utilisation au CH de Saint-Brieuc et revue de la littérature CARDIOXANE® Desrazoxane Bon usage, utilisation au CH de Saint-Brieuc et revue de la littérature
MECANISME D’ACTION (Vidal 2006) Le dexrazoxane, ICRF-187 est un agent chélateur dérivé cyclique de l'EDTA, Il est hydrolysé dans les cellules du myocarde par ouverture des cycles en ICRF-198. ICRF-187 et l'ICRF-198, sont des chélateurs des ions métalliques et empêchent la formation du complexe Fe 3+/anthracycline réduisent la production des radicaux libres à l'origine de leur cardiotoxicité Le dexrazoxane : ne protège pas contre la toxicité extracardiaque induite par les anthracyclines ne réduit pas l'activité antitumorale des anthracyclines (mécanismes différents)
POSOLOGIE et MODE D’ADMINISATRATION INDICATION (Vidal 2006) Prévention de la cardiotoxicité chronique cumulative liée à l'utilisation de la doxorubicine ou de l'épirubicine chez des malades atteints de cancers avancés et/ou métastasés, ayant déjà reçu un traitement comportant une anthracycline. La tolérance et l’efficacité du CARDIOXANE® n’ont pas été établis chez l’enfant. POSOLOGIE et MODE D’ADMINISATRATION En perfusion IV brève (15 minutes) environ 30 minutes avant l’administration de l’anthracylcine. Posologie : 20 fois celle de la doxorubicine 10 fois celle de l’épirubicine
PREPARATION PHARMACOCINETIQUE Reconstitution du flacon : avec 25 ml d’EPPI (stabilité 24 h à TA) Dilution de la solution : dans 250 à 500 ml de Ringer lactate (stabilité 8 h à TA) PHARMACOCINETIQUE Après administration en perfusion veineuse distribution tissulaire rapide Liaison aux protéines plasmatiques : très faible (<2%) Pas de diffusion dans le LCR ½ vie d’élimination : 2,2 heures Élimination majoritaire dans les urines (40 à 60% de la dose administrée sont éliminés dans les urines en 24 heures). Pas d’études de pharmacocinétique chez le sujet âgé, l’enfant, le sujet insuffisant rénal ou hépatique
EFFETS INDESIRABLES Les effets indésirables rapportés correspondent à ceux observés chez les patients recevant un traitement par anthracycline en association : ils sont donc liés soit au desrazoxane soit à l’anthracycline. Pas de majoration de la toxicité des anthracyclines à l’exception d’une plus grande fréquence de certains effets hématologiques notamment des neutropénies, très rarement thrombopénies et/ou anémies autres effets rapportés sans être imputables uniquement au cardioxane : affections vasculaires (ETEV) infections des voies respiratoires troubles généraux réactions au site d’administration affections gastro-intestinales etc.…
RECOMMANDATIONS DE BON USAGE Référentiel bon usage : modèle médicament Commission des Pharmaciens de CHU « Groupe innovations » Juin 2005 GROUPE I : Indications reconnues (AMM et protocoles thérapeutiques définis par l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé, la haute autorité de santé ou l’institut national du cancer) GROUPE II : Indications scientifiquement validées et indications sur justification spécifique GROUPE III : Indications non validées ou autres
RECOMMANDATIONS DE BON USAGE GROUPE I Prévention de la cardiotoxicité chronique cumulative liée à l'utilisation de la doxorubicine ou de l'épirubicine chez des malades atteints de cancers avancés et/ou métastasés, ayant déjà reçu un traitement comportant une anthracycline. 4 flacons maximum Par patient AMM
RECOMMANDATIONS DE BON USAGE GROUPE II Utilisation du dexrazoxane en prévention de la cardiotoxicité des anthracyclines chez des enfants atteints de cancers: LAL, maladie de Hodgkin, ostéosarcome, sarcomes de Ewing ou maladies apparentées hépatoblastomes, LNH, neuroblastomes… Cardioprotection au cours de l'utilisation des anthracyclines dans le cadre d'un traitement d'un cancer : chez un patient ayant un facteur de risque majorant la cardiotoxicité (âges extrêmes, ATCD cardiovasculaires, radiothérapie thoracique, association avec d'autres agents cardiotoxiques, association docétaxel/doxorubicine, association paclitaxel/épirubicine, association doxorubicine/paclitaxel)
