TD Pédologie DEUG II C. CORONA, 2003
Dokoutchaïev a défini le sol comme étant une formation naturelle résultant de l’action de 5 facteurs : le temps, la roche-mère, le relief, le climat et les êtres vivants (dont l’Homme). Le sol est le produit de l'altération et du remaniement des couches supérieures de la croûte terrestre sous l'action de la vie par le biais des échanges d'énergie et de matière qui se manifestent entre l'atmosphère et la croûte terrestre. L'ensemble des processus qui président à la formation et à l'évolution d'un sol constitue la pédogenèse. Le sol est un milieu complexe qui résulte d'un double processus : l'altération et la désagrégation de la roche-mère, ou des formations superficielles qui la surmontent, sous l'action des agents atmosphériques et biologiques ; cela donne la phase minérale du sol ; l'accumulation et la décomposition des plantes et des animaux morts sous l'action des agents atmosphériques et biologiques ; cela donne la phase organique du sol. Le sol est un milieu vivant car, d'une part les plantes y plongent leurs racines et d'autre part une macrofaune (taupes, rongeurs divers, lombrics et autres annélidés...) et une microfaune y vivent en permanence et participe à l'évolution du sol. Le sol, qui est une pellicule de surface dont l'épaisseur dépasse rarement 2 ou 3 mètres, est donc différent : De la roche d'une part : la roche est le matériel constituant de l'écorce terrestre mais c'est un matériel inerte ; Des formations superficielles d'autre part : ces formations se placent entre le sol et la roche. Elles sont nettement plus épaisses que les sols ; elles sont issues d'une altération en surface de la roche et elles constituent elles aussi un matériel inerte. Leur lien avec le sol réside dans le fait qu'elles sont souvent le support minéral à partir duquel le sol se forme.
Les processus physiques et chimiques qui rendent compte de la transformation de la roche-mère sont nombreux et variables selon les contextes climatiques : fragmentation des roches du fait des alternances de gel/dégel, des variations thermiques, dissolution par les eaux d'infiltration, hydrolyse.... La phase minérale comporte plusieurs fractions qui se distinguent par la texture des particules c'est-à-dire la granulométrie. [Ne pas confondre texture et structure ; la structure c'est l'architecture d'ensemble d'un sol ou d'une roche ; la structure est définie par la façon dont sont assemblés les éléments composant le sol ou la roche].Suivant la granulométrie on distinguera 2 fractions dont le rôle sur la végétation est différent : la fraction grossière qui est constituée par des particules dont la dimension est supérieure à 2microns comporte des sables (entre 50µ et 2mm) et des limons (entre 2µ et 50µ). Cette fraction grossière constitue le squelette du sol. Dans sa forme brute elle est sans intérêt pour les plantes. Elle ne sera utilisable par les végétaux qu'une fois transformée en éléments plus fins. Par contre son rôle est primordial pour la quantité d'eau qu'elle retient. la fraction fine est constituée par les matériaux altérés, de dimension inférieure à 2µ : argiles et colloïdes issus des micas, des feldspaths LA FRACTION MINERALE DU SOL
Les minéraux argileux résultant de la destruction des roches, peuvent soit rester sur place (argiles résiduelles, ex: argiles à silex, argiles de décalcification) soit être transportées sur de longues distances (ex: argiles des fonds océaniques). En fonction des roches mères et du climat, les minéraux argileux résultant sont différents. En climat froid : l'altération est faible, les minéraux argileux sont identiques ou peu différents des minéraux de la roche (illite et chlorite), ils sont hérités de la roche d’origine. En climat chaud et humide, l'hydrolyse est poussée, la kaolinite se forme en milieu drainé, les smectites en milieu confiné. En climat tempéré, humide, l'altération est modérée, il apparaît des interstratifiés, des illites et chlorites dégradées, de la vermiculite. La nature de la roche-mère joue un rôle: l'altération d'une roche acide, comme le granite, donne plutôt de la kaolinite l'altération d'une roche basique, comme le basalte, donne plutôt des smectites.
Ces minéraux argileux sont importants car ils peuvent fixer puis relarguer des cations métalliques : la Capacité d'Echange Cationique, ou C.E.C., dépend du type d'argile: elle est faible pour l'illite, la chlorite et la kaolinite mais importante pour la vermiculite et les smectites. Les colloïdes sont plus petits que les argiles et sont constitués d'un regroupement de molécules. Ces colloïdes de la phase minérale sont qualifiés de colloïdes argileux. Ils ont un rôle fondamental. Ils ont la propriété de s'imbiber d'eau et donc de la retenir. Si les colloïdes sont peu nombreux comme c'est le cas dans les sols sableux, les eaux circulent au sein de la fraction grossière. Les espaces par lesquels l'eau peut ainsi circuler sont suffisamment grands pour que l'eau échappe aux forces d'attraction qui pourraient la lier aux particules du sol et la retenir. L'eau peut ainsi rejoindre la nappe souterraine ou nappe phréatique. Si les colloïdes au contraire sont trop abondants le sol ne présentera pas suffisamment d'espaces vides pour permettre à l'eau (et à l'air) de pénétrer et circuler ; l'eau restera donc largement en surface et ne bénéficiera guère plus aux plantes. Par conséquent la teneur en colloïdes d'un sol est très importante
Les colloïdes sont des groupes de molécules chargées d'électricité négative ou positive. Si les charges électriques de 2 particules sont identiques alors les particules se repoussent ; les colloïdes sont alors dispersés et peuvent être entraînés par l'eau en solution colloïdale. Si au contraire 2 particules présentent des charges électriques différentes, alors ces charges se neutralisent et les particules peuvent se rapprocher et s'associer Les colloïdes s'agglomèrent alors en flocons, on parle de floculation. Certains minéraux comme les carbonates sont des floculants exceptionnellement actifs. La floculation permet de dégager des espaces vides dans le sol ce qui est fondamental pour la circulation de l'eau et de l'air. Ces espaces vides sont beaucoup plus petits que dans la fraction grossière. L'eau peut être retenue dans les pores du sol. La floculation permet aussi de retenir plus facilement les éléments nutritifs. La qualité d'un sol va donc dépendre non seulement de la teneur en colloïdes mais aussi de l'importance de la floculation.
2. LA FRACTION ORGANIQUE DU SOL Elle est constituée essentiellement de grosses molécules de carbone d'hydrogène, d'oxygène, d'azote, de soufre et de phosphore. Ces molécules proviennent de la décomposition des animaux et des plantes mortes, décomposition réalisée par les micro- organismes qui vivent dans le sol. Dans 1 g de sol, il y a jusqu'à 1 milliard de bactéries, 1 million de champignons, algues, 1 million de protozoaires La matière organique morte est décomposée plus ou moins rapidement selon les conditions climatiques. Un climat chaud et humide favorise la décomposition. En revanche, le froid et la sécheresse ralentissent les processus chimiques. Les végétaux qui ne sont pas encore décomposés constituent la litière. Cette litière, à laquelle s'ajoutent les cadavres d'animaux, va être ensuite transformée en humus. Les processus de transformation sont regroupés sous le terme d'humification. Dans l'humus les restes végétaux et animaux ne sont plus reconnaissables mais la nature chimique des corps le composant est toujours organique. L'humus se compose de grosses molécules qui se groupent pour former des colloïdes humiques ou colloïdes organiques. Ces colloïdes humiques se transforment ensuite en acides mais cette transformation dépend de 2 facteurs : le climat et la végétation.
- sous climat froid et humide, dans des sols gorgés d'eau, mal aérés, surmontés d'une végétation riche en composés acides (éricacées : bruyère, myrtille, rhododendron ; pins, chênes, hêtres), les colloïdes humiques donneront des acides fulviques. Ces acides sont très mobiles, facilement mobilisés par les eaux de percolation (c'est-à-dire les eaux qui circulent dans le sol). Ils sont néfastes pour les sols car ils entraînent avec eux les argiles et le fer qui sont des éléments indispensables à la qualité des sols. Dans ce contexte bioclimatique les humus qui se forment sont des humus acides ou mor. -sous climat chaud et humide, dans des sols bien drainés, bien aérés, supportant une végétation qui restitue beaucoup de composés basiques (plantes à feuilles caduques ou plantes caducifoliées), les colloïdes humiques se transforment en acides humiques. Ces acides sont peu mobiles, difficilement entraînés par les eaux. Et surtout ils se lient fortement au fer et aux argiles qu'ils retiennent dans le sol. Les plantes disposent ainsi d'éléments nourriciers en abondance. - enfin une situation intermédiaire aboutit à la formation d'humus de type moder.
-En milieu peu actif la décomposition des litières est lente, l'horizon organique Ao brun noir, fibreux et acide est bien distinct, c'est un mor - En milieu biologiquement biologiquement plus actif, l'horizon Ao est moins épais et constitue un moder. - En milieu très actif, la décomposition (minéralisation) est très rapide, l'horizon Ao disparaît, l'humus est incorporé dans la fraction minérale en complexes organo-minéraux formant un horizon A1 (mull) à agrégats argilo-humiques à Fe et Al. L'humus joue un rôle important sur la valeur agronomique des sols cultivés et la physiologie des végétaux (rétention de l'eau, fixation d'oligo-éléments, action stimulante sur la formation et la croissance des racines...) Mais chaque année, le sol perd de son humus par minéralisation. L'importance de cette perte dépend du type de sol (teneur en argile et calcaire notamment), de la végétation et du climat (humide ou sec, chaud ou froid). Les résineux, les Ericacées (bruyère) donnent des litières qui se décomposent difficilement et forment une couche noire et épaisse (« Terre de bruyère »). Le calcaire ralentit l'humification.
La minéralisation est le terme de l'évolution car les molécules organiques ont été transformées en molécules minérales plus simples (CO2, NH3, nitrates, carbonates). Seules celles-ci sont susceptibles d'être absorbées par les plantes. La minéralisation s'accompagne de la diminution de la teneur en carbone et de l'augmentation de la teneur en azote. Le rapport C/N renseigne sur la vitesse et l'importance de la minéralisation d'un sol. Un sol très riche en carbone va avoir une minéralisation très lente. C’est un sol pauvre. Au contraire la forte teneur en azote est un gage de fertilité. [N.B. : le problème est qu'une végétation qui se contente de sols pauvres en éléments minéraux est une végétation qui n'a pas besoin de ces éléments pour vivre et qui donc à sa mort ne pourra en restituer au sol. Pour enrichir un sol, et augmenter notamment la teneur en azote, il faut planter une végétation exigeante qui à sa mort restituera au sol beaucoup d'éléments minéraux. Il existe aussi des plantes qui ont la propriété de fixer l'azote atmosphérique grâce à des nodosités ; ces nodosités sont des excroissances placées sur les racines et provoquées par l'intermédiaire de bactéries et de champignons. Ces plantes peuvent donc subsister sur des sols très pauvres et enrichir à leur mort ces sols en restituant l'azote prélevé à l'atmosphère : ex. légumineuses (pois, haricots...), les genêts, l'aulne...]
3. LE COMPLEXE ABSORBANT ET LE PRELEVEMENT DES ELEMENTS NUTRITIFS PAR LES RACINES Les colloïdes argileux et organiques capables de retenir autour d'eux les éléments nutritifs avant de les céder à la plante constituent le complexe absorbant ou complexe argilo- humique. Autour des molécules qui composent les colloïdes (micelles) se fixent des éléments minéraux chargés électriquement. Ces éléments sont des ions électro-positifs que l'on nomme cations. Lorsque toutes les positions disponibles sont prises on dit que le complexe est saturé. Parmi les cations les plus importants pour les plantes on trouve les cations de calcium (Ca), d'azote (N), de potassium (K), de sodium (Na), de magnésium (Mg), le fer (Fe), l'alumine (Al) le manganèse (Mn), le soufre (So4).Ces cations ne sont pas solidement fixés aux micelles et des échanges peuvent se produire avec les racines des plantes. La plante échange un de ses cations d'hydrogène qu'elle possède contre, par ex., un cation de calcium du sol. Mais si le sol est acide, les places disponibles sur les micelles sont occupées par des cations H+ qui sont nombreux dans ce type de sol au pH faible. Or l'hydrogène n'est pas un élément nutritif pour les plantes. Les éléments nutritifs existant ne pouvant se fixer du fait de l'absence de place autour des micelles sont rapidement emportés par les eaux de percolation. Un sol acide va donc proposer peu d'éléments nutritifs pour les plantes et notamment peu de calcium car il y a une relation entre la teneur en calcium et le pH.
