Épices, aromates et condiments
LES ÉPICES, QUE SONT-ELLES? Les épices sont des éléments végétaux: des graines, des baies, des herbes, des rhizomes, des feuilles, des écorces, des morceaux de fleurs ou des fruits. Elles sont utilisées fraîches ou sèches et sont destinées à transmettre leur saveur aux aliments. La plupart des épices que nous utilisons datent de l’Antiquité. En effet, beaucoup de noms de plantes et d’épices, dont le safran,le cumin,le curcuma et le sésame, dérivent du sumérien .
Épices, herbes et condiments Depuis les temps les plus anciens, le besoin d’ alimentation se complète avec le désir d’ obtenir des plats avec des goûts, des textures et des odeurs différents. À la simplicité du sel et du vinaigre on ajoute bientôt des herbes aromatiques, des épices, des sauces et des condiments. Une culture culinaire qui mélange les produits locaux avec ceux qui arrivent de l’ Orient exotique. La tradition s’ étend à travers l’ Empire et évolue dans le temps, avec l’ essor des routes commerciales et avec les apportations des territoires découverts à la Renaissance.
LES ÉPICES ET LES ROMAINS La Via Piperatica (rue aux poivres) constituait le souk aux épices et était située au-dessus du forum de Trajan. À mesure que l’Empire romain s’étendit, les populations du nord de l’Europe apprirent à apprécier les épices. Seulement les classes sociales les plus riches avaient accès aux épices car les prix pratiqués à Rome atteignaient le centuple du prix d’achat. Gavius Apicius, gourmet romain contemporain du Christ écrivait sur les épices à utiliser: le sel, le poivre, la ciboulette, l'oignon, le cumin, la cannelle, à quoi s'ajoutent : coriandre, sauge, cerfeuil, menthe, thym, aneth, marjolaine, cardamone, sarriette, genièvre, raifort, etc. Les riches s’ habituèrent à consommer la viande condimentée avec une série de produits qui constituèrent les caractéristiques de la future cuisine de l’ empire: le poivre, le miel, le coriandre, l’ ortie, la menhte et la salvia. Le poivre était le plus populaire, avec le gingembre et le curcuma. On utilisa aussi le “silfio”, une herbe aromatique qui est disparue. Le silphium était au centre de l'activité commerciale de la ville de Cyrene. La vente du silphium était si vitale pour l'économie cyrénaïque que l'image de cette plante figurait sur la plupart des pièces de monnaie de la cité Le silphium était utilisé comme condiment dans la cuisine gréco-romaine ; il est cité dans des recettes d’Apicius. Les Romains considéraient qu'il valait son poids en argent. (Wikipedia) Ils utilisaient aussi beaucoup de sauces et le résultat final était une cuisine très condimentée, pleine d’ odeurs et des goûts exotiques. Le roi Arcésilas de Cyrène4 et la pesée du silphium sur une coupe laconienne à figures noires. Cabinet des Medailles. , Paris. On pense que les romains utilisèrent , les premiers, les épices avec des finalités alimentaires. À partir du Ier siècle apr. J.C., les Romains partent d’Egypte pour rejoindre l’Inde, d`où ils importent des épices pour les parfums, les cosmétiques, les médicaments et la cuisine. Les épices étaient utilisées pour conserver les aliments, aider à la digestion et rehausser le goût des aliments .
