Séance n° 1 Présentation du cours Le travail : de quoi parle-t-on ?

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Transcription de la présentation:

Séance n° 1 Présentation du cours Le travail : de quoi parle-t-on ? Conception générale Plan

Conception générale Une initiation à la sociologie du travail et des professions française Travaux et grands débats contemporains sur les évolutions du travail, de l’emploi et des professions  : hausse des qualifications, chômage de masse, flexibilité, tertiarisation, féminisation. Les mots et concepts : problèmes de définition, de mesure et de traduction La boîte à outils du sociologue du travail : entretiens, observations, statistiques…

PLAN 1er cours : Le travail, de quoi parle-t-on ? Approche socio-historique de ses représentations et grandes évolutions de la population active des années 1950 aux années 2000 2e cours : Où va le travail humain ? De mal en pis ? 3e cours : Le sexe du travail 4e cours : Sociologie des professions : approches et terrains (musiciens, danseurs)

Le travail : une notion fluctuante dans le temps et dans l’espace 1. Etymologie : entre peine et réalisation de soi, l’ambivalence. 2. Un paradoxe ou une énigme : du travail méprisé, servile, au travail, pivot de l’intégration sociale 3. Travail et esclavage en Grèce 4. La revalorisation progressive du travail du Moyen-Âge à la Révolution 5. Une typologie du travail aujourd’hui

Les mots du travail Entre peine et création : l’ambivalence. Tripalium : trépied, chevalet, instrument de torture Travail de la femme qui accouche Arbeit, arm, arbma (solitaire, négligé, abandonné, orphelin) tribulatio, persecutio, adversitas, malum (allemand médiéval). Agitation intérieure : « ça me travaille… » (12e et 13e siècle). Violence exercée sur les autres : en boxe, travailler l’adversaire au corps (15e et 17e siècles) Efficacité productive, richesse, énergie, création de valeur (à partir du 16e siècle) 

Le travail en Grèce Positif Négatif Contemplation Travail utilitaire Praxis Poiesis Cité, peuple Oikos (Maison)

Le travail à Rome Opus : le travail effectué, l’oeuvre Opera(e) : l’activité de travail Labor : le travail agricole et militaire (mais aussi celui de la femme en couche)= servilité. Otium (loisir = indépendance économique). Eloge de la propriété agricole et des métiers à but noble : médecine, architecture Mépris du travail artisanal, manuel, servile

Le travail chez Hanna Arendt L’œuvre de l’homo faber (biens durables) L’action : praxis et lexis du citoyen Le travail : nécessité physiologique de l’animal laborans Critique de Marx qui assimile le travail à l’oeuvre

Du Moyen-Âge à la Révolution : un impératif catégorique Revalorisation du travail (gain, conquête) Mise au travail forcé des oisifs, vagabonds: hôpital général, déportation aux colonies, galères, pilori, mort Le travail a une valeur religieuse et morale (pour Luther) (1483-1586)  : activité morale qui répond aux devoirs à accomplir comme une vocation, un appel de Dieu

Révolution des Lumières Libre accès au marché contre les tutelles corporatistes et les monopoles commerciaux Tout homme a droit à sa subsistance dans une société d’individus libres et égaux Effets socialement dévastateurs : vulnérabilité de masse Le travail : la source de toute richesse. Industrialisation, paupérisme

L’état social Du droit au travail au droit du travail Assurances sociales : socialisation du non travail (chômage, maladie, retraite…) Vulnérabilité de masse, effritement de la société salariale(Robert Castel)

Types d’activité Modes de mise au travail Travail libre Travail salarié Travail forcé Types d’activité Activités non marchandes Travail domestique, travail militant Salariés des administra-tions 20% Esclavage, corvées, peines de travail obligatoires prostitution Activités marchandes Travail indépendant 15% Salariés des entreprises 65%

Deux siècles d’évolutions du travail 1. Le développement de l’Etat social (Robert Castel, 1995, Les métamorphoses de la question sociale, Fayard). 2. Deux siècles d’évolutions de la population active (Olivier Marchand et Claude Thélot (1997), Deux siècles de travail en France : 1800-2000). 3. Les années de crise : 1970-2000

Les grandes évolutions de la population active Activité, emploi chômage : définitions Débat autour de la mesure sur longue période : sous estimation de l’activité féminine Les grandes tendances : disparition du travail des enfants, féminisation, diminution des actifs agricoles, industrialisation puis tertiarisation, réduction du temps de travail, augmentation du niveau de vie..

Définition des catégories d’activité (BIT) Taux d’activité = population active totale / population totale en âge de travailler (15-64 ans) Taux d’emploi = population active occupée / population totale en âge de travailler (15-64 ans) Taux de chômage = chômeurs /population active

L’activité et l’inactivité : des conventions statistiques mouvantes L’activité est un concept avant tout statistique, une convention Dans le langage courant, l’activité est un terme très polysémique : activité de travail, de loisirs, activité domestique, activité politique… Mais en sociologie ou en économie, elle renvoie à la catégorie statistique L’activité regroupe les personnes qui ont un emploi et celles qui en cherchent un. Elle englobe donc les actifs occupés et les chômeurs Les actifs, ce sont tous ceux qui sont sur le marché du travail. C’est ce que l’on appelle la population active C’est une convention statistique aujourd’hui largement utilisée (BIT, OCDE…) importante à maîtriser dès lors que l’on travaille sur des chiffres.

Un actif n’est pas forcément quelqu’un qui travaille. Un chômeur est défini comme un actif, une mère de famille au foyer comme une inactive, un salarié ou une salariée en congé maladie comme une active, une salariée en congé maternité comme une active, un étudiant comme un inactif, un militaire du contingent a été d’abord défini comme inactif puis comme actif, un retraité qui travaille comme bénévole comme un inactif etc.

Occupent un emploi Recherchent un emploi Oui Non Population occupée Chômage Population inactive Population active Population totale

L’âge de travailler et l’âge des travailleurs Sur longue période c’est l’évolution de l’âge de travailler qui frappe par son ampleur. Dans la période récente, c’est l’âge des travailleurs qui a diminué. L’âge de travailler : âge légal au travail. Plancher : âge de la scolarité obligatoire ; plafond : âge du retrait d’activité Tout au long du 19e siècle, l’âge de travailler se définit uniquement par son plancher : plus de 10 ans jusqu’en 1841, + de 13 ans de 1881 à 1936 (loi Jules Ferry de 1882), + de 14 ans de 1946 à 1955. Au milieu du 19e, Les enfants représentent 12% des ouvriers de l’industrie et Jules Simon publie « L’ouvrier de 8 ans » (1840). Interdiction du travail des enfants de moins de 8 ans en 1841. Ce n’est qu’au début des années 60 que l’on voit apparaître un plafond dont la hauteur n’a cessé de s’affaisser passant de 74 ans en 1962 aux 64 ans que l’on connaît depuis les années 1980. Scolarité obligatoire à 16 ans depuis 1967.

Le chômage les chômeurs ne sont pas seulement ceux qui n’ont pas d’emploi, ce sont ceux qui obéissent à certaines règles administratives pour être enregistrés, comptabilisés et indemnisés comme chômeurs.

Des frontières floues La définition officielle très restrictive du chômage laisse de côté un certain nombre de situations de sous utilisation involontaire des capacités de travail. Ces catégories partiellement ou totalement privées d’emploi représentent, en équivalent temps plein, un volume total du même ordre de grandeur que celui du chômage « officiel ». Ce flou conduit à sous-estimer plus encore le chômage des femmes, inactives contraintes ou en sous-emploi dans des temps partiels subis.

La progression de l’activité féminine Les femmes ont toujours travaillé, la nouveau ce n’est pas le travail mais l’emploi (la féminisation de la population active) et le salariat féminin qui ont progressé. Sous-estimation de l’activité des femmes au 19e et surtout dans la première moitié du 20e due en particulier à la prise en compte des actives de l’agriculture. La paysanne était-elle agricultrice ou femme d’agriculteur ? Pour un même labeur elle pouvait être recensée dans l’une ou l’autre case, c'est-à-dire active ou inactive (Fouquet, 2004).De la même façon, le travail à domicile qui a soutenu une bonne part de l’activité économique durant la seconde moitié du 19e pose de sérieux problèmes de comptage (Lallement, 1990). C’est aux femmes que l’on doit l’essentiel de l’accroissement de la population active depuis 50 ans (+ 7 millions versus + 1,5 millions en France). Ce phénomène est similaire dans les 15 pays d’Europe. Les taux d’activité  masculins stagnent ou régressent, ceux des femmes augmentent (chômeuses et en emploi).

Disparition des domestiques ? Des cochers, maîtres d’hôtel, lingères, cuisinières aux femmes de ménage. La disparition des domestiques est celle des hommes après l’apogée dans les années 1880. Pourquoi ? Effet de substitution (cocher, chauffeur, cuisinier) La domesticité féminine ne disparaît pas en dépit des substituts extérieurs: elle se transforme (de la bonne aux femmes de ménage)

La notion de profession Fluctuations entre une définition et une représentation du travail) familiale-corporatiste (métiers ou nature du produit) et une définition individuelle (position dans une hiérarchie de classes). La distinction entre salariés et non salariés s’affine progressivement. L’idée que n’est attribuée une profession qu’à ceux qui en exercent concrètement une ne s’impose que tardivement. Ainsi les rentiers ou les propriétaires ne vivant que de leurs revenus sont classés, selon les années, dans la catégorie des professions libérales ou dans des catégories résiduelles constituées de personnes sans profession ou au statut inavouable telles les filles publiques. A l’opposé les domestiques devront atteindre la fin du siècle pour se voir reconnus dans la population active (autre facteur de sous estimation de l’activité des femmes) Le passage à un relevé individuel des professions n’a pas aboli la vision dominante des femmes comme dépendantes des membres masculins de leur famille. Le Code civil donne un fondement juridique à cette représentation. Et cela perdure : difficulté des femmes à se souvenir de la profession de leur mère et grand-mère

Les codes des professions en France Trois niveaux : 1. Les 489 postes élémentaires qui distinguent des professions selon l’activité, le statut et la classification (codage à quatre chiffres) 2. Les 32 catégories socioprofessionnelles (deux chiffres) Les 8 groupes (un chiffre) dont six concernent les actifs. En 2005, on compte parmi les actifs occupés : 2,7 % d’agriculteurs, 6 % d’artisans, commerçants et chefs d’entreprise, 14,7 % de cadres supérieurs, 23,2 % de professions intermédiaires, 29,1 % d’employés et 23,9 % d’ouvriers.

Comparaisons internationales Les nomenclatures de professions sont le produit d’une histoire sociale propre à chaque espace national. « Dans la classification britannique, par exemple, les employeurs et les cadres dirigeants ne sont pas différenciés au premier niveau de catégorisation, tandis que le terme professionals agrège professions libérales et salariés hautement qualifiés. De telles singularités présentent cet intérêt majeur de révéler les représentations dominantes que chaque société peut avoir d’elle-même. Mais, ce faisant, elles rendent extrêmement délicat le travail de comparaison internationale de catégories par définition incomparables. Il est néanmoins un trait commun qui ne peut être ignoré : toutes les nomenclatures adoptées par les pays développés font de l’activité professionnelle le critère décisif des segmentations en groupes sociaux distincts ». (Lallement Michel, 2007, Le travail, Gallimard)

1856 1930 1978 % des dépenses alimentaires dans le budget des ménages ouvriers 71 % 60 % 22 %

Les années de crise : décennies 1970 à 2000 Croissance de la population active, resserrée sur les 25-54 ans Salarisation (75% à 89%) Féminisation (35% à 45,8%) Tertiarisation Mouvement ascendant des qualifications mais maintien d’emplois non qualifiés (dans les services surtout). Forte progression du chômage (2,5 à 9,8%) Développement des emplois atypiques et de la précarité (intérim, durée déterminée, stages, temps partiel…)

Du travail à l’emploi (Maruani, Reynaud, Sociologie de l’emploi, La Découverte, Repères, 2004) A l’intersection de la sociologie du travail et de l’économie du travail, la sociologie de l’emploi traite des rapports sociaux de l’emploi. Objets principaux : Mouvements de recomposition de la population active ; mécanismes sociaux de la répartition der l’emploi et du chômage. Avec la sociologie du travail, elle partage la conviction centrale que l’activité laborieuse est l’expérience sociale centrale, mais elle en déplace l’épicentre : Du travail compris comme l’activité de production de biens et de services et l’ensemble des conditions d’exercice de cette activité vers l’emploi, entendu comme l’ensemble des modalités d’entrée et de sortie du marché du travail ainsi que la traduction de l’activité laborieuse en termes de statuts sociaux.

La progression de l’activité féminine C’est aux femmes que l’on doit l’essentiel de l’accroissement de la population active depuis 50 ans (+ 7 millions versus + 1,5 millions en France). Ce phénomène est similaire dans les 15 pays d’Europe. Les taux d’activité  masculins stagnent ou régressent, ceux des femmes augmentent (chômeuses et en emploi).

Un chômage de masse En 1997, 7 millions de personnes sont touchées par les difficultés de l’emploi (Margaret Maruani,Les mécomptes du chômage, Bayard, 2002). Sous estimation du chômage et surtout de celui des femmes : chômeuses découragées, indisponibles, en activité réduite 53% des femmes actives, 46% des hommes ont au moins une fois au chômage depuis la fin de leurs études (sondage CSA, 1995). Cela relativise le taux de chômage à l’instant t (autour de 10%)

Les formes particulières d’emploi sont-elles nouvelles Les formes particulières d’emploi sont-elles nouvelles ? Fourcade, 1992, « L’évolution des situations d’emploi particulières de 1945 à 1990 », Travail et emploi, n° 52. ) Jusqu’en 1945, la norme d’emploi n’existe pas. La distinction majeure passe par le travail indépendant et le travail salarié 1950-1970 : généralisation du salariat et construction juridique de l’emploi typique : durée indéterminée du contrat, unicité de l’employeur, temps plein. La stabilité de l’emploi constitue un élément central du contrat de travail A partir des années 70, effritement de la société salariale ; construction juridique des formes particulières d’emploi, dérogatoires à la norme de l’emploi typique.

Une condition ouvrière améliorée mais des inégalités durables Une croissance rapide et régulière des salaires le développement du crédit La part des dépenses alimentaires dans le budget ouvrier passe de 60 % en 1930 à 22 % en 1978. En 1978, 77 % des ouvriers possèdent une automobile, 90 % une télévision, 80 % une machine à laver. Maintien des inégalités : Sur la période 1950-1976, l’écart des revenus entre le salaire ouvrier et celui des cadres supérieurs se maintient aux environs de 3,7.

Années 80-2000 : La déstabilisation du salariat Disparition de métiers et secteurs, tels les mineurs; la famille refuge (Le monde privé des ouvriers, Olivier Schwartz; 1990, 2002) Peur du chômage, déclassements, stagnation du niveau de vie, perte des solidarités, crise du militantisme, désenchantement des jeunes, ghettos urbains (Beau et Pialoux) Employé-e-s sous pression Banalisation du statut de cadre Depuis le milieu des années 90, remontée des emplois non qualifiés

Inégalités face à la crise Taux de chômage (BIT) en 2002 Total Hommes Femmes Agriculteurs 0,2 0,1 0,3 Artisans, commerçants, chefs d’entreprise 3,4 2,8 4,7 Cadres et professions intellectuelles supérieures 3,8 4 3,5 Professions intermédiaires 5,4 4,9 5,9 Employés 10,5 9,8 10,7 Ouvriers 11,4 10,2 16,0 8,9 7,9 10,1

Inégalités selon l’âge La France se caractérise, parmi les pays développés, par un rejet des déséquilibres du marché du travail sur les classes d’âge extrêmes. Les jeunes de 15 à 24 ans subissent un taux de chômage qui est régulièrement supérieur au double du taux de chômage moyen. À cela s’ajoute, à la sortie du système scolaire, un allongement des trajectoires d’insertion qui passent majoritairement par des périodes de chômage et par des emplois précaires ou aidés. L’accès à un emploi s’accompagne souvent, au moins initialement, d’un déclassement par rapport au diplôme obtenu. Les jeunes femmes sont un peu mieux protégées du fait de leur plus grande réussite scolaire: elles sont moins nombreuses à sortir sans diplôme. Mais les pas ou peu diplômées sont encore plus discriminées que les hommes.

Inégalités selon l’origine nationale Le taux de chômage de la population immigrée est proche du double de celui de la population non immigrée ; l’écart est plus grand encore pour les immigrés issus de pays non membres de l’Union européenne. La nature des besoins de main-d’œuvre, qui ont longtemps commandé l’appel aux travailleurs immigrés, explique la forte concentration de ces derniers dans les catégories d’ouvriers et d’employés faiblement qualifiés. De multiples enquêtes ont mis en évidence la prégnance des comportements de discrimination à l’embauche, notamment à l’égard des jeunes issus de l’immigration. La montée du chômage global et les divers déséquilibres sociaux qui l’ont accompagnée ont mis en cause le modèle « républicain » d’intégration intergénérationnelle qui servait de référence à notre pays.

L’effritement de la société salariale (Castel, 1995) Déstabilisation des stables Installation dans la précarité ; culture de l’aléatoire (alternance de chômage et d’emplois précaires) Les « inutiles au monde » ou inactifs forcés : jeunes en quête d’emploi, travailleurs vieillissants, chômeurs de longue durée Liens complexes entre dégradation du statut social lié au travail et fragilisation des supports relationnels (famille, voisins, syndicats, associations…), sauf pour les cas extrêmes des SDF (p. 672)