Être malade d’Alzheimer et vivre à domicile

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Transcription de la présentation:

Être malade d’Alzheimer et vivre à domicile Louis PLOTON Professeur de gérontologie Université Lyon-2

Quels interlocuteurs? Concrètement il existe un problème « de l’information » des familles A qui s’adresser : « le maintien à domicile c’est quel numéro de téléphone ? » Besoin d’instances d’accueil, d’écoute, de soutien matériel et moral, pouvant s’adapter à l’évolutivité des besoins Il n’y a pas réellement sur l’ensemble du territoire de réponse normalisée (d’efficacité comparable) Implication variable des services existants et des associations avec des leaders locaux sur qui s’appuyer Seule la question des aides matérielles est généralement résolue : allocations, aides ménagères, auxiliaires de vie, paramédicaux, soins infirmiers (pénurie)

Des problèmes non matériels (1) Accompagner des deuils qu’il doit faire : Gestion des biens Conduite automobile Aménagement du cadre de vie Des transferts de responsabilité : Devenir responsable à sa place Question des risques acceptables Comment prendre en compte son point de vue ? Expression comportementale, mais qui décode ? Ambivalence : une chose dite, le contraire montré ! Question des transferts de pouvoir : Directives anticipées Personne de confiance Question des arbitrages (médiations par des professionnels, mais par lesquels ?)

Des problèmes non matériels (2) La maladie d’Alzheimer, comme toute maladie pose la question douloureuse de la séparation finale (la mort) Qui partira le premier dans le couple ? Que deviendrons-nous (nous sa famille, ses enfants) lorsqu’il ne sera plus là ? Cela renvoie à des questions telles que : Sa réconciliation avec lui-même et avec d’autres (question des problèmes non résolus) Savoir ce qu’il nous lègue symboliquement, y compris ce que sa maladie nous donne à penser (elle servira de référence) Préserver les liens avec lui D’une manière générale: apprendre à communiquer encore, avec lui, par les canaux restés performants (le registre affectif)

Des crises Les périodes critiques marquent des étapes vers une situation où l’accroissement des aides matérielles risque d’être inopérante (Thèse DARNAUD) Exemples de situations critiques : la prédisposition possible aux troubles du comportement (confusion, hallucinations, cris, fugues agressivité...) l’incontinence majeure, les chutes, la grabatisation Doit on régler le problème des troubles du comportement à domicile ou à l’hôpital (la séparation est généralement efficace, en soi, mais problème de la sortie) ? Nécessité de formation des professionnels à l’élaboration d’hypothèses sur le sens et la fonction possible des symptômes Déficit de savoir théorique chez les intervenants de terrain et chez ceux qui les encadrent : ils ne savent pas qu’il existe des connaissances pouvant répondre à leurs besoins (notamment dans le registre des interactions psychologiques) d’où leur difficulté à se faire aider

Un absent Place insuffisante du secteur psychiatrique, comme co-acteur Question de ses moyens et de son articulation avec les acteurs médico-sociaux Des tentations fréquentes, soit : l’éviter le faire intervenir comme « preneur de décisions » ne l’utiliser que pour obtenir un lit en milieu spécialisé (HDT) Un exemple de coordination : référent principal / prestations de services complémentaires (maître d’œuvre / sous traitant)

Des limites ? Capacité de réponse au besoin de soutien matériel et moral Épuisement des proches problème de l’isolement social progressif demande de toujours plus de présence Question des peurs (chute accident) et du sentiment de responsabilité de la mort d’un Être cher Ce qui conduit dans nombre de cas à poser la question de l’institutionnalisation, laquelle opère un transfert de responsabilités, mais va : rationner la réponse (savoir être frustrant sans sadisme…) limiter la vie pour la protéger ! Important nécessaire triangulation de la décision de placement et de la préparation de celui-ci savoir tenter un ultime retour à domicile pour limiter les regrets

La question des référents Rôle de la triangulation et de l’alliance thérapeutique Nécessité de pouvoir s’appuyer sur des référents stables (dans tous les sens du terme) : bien informés, adéquatement formés et épaulés Ce qui suppose que ceux-ci disposent d’espaces de réflexion pour mettre en perspective les difficultés auxquelles le MAD les confronte du point de vue médical psychologique et social (financier) qui sont indissociables La coordination des aides est d’abord une question de méthodologie d’intervention

La stratégie d’intervention (1) L’intervenant : Intervient par délégation, ce qui suppose une part d’appropriation de sa tâche (dans des limites révisables) Ne peut pas faire à la façon d’un autre (de l’aidant familial) et il n’a pas intérêt à trop tenter de le faire (il serait nécessairement pris en défaut) Nécessité d’un contrat moral sur ce qui lui est demandé en fonction de compétences reconnues  Définition conjointe des objectifs et moyens d’action Connaissance des principes d’action propres aux professionnels (ex : exercice de choix, non-contention etc.) Rencontres périodiques de tous les acteurs et des bénéficiaires du MAD pour évaluer les difficultés et les dérives du projet et pour savoir redéfinir d’autres objectifs ou moyens d’action  Réflexion de fond, entre professionnels, sur la pertinence des principes (ex : re-motivation au lieu de stimulation) et sur la méthodologie d’intervention et/ou de résolution des difficultés

La stratégie d’intervention (2) A ce propos : Importance de distinguer : qui souffre qui demande qui présente des symptômes Savoir qu’il y a (au plan psychoaffectif) des liens privilégiés de solidarité inconsciente entre famille et patient Il est illusoire d’essayer de prendre le parti du malade contre sa famille, car il finira toujours par valider le point de vue de celle-ci (ex : des liens qui existent dans les couples)

La place de l’intervenant Le rôle de l’intervenant (aidant / soignant) : il n’est pas interchangeable il agit de l’extérieur de la famille dont il est un allié temporaire mais dont il n’est pas membre il est un conseiller et n’a pas à exercer une position d’autorité Même si le professionnel a un savoir général incontestable, il doit tenir compte du savoir des proches, propre à « leur » patient  il ne doit pas surestimer sa place : coup de pouce point d’appui grain de sable catalyseur de questionnement…

La place centrale de la famille Être clair sur le rôle de la famille : même si elle n’a aucun pouvoir formel, elle est l’aidant et surtout le référent principal Il lui échoit d’être le défenseur naturel et le garant de la qualité des aides et soins prodigués Un problème récurrent : savoir se faire aider à temps, ce qui est souvent contraire à la demande implicite du malade (toi, rien que toi, tout le temps toi…)

Des voeux Le malade et ses proches ont tout à la fois besoin d’informations (médicales, sociales et psychologique) d’aides matérielles, de soins médicaux et de soutien psychologique Nécessité que la recherche progresse, au plan : bio-médical des stratégies relationnelles de la connaissance du vécu de la maladie (par le malade et par ses proches) de l’image même de la maladie et du malade C’est à ce propos qu’il appartient à la recherche psychologique de développer des façons de raisonner et des représentations plus fécondes