EQUILIBRE ACIDO-BASIQUE ACIDOSE LACTIQUE Dr V. TURI DAR Brabois
EQUILIBRE ACIDE-BASE pH organisme = 7,4 +/- 0,05 (limites compatibles avec la vie = 6,6 à 7,7 +/- 0,1) pH = -log[H+] le métabolisme Caire produit 50 à 100 mmol/j d’ions H+, éliminés par 2 voies : systèmes tampons (Caire, plasmatique et globulaire) organes excréteurs (rein, poumon, foie)
SYSTEMES TAMPONS Tampons extra-Caires : les bicarbonates H+ + HCO3- ⇄ H2CO3 ⇄ CO2 + H2O
Équation d'HENDERSON- HESSELBALCH pH = 6,10 + log[HCO₃-] = 6,10 + log[HCO₃־] 0,03 PaCO₂ [H₂CO₃] (0,03 = coef de solubilité du CO₂ dans le plasma ) 3 facteurs sont donc interdépendants dans ce système tampon : le pH, la PaCO₂ et les HCO₃־
Tampons intraCaires : Hb Protéines Phosphates Cristaux d'apatite de l'os
ORGANES EXCRETEURS la régulation respiratoire réponse dépendant du pH la ↘ des HCO₃־ entraîne une ↘ du pH responsable d'une hyperventilation (Kussmaul) qui vise à ↘ la PaCO₂ et les H₂CO₃ inversement, l'alcalose métabolique entraîne une hypoventilation et donc une ↗ de la PaCO₂
la régulation rénale l'élimination des ions H⁺ se fait par 3 mécanismes : La réabsorption des bicarbonates L’excrétion des ions H⁺ sous forme d'acidité titrable et d'ions ammonium La régénération des bicarbonates
la régulation hépatique cycle de l'uréogénèse = acidifiant synthèse de la glutamine = alcalinisant L'acidose diminue la synthèse d'urée et augmente celle de la glutamine L'alcalose détermine une réaction inverse
Interprétation de la gazométrie Validation : Comparaison HCO₃¯ calculés et bicar plasmatiques mesurés sur le ionogramme sanguin artériel concomitant Écart admis = ± 2 mmol/l
Interprétation trou anionique TA = Na⁺ - (HCO₃¯ + Cl ¯) = 12 ± 2 mmol/l Permet de mettre en évidence les indosés anioniques
trou osmotique Différence entre l'osmolarité plasmatique mesurée et l'osmolarité plasmatique calculée selon la formule : OsmPc = 2Na⁺ + azotémie + glycémie OsmPm - OsmPc ≤ 10-12 mOsm/l Permet de mettre en évidence des molécules indosées osmotiquement actives (ex : intoxication méthanol, éthanol, éthylène glycol)
pH et trou anionique urinaire le pHu évolue en fonction de la balance acide-base : dans les acidoses métaboliques, le pHu est acide (< 6 voire 5), sauf dans fuites rénales de bicar où il est alcalin Dans les acidoses métaboliques "minérales", la mesure du Trou Anionique urinaire permet d'évaluer l'adaptation rénale à l'acidose : TAu = (Na⁺ + K⁺) - Cl¯
TAu Normal > 0 (= excrétion urinaire de NH₄⁺) L'adaptation rénale à une acidose métabolique minérale entraîne un accroissement de l'excrétion rénale d'ions NH₄⁺ (accompagnée d'ions Cl¯) et donc une diminution du TAu même si le pHu est > 6
compensation rénale ou respiratoire prévisible Plusieurs formules disponibles La compensation rénale ou respiratoire tend à ramener le pH dans des valeurs proches de la normale, mais sans jamais y parvenir
ACIDOSE METABOLIQUE ↘ HCO₃¯ ⇒ ↘ pH Par perte de HCO₃¯ Par perte de HCO₃¯ Par accumulation d'ions H⁺
clinique pulmonaire : hyperventilation neuro : obnubilation coma cardiovasc : dépression myocardique pour pH < 7,20 , FV par ↘ du seuil d'excitabilité, effet direct vasodilatateur artériel (compensé par ↗ des catécholamines ) et effet vasoconstricteur veineux digestif : anorexie, nausées, vomissements
biologie ↘ pH , HCO₃¯ et hypocapnie compensatrice hyperkaliémie fréquente, variétés hypokaliémiques possibles TA plasmatique normal ou augmenté
étiologies (cf. tableaux) à TA normal, hyperchlorémiques (tableau I) à TA élevé : (tableau II) 3 étiologies principales acidocétose acidose lactique toxique
