La ménopause de nos jours C.Mokdad Interne 5ème semestre , CHU Rouen Journée de DES , 14/01/2009
Définition (OMS 1996) Arrêt permanent des menstruations résultant d’une perte de l’activité folliculaire ovarienne . Diagnostic rétrospectif : aménorrhée > 12 mois +/- symptômes climatériques Survenue en moyenne à 50 ans en France
Diagnostic positif En pratique courante : diagnostic clinique suffisant pas d’intérêt des dosages biologiques
Cas particuliers Test à la progestérone →Si nécessité d’un THM précoce (Sp climatériques+++) Dosages hormonaux (FSH >30 UI/L E2 < 20 pg/mL) femmes hystérectomisées contraception estro-progestatifs macro-progestatifs DIU au lévonorgestrel Aménorrhée isolée (surtout si < 40 ans) Rechercher une cause d’aménorrhée 2aire (grossesse, adénome à prolactine…) Hystérectomie : dosages 2 à 3 sont nécessaire à 1 mois d’intevralles vers 50 ans O-P : à J 7
Symptômes fonctionnels ou climatériques 875 femmes de 45 à 64 ans aux USA Symptômes les plus fréquents: Bouffées de chaleur 46% Douleurs articulaires 44% Insomnie 43% Sudation nocturnes 36% Résolutif en 2 à 5 ans ( symptômes prolongées=10 à 20 %) 14 % ne se plaignent de rien … Chez la moitié d’entre elles symptômes sont invalidants et altèrent leur qualité de vie Greendale et Al, Obstet Gynecol 1998
Conséquences tissulaires de la ménopause Liée à la carence oestrogènique Peau: sécheresse cutanée , accentuation des rides , amincissement de la peau et pertes d’élasticité Appareil uro-génital: sécheresse vaginale, prurit, dyspareunie, vaginite , infections urinaires à répétition … Sein : atrophie du parenchyme , disparition des lobules ,↓ taille des mamelons , perte pouvoir érectile Cardio- vasculaire : ↑ risque des facteurs de risques ( ↑ TA , ↑résistance à l’insuline , ↑LDL – Cholestérol ,↑ triglycérides ,↓HDL – Cholestérol ) →incidence infarctus du myocarde X 10 entre 50 et 65 ans →cardiopathie ischémique : 1ère cause de mortalité féminine Rozenbaum, EMC Gynécologie-Obstétrique 2007
Os : modification du remodelage osseux marquée par une hyperactivité ostéoclastique →diminution de la densité osseuse Cerveau : participent aux mécanismes protecteurs de le maladie d’Alzheimer ( antidépresseur , synthèse du NGF , augmentation du flux sanguin , antioxydant , anti-inflammatoire …)
PRINCIPE DU TRAITEMENT HORMONAL
Femmes non hystérectomisées Estrogènes + Progestatifs (protection de l’endomètre) Femmes hystérectomisées Estrogènes seuls Progestatifs : lutte contre l’hyperplasie endomètriale induite par les œstrogènes
Œstrogènes Molécules Voies d’administration 17 β œstradiol (ou 17 β E2 ,œstrogène endogène) œstrogène conjugué équin Voies d’administration Orale : estrogène conjuguée équin (Prémarin®) et 17 β E2 (Estréva®) Transdermique (patch) : 17 β E2 (Estraderm®) Percutanée (gel ou flacon doseur) : 17 β E2 (Oestrogel® ) Voie orale : passage hