HISTOIRE DE LA PENSEE ECONOMIQUE
→ Pourquoi une Histoire de la Pensée Economique ? → Première lecture : une science se caractérise par une logique de progrès Référence à l'épistémologie de Karl Popper Proposition scientifique doit pouvoir être réfutable (soumise à un test permettant d’en établir la validité) Proposition est tenue pour vrai tant qu’elle n’est pas réfutée Réfutation oblige à construire de nouvelles propositions
→ dans cette perspective : intérêt limité de l'Histoire de la Pensée Economique l'histoire d'une science «ne peut être que l'exposé des tentatives, plus ou moins heureuses [...] pour recueillir et solidement établir les vérités dont elle se compose. Que pourrions-nous gagner à recueillir des opinions absurdes, des doctrines décriées et qui méritent de l'être ? Il serait à la fois inutile et fastidieux de les exhumer. Aussi l'histoire d'une science devient-elle de plus en plus courte à mesure que la science se perfectionne» Jean Baptiste Say – Cours complet d'économie politique pratique - 1828 → cf. Georges Stigler : forme la plus aboutie de la science économique est l'économie néo-classique → analyse peut passer par la recherche de « précurseurs » des pensées actuelles (mais caractère discutable de cette idée, même si elle est implicite chez de nombreux « grands économistes »)
Double conclusion : Mise en place d’une théorie standard Principe de progrès scientifique Question : raisonnement poperrien peut-il s’appliquer à l’économie ? Complexité des schémas économiques Difficulté d’expérimentation Caractère performatif de l’économie Constat de la présence simultanée de plusieurs théories
→ Deuxième lecture : une science se caractérise par des ruptures, des discontinuités dans l’élaboration de la pensée Référence à l'épistémologie de Thomas Kühn Science caractérisée par la mise en place d’un paradigme dominant (science normale) : délimite le champ des questions scientifiques et des réponses proposées Observation peut conduire à une remise en cause des conclusions dominantes (crise du paradigme) et à la construction d’un nouveau paradigme qui s’impose progressivement révolution scientifique : révolution copernicienne Identification de conflits entre des paradigmes en économie mais caractère réversible des « révolutions »
Rapprochement avec la conception d' Imre Lakatos Scientifiques travaillent dans le cadre d’un programme de recherche qui comporte un noyau dur et des hypothèses auxiliaires (dites protectrices) Programme de recherche définit à la fois le cadre dans lequel la réflexion scientifique s’établit et un « dehors » qui n’appartient pas au champ scientifique Programme de recherche peut être progressif (producteur de connaissances nouvelles et gagnant en influence) ou régressif (incapable de prédire des faits inédits et perdant en influence) Coexistence de programme de recherches avec débats intellectuels
→ Troisième lecture : pensée économique se construit dans un contexte donné « One of the results of any survey of the development of economic doctrines is to show that in large measure the important departures in economic theory have been intellectual responses to changing current problems ; that is, the economic theorists who have counted deeply concerned with problems that troubled their generation. Their theories have been attempts to deal scientifically with these problems, to point out promising means of practical action. » W. C. Mitchell - Types of economic theory - 1967 → réflexion économique peut apparaître comme liée à la recherche de solutions à des problèmes concrets qui nourrissent ensuite une réflexion théorique (cf. interprétations possibles de la pensée de K. Marx ou de celle de J. M. Keynes) → lecture et interprétation des auteurs « classiques » renvoie aussi à un contexte historique (cf. chapitre 12 de la Théorie Générale)
→ triple intérêt de l'histoire de la pensée économique selon J. A → triple intérêt de l'histoire de la pensée économique selon J. A. Schumpeter « avantages pédagogiques » pour rendre compte de la dynamique de la réflexion Mise en perspective des questions posées par les économistes « Nous nous instruisons à la fois de la futilité et de la fécondité des controverses ; des déviations, des efforts gaspillés, des impasses ; des intervalles où le progrès s'interrompt, de notre soumission au hasard, des procédés à éviter, des retards à rattraper. Nous apprenons à comprendre pourquoi nous sommes aussi avancés que nous le sommes, et aussi pourquoi nous n'avons pas progressé au-delà . Et nous apprenons ce qui arrive, comment et pourquoi. » J. A. Schumpeter – Histoire de l'analyse économique Histoire de la pensée présente la « logique de l'esprit humain »
Histoire des théories économiques ou de la pensée économique ? Qu’est-ce qu’une théorie ? Mode d’organisation de faits 1- Elaboration et mise en avant de concepts 2- Mise en évidence de relations générales et stables (lois ?) : recherche de déterminants + effets des phénomènes 3- Abstraire de la réalité une explication simplifiée (modélisée ?) du fonctionnement de l’économie
Théorie économique : « système logique qui constitue un schéma explicatif de la réalité économique » Question clé : constat de l’existence de théories économiques Peuvent correspondre à des champs spécialisés (commerce international, marché du travail, firme, …) Théories générales et concurrentes → référence aux théories économiques mais prise en compte de la dynamique historique de la pensée (inclure la question des faits dans la présentation de la réflexion)
Chapitre 1 : l'émergence de la pensée économique « moderne » : Les économistes classiques Chapitre 2 : le temps des débats Marx, néo classiques et marginalistes, institutionnalistes Chapitre 3 : « Mainstream » ou complexification de la pensée ? Keynes, les débats néo-classiques – keynésiens, la permanence des penseurs hétérodoxes
Deux références en ligne Un feuilleton H. P. E.
L'histoire de la pensée économique en fresque interactive (Citéco)
Lectures complémentaires
« Les idées, justes ou fausses, des philosophes de l'économie et de la politique ont plus d'importance qu'on ne le pense en général. À vrai dire le monde est presque exclusivement mené par elles. Les hommes d'action qui se croient parfaitement affranchis des influences doctrinales sont d'ordinaire les esclaves de quelque économiste passé. Les illuminés du pouvoir qui se prétendent inspirés par des voies célestes distillent en fait des utopies nées quelques années plus tôt dans le cerveau de quelque écrivailleur de Faculté. » J. M. Keynes – Théorie Générale... - Ch. 24