Tableau I : Acidoses métaboliques à TA normal pH urinaire hypo ou normokaliémique hyperkaliémique < 6 > 6 TAu < 0 acidose post-hypocapnique - diarrhée - fistule pancréatique - dérivation urinaire TAu > 0 -acidoses tubulaires rénales : proximales : - uricosurie, - phospho-amino-acidurie, - résistance aux alcalins distales : - atteinte osseuse, - kaliurie, - hypercalciurie - inhibiteurs de l'anhydrase carbonique Hypoaldostéronisme -hyporéninisme -insuffisance surrénalienne primitive
Tableau II : Acidoses métaboliques à TA élevé ETIOLOGIES ELEMENTS DU DIAGNOSTIC Insuf. rénale chronique Anamnèse, azotémie, créatininémie, clearance de la créat, calcémie, Hb Acido-cétose: Jeûne DID Intox alcoolique Glycogénose type I, troubles de la néoglycogénèse Acide ß-hydroxy-butyrique, acide acéto-acétique, glycémie, alcoolémie
Acidose lactique : Toxiques Lactates > 5 mmol/l Type A : hypoxie tissulaire ↘ perf. Tissulaire ↘ CaO₂ ↗ demande Type B : oxygénation tissulaire normale toxiques mal. Métaboliques hépatiques ou rénales acidose lactique idiopathique Lactates > 5 mmol/l Hypotension, choc, arrêt circulatoire, IVG aiguë Anémie aiguë, Hémorragie, intox. CO, hypoxémie Convulsions Éthanol, biguanides, isoniazides, cyanure Déficit de la néoglycogénèse Troubles de l'oxydation des pyruvates Toxiques Aspirine Méthanol Ethylèneglycol paraldéhyde Clinique, salicylémie Tbles neuro, visuels. Méthanolémie } Tbles neuro, rénaux, cardiopulm } Cristaux d'oxalates dans les urines } TO>15 mOsm/l
traitement Le traitement étiologique est toujours essentiel, quelle que soit la cause de l'acidose métabolique Le traitement symptomatique fait appel à l'alcalinisation. Il reste indiqué dans certaines situations particulières telles la fuite importante de HCO₃¯ d'origine urinaire ou digestive
ACIDOSE LACTIQUE lactates > 5 mmol/l Étiologie la plus fréquente des Acidoses Métaboliques à TA élevé Résulte d'une surproduction ou d'une altération du métabolisme de l'acide lactique, et se subdivise en 2 catégories (type A et type B)
Les lactates sont formés dans le cytosol à partir du pyruvate, sous l'action de la LDH, selon la réaction : pyruvate + NADH + H⁺ ⇄ lactate + NAD le pyruvate est métabolisé principalement par la voie d'oxydation aérobie intramitochondriale, via le cycle de Krebs, avec formation d'ATP et consommation d'O₂
les lactates sont produits par voie anaérobie au niveau d'organes producteurs (érythrocytes, intestin, cerveau, peau, muscle), et métabolisés par le foie (70%), le rein et le cœur La production journalière est de 1300 à 1500 mmol/j, et est totalement compensée par le travail des organes "métaboliseurs" dans les conditions normales lactatémie = 0,5 à 1,5 mmol/l
Toute élévation de la lactatémie traduit un déséquilibre entre la production et l'élimination des lactates, avec ou sans hypoxie tissulaire. En réanimation, les hyperlactatémies se rencontrent essentiellement lors d'états de choc ou d'hypoxie tissulaire prolongée, et constituent un facteur de mauvais pronostic, tant par la sévérité de l'acidose lactique que par sa durée.
Le traitement repose exclusivement sur le traitement étiologique de l'état de choc ou de l'hypoxémie aiguë. La correction de l'acidose lactique par des solutés bicarbonatés ne trouve plus aucune indication, même pour des pH très bas, aucune étude n'ayant pu démontrer de bénéfice à l'administration de solutés tampons. La seule indication des solutions tampons reste l'arrêt cardiocirculatoire associé à une hyperkaliémie.