LES SAUCES. LE GARUM: PRODUIT EN HISPANIA Beaucoup de recettes étaient baignées avec des sauces différentes, élaborées avec du vinaigre, des herbes aromatiques, des épices, du vin, de l’ huile, et du´”garum”, le condiment le plus important de tout l’ Empire Romain . Hispania se distingua par la continuité de son commerce fleurissant de salaisons qui venaient de la Bética, la Tarraconense et la Carthaginense, qui répandait son marché par tout l’ occident européen. Cette activité productive, en plus du poisson en salaison ou “ salsamenta”, générait la sauce «garum», une sauce qui s’ obtenait au moyen d’ un procédé de macération des viscères du poisson et qui constitua une des grandes passions gastronomiques des Romains. La production du garum générait une industrie importante auxiliaire pour l’ emballage et un commerce important. Le garum fût un condiment de luxe pendant l’ Empire, mais dans les premiers temps c’ était un aliment habituel parmi les soldats, puisqu´il avait une haute valeur énérgetique et nutritive et supportait le passage du temps sans s’ abîmer. Il y avait d`autres types de sauces de poisson mais d’ une plus petite qualité:la muria et le liquanen . Mosaïque (Amphore du garum), atrium dans la villa d'Aulus Ubricius Scaurus, célèbre producteur de garum, à Pompéi. Baelo Claudia, Cádiz (factoríe de garum)
LES ÉPICES DANS LA CUISINE MÉDIÉVALE La disparition des épices coïncida avec la chute de l’Empire romain ; l’Europe fut plongée dans une période sombre, où les gens ordinaires se nourrissaient de ce qui poussait sur place. Seuls les personnes très riches pouvaient importer et consommer des denrées comme la cannelle, le poivre, la muscade, etc. On continuait à utiliser des sauces comme le garum ou la cameline (macération de pain hâlé, mis à tremper et coulé ensuite dans du vin rouge, du vinaigre, du sel, de la cannelle — l'épice la plus recherchée et la plus rare —, du gingembre, et de menues épices) . Sa composition semble plus modeste, mais le coût des épices la rend tout aussi précieuse. Les épices sont d'abord employées pour leurs vertus thérapeutiques avant d'être un assaisonnement culinaire.
LES ÉPICES DANS LA CUISINE MÉDIÉVALE Les jardins des monastères furent le lieu de culture d’épices et d’herbes ; les livres de compte des monastères donnent des indications précieuses quant à sa consommation. Un décret datant de la fin du règne de Charlemagne (début IXème siècle) impose la présence de 68 épices et herbes dans toutes les propriétés impériales ainsi que dans les monastères. Durant les grandes épidémies, on fumigeait avec des épices et des herbes aromatiques, pour purifier l’air. Au Moyen Age, tous les plats sucrés étaient toujours préparés et cuits avec des épices. Grâce à l’ essor commercial expérimenté pendant le Moyen Âge, les épices furent accessibles à tout le monde, surtout à partir du XIIème siècle, où leur emploi devint très commun.
LES ÉPICES DANS LA CUISINE MÉDIÉVALE L'apogée de leur utilisation se situe entre le XIVème et le XVIème siècles. À cette époque-là l’ emploi des salaisons pour conserver les aliments fût très importante, mais aussi l’ emploi du poivre, du gimgembre ou du safran pour apporter de nouveaux saveurs. À part, le poivre, la ciboulette, le cumin, la cannelle, le coriandre, le sauge,le cerfeuil, la menthe, le thym,l’ aneth, la marjolaine, la cardamone,la sarriette,le genièvre ou raifort, les cuisiniers du Moyen-Âge utilisèrent aussi le gingembre,le girofle, le safran, le laurier,l’ ail, le persil, l’oseille,le garingal (plante d'Asie dont on connaît mal l'usage). Les condiments utilisés étaient les herbes locales. Le sauge, la moutarde et surtout le persil qui poussaient en toute l’ Europe, étaient utilisées dans presque toutes les régions, ainsi que les câpres, le carvi, la menthe et le fenouil. L’ aneth et la moutarde devinrent très populaires comme condiments. Le sucre éati un produit très cher au Moyen Âge et sa consommation, très modérée.L’ édulcorant le plus commun était le miel. LES ÉPICES DANS LA CUISINE MÉDIÉVALE
L’EXOTISME DES ÉPICES Les épices sont importées d'Orient et d'Afrique et alimentent un commerce international très lucratif. Ces épices arrivent par voie terrestre de l'Orient vers le bassin oriental de la Méditerrannée. Elles sont achetées par les marchands génois et vénitiens qui les revendent sur les marchés européens. L'Orient a une place trés importante dans les représentations et l'imaginaire occidental car c'est là que se trouve le jardin d'Eden'. La graine de paradis (ou maniguette), apparaît au XIIIème siècle dans la pharmacopée occidentale. Elle devient une épice à la mode au XVème siècle, surtout en France. Son goût est proche du poivre rond et elle devient une denrée trés chère. Les marchands français pensent que cette épice est originaire d'Orient d'où son nom de graine de Paradis. Quand on apprend que c'est une plante africaine, elle perd alors tout son mystère et son prestige. Elle n'est plus nommée graine de paradis mais seulement maniguette et finit par disparaître des recettes après 1530-40. ( Anecdote LA GRAINE DE PARADIS.)
