LE SOMMEIL
APPROCHE ELECTRO-PHYSIOLOGIQUE Approche qui s’est greffée sur l’approche anatomique fonctionnelle (observation, ablation, section, lésion). Son but est de définir la spécificité d’une structure cérébrale par rapport à son fonctionnement électrique. Parmi les activités cérébrales accessibles à la périphérie, on peut recueillir 2 types d’activités électriques : - les activités spontanées : représentées par l’activité électrique cérébrale enregistrée dans les conditions normales - les activités évoquées : représentées par l’activité électrique cérébrale enregistrée dans des conditions particulières pour le sujet (exemple : potentiels évoqués cognitifs) Les activités spontanées Elles sont observables grâce à l’électroencéphalogramme (E.E.G.) qui mesure l’activité électrique du cortex cérébral, ou plutôt les fluctuations des émissions électriques entre 2 électrodes placée à une certaine distance l’une de l’autre sur le scalp. La contribution au signal de chaque neurone pris à titre individuel est extrêmement faible, et le signal doit traverser plusieurs couches de tissu non neuronal (méninges, LCR, os du crâne et peau) avant d’atteindre les électrodes. Aujourd’hui, l’E.E.G. est indispensable pour le diagnostic neurophysiologique car il permet de détecter l’épilepsie, les tumeurs cérébrales, les abcès du cerveau, du tronc cérébral… L’E.E.G. est aussi le principal outil d’étude du sommeil. ♥ électroencéphalogramme ≠ électrocorticogramme, où les électrodes sont directement placées sur le cortex.
Pour faciliter les comparaisons, il y a une standardisation de la position des électrodes et des conditions d’enregistrement : - les zones du scalp ont été classifiées selon les lobes en zone frontale, centrale, temporale, occipitale et pariétale ; droite, gauche et médiane - les électrodes sont suivies d’un chiffre, impair étant par convention les électrodes placées du côté gauche (exemple : O1 = occipitale gauche ; Cz = centrale médiane ; F2 = frontale droite) L’E.E.G. présente cependant des inconvénients : si on place des électrodes directement en contact avec le cortex, les ondes recueillies sont 10 fois plus amples que celles recueillies par des électrodes placées sur le scalp (besoin d’amplificateurs pour pouvoir observer la réponse). Une électrode posée sur le scalp est en contact avec environ 100.000 neurones. Chez l’Homme, on observe différentes ondes cérébrales : - les ondes β (bêta) - les ondes α (alpha) - les ondes θ (thêta) - les ondes δ (delta) La forme des ondes dépend du degré de vigilance du sujet, et le tracé E.E.G. change radicalement d’aspect en fonction de l’état de sommeil et d’éveil. En règle générale : - yeux ouverts = ondes de faible amplitude et de haute fréquence (ondes à rythme rapide) - yeux fermés = ondes de grande amplitude et de basse fréquence (ondes à rythme lent)
Les principales activités électriques de l’E.E.G. Ondes de rythme β : ce sont les rythmes les plus rapides - fréquence = 10-30 Hz (cycle / seconde) - amplitude = < 25µV - rythme asynchrone, qualifié de désynchrone, par rapport à l’ensemble du rythme cortical - on l’observe pendant l’éveil, les yeux ouverts et pendant le sommeil paradoxal (rêves) Ondes de rythme α : - fréquence = 8-12 Hz - amplitude = ~ 50 µV - rythme synchronisé - on l’observe dans l’état d’éveil au repos les yeux fermés (adulte en bonne santé) - si le sujet ouvre les yeux, le rythme α disparaît et on parle de réaction d’arrêt, pour passer au rythme β - quand le sujet ouvre les yeux, 3 situations peuvent se produire : - dans 80 % des cas, le rythme α disparaît : on parle de « sujet α-réactif » - dans 10 % des cas, le rythme α persiste : on parle de sujet α-persistant » - dans 10 % des cas, on observe très peu d’ondes α : on parle de « sujet α-minus » - les ondes α disparaissent dans le sommeil Ondes de rythme θ : - fréquence = 4-7 Hz - amplitude = > 50 µV - on l’observe pendant le sommeil lent de stade 1 (SL1) chez l’adulte sain, ou pendant l’éveil chez les patients présentant certaines affections cérébrales
Ondes de rythme δ : - fréquence = très faible : 0.5-3 Hz - amplitude = > 50 µV et > à l’amplitude des ondes θ - on observe ces ondes lentes chez l’adulte sain pendant le sommeil lent profond (SL3 et SL4) ; si le rythme δ s’observe en dehors de ces circonstances, on est en présence d’une grave affection cérébrale Conclusion : les rythmes - de haute fréquence / faible amplitude = vigilance – éveil – phases de rêve du sommeil - de basse fréquence / grande amplitude = phases du sommeil sans rêve – état physiologique du coma Avec l’apparition de ces différents types d’ondes sur l’E.E.G., on peut définir 3 états fonctionnels du cerveau : - l’état de veille - l’état de sommeil lent - l’état de sommeil paradoxal Problèmes de crises : « décharges hyper-synchrones anormales » ; si les crises se répètent, on parle de crise d’épilepsie. L’épilepsie n’est pas tant une maladie en elle-même, mais le symptôme d’une maladie (tumeur, infection, troubles métaboliques,…). Les crises isolées ne sont pas rares : 7 à 10 % de la population globale a au moins 1 crise une fois dans sa vie.
LE SOMMEIL HUMAIN Au coucher Sommeil = état d’inconscience immédiatement réversible par des stimulations sensorielles. Il existe différents stades dans le sommeil humain, révélés par l’expérience chez les sujets sains en laboratoire : E.E.G. (électroencéphalogramme), E.M.G. (électromyogramme), E.O.G. (électro-oculogramme). Le sommeil est divisé en 2 parties : - le sommeil lent = SL, qui comporte 4 stades - le sommeil paradoxal = SL Au coucher Avant de dormir, le sujet a les yeux fermés et il se trouve dans un état de veille au repos : - EEG = le rythme α prédomine - EMG = activité tonique des muscles posturaux de la nuque - EOG = le sujet a une alternance de mouvements oculaires rapides et de mouvements lents - les fréquences cardiaque et respiratoire sont relativement stables
Le sommeil lent Il représente 75 % du sommeil total. EEG : rythmes lents et de très grande amplitude. Sommeil lent = état fait pour le repos - tension musculaire diminuée - température et consommation d’énergie du corps diminuées - fréquences cardiaque et respiratoire diminuées (travail du système nerveux parasympathique) Divisé en 4 stades nommés de 1 à 4 : - Sommeil Lent 1 - stade de l’endormissement - seuil de réveil relativement bas : un faible stimulus sensoriel peut suffire à provoquer le réveil - EEG : le rythme α disparaît pour laisser la place à des ondes θ peu prononcées de faible amplitude - EMG : le tonus musculaire diminue légèrement mais apparaît encore nettement - EOG : lents balancements des globes oculaires - FC : elle diminue légèrement mais reste régulière - FR : irrégulière avec quelques apnées d’une 10ène de secondes
- Sommeil Lent 2 - début du sommeil proprement dit, mais il reste léger - la conscience du sujet est totalement abolie - le seuil d’éveil est augmenté - EEG : les ondes θ disparaissent progressivement et laissent la place à des ondes particulières que l’on appelle « les fuseaux du sommeil » : ce sont des ondes à fréquence rapide (12 à 14 Hz) que représentent un type spécifique d’interaction entre le thalamus et le cortex cérébral + complexe K ; les complexes K sont des ondes rapides de grande amplitude qui ressemblent à la lettre « K » et qui apparaissent sous l’influence d’un son, d’un bruit, ce qui traduit que le sujet n’est pas profondément endormi - EMG : le tonus musculaire est très diminué - EOG : aucun mouvement oculaire - FC : ralentie, régulière - FR : il peut exister une légère arythmie respiratoire (quelques apnées) - Sommeil Lent 3 - sommeil modérément profond - la conscience du sujet reste totalement abolie - le seuil d’éveil augmente encore - EEG : il y a disparition des fuseaux du sommeil et l’apparition d’ondes δ - EMG : on note une très discrète activité musculaire - EOG : pas de mouvements oculaires - FC / FR : le cœur et la respiration ont une fréquence stable et particulièrement régulière
