Le Droit international : un instrument de lutte face à la dette (Volet judiciaire) Université d’été du CADTM Europe Le 4/07/09 Renaud Vivien (CADTM Belgique)
Plan L’arbitrage international sur la dette présentation de l’arbitrage dans l’ordre juridique international Le Tribunal international permanent de la dette souveraine Position du CADTM Le procès des Institutions financières internationales (IFI) Le but d’une action en justice contre les IFI Les fondements juridiques de cette action en justice La stratégie du CADTM pour poursuivre la BM en justice
Présentation de l’arbitrage dans l’ordre juridique international 19ème siècle: développement de l’arbitrage inter-étatique Création de la Cour permanente d’arbitrage de La Haye en 1889 et de la CIJ en 1946 Désormais, l’arbitrage, à l’échelle internationale, est principalement utilisé dans le règlement des différends relatifs aux relations commerciales transnationales. 2 conventions multilatérales principales en la matière fixent des règles générales : la Convention de New York du 10 juin 1958 et la Convention européenne de Genève sur l'arbitrage commercial international du 21 avril 1961 les sources d’origine privée sont nombreuses et largement exploitées (les conventions d'arbitrage-type, les règlements d'arbitrage des institutions permanentes d'arbitrage, notamment ceux de la Chambre de Commerce International (C.C.I), l'American Arbitration Association, la London Court of Arbitration, la Chambre de commerce de Stockholm etc.)
Le (dys)fonctionnement de l’arbitrage international En soumettant leurs litiges à l’arbitrage international, les parties décident de soumettre non pas aux juridictions étatiques, mais à un ou plusieurs arbitres privés, en leur conférant le pouvoir de juger. L’arbitre est le garant du principe de l'autonomie de la volonté des parties L’arbitre exerce un pouvoir juridictionnel et sa solution s’impose aux parties (ex: les fonds vautours) les principes directeurs de l'arbitrage sont régulièrement battus en brèche puisqu’on assiste très souvent à une rupture de l’égalité des parties et à des violations des principes généraux au cours de la procédure l'indépendance et l'impartialité (ex : CIRDI) le coût de la procédure atteinte au principe de publicité de la procédure privation du droit à un recours effectif
Le Tribunal international permanent sur la dette Les deux économistes Oscar Ugarteche et Alberto Acosta défendent l’idée d’un Tribunal international permanent de la dette souveraine institué sous l’égide de l’ONU Ce tribunal devra notamment se prononcer, entre autres, sur les dettes 1. contractées par des débiteurs illégitimes ou des régimes illégaux ou par des créanciers qui ont agi de manière illégitime ou illégale en concert avec les gouvernements des États débiteurs ; 2. contractées dans un but illégitime ou illicite (guerre, oppression de la population, etc.) ; 3. contractées par des gouvernements démocratiques mais étroitement liées à la corruption ; 4. qui violent les droits humains (DESC, Droits civils et politiques). Au-delà de l'aspect légal, ce tribunal pourrait se pencher non seulement sur l'illicéité de la dette mais aussi sur sa légitimité et identifierait les responsabilités respectives des débiteurs et des créanciers
Les avantages du Tribunal international sur la dette Il aurait vocation à rééquilibrer le désavantage créé au détriment de débiteurs. En effet, il est courant de trouver des clauses de règlement par lesquelles les États renoncent explicitement à l’exercice des compétences des tribunaux nationaux au profit des tribunaux étrangers. Ce transfert de l’exercice des compétences se fait normalement en faveur des tribunaux situés aux États-Unis ou en Grande-Bretagne Les citoyens seraient habilités, comme les États, à introduire des demandes auprès du Tribunal. Le recours individuel devra être prévu dès la création du Tribunal. La création de ce Tribunal consisterait à réaffirmer la justiciabilité des IFI, banques privées, États et transnationales
Les inconvénients du Tribunal international sur la dette Pour créer un Tribunal international, il faut un traité international négocié, signé et ratifié par les débiteurs et les créanciers (cf Convention de Genève sur le droit des Traités de 1969 et Convention de Vienne sur le droit des traités entre États et Organisations internationales et entre celles-ci de 1985) Quel statut donner aux créanciers privés ? Quel sera le droit applicable? Un jugement légitimerait toutes les dettes qui n’ont pas été déclarées illicites (au regard de quelles règles de droit encore une fois!) Un mécanisme d’arbitrage ne peut pas résoudre le problème de l’endettement extérieur des pays du Sud : il faut une implication totale des population des pays victimes de la dette. L’identification de toutes les dettes illégitimes et leur non-paiement relève fondamentalement de la souveraineté des États
Position du CADTM L’audit de la dette et l’acte de répudiation des dettes illégitimes (fondés en droit international et les exemples du Paraguay, Norvège et Équateur) Le recours aux juridiction internes : doctrine Calvo, résolution 1803 sur les ressources naturelles (1962), Charte des droits et des devoirs économiques des États (1974) La répudiation n’est pas incompatible avec la voie judiciaire (CAIC, action judiciaire pour la récupération des biens mal acquis, Procès Apartheid, avis consultatif de la CIJ…)
II. Le procès des IFI 1) Pourquoi faire un procès contre les IFI ? transfert de dettes coloniales Soutien aux dictatures Financement de crimes contre l’humanité PAS Financement de projets causant des dommages humains et écologiques irréversibles Elles n’ont jamais été poursuivies pour violation de droits humains
Les fondements juridiques d’un procès contre les IFI La Banque mondiale et le FMI, en tant qu’organisations internationales sont des sujets de droit (Avis consultatif de la CIJ) La BM et le FMI sont des institutions spécialisées de l’ONU (Rapport de l’expert indépendant de l’ONU sur la dette externe) La BM est composé d’États qui individuellement doivent respecter les droits humains La BM n’est pas couverte par l’immunité de juridiction (la section 3 de l’article VII de ses statuts ; décision de la Cour d’appel US 1983 « Mendaro » ) Le FMI ne peut pas opposer son immunité si elle s’est rendue complice de violations graves du droit international Le droit à un procès prime sur l’immunité de juridiction (C.Cass, 25 janvier 2005)
Les difficultés en pratique Aucun procès n’a encore été intenté contre les IFI Difficulté à prouver le lien de causalité directe (action en responsabilité civile et l’intention dans l’action au pénal) Risque pour la sécurité des plaignants Les IFI sont relégitimées du fait de la crise économique mondiale L’importance des outils de communication des IFI (cf Panel d’inspection de la BM, Plan d’action du Management de la BM dans l’affaire des Pygmées) Problème de la prescription
Stratégie du CADTM pour une action en justice contre la Banque mondiale Faciliter une action en responsabilité civile contre la BM sur des cas le plus précis possible (rôle de l’audit de la dette) 2 cas de violation précises retenues en RDC Utiliser les rapports du Panel d’inspection de la BM Choix du Tribunal de grande instance de Paris Communiquer un maximum autour de ce projet pour avoir l’adhésion d’un maximum d’associations, syndicats, citoyens, etc….