FRANCE AU MOYEN ÂGE: LA CUISINE DES ÉPICES A la fin du Moyen Age et début de la Renaissance, beaucoup de recettes comportaient du safran et la consommation de moutarde atteignait des sommets . On dégustait le soir à la veillée des gaufres, crêpes, tartes, beignets, des "épices de chambre" ou "confettis", composées de réglisse, coriandre, genièvre, anis enrobés de sucre, des dattes, des amandes, des noisettes, des raisins secs, ainsi que citrons, abricots, oranges et gingembre confits au miel qui constituaient tous de petites friandises digestives. Au XVème siècle, à Arles, l’archevêque faisait payer les Juifs de sa cité une redevance de vingt livres de poivre à l’occasion de la fête des Rameaux. En France, les Papes utilisaientt une liste hebdomadaire d’épices. François Ier voulait éblouir par son faste et sa table est jonchée de plats aux arômes épicés. Les grands bourgeois devenaient riches par le commerce des épices qui leur permettait d’ acheter des charges pour accéder à la noblesse de robe et parader à la cour. Le jardin des plantes et des herbes sort de l’enceinte des monastères et devient à la mode.
LES GRANDS DÉCOUVREURS. L’ÉVOLUTION REGIONAL Entre le XIème et le XVème siècle Venise fut la capitale européenne du négoce des épices. Les grands voyages de découverte des XVème et XVIème siècles et le commerce maritine international détenu par les européens ont favorisé l’apparition de nouvelles épices. Portugal et Espagne se battent pour la domination des îles des Indes orientales afin de s’assurer le monopole des épices. Colomb découvrit le piment ( poivre rouge), le piment de la Jamaïque et la vanille. Mais les épices deviennent trop communes pour les tables seigneuriales et perdent leur prestige dans l'alimentation aristocratique, surtout en France, où s'élabore une nouvelle cuisine moins épicée. A partir de cette époque , se définirent des préférences nationales : la cuisine française a alors un goût de muscade, l’anglaise de macis et l’espagnole de safran. Au milieu duXVIIème siècle, les épices avaient presque disparu des cuisines aristocratiques, on préférait les saveurs douces comme le chocolat, le sucre et aussi le café.
CLIN D’ OEIL : ET AJOURD’HUI? La technique de conservation des aliments évolue :la salaison, la macération avec des épices... On doit la première conserve à un confiseur établi en 1780 à Paris. Au XVI, XVII et XVIII siècles de nouveaux condiments s’ inventèrent . La sauce pesto date du XVI siècle, en Italie. Plus tard arrivèrent la bechamel et la sauce de soja. On dit qu’ un chef français fit la mayonnaise pour la première fois en 1756. Au XIX siècle, avec la Revolution Industrielle, la production en masse des condiments commencea. Le safran, la vanille et la cardamome restent les trois épices les plus chères. Le poivre est l’épice la plus importée en quantité et valeur, suivi par le paprika, le piment, et le poivre de Cayenne