Master RACOR RC01 Cours #2 Ingénierie des Connaissances quelques éléments sémiotiques pour les « systèmes d’organisation des connaissances » Jean-Pierre Cahier 26 novembre 2007- Cours #2 1ère partie
Plan Origine des théories et sciences du signe (sémiotique/sémiologie) Théories classiques du signe Théories modernes du signe Approfondissement de la sémiotique de Peirce Utilités de la sémiotique en IC Ex. Importance de la sémiotique en IC pour contribuer à l’intelligence des situations
Origine des théories du signe (sémiotique/sémiologie ) Aristote :Universaux, particuliers ; remémoration ; catégories pensée catégoriale : fournir des moyens de classification ou les lieux dans lesquels les concepts vont trouver des places et pouvoir être mémorisés. dimensions irréductibles de l’Être catégories fondamentales proposées pour la connaissance ou prédicaments (predicamenta, susceptibles de permettre de formuler des prédicats) pour connaître une chose
Aristote : catégories (suite) sa « substance » Les Catégories (utilisables comme « organisatrices de l’information ») sont considérées comme des déterminations réelles de l’Être (ontologiques), ce sont : sa « substance » les neuf types « d’accidents » (aptes à qualifier toute substance) qui peuvent advenir à cette substance: quantité, qualité, relation à, lieu, temps, position, état, action (opération active), passion (action passive, processus). Aristote dérive ensuite une méthode pour décrire des universaux et des particuliers, en se posant les questions du quoi (la « quiddité ») de la chose, de son pour quoi (but final ou « entélechie ») de son comment, etc. Aristote soulignait l’intérêt de son cadre de catégories pour la classification de l’expérience. Questions posées : fixicité (« ontologique ») de la grille d’analyse les aspects de l’événement
Théories classiques du signe Depuis Aristote, relatif accord autour de l’idée qu’un signe [ECO 88] est quelque chose « mis pour » quelque chose / qui « tient lieu de » quelque chose
Exercice Considérez, dans un optique « d’intelligence collective de la situation », la situation proposée sur le transparent ci-après Inventoriez tous les signes qui apparaissent aux acteurs , sont produits et utilisés par eux dans cette situation Parmi ces signes, lesquels renvoient aux éléments cruciaux de la situation ? Lesquels sont des connaissances faisant progresser l’enquête ? Comment pourrait-on isoler puis relier ces signes dans un modèle pertinent dans le sens d’une intelligence collectivc de la situation par les acteurs Quelles seraient les limites d’un tel modèle ?
1- notions de sémiotique utiles en IC
Théories classiques du signe Depuis Aristote, relatif accord autour de l’idée qu’un signe [ECO 88] est quelque chose « mis pour » quelque chose / qui « tient lieu de » quelque chose Importance des réflexions médiévales sur le signe importance dans la cartographie voir http://cahier.tech-cico.fr/carto/galerie.html
Théories classiques du signe Depuis Aristote, relatif accord autour de l’idée qu’un signe [ECO 88] est quelque chose « mis pour » quelque chose / qui « tient lieu de » quelque chose Importance des réflexions médiévales sur le signe importance dans la cartographie importance dans les diagrammes et la « cartographie de connaissances »; « Ars Memoriae » [CARRUTHERS ] [YATES]
Théories modernes du signe [KOWZAN 92, p.12-17]
Propriétés et aspects du signe Classification des signes Ex : par le rapport que les signes ont avec leur objet, en : icône, indice ou symbole Signes naturels vs artificiels critère de distinction : l’intentionnalité (au niveau de l’émisssion) les signes produits sans l’intention de signifier, émis dans l’intention de communiquer ou de laisser un message, sont des signes naturels foudre, toux… Signes motivés vs signes arbitraires « un signifiant est motivé lorsque les raisons du choix de la forme sont transparente (Mounin, 74) ; interprétable en termes de causalité (ex : onomatopée) motivation interne (empreinte d’un pied), motivation externe (relation avec d’autres signes, ou d’autres systèmes de signes) pour qui le signe est-il motivé (pour l’émetteur, le recepteur ?) dialectique du motivé et de l’arbitraire (ex : la signalisation routière) Signes conventionnels convention : règle, accord convenus à l’intérieur d’un groupe pour les signes articificiels (ex : toux, signes linguistiques mêmes motivés, ex : cock-a_doodle-doo)