RECOMMANDATIONS DE BON USAGE GROUPE III Prévention de la cardiotoxicité d'autres médicaments cardiotoxiques tels que le trastuzumab, paclitaxel, docétaxel, alcaloïdes de la pervenche, aracytine haute dose (>3g/m2), amsacrine, étoposide, fluorouracile. Cardioprotection au cours de l'utilisation d'anthracyclines dans le cadre du traitement d'un cancer du sein en adjuvant Traitement de l'insuffisance cardiaque aiguë et des lésions cardiaques causées par un surdosage accidentel de cyclophosphamide Prévention de la cardiotoxicité de la radiothérapie
FICHES DE BON USAGE COMITE DU MEDICAMENT ET DES DISPOSITIFS MEDICAUX DE LA REGION CENTRE Pas d’utilisation avec les autres anthracyclines ou apparentée (mitoxantrone) Pas d’indication en situation adjuvante chez des patients naïfs d’anthracyclines Efficacité non démontrée pour des associations comportant un risque accru de toxicité cardiaque telles que doxo + paclitaxel, doxo + trastuzumab UTILISATION DU CARDIOXANE A L’HOPITAL SUD : 1 critère suffit Critères liés à l’enfant: Enfants < 5 ans ou < 25 kg ATCD d’HTA, de cardiopathie, d’HVG Critères liés à la chimiothérapie Dose cumulée de doxo > 240 mg/m2 au total Enfants inclus dans le protocole FRALLE 93 groupes C Enfants inclus dans les protocoles FRALLE 2000 A3 et FRALLE 2000 BT Radiothérapie médiastinale Association au 5-FU, endoxan HD, taxanes SITE HEMATO (SFH) : pas de recommandations de bon usage
UTILISATION AU CH DE SAINT BRIEUC Pas de fiche de bon usage AVANT 2003 : UTILISATION SEMBLAIT CONFORME AU GROUPE I parfois II A PARTIR DE 2003 : MODIFICATION DES PRESCRIPTIONS, suite à la description d’un cas d’insuffisance cardiaque chez une jeune femme (24/06/1975) survenue lors de son accouchement et ayant été traitée en 2000 par (ACVBP) pour le traitement d’un lymphome médiastinal et sus-claviculaire (dose cumulée 300 mg/m²). La patiente est toujours traitée par TRIATEC. EXPLOSION DES CONSOMMATIONS EN HEMATOLOGIE : Prescription SYSTEMATIQUE dans tous les protocoles d’hématologie comportant de la doxorubicine ou de l’épirubicine et pour tous les patients
UTILISATION AU CH DE SAINT BRIEUC EVOLUTION DES CONSOMMATIONS DE 2003 A 2006
UTILISATION AU CH DE SAINT BRIEUC ETUDE SUR 6 MOIS : de juin à novembre 2006 RELEVE NOMINATIF DES PRESCRIPTIONS de CARDIOXANE Patient, Service, Protocole, Nombre de flacons délivrés (gestion des stocks par l’URCC) RESULTATS : 615 flacons délivrés, soit une consommation moyenne de 102 fl/mois représentant un coût mensuel de : 10 830 € correspondant à 214 dispensations et 45 patients (12-92 ans) : 26 femmes (58%) et 19 hommes (42%)
(et apparentés: CEOP, CHEP) REPARTITION PAR SERVICE 36 patients d’hémato (80%) 8 patients d’onco (18%) 1 enfant (2%) HEMATO ONCO PEDIATRIE ABVD-MP CHOP-Lymphome (et apparentés: CEOP, CHEP) Mini-CHVP FEC 100 AUTRE PROTOCOLE (comportant de la doxorubicine) SERVICE PROTOCOLE NOMBRE DE DISPENSATIONS % FRALLE 2000 BT 72 (39%)* 81 (44%)* 31 (17%)* 5 5 (20%)* 20 (80%)* 86% 12% 2% (dispensations) *: correspond au % dans la spécialité
DOSES CUMULEES D’ANTHRACYCLINES Mini-CHVP : 25 mg/m² x 8 cycles, soit 200 mg/m² de doxorubicine sujets âgés : âge moyen 68,5 ans (50-92) ABVD-MP : 25 mg/m² J1-J15 x 4 cycles, sujets plutôt jeunes : âge moyen 45,1 ans (19-68) CHOP-lymphome : 50 mg/m² x 8 cycles soit 400 mg/m² de doxorubicine sujets plutôt âgés : 63,3 ans (33-84) FEC 100 : 100 mg/m² d’épirubicine soit 600 mg/m² Moyenne d’âge : 47 ans
CONCLUSION UTILISATION HORS AMM dans de nombreuses situations Près de 100% des patients d’hémato traités par doxorubicine ou épirubicine recoivent du cardioxane, QUELQUE SOIT - L’ÂGE , - LES FACTEURS DE RISQUE - et LES DOSES CUMULEES par protocole moins de 20% des femmes traitées pour un cancer du sein par FEC 100 reçoivent du cardioxane AMM peu précise, sujette à interprétations tatillonnes Difficile d’aller à l’encontre de la conviction des hématologues
