Forum citoyen Développement durable et société Développement durable et agroalimentaire I. Les appropriations du vivant et du cognitif Thierry Linck Laboratoire de recherche sur le développement de l'élevage INRA SAD - Corte
Le développement : ce n'est pas que l'affaire des économistes Selon F. Perroux (1961) : « Ensemble des changements sociaux et mentaux d'une population qui lui permettent d'accroître durablement son produit réel marchand... » un impact apprécié sur le seul plan de la production de valeurs marchandes (où est la durabilité?) des facteurs non économiques (« changements sociaux et mentaux ») appellent une réflexion plus large et peuvent être compris comme la production et le partage de connaissances nouvelles)
Le développement comme rapport à la nature et à la société Le vivant, les ressources écosystémiques... reconnus et mobilisés grâce à la mise en oeuvre de: savoirs techniques qui cadrent les modes d'aménagement des écosystèmes et de domestication des processus biologiques. savoirs relationnels qui règlent les modalités d'appropriation des ressources et la place des individus dans la société. Ces savoirs techniques et relationnels structurés par des trames cognitives partagées forment patrimoine.
Le développement durable est un développement patrimonial......Inscrit dans les temporalités du quotidien et du lien intergénérationnel à la fois ancrage dans nos représentation du passé et capacité de projection dans l'avenir... Incrémentation ou déconstruction patrimoniale (de savoirs techniques et relationnels) jouent sur les trois piliers du développement durable : Environnemental (aménagement des écosystèmes), Économique (viabilité) Social (modes d'appropriation)
Les ressources patrimoniales sont des ressources collectives En l'absence de règle nul n'est tenu d'en assurer l'entretien, Elle sont dépouvues de valeur marchande propre, Elles peuvent faire l'objet d'une appropriation collective : Dès lors qu'elles sont activées dans la construction du développement, rien ne permet d'affirmer qu'il s'agit de biens libres
Il n'y a pas d'appropriation collective sans exclusion Comme toute forme d'appropriation, elle repose sur un principe d'exclusion. Elle se différencie de l'appropriation individuelle par la diversité de ses formes et de ses champs d'application : L'appropriation collective est une capacité inégalement distribuée à : identifier définir activer façonner valoriser gérer tirer profit transmettre... Des ressources patrimoniales
Les dispositifs de l'appropriation collective Qu'elle qu'en soit la nature, le développement est l'expression d'un choix collectif (donc essentiellement politique) fondé sur la mise en oeuvre de dispositifs d'appropriation, c'est-à-dire d'un agencement contingent de savoirs techniques et relationnels qui régissent le mode de distribution de ces compétences. Ces dispositifs déterminent : les capacités (individuelles et collectives) d'action, les constructions identitaires (et donc la cohésion du lien social) la durabilité (environnementale, économique et sociale)
Les pièges de la marchandisation Première option : Dans la mesure où nul n'est tenu d'assurer l'entretien des ressources patrimoniales (notamment environ- nementales et cognitives), il est possible d'externaliser les risques et les coûts environnementaux. C'est la logique du modèle productiviste et de l'intégration de l'agriculture dans des filières longues dominées par le négoce de l'alimentation.
Les pièges de la marchandisation Seconde option : Qualifier l'origine (ou tout autre attribut) Le dispositif, inscrit dans le registre de la propriété intellectuelle, met en réserve la dénomination du produit asssure une exclusivité d'usage de la réputation qui lui est associée, mais ne constitue pas une garantie de durabilité, « d'authenticité » ou de justice sociale. C'est encore une fois une question de construction de choix collectif. Il est bien question ici de « rareté instituée » qui porte sur la dénomination et non sur la ressource patrimoniale elle- même.
Conclusion Il n'y a pas de développement durable sans appropriation patrimoniale et sans maîtrise collective de l'exclusion