Le signe dans la communication [KOWZAN 92, p.54])
Enchevêtrement des aspects des signes Le signe dans la communication, ex. du théatre [KOWZAN 92, p.59]) Enchevêtrement des aspects des signes Polyvalence du signe Ambiguité du signe ex : phares
Approfondissement de la sémiotique de Peirce - 1 Charles Sanders Peirce (1839-1914) né à Cambridge (Massachusetts),diplômé de Harvard en 1859, fondateur de la sémiotique (ou science des signes) Sa contribution sémiotique est indissociable de (et développée dans un lien de cohérence avec) sa réflexion phénoménologique et logique Toute pensée réside en signe (« la pensée prend toujours place au moyen de signes »)
Approfondissement de la sémiotique de Peirce - 2 la théorie peircéenne des Catégories (Priméité, Secondéité, Tiercéité) relation d’ordre / hiérarchie fondamentale des Catégories
Priméité : CHOC
Secondéité : COUP
Tiercéité GESTE
relation d’ordre : 1 est toujours dans 2, 2 est toujours dans 3, mais l’inverse n’est pas vrai ( Le choc est toujours présent dans le coup, le coup est toujours dans le « geste du coup » . Par contre si on n’a que le choc, l’acteur est dans l’incertitude sur les éléments qui permettraient de l’interpréter davantage (y a-t-il coup derrière le choc? y a-t-il « geste » ? quel est « le geste » derrière « le coup » ? Quel est la signification du choc?, etc.). S’il y a plusieurs acteurs, ils interpréteront différemment (voir [Morand 04] auquel nous devons cet approfondissement de l’exemple « choc – coup – geste »)
Approfondissement de la sémiotique de Peirce (suite) …la théorie peircéenne des Catégories (Priméité, Secondéité, Tiercéité) Dès qu’il y a 4 termes et plus, Peirce a montré qu’on peut se ramener à ses 3 catégories de base - Comme le signe chez Peirce s’exprime par un prédicat langagier à trois « places vides » Quelque chose (représetnamen) qui tient lieu (interprétant) de quelque chose (objet) , un signe relève donc toujours du registre de la tiercéité s’applique au signe : un Premier est mis pour un Second pour un Troisième . la théorie de catégories de Peirce débouche notamment du point de vue sémiotique sur des trichotomies , par exemple entre les trois formes de rapports du signe à son objet: icône, indice et symbole
Approfondissement de la sémiotique de Peirce - 3 « relation-signe », triadique, entre le signe (représentamen), son objet et l’interprétant où se forme son sens ou son interprétation. L’interprétant (pas forcément une personne) est quelque chose (le potentiel d’un autre signe) que le signe est appelé à créer dans l’esprit du destinataire - un signe équivalent ou plus développé - qui est l’interprétant du premier signe. Approfondissement de la sémiotique de Peirce - 3 pour quelqu’un quelque chose tenant lieu de Interprétant Signe I S quelque chose O à un certain égard ou titre Objet Fondement
Approfondissement de la sémiotique de Peirce - 4 La dynamique de la sémiose : l’interprétant est déjà potentiellement un signe qui va déterminer un autre interprétant (en même relation avec l’objet) et ainsi de suite. l’interprétant d’une relation-signe est donc susceptible de devenir à son tour signe dans un processus d’enchaînements et de transformations continu. C’est le flux temporellement inscrit des signes actualisés ( la « chaîne sémiotique »), dans le mouvement général de la sémiose (semiosis). S 1 S -1 D’après [MORAND 04, p.84] S 2
Approfondissement de la sémiotique de Peirce - 5 Classification des signes (Peirce) d’après [MORAND 04, p.68-73]
Approfondissement de la sémiotique de Peirce - 6 d’après [MORAND 04, p.68-73] La Classification logique des signes (Peirce) Exemples:
Approfondissement de la sémiotique de Peirce - 7 d’après [MORAND 04, p.68-73] La Classification logique des signes (Peirce) Les dix classes de signes et leurs affinités selon Peirce:
