Le chômage des jeunes : causes, évolution et solutions « Get Job Now » – ISPFP Tolochenaz, Mercredi 5 avril 2006 Le chômage des jeunes : causes, évolution et solutions Yves Flückiger (Université de Genève)
1. Introduction Le chômage des jeunes est au cœur de l’actualité dans notre pays comme ailleurs Cela s’explique principalement par le fait que le grand public a les yeux rivés sur le taux de chômage En 2005, il s’élevait à 3,8% pour l’ensemble de la population… alors qu’il atteignait 6,1% pour les jeunes de 20 à 24 ans et 4,7% pour les 25-29 ans Dans le même temps, il se montait à 3,4% pour les jeunes de 15 à 19 ans
1. Introduction En comparaison internationale, ces différences sont particulièrement faibles Le rapport entre le taux de chômage des jeunes âgés de 15 à 24 ans et celui de l’ensemble de la population (1,3 en 2005) place la Suisse en tête des pays de l’OCDE en compagnie de l’Allemagne Elle est loin devant la France (2,6) et plus encore l’Italie où ce rapport culmine à 3,4
Taux de chômage par classe d’âges, Suisse, 1990-2005
2. Causes et évolution Le taux de chômage des jeunes de moins de 20 ans est plus faible que celui de l’ensemble de la population Dans cette classe d’âge, les jeunes sont, dans leur très grande majorité, engagés dans une formation ou actifs sur le marché du travail Néanmoins, certains jeunes connaissent des difficultés d’insertion à la fin de leur scolarité obligatoire Leur proportion est certes très faible mais leur situation est très préoccupante
2. Causes et évolution Des études montrent que des jeunes qui n’ont pas trouvé leur insertion entre 20 et 22 ans présentent un risque élevé d’être durablement exclus Cela explique l’évolution du pourcentage de jeunes tributaires de l’AI ou de l’aide sociale C’est un chômage de nature structurelle de longue durée, lié à la transition entre formations obligatoire et post-obligatoire Le taux de chômage des jeunes âgés entre 20 et 24 ans est plus élevé mais sa nature est très différente
2. Causes et évolution Il s’agit d’un chômage qui touche principalement une population formée qui a poursuivi des études post-obligatoires C’est un chômage de nature frictionnelle, de courte durée, lié à la transition entre la formation et le marché du travail Pour distinguer les différentes formes de chômage, il est utile d’analyser l’évolution du rapport entre les taux de chômage par classe d’âges
Ratio entre le taux de chômage des 15-19 ans et des 20-24 ans par rapport à l’ensemble de la population
2. Causes et évolution Les inégalités entre les jeunes et le reste de la population sont très sensibles à la conjoncture Elles augmentent en période de mauvaise conjoncture Elles diminuent dès que la situation économique s’améliore Cette forme de chômage conjoncturelle est moins préoccupante que celle qui touche les jeunes qui ne parviennent pas à transiter vers une autre formation ou vers une place d’apprentissage à la fin de la scolarité obligatoire
2. Causes et évolution Elle affecte plus particulièrement les jeunes de 20 à 24 ans ou même de 25 à 29 ans L’évolution du rapport relatif aux jeunes de 15 à 19 ans semble démontrer une hausse des problèmes structurels Il convient de distinguer les différentes formes de chômage qui affectent les jeunes… .. afin d’adopter les mesures les plus efficaces possibles pour combattre ce chômage
3. Les différentes formes de chômage Comme pour le reste de la population, il existe trois formes de chômage des jeunes Elles présentent néanmoins certaines spécificités propres à la population juvénile Chômage conjoncturel : les jeunes y sont plus sensibles que le reste de la population Les périodes de mauvaise conjoncture retardent leur entrée dans le marché du travail… Mais en bonne conjoncture, ce sont les premiers a en bénéficié
3. Formes de chômage Pourcentage d’étudiant(e)s à la recherche d’un emploi, 6 mois après la fin de leurs études ASOU, 2005
3. Formes de chômage Les difficultés d’insertion professionnelle des étudiant(e)s suivent la conjoncture économique… ..mais leur taux de chômage est très volatile; il diminue très fortement en phase de reprise économique Ces problèmes de transition vers l’emploi sont nettement moins importants pour les personnes ayant suivi des stages durant leur formation
3. Formes de chômage Chômage frictionnel: la première entrée sur le marché du travail, à la fin d’une formation, n’est pas immédiate en raison souvent du manque d’expérience professionnelle des jeunes qui n’est pas compensé par leur formation Ce chômage est de courte durée et ne reflète pas une inadéquation entre l’offre et la demande de travail Des différences existent selon les filières de formation choisies
3. Formes de chômage Chômage structurel: cette forme de chômage se réfère à des inadéquations qui existent entre l’offre et la demande de travail Jusqu’à un passé récent, on avait pas de données en Suisse susceptibles d’être utilisées pour suivre les jeunes au-delà de leur scolarité obligatoire L’école obligatoire a certes pour mission de permettre aux élèves qui terminent leur scolarité d’obtenir les performances les plus élevées possibles…