REVUE DE LA LITTERATURE Anthracyclines = molécules importantes dans le traitement de nombreuses tumeurs (onco ou hémato) et molécules cardiotoxiques Conséquences anatomo-pathologiques : - Macroscopiquement : cœur endommagé et ventricules sont dilatés - Microscopiquement : dégénérescence cellulaire (microfibrilles de plus en plus rares, parfois cellules fantômes). Les myocytes nécrosés ne sont pas remplacés et ceux restant s’hypertrophient par compensation. A un stade avancé, augmentation du tissu interstitiel et la fibrose s’installe Cardiotoxicité cumulative et irréversible; seuils à ne pas dépasser (Dossier du CNHIM) doxorubicine : 550 mg/m² épirubicine : 900 mg/m² Dossier du CNHIM Certains considèrent que le risque de développer une IC jusqu’à 450-550 mg/m² de doxo est faible (Von Hoff, 1979) alors que pour d’autres, il est de 27% (Speyer, 1992) Même si la cardiotoxicité est cumulative, les effets cardiaques commencent dès la première dose et des cas IC ont été rapportés après une dose unique de 50 mg/m² de doxo (Von Hoff, 1979) - Rare si < 450 mg/m² - 7% à 550 mg/m² - 15% à 600 mg/m² - 30-40% à 700 mg/m²
REVUE DE LA LITTERATURE Une diminution de la FEV peut s’observer à partir de 100 mg/m² (Bristow, 1978) Mesure de la FEV = sensible en cas d’altération cardiaque mais elle ne peut pas mettre en évidence les altérations au niveau des myocytes : nécessité d’une biopsie (Pouillart, 2004) Facteurs de risque aggravant la cardiotoxicité (Allen, 1992) : - dose totale cumulée élevée - radiothérapie thoracique, médiastinale, cardiaque, mammaire - association à d’autres molécules cardiotoxiques - âges extrêmes - ATCD cardiaques Précoce (48 h) ou tardive (1 mois); chez les enfants ayant reçu un traitement par anthracycline, 71% d’entre eux développent des signes IC après 15 ans Dans toutes les études, le desrazoxane diminue les évènements cardiaques et les signes cliniques d’IC (Swain, 1997 2 études; Speyer, 1992) Limite : études conduites dans le traitement du cancer du sein métastatique
REVUE DE LA LITTERATURE Cardioxane a aussi montré son efficacité dans d’autres localisations : CPC (Feldman, 1992), Sarcome de Ewing (Wexler, 1996) et sarcome des tissus mous (Lopez, 1998) Bénéfice chez les enfants : 67% évènements cardiaques vs 22% dans le bras avec desrazoxane (Wexler, 1996) Ne modifie pas l’efficacité de la chimiothérapie (Seymour, 1999) Pratiques très différentes entre les pays et les médecins (Swain, 2004) Point de vue des cardiologues et des oncologues sont différents : selon les cardiologues, le cardioxane devrait être prescrit dès la première dose puisque les lésions apparaissent dès la première dose (Swain, 2004) Mettre en balance le coût du desrazoxane par rapport au coût du traitement de l’IC (Bates, 1997) Les oncologues sous-estiment la cardiotox des anthracyclines (Swain, 2003) Seulement 6 à 7% des patients européens recevant un traitement par anthracycline bénéficient d’un traitement par cardioxane (Swain, 2004)
REVUE DE LA LITTERATURE l’utilisation du desrazoxane permet de maintenir des doses d’anthracyclines efficaces (Speyer, 1992) et d’augmenter les doses cumulées : 26% des patients tolèrent 750 mg/m² de doxo vs 5% sans cardioxane (Swain, 1997) Conclusions des experts (ASCO, Schuchter, 2002) : utilisation du cardioxane est recommandée à partir d’une dose cumulée de 150-300 mg/m² de doxo Pour l’épirubicine, l’utilisation du desrazoxane est recommandée à partir de la première dose et lorsque les doses cumulées atteignent 480 mg/m² (Lopez, 1998) D’autres études doivent être conduites pour évaluer son efficacité dans d’autres tumeurs et notamment dans les situations adjuvantes (Swain, 2004) Même si le desrazoxane a montré un intérêt cardioprotecteur pour l’association doxorubicine/paclitaxel (Gianni, 1995), il faut poursuivre les études avec d’autres associations cardiotoxiques (notamment l’Herceptin) ou avec d’autres types de molécules comme l’Endoxan (Simbre, 2001) ou en cas de radiothérapie
DISCUSSION Pratique dans les autres hôpitaux bretons? Reconstitution à la bulle?