Utilité de la sémiotique en IC Les connaissances sont des signes, la pensée est signe [PEIRCE], les documents sont des signes Ex Théorie du support [BACHIMONT 04] L’IC (comme pratique d’enquête peut utiliser la sémiotique pour contribuer à l’intelligence des situations et s’inscrit en référence au courant pramatique [PEIRCE][DEWEY38], lui-même référence du courant PragmaticWeb [SCHOOP 06] meilleure appréhension des signes linguistiques [RASTIER ], [RECANATI ] meilleure appréhension des signes non-linguistiques , ex. [KOWZAN] meilleure approche des représentations diagrammatiques [MORAND 04]: cartographies de connaissances, IHM, conception des SI, des SOC… Aide concrète à l’analyse des connaissances par typage des signes : par exemple l’utilisation de cartographies de connaissances multi-points de vue est possible en se basant sur des méta-sémiotiques au sens de Hjemslev [BADIR 06] [ZACKLAD 07] ontologies sémiotiques [CAHIER 05] La sémiotique , notamment de Peirce, est nécessaire pour expliciter (cf. les 2 slides suivants) : le débat entre Formalité logique vs Formalité sémiotique le débat sur le statut (ambigu) des diagrammes, dont l’usage est à la fois possible en systémique (usage ingénieurial classique) et en SHS (usage rhétorique),
ouverture sociale du sens Utilité de la sémiotique en IC Formalité logique vs Formalité sémiotique Formalité logique Systémique Modélisation univoque du système (socio-) technique Sémantique univoque Ontologie formelle fermeture du sens Formalité sémiotique ouverture sociale du sens Explicite - Modélisation socio-technique« langagière » - avec reflexivité - socio-sémantiqu - usage « réthorique » des diagrammes - Diversité explicite des points de vue : « ontologie sémiotique » Implicite Vie sociale - sans reflexivité très explicite Ex: « web social » -Diversité« naturelle » des points de vue
Biblio citée ARISTOTE. Organon: I. Catégories ; II. De l'interprétation. (-300), Trad. J. Tricot, Paris: Vrin, 1959, 153 p. BACHIMONT Bruno. Arts et sciences du numérique : Ingénierie des connaissances et critique de la raison computationnelle. Mémoire d'Habilitation à Diriger des Recherches, Université de Technologie de Compiègne, 12 janvier 2004. BADIR S. (2006), « La hiérarchie sémiotique », dans Louis Hébert (dir.), Signo [en ligne], Rimouski (Québec), http ://www.signosemio.com. CAHIER J.-P. (2005) Ontologies sémiotique pour le Web socio sémantique: étude de la gestion coopérative des connaissances avec des cartes hypertopiques, Thèse en informatique de l’université de technologie de Troyes. CARRUTHERS Mary. "Le livre de la Mémoire". Coll. Argo, éditions Macula, 2002. DEWEY, J. (1938). Logique, la théorie de l'enquête, trad. Gerard Deledalle, col. L'interrogation philosophique, PUF, 1938 (re-éd.1993). ECO Umberto. "Le signe". Editions Labor, Bruxelles, 1988. ECO Umberto. "Kant et l'ornithorynque". Grasset, 1999. KOWZAN Tadeusz, Sémiologie du théâtre, Coll. Fac. Littéraire, Armand Colin, 1992 réed 2005, ISBN 2-200-34430-9 MORAND B. Logique de la conception - Figures de sémiotique générale d'après Charles S. Peirce. Collection Ouverture Philosophique, éditions L'Harmattan, Paris, Avril 2004. RASTIER F., CAVAZZA M., ABEILLE A. Sémantique pour l'analyse. De la linguistique à l'informatique. Masson 1994. RASTIER F. (2003). De la signification au sens. Pour une sémiotique sans ontologie. Texto! juin-sept. 2003 [en ligne]. Disponible sur : <http://www.revue-texto.net/Inedits/Rastier/ Rastier_Semiotique-ontologie.html> RECANATI F. "La transparence et l'énonciation". Le Seuil, 1979. Schoop, M., De Moore, A. and Dietz, J. L.G., The pragmatic web: a manifesto. Communication of the ACM, (2006), ACM 49, 5, 75-76. YATES Frances A. The Art of Memory,. Londres 1966, Trad. »L’art de la Mémoire, Paris, Gallimard 1975. ZACKLAD M., BENEL A., CAHIER J.-P., ZAHER L. H., LEJEUNE C. & ZHOU C. (2007), Hypertopic : une métasémiotique et un protocole pour le Web socio-sémantique, Actes des 18èmes journées francophones d'Ingénierie des Connaissances, Grenoble, juillet 2007