ALCALOSE METABOLIQUE ↗ HCO₃¯ par perte excessive d'ions H⁺ ou par rétention d'ions HCO₃¯ pH > 7,45 l'alcalose métabolique est plus grave que l'acidose métabolique à variations de pH comparables
principales étiologies : la perte d'ions H⁺ : digestive : vomissements, aspiration gastrique, tumeur villeuse rénale : diurétiques, hyper-réninisme, hyperaldostéronisme Iaire, syndrome de Cushing hypercalcémie hypoparathyroïdie
Surcharge en bicarbonates Hypokaliémie (transfert intraCaire d'ions H⁺) Alcalinisation excessive des acidoses Hyperalimentation, polytransfusions, antiacides, syndrome des buveurs de lait L'insuffisance rénale, l'hypovolémie, l'hypokaliémie, l'hypochlorémie, l'hyperaldostéronisme entretiennent cette alcalose métabolique La compensation respiratoire est l'hypoventilation avec ↗ de la PaCO₂
clinique : neuromusculaire : léthargie, agitation, confusion, contractures musculaires, crises convulsives, coma cardiovasculaire : TDR ventriculaires et supraventriculaires, ne régressant qu'avec la normalisation du pH respiratoire : hypercapnie et hypoxémie
biologie : ↗ HCO₃¯, ↗ pH, hypercapnie compensatrice hypochlorémie (pertes digestives ou urinaires) ± hyponatrémie hypokaliémie fréquente
parfois hypophosphorémie, hypocalcémie, hypoMg²⁺ pH variable, alcalin, ou acide par ↗ réabsorption des ions HCO₃¯ et excrétion des H⁺ chlorurèse dépendant de l'étiologie : < 15mmol/l : vomissements, aspiration gastrique, diurétiques au long cours … >15 mmol/l : excès de minéralo-corticoïdes, diurétiques (début TTT), surcharge en alcalins, hypoK⁺ sévère
Traitement : traitement étiologique +++ apport de chlorures dans les alcaloses Métaboliques chlorosensibles ( NaCl et KCl) agents acidifiants si l'alcalose est majeure (pH > 7.6) [attention au chlorhydrate d'arginine et de lysine, CI chez l'insuf. rénal et hépatique] épuration extra-rénale
ACIDOSE RESPIRATOIRE ↗ PaCO₂ par hypoventilation alvéolaire avec ↘ pH variable selon la compensation rénale
clinique : hypercapnie aiguë : Hypercapnie chronique : HTA, ↗ Qc, HTIC et ↗ DSC Rétention hydrosodée Neuro : nausées, vomissements, flapping, céphalées, agitation, confusion … Hypercapnie chronique : Cœur pulmonaire chronique HTAP Troubles du rythme
biologie : hypercapnie – hypoxémie ↗ HCO₃¯ dans les Acidoses Respiratoires chroniques
étiologies (cf. tableau 3) traitement : correction de l'hypoventilation alvéolaire fluidifiants, broncho-dilatateurs, corticoïdes … ventilation mécanique si nécessaire
Tableau III : étiologies des acidoses respiratoires aiguës chroniques Obstruction des voies aériennes : Inhalation, laryngospasme, bronchospasme sévère, obstacle des VAS Dépression des centres respi : AG, sédatifs, Trauma crânien, AVC Défaillance cardiovasc : Arrêt cardiaque, OAP grave Déficits neuromusculaires : Botulisme, tétanos, Guillain-Barré, myasthénie, toxiques (curares), hypoK⁺ Atteinte thoraco-pulmonaire : PNO, hémothorax, pneumonie sévère, SDRA Ventilation artificielle : Volume/minute insuffisant BPCO Surdosage chronique en sédatifs, syndrome de Pickwick, tumeur cérébrale Poliomyélite, SLA, SEP, myopathies, paralysie diaphragmatique, myxœdème Cyphoscoliose, fibrose pulmonaire, hydrothorax, obésité, ascite, altération de la mécanique diaphragmatique
ALCALOSE RESPIRATOIRE ↘ PaCO₂ par hyperventilation alvéolaire ↗ pH ( >7,45)
Alcalose Respiratoire aiguë : clinique : Alcalose Respiratoire aiguë : Neuro : céphalées, confusion, crises comitiales (par ↘ DSC) Cardiovasc : ↘ Qc et TA chez patients sous AG Alcalose Respiratoire chronique : Le plus souvent asymptomatique
biologie : ↘ PaCO₂ et des HCO₃¯ K⁺ normal ou ↘ HypoCa²⁺ Hypophosphorémie
étiologies : (cf. tableau IV) Traitement : Patients en VC : ↘ ventilation/minute Patients en VS : s'assurer qu'il ne s'agit pas d'une hypoxémie oxygénothérapie
Tableau IV : étiologies des alcaloses respiratoires H hyperventilation alvéolaire d'origine centrale volontaire : anxiété, douleur involontaire : -> atteinte neuro : TC, encéphalite, méningite, tumeur cérébrale, AVC -> toxique : salicylés, aminophylline, catécholamines -> fièvre, sepsis, encéphalopathies métaboliques, grossesse hyperventilation alvéolaire par hypoxie tissulaire baisse de la FiO₂, altitude, intoxication au CO, anémie intense, insuf. Circulatoire majeure, shunt droite-gauche, tbles du rapport ventilation/perfusion, fibrose pulmonaire AAutres Hémodialyse, ventilation mécanique mal conduite