Au contraire dans un sol issu de terrains calcaires, la teneur en calcium sera très forte; Le complexe absorbant est saturé en calcium lorsque le pH est égal à 7. Au-dessus de 7 il y a des cations de calcium qui sont libres dans le sol. En-dessous de 7 nombreuses places peuvent être prises par les cations d'hydrogène. L'excès de calcaire n'est pas plus favorable aux plantes que son déficit car l'excès de calcaire gêne l'absorption de certains éléments indispensables pour les plantes et notamment le fer et l'azote. Les racines prélèvent aussi de l'eau dans le sol. L'échange se fait grâce aux différences de pression osmotique qui détermine des forces de succion plus ou moins grandes. [L'osmose est un phénomène de diffusion qui se produit quand 2 liquides ou 2 solutions de concentrations moléculaires différentes se trouvent séparées par une membrane semi-perméable qui laisse passer le solvant mais pas la substance dissoute.] Cette eau se présente sous 3 formes : - l'eau de gravité est celle qui circule dans les canaux les plus grands du sol. Ceux-ci sont particulièrement développés lorsque la fraction grossière est abondante. Cette eau, qui rejoint rapidement les nappes souterraines, échappe aux forces d'attraction qui pourraient la lier aux particules du sol et, de ce fait, elle n'est pas disponible pour les êtres vivants ; - l'eau de capillarité est retenue dans les petits espaces vides du complexe absorbant. Elle circule donc plus lentement que l'eau de gravité et n'échappe pas à certaines forces d'attraction. Cependant elle n'est pas retenue par des forces très importantes ce qui la rend disponible pour les végétaux ; - l'eau hygroscopique n'est pas disponible car elle est fixée très solidement aux molécules du sol.
4. ROPRIETES DES SOLS La texture du sol est définie par la grosseur des particules qui le composent : % graviers, sable, terre fine (ou argiles au sens granulométrique). a. La texture du sol Triangle des textures organiques Triangle des textures minérales Elle dépendent de : * la texture * la structure * la porosité
Cougourlier(34). Sols argileux gris à pseudogley. La texture lourde est visible sur cette photo dans laquelle la terre semble comme "découpée" par le couteau. Bois de Doscare (Mauguio, 34). Sol caillouteux, niveau de surface appauvri sur les horizons B rubéfié Marsillargues. Sol argileux gris à précipitation de gypse dans le niveau tourbeux.
b. La structure et l'organisation du sol. Elle est conditionnée par les colloïdes : argiles, substances humiques hydroxydes. Les argiles favorisent la fragmentation du sol en produisant des fentes de retrait à la dessiccation. Elles peuvent enrober les autres particules et colmater les pores. Elles peuvent fixer des composés organiques par adsorption sur leurs feuillets par l'intermédiaire des oxyhydroxydes d'Al et de Fer qui forment un revêtement pelliculaire. Ces complexes organo- minéraux (ou argilo-humiques) sont agglomérés en agrégats incorporant des filaments mycéliens et des bactéries à polysaccharides. On distingue 3 grands types de structures : - particulaires : sol très meuble - massives : éléments liés par un ciment - fragmentaires : en agrégat (mm), grumeaux (cm) ou polyédrique, très favorables aux cultures Structure grumeleuse d'un sol brun
c. La porosité La porosité est l’ensemble des vides du sol. Selon le degré d’humectation, les pores du sol sont occupés en majeure partie soit par de l’eau soit par de l’air. - La macroporosité (pores > 50 microns) contient l’eau de gravitation - La porosité capillaire (de 0.2 à 50 microns) contient l’eau utile - La microporosité (inférieure à 2 microns) contient l’eau inutilisable Etang de Carnon. Aspect de surface des argiles noires. Individualisation de structures prismatiques.