3. Formes de chômage ... mais ce n’est pas son seul objectif; elle doit aussi préparer les jeunes à réussir leurs transitions vers le monde du travail ou vers d’autres formations L’enquête TREE permet aujourd’hui de suivre les élèves ayant participé à PISA au cours de leurs transitions Elle montre que deux ans après la fin de la scolarité obligatoire, 90% des jeunes suivent une formation post-obligatoire, 6% se trouvent engagés dans une solution transitoire (10ème année, séjour linguistique..) et 4% ne suit aucune formation
3. Formes de chômage TREE, 2001 et 2002
3. Formes de chômage Ces chiffres masquent cependant des inégalités criantes selon le genre, l’origine sociale ou le statut d’immigration Les résultats obtenus au test PISA exercent aussi une influence non négligeable sur le parcours post-obligatoire mais cet effet est fortement concurrencé par les autres facteurs Cette enquête permet aussi de décrire le profil des populations à risque de parcours de formation problématique
3. Formes de chômage Il s’agit surtout des femmes résidant plutôt en Suisse alémanique, n’ayant reçu qu’une formation élémentaire, ayant des compétences médiocres en lecture et qui appartiennent à des familles défavorisées sur le plan socio-économique et/ou à des familles d’immigrés
4. Les solutions Elles diffèrent selon la forme de chômage que l’on entend combattre En ce qui concerne le chômage de nature purement conjoncturelle, il faut utiliser les moyens prévus par la LACI pour éviter que cette période, surtout si elle se prolonge, ne transforme un chômage conjoncturel en un problème structurel
4. Les solutions Il faut utiliser notamment des instruments tels que les entreprises d’entraînement, les semestres de motivation (SEMO), les stages professionnels Il s’agit surtout d’éviter d’installer les jeunes dans des positions d’attente inactives ou de simples mesures passives
4. Les solutions En ce qui concerne le chômage frictionnel, il convient de développer, dans le cadre des études, des stages professionnels, favoriser le développement des HES, aménager les temps de formation à l’exercice d’une activité de travail ou offrir des formations intermédiaires (bachelor/master)
4. Les solutions Pour le chômage structurel, les mesures sont plus complexes; elles touchent l’offre et la demande de travail et elles concernent plusieurs systèmes Au niveau du système scolaire tout d’abord, les mesures suivantes doivent être envisagées: Rétablir la confiance des employeurs envers la scolarité obligatoire qui est mise en cause par l’émergence d’un marché privé de l’évaluation (Basic-Check, etc.)
4. Les solutions Il faut introduire dans tous les cantons des examens de fin d’année qui certifient les compétences des élèves Établir des socles de connaissances et de compétences à atteindre pour tous les élèves en fin de scolarité obligatoire (PECARO, HarmoS, projet « poste d’aiguillage ») Développer le potentiel des jeunes par un enseignement adapté aux points forts individuels Mettre en place les conditions cadre qui rendent ces objectifs accessibles pour l’institution et ses enseignants
4. Les solutions Au niveau de l’orientation scolaire, il conviendrait de: Revaloriser l’image de la formation professionnelle Eviter la stigmatisation liée à l’organisation de la scolarité obligatoire en filières Supprimer la tyrannie du choix qui s’impose à des élèves de 15 ans, en fin de scolarité obligatoire, qui sont aussi souvent ceux qui sont les moins performants sur le plan scolaire et à qui on demande de faire la preuve de leurs compétences pour trouver un apprentissage
4. Les solutions Au niveau de l’apprentissage, il faut tout d’abord constater que : Les changements de structure économique, liés notamment à la baisse du secteur secondaire, contribuent à réduire la demande d’apprentis De surcroît, les PME qui sont aussi celles qui présentent le taux d’embauche d’apprentis le plus élevé en proportion de leur personnel (9% contre 4% pour les grandes entreprises) sont aussi celles qui subissent le coût d’embauche les plus élevés (frais administratifs etc)
4. Les solutions Face à cette diminution de la demande d’apprentis, on constate que pour des raisons purement démographiques, le nombre d’élèves en fin de scolarité obligatoire va augmenter encore jusqu’en 2008 Au-delà de 2008, ce nombre va baisser contribuant ainsi à réduire la pression sur le nombre de places d’apprentissage Reste encore les problèmes d’adéquation entre l’offre et la demande Ils sont dus aux exigences accrues du marché du travail et aux difficultés d’un nombre croissant d’élèves en fin de scolarité obligatoire
4. Les solutions Pour y remédier, il faut : Former des réseaux d’entreprises formatrices Favoriser le passage des apprentis à travers plusieurs entreprises d’un même domaine pour couvrir toutes les facettes d’un métier Mise en place du mentoring ciblé sur les élèves en difficulté et du coaching des apprentis en période de transition Création de fonds de formation obligatoire dans certaines branches Promoteurs de place d’apprentissage Certification des entreprises formatrices