TRANSFORMER LES POLITIQUES DE L’IMMIGRATION Université d’été d’ATTAC - Poitiers 2006 Christian DELARUE Secrétaire national du MRAP, Membre du CA d’ATTAC et du Groupe « Migrations » du Conseil scientifique d’ ATTAC
Introduction Pour anticiper sur les développements la transformation et les ruptures portent sur : - la conception : de type « loi de police » - - la logique : d’exclusion - le contenu : infra-juridique (du non droit) qui préside au droit de l’immigration et la politique d’immigration. Il s’agit d’y insuffler un droit de protection et de liberté. La politique de l’intégration que j’expose dans une autre session ne sera abordé qu’incidemment ici, s’il influe sur la politique d’entrée et séjour.
1 - Préalable : Immigration : de quoi et de qui parle-t-on ? L’immigration concerne le mouvement des personnes allant d’un pays à un autre, plus exactement d’un pays d’origine à un pays d’accueil pour s’y installer durablement . L’immigré est donc celui qui vient d’ailleurs, de l’étranger. Mais : - Tous les immigrés ne sont pas nécessairement des étrangers, pas ceux qui sont devenu français. - Tous les étrangers ne sont pas nécessairement des immigrés ; pas ceux qui sont nés en France et qui ont gardé la nationalité de leurs parents étrangers. Tous ceux résidants sur le sol français appartiennent à la « population française ».
Les chiffres En 2004-2005, sur 57,2 millions de français il y aurait 3,5 millions d’étrangers dont 0,6 million nés en France. Les immigrés étaient eux environ 4,9 millions dont 2,9 millions d’étrangers. Environ 110 000 personnes bénéficient aujourd’hui du statut de réfugié contre 350 000 en 1963.
Les types d’immigration L’immigration de travail (avec ou sans famille) mais qui migre pour trouver de quoi vivre décemment et les réfugiés (avec ou sans famille) Les réfugiés qui fuient leur pays pour diverses raisons. La législation à appliquer n’est pas la même. Les étudiants : particularité: ils sont durablement installés mais retournent en principe chez eux à la fin de leurs études Enjeux juridiques Dans le premier cas ce sera l’ordonnance du 2 novembre 1945 - modifiée plusieurs fois. Pour les réfugiés, les règles de l’asile figurent dans la Convention de 1951. La dernière loi du 24 juillet 2006 est incluse dans le CESEDA (code d’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile) qui rassemble l’ensemble des textes sur les étrangers.
2 - La politique et l’utilitarisme migratoire. De 1954 à 1974, la France connaît un afflux extrêmement massif d’immigrés masculins, le plus souvent venu du Maghreb sans sa famille. Il s’agit d’une volonté politique : Les « recruteurs » vont chercher les travailleurs immigrés qui sont employés à bas prix aux travaux les plus pénibles.
« la crise économique » et les politiques anti-immigrés Décision de suspendre l’immigration (VGE 3 juillet 1974) Politiques d’aide au retour engagées sans succès. En fait, ce sont les familles qui immigrent pour rejoindre le père. L’immigration s’installe sur le territoire français de 1974 à 1982. Quels efforts en matière de logements, de formation professionnelle?
Années 80 Réactions et débats Lors de la « marche des beurs » de 1983 un étranger sur trois a moins de 20 ans. La même année le Front national fait de l’immigration un axe de politique qu’il ne quittera plus. La même année encore la gauche évoque le droit de vote des immigrés mais sans passer à l’acte.
Une force de changement trop tranquille ! Après une année 1981/82 de mesures positives pour les immigrés, les différents gouvernements vont ensuite engranger des lois de contrôle des flux migratoires qui globalement durcissent les conditions de l’entrée et du séjour l’immigration.
Eté 1981 Le 8 juillet : Déclaration de Pierre MAURROY Le 12 juillet : Circulaire Gaston DEFERRE Du 8 au 11 août : Visite de Claude CHEYSSON en Afrique du Nord Du 11 au 18 août : circulaire de régularisation des clandestins / illégaux
« Immigration zéro » Les principales lois 1986 Pasqua : contre l’immigration clandestine 1993 Pasqua : durcissement du code de la nationalité 1996 Loi Debré renforce encore Pasqua 1997 Loi Chevènement ne fait qu’assouplir ce dispositif 1998 Loi Guigou revient sur certaines dispositions mais maintien le dispositif
3 - « Accueillir la misère du monde » ? La mondialisation de l’économie va prendre une nouvelle forme et dimension. Les flux migratoires vont eux aussi prendre une dimension mondiale. Le thème du co-développement va alors faire son apparition mais sans effet politique tangible.
Le « devoir d’intégration »? Parallèlement un discours puis une institution (le HCI en déc.1989) puis une politique dite d’intégration de l’immigration légale va se mettre en place. Elle va servir de cache sexe à la féroce répression de l’immigration clandestine Cette politique d’intégration est sans effets tangibles sur les conditions de séjour des immigrés voire porteuse d’une signification assimilationniste à l’adresse de l’ensemble des immigrés qui ont un « devoir d’intégration » (Rocard 1991). La politique d’intégration consiste alors à simplement favoriser cet effort demandé et non à développer l’insertion économique et sociale des immigrés par des projets sectoriels ambitieux.
Intégration dans une société raciste et fermée ? Les différentes qualités juridiques d’un immigré (légal/illégal ou de travail/d’asile etc…) ne sont pas inscrites sur son front par contre les stigmates de ses origines sont pour certains belles et bien visibles. A tel point que le volet intégration a du prendre depuis quelques années une nécessaire tournure anti-discrimination raciste. Cette politique de construction d’un mur pour forteresse s’est durcie tant en France qu’en Europe, tant à l’intérieur des frontières qu’à l’extérieur, au Maghreb surtout.
La « dialectique de l’intégration » Intégration-assimilation Les immigrés se sont largement assimilés à la société française Une perspective unilatérale Un discours d’extrême droite dangereux. Intégration-insertion Les problèmes de l’immigration relèvent d’une indigente politique d’insertion économique et sociale INTEGRATION Par la citoyenneté de résidence Par l’école INSERTION Par l’emploi partout y compris dans la fonction publique Par le logement Par un aménagement des quartiers