Ainsi, la végétation fournit l'humus et assure la circulation ascendante des matières; elle protège ensuite la roche de l'érosion. La destruction de la végétation entraîne celle des sols évolués, ou évolution régressive du sol. Les cycles évolution / régression des sols se succèdent à intervalles de temps courts (cataclysmes, action de l'homme) ou longs (pulsations climatiques). Le rôle déterminant du climat dans l'altération des roches et l'élaboration des sols a donné lieu à la formulation de la théorie de la biorhexistasie par ERHART. En climat humide, les conditions sont favorables à l'altération des roches, au développement de la végétation et à la formation des sols; la destruction des roches est limitée aux phénomènes chimiques qui libèrent essentiellement des ions solubles : cette période favorable à la vie est la biostasie. En période sèche, les roches mises à nu sont soumises à la désagrégation mécanique qui produit des matériaux détritiques grossiers: c'est la rhexistasie. En climat tempéré, il faut environ 1000 ans pour former un horizon A, plusieurs milliers d'années pour un horizon B et quelques heures à un homme pour détruire un sol…
4. FORMATION, CLASSIFICATION ET EVOLUTION DES SOLS 5 facteurs 1 principe d’évolution 3 étapes de formation 17 processus Une gamme presque infinie de sol a. 5 facteurs En climat tempéré, lorsqu'une roche affleure, elle est progressivement altérée et colonisée par la végétation: végétaux inférieurs, plantes herbacées puis arbres ; le sol se forme. Il s'établit d'abord un horizon d'humus sur la roche altérée (profil AC, sol jeune), puis un horizon de type B (profil ABC). La profondeur augmente et le profil pédologique devient de plus en plus évolué jusqu'à atteindre un état d'équilibre avec le climat, la végétation et le relief. Les matières circulent dans le sol dans le sens descendant, par infiltration des solutions, et dans les sens ascendant, par remontée capillaire et remontée biologique (lombrics, termites en climat tropical, racines). 1. Formation des sols
Le climat Le matériel minéral parental Les êtres vivants Le relief Le temps Cet exemple montre bien les 5 facteurs qui régissent la pédogenèse : Influence du climat La fertilité d'un sol est liée à plusieurs facteurs : - la roche-mère qui peut contenir des éléments nutritifs en abondance qui viendront enrichir le complexe absorbant au fur et à mesure que se poursuit l'évolution du sol ou au contraire l'appauvrir en fournissant des ions H+. - le climat qui, par le biais des températures et de l'humidité, détermine la vitesse et l'importance des processus d'altération, d'humification et de minéralisation. - la végétation qui influe sur le pH du fait de la composition chimique de ses tissus ; - le relief ; le temps
Climat Relief Temps Relief / climat
b. 1 principe d’évolution Influence du matériel minéral parental
c. Les trois étapes de la formation 1. Altération de la roche mère 2.Enrichissement en matières organiques 3.Transferts de matières et formations d’horizons différenciés
d. 17 processus fondamentaux Processus liés à l’humification (climats froids ou tempérés) Décarbonatation Décalcification Brunification Lessivage Podzolisation Andosolisation Processus conditionnés par de forts contrastes saisonniers (climats continentaux) Mélanisation Calcification Vertisolisation Processus à base d’altération géochimique prolongée (climats méditerranéens, tropicaux, équatoriaux) Fersiallitisation Ferrugination Ferralitisation Processus liés aux conditions physico-chimiques de la station (tous climats) Hydromorphie Salinisation Sodisation Alcalinisation Sulfatoréduction
2. Classification des sols 1.1 Les horizons organiques O Ils sont constitués de fragments de végétaux morts (feuilles, racines, écorces...) plus ou moins transformés en conditions aérobies et situés à la partie supérieure de la couverture pédologique. Il s'agit de la litière désignée autrefois par A0. Selon le degré de transformation des débris végétaux, on distingue 3 type d'horizons O : OL : débris peu transformés, toujours reconnaissables OF: débris mélangés avecde la matière organique fine sous forme de boulettes fécales OH: une majorité de matière organique fine formée de boulettes fécales et de microdébris non identifiables à l'oeil nu. Une coupe du sol fait apparaître plusieurs bandes d'épaisseur variable, de quelques centimètres à quelques mètres, les horizons. Les horizons se distinguent les uns des autres par la couleur et la nature des constituants minéraux ou organiques. Chaque horizon est conventionnellement désigné par une lettre majuscule et pour les subdivisions on rajoute une lettre minuscule ou un chiffre.
1.2 Les horizons A Ils sont constitués d'un mélange de matière organique et de matière minérale. Ils sont situés à la partie supérieure de la couverture végétale, sous l'horizon O s'il existe. Les horizons A sont structurés par l'activité biologique (faune, racines...) qui contribuent à la formation de complexes argilo-humiques. 1.3 L'horizon éluvial E C'est un horizon appauvri en en fer, en minéraux argileux, en aluminium par entraînement de ces éléments latéralement ou vers la profondeur. Les matières entraînés peuvent notamment se concentrer plus bas et former un horizon BT ou BP. 1.4 Les horizons BT et BP Ces horizons sont caractérisés par une accumulation de matières par rapport aux autres horizons du profil. Cet enrichissement peut être en fer, en aluminium, en argile, en humus. L'horizon argilluvial BT est enrichi en argiles provenant d'un horizon éluvial E au- dessus ou en amont. L'horizon podzolique BP est à base de matière organique et d'aluminium, avec éventuellement du fer. Sa couleur est orangé à rouge.
1.5 Les horizons S Les horizons structuraux S sont des horizons typiques des sols évolués ; ils sont formés par l'altération des minéraux primaires (hydrolyses, oxydation, décarbonatation...) qui libèrent notamment des argiles et des oxy-hydroxydes de fer. Ils correspondent aux horizons B des anciennes classifications. 1.6 Les horizons réductiques G Ils sont produits par des phénomènes de réduction, en particulier du fer, dus à un engorgement quasi-permanent. Leur teinte est généralement grise à verdâtre. Des oxydations locales donnent des taches rouille. Si l'eau peut circuler, le fer réduit soluble est exporté et l'horizon s'appauvrit en fer. 1.7 Les horizons vertiques V Ils sont très riches en argiles gonflantes (smectites) qui leur confèrent des propriétés physiques particulières: * à l'état humide gonflement, forte plasticité, faible taux d'infiltration * à sec, rétraction avec profondes fentes de retrait * forte Capacité d'Echange Cationique.
1.8 L'horizon Fersialitique FS Il résulte de l'altération fersialitique des minéraux (climat sub-tropical et méditerranéen). Les argiles sont de type 2/1 (smectites) et le fer est abondant. La couleur est orangé à rouge. La capacité d'échange est assez élevée et la capacité de rétention d'eau est bonne. 1.9 Les horizons peu évolués ou jeunes J Ce sont des horizons peu différenciés mais différents de la roche-mère : la structure pédologique existe mais elle est peu évoluée parce que la formation est récente ou que les facteurs de la pédogénèse sont peu efficaces ou bloqués (climat trop sec, trop froid...) Ils contiennent peu ou pas de matière organique L'horizon labouré L Le travail de la charrue retourne la couverture pédologique et mélange les horizons. A cette action mécanique, importante près de la surface, s'ajoutent les apports de substances allochtones qui sont incorporées au sol (engrais, amendements, épandages, traitements divers...) A une trentaine de cm de profondeur, un niveau plus tassé constitue la semelle de labour La roche-mère M, R, D et l'horizon C La roche située à la base de la couverture pédologique peut être peu altérée: elle est dénommée R pour une roche dure et massive, M pour une roche meuble. Si la roche est altérée et fragmentée, elle est appelée C.
b. Les principaux types de sols et leur évolution Evolution des sols sur substrat calcaire
Evolution des sols sur substrat siliceux
2.1 Sols peu différenciés - lithosols : profil réduit à la roche de type M R ; couche O possible. - cryosols : sols gelés périodiquement en surface, constamment en profondeur (pergélisol ou permafrost); - colluviosols: sur colluvions de pente formées de portions de sols érodés et de roches altérées ou non. - fluviosols: sur alluvions fluviatiles; profils à horizon de type J ou A sur une roche meuble à base de limons et de graviers (M). - rankosols ou ranker sur roches siliceuses ; humus peu actif (mor); profil (O)/ A/ C ou R. Colluviosol Causse Méjan. Lithosol sur calcaire fissuré. Paysage sur Calcosol.
Ranker sur éboulis siliceux (Haute Ubaye) Ranker humifère sous cailloutis. Sol ranker cryptopodzolique sur schistes
Lithosol et rendosol à éclat sur bancs calcaires plus durs alternant avec des faciès plus marneux. Lithosol sur calcaire en plaquettes, plus ou moins fissurés
2.2. Sols issus de processus liés à l’humification Ils comprennent en particulier les Rendosols (ou Rendzines) et les Calcosols. Ils sont installés sur une roche calcaire C, R ou M. - Rendosols: profil (O), Aca/C, M ou R. L'horizon A est calcaire (Aca), il contient un complexe argile - humus - Ca C03, l'épaisseur est au maximum de 40 cm. - Calcosols: Ils possèdent en plus un horizon structural calcaire Sca (de décarbonatation). Rendzine sur calcaire jurassique (Jura méridional) Rendosol sur calcaires en plaquettes vertes et bleues
Rendzines On les trouve classiquement sur les versants calcaires. L'horizon humifère est épais, bien structuré en grumeaux irréguliers, gris à bruns-noirs, formés de complexes argile-humus-calcaire (horizon Aca). L'humus est un mull. L'activité biologique est intense. Quelques cailloux de craie y sont dispersés. Une partie du calcaire est détruite par l'eau de pluie acide et reprécipitée en profondeur, au contact du substrat crayeux. Sur roches calcaires argileuses, les rendzines peuvent évoluer en rendzines brunifiés avec décarbonatation partielle de l'horizon humifère et apparition d'un horizon structural B (ou S) plus compact au-dessus de la roche-mère. Ce phénomène de brunification est plus lent sur la craie qui est contient peu d'argile. Les rendzines sont des sols peu épais mais bien structurés et bien aérés. Ils sont favorables à l'agriculture à condition que de l'eau soit fournie pendant la saison sèche (remontée capillaire à partir de la craie, irrigation). Cependant l'humus est rapidement minéralisé et la présence de calcaire élève le pH, ce qui favorise la perte d'azote, et insolubilise des éléments indispensables au développement de la plante comme le phosphore, le fer, le bore. L'apport de ces éléments devra être constamment renouvelé sous forme d'amendement organique et d'engrais.
Calcosol sur marnes, plus ou moins épais. Calcosol peu caillouteux, irrégulièrement profond
Sols bruns ou Brunisols Sols des climat tempérés ; profil A/S/C ; humus actif (mull), horizon S brun (association oxydes de Fe - argiles) Formation : Sols bruns : se développe typiquement au niveau des forêts de feuillus sous un climat tempéré suivant un processus de brunification. Il nécessite un apport constant de matière organique (activité biologique importante dans l'horizon superficiel) et une début de lessivage (niveau d'argile uniforme au sein de l'horizon B). Il est en général épais. Sols bruns calciques : se développent au niveau d'affleurements de calcaires tendres très purs ou de colluvions calcaires sous un climat tempéré. Il résulte d'un phénomène de brunification (calcaire actif inférieur à la teneur en matière organique). Les sols bruns calciques sont le résultat de l'évolution des rendzines. Les horizons A et B sont dépourvus de calcaire. Sol brun : à gauche sur craie, à droite sur limons (Amiens)
Sol brun calcaire profond (calcosol), limono-sableux, issu de loess Profil n° 95 - Morphologie Ap - 0/10 cm : Limon sableux, calcaire, beige, structure grumeleuse (5 mm), meuble, racines peu nombreuses. Ah - 10/30 cm : Limon sableux, calcaire, beige, structure polyédrique subanguleuse (60 mm), meuble, racines peu nombreuses. B1 - 30/50 cm : Limon sableux, calcaire, beige orangé, structure polyédrique subanguleuse (50 mm) à tendance continue, peu de racines. B2 - 50/210 cm et + : Limon sableux, calcaire, jaunâtre, structure polyédrique subanguleuse (40 mm) à tendance continue, peu ou pas de racines.
Sol (brun) calcaire anciennement cultivé sur marnes hauteriviennes (Corconne)
Sols bruns lessivés ou Luvisols Ce sont des sols présentant une forte illuviation d'argile. L'horizon supérieur est appauvri en argile et en fer, il est plus clair et perméable (horizon E). L'horizon sous-jacent concentre l'argile et le fer, il est plus coloré et présente une structure polyédrique ou prismatique (horizon BT). Profil A/E/BT/C ou M. Ap - 0/25 cm : Limon sablo- argileux, brun (10 YR 33), structure grumeleuse (10 mm), peu compact. Nombreux cailloux, nombreuses racines. Ah - 25/55 cm : Limon sablo- argileux, beige (7.5 YR 46), structure polyédrique subanguleuse (20 mm), compact. Cailloux assez nombreux, racines assez nombreuses. Btg - 55/90 cm : Limon argilo- sableux, rougeâtre (5 YR 46), structure polyédrique anguleuse (50 mm), très compact, peu de cailloux, peu de racines. Quelques taches grises. BCg - 90/120 cm : Argile limoneuse, jaune rougeâtre (10 YR 66), structure prismatique (100 mm), très compact, peu de cailloux, pas ou peu de racines. Nombreuses taches rouille (7.5 YR 58). Cg - > 120 cm : Sable argileux, structure particulaire, très compact à induré, pas de racines. Roche mère : Argile à silex.
Podzols ou Podzosols Sols à horizon cendreux de zones boréales (Taïga) et tempérées humides; Profil de type O/A/E/BP A : mor noir peu épais E: horizon résiduel cendreux, surtout du quartz; très lessivé sous l'action des acides organiques de l'humus. BP coloré: accumulation de composés organiques et minéraux. Podzol: un horizon d'accumulation sombre sous un horizon décoloré d'éluviation
Les podzols (terme russe signifiant: sols cendreux) sont des sols de milieu acide à faible activité biologique. Dans les sols podzolisés (podzols et sols podzoliques), le mor (l’humus brut), subit une lente décomposition. Il se forme alors deux couches différentes: l’une cendrée, amorphe, formée de grains de quartz détritique; l’autre colorée et compacte, chargée d’aluminium, d’hydroxydes de fer, d’oxydes de fer, de silice et de matière organique prend l’aspect d’un ciment de quartz. Le froid de la zone boréale du Nord de la Russie peut participer au mécanisme de décomposition de l’ humus (podzol à permafrost). Mais la podzolisation se trouve aussi, du fait de l’acidité, dans des zones tempérées (roches mères très quartzeuses, forêt résineuse, lande à bruyère). Une dégradation biochimique des minéraux silicatés précède leur transport par l’eau sous l’effet de la gravitation. Andosols Sol noir, fertile, léger, à fort pouvoir absorbant, se développant sur roches volcaniques dans des conditions de température pas trop élevée, d'insolation réduite et d'humidité persistante. Ses caractéristiques originales sont sa richesse en matière organique et la présence de constituants argileux appelés allophanes, dérivant de l'altération de projections volcaniques basiques ou acides.
Andosol typique sur basalte (hêtraie, Escandorgue) Colluviosol sur basalte. Pézenas, le Trou du Conil.
En climat chaud et humide, l'hydrolyse est totale, elle se fait à pH neutre; les silicates sont hydrolysés en gibbsite; l'acide silicique et les cations solubles sont lessivés, il reste sur place le fer et l'aluminium qui constituent un sol ferralitique ou latéritique. Les oxydes de fer peuvent se concentrer en surface et constituer une croûte ferrugineuse, la croûte latéritique. La matière orge. La matière organique, oxydée, intervient peu. Les latérites en place ou remobilisées sont susceptibles d'être exploitées comme minerai de fer ou d'aluminium (bauxite). Les gisements de bauxite des Baux en Provence ont cette origine. Le lessivage, en éliminant les cations, augmente l'acidité du sol Sols issus de processus liés à l’altération géochimique prolongée En climat chaud et à saisons sèches et humides alternant, le lessivage et le confinement alternent, les solutions remontent à la surface en saison sèche, la matière organique est minéralisée rapidement et a peu d'action, des smectites se forment, la silice reste sur place. Le sol contient l'association Fe, Si et Al, c'est le sol fersialitique des pays tropicaux et méditerranéens. La concentration en surface des oxydes de fer produit le phénomène de rubéfaction.
Roujan. Fersialsol calcique Association de lithosols et fersialsols calciques rouges en poches (le Causse, à Cazedarnes)
Servian. Sols rouges sous vignes (Carignan). Bois de Doscare (Mauguio, 34). Sol caillouteux, niveau de surface appauvri sur les horizons B rubéfié. des hauts niveaux Villafranchiens.
Fersialsols acides d'altération ancienne sur colluvions de schistes et grès ordoviciens Colluvium fersiallitique, le long de la N112 (la Crousette, Bouldou)
Sol ferralitique (Hawaï)
Les vertisols sont des sols à argiles gonflantes (montmorillonite) qui leur confèrent compacité et adhérence (en période humide) ainsi que des propriétés de gonflement-retrait. En saison sèche, ils présentent de larges et profondes fentes de retrait. Les vertisols sont de bonnes terres, lorsqu'on peut les irriguer ou lorsque le climat est assez humide, mais les racines peuvent être écrasées, aplaties, cassées par les mouvements des agrégats 2.4 Sols issus de processus conditionnés par de forts contrastes saisonniers Fentes de retrait dans un vertisol Plan de glissement dans un vertisol (période humide)
2.4 Sols issus de processus liés aux conditions physico-chimiques de la station sols imbibés d'eau ; le déficit d'oxygène ralentit l'humidification et réduit le Fe (couleur gris-vert), à l'extrême, une gley peut donner une tourbe Les sols hydromorphes organiques se caractérisent par :. Une matière organique de type tourbe :. plus de 30% sur au moins 40cm si la matière minérale est argileuse. Plus de 20% si la matière minérale est sableuse Sols hydromorphes (gley) Calcosol à hydromorphie de profondeur et à passées colluviales (Autignac)