Le sommeil paradoxal - Sommeil Lent 4 - sommeil profond - la conscience reste totalement abolie - le seuil d’éveil reste élevé - pendant 10 à 30 minutes, le sujet se trouve dans un sommeil profond, puis après le stade 4, le sujet entre dans un sommeil paradoxal - EEG : on observe des ondes δ larges et lentes - EMG : très discrète activité musculaire - EOG : aucune activité oculaire - FC / FR : le cœur et la respiration ont une fréquence stable et particulièrement régulière Le sommeil paradoxal - 25 % du sommeil total - c’est le sommeil du rêve - il intervient après les différents stades du sommeil lent - EEG : quasi-identique à celui d’un sujet éveillé et actif, bien que le sujet se trouve en fait dans un état de sommeil profond (difficile de se réveiller) : activité rapide et peu ample du cerveau = rythme β - EMG : atonie posturale complète - EOG : bouffées de mouvements oculaires, en saccades subcontinues qui peuvent durer quelques minutes, disparaissent puis réapparaissent : 2 types de sommeil paradoxal - phasique avec des mouvements oculaires - tonique sans mouvements oculaires - FC : assez irrégulière avec alternance de bradycardie / tachycardie - FR : très irrégulière, avec alternance tachypnée / bradypnée et apnée - le sommeil profond est un sommeil que l’on qualifie de REM (Rapid Eye Movement) car c’est un sommeil actif, par opposition au sommeil lent, qui est qualifié de non-REM
Déroulement rythmique du sommeil La séquence de l’activité EEG au cours d’un sommeil nocturne suit un schéma prévisible : - endormissement SL1 SL2 SL3 SL4 ~ 60 minutes - changement brutal entre le SL4 et le SP ~ entre 70 et 90 minutes après l’endormissement - après le début du 1er épisode du SP (~ 10 min), on retourne au cycle SL2 SL3 SL4 SP ~ 90 minutes - le cycle alternatif SP-SL se répète ~ 4-5 fois au cours du sommeil nocturne (~ 8 heures) A l’exception du 1er épisode de SP, le SP dure en moyenne 20 à 30 minutes. La durée d’un cycle SL6SP fait ~ 90 minutes. Au fil de la nuit : - le sommeil lent est moins profond - les SL4 sont moins longs et ont même tendance à disparaître - les phases de SP s’allongent ; elles sont de plus en plus longues au fur et à mesure qu’on s’approche du petit matin (5-7 heures)
LES MECANISMES NEURONAUX DU SOMMEIL Jusqu’en 1940, le sommeil était considéré comme un mécanisme passif = priver le cerveau d’informations sensorielles provoque l’endormissement : FAUX. Si on bloque l’activité des afférences sensorielles du cerveau de l’animal, les cycles de veille et de sommeil persistent. Sommeil = processus actif qui met en jeu diverses régions du cerveau. Les mécanismes neuronaux du sommeil ne sont pas bien connus, mais les principes de base sont les suivants : - les neurones les plus impliqués dans le contrôle du sommeil et de l’éveil dont partie des différents modulateurs diffus (difficilement localisables) - les neurones modulateurs du tronc cérébral sont actifs pendant l’éveil et accentuent cet état (sécrétion de noradrénaline et de sérotonine) - les systèmes modulateurs diffus contrôlent les activités rythmiques du thalamus, les rythmes lents du thalamus associés au sommeil et bloquent apparemment le flux des informations sensorielles vers le cortex - dans le sommeil, des systèmes modulateurs descendants entrent également en jeu, par exemple pour inhiber les neurones moteurs au cours du rêve