muqueuse .On distingue, selon la topographie de l’atteinte, une forme cervicofaciale de très loin la plus fréquente avoisinant les 55 % des cas , une forme thoracique survient dans 15 à 20 % des cas et une forme abdominopelvienne dans 25 % des cas, qui reste dominée par la localisation appendiculaire qui est d’environ 65 % des cas . Ainsi, la symptomatologie de l’actinomycose appendiculaire est fruste et peu spécifique et peut se présenter sous différents tableaux cliniques, le plus souvent par une appendicite aiguë compliquée ou une appendicite chronique ayant comme symptômes une fièvre , une maladie inflammatoire chronique intestinale, ou une tuberculose intestinale mais aussi une pelvipéritonite . L’imagerie est non spécifique, mais elle permet le diagnostic et éventuellement le traitement en permettant la ponction percutanée ou la biopsie des abcès ou des lésions. La tomodensitométrie montre un épaississement des parois de l’appendice, du cæcum et de la dernière anse grêle et précise l’étendue des lésions, mais a surtout un rôle dans la surveillance de l’efficacité du traitement médical ou pour guider une ponction . Le diagnostic préopératoire est difficile et souvent retardé du fait de l’évolution insidieuse de cette pathologie, il est fait à partir de la ponction ou du drainage d’un abcès de la fosse iliaque droite . Le diagnostic bactériologique repose sur la découverte d’un bacille filamenteux, ramifié, Gram positif. La culture bactérienne est lente, réalisée en milieu anaérobie strict enrichi et nécessite une lecture aux 2e et 21e jours avant de conclure à sa négativité. Elle n’est positive que dans 50 % des cas . Dans notre observation et vu le tableau de sepsis abdominal, l’indication opératoire a été posée en urgence, et la confirmation était posée en postopératoire après étude histologique de la pièce d’appendicectomie. Si le diagnostic d’actinomycose de l’appendice est posé avant un acte chirurgical, l’antibiothérapie seule à base de pénicilline G, qui constitue le traitement de première intention, doit être administrée à forte dose, relayée par la pénicilline A, pendant une période minimale de six mois, permettant de guérir l’infection et d’éviter la chirurgie . Si ce diagnostic est posé en postopératoire, une antibiothérapie de six mois est recommandée en association à un traitement chirurgical pour éviter les récidives. Les échecs thérapeutiques sont dus à une mauvaise pénétration du produit en raison de la difficulté de traverser la paroi de sclérose de la masse mycélienne et non à une résistance bactérienne. L’intervention chirurgicale est parfois nécessaire pour l’exérèse de la masse actinomycosique
Conclusion L’actinomycose appendiculaire est une affection rare dont le diagnostic reste difficile à établir en raison d’une symptomatologie révélatrice peu spécifique et parfois trompeuse. Néanmoins, il faut savoir l’évoquer devant un tableau clinique chronique d’une douleur de la fosse iliaque droite avec des signes d’abcédation ou de fistulisation. D’autant plus que son traitement est avant tout médical, permettant d’éviter le traitement chirurgical réservé aux formes compliquées ou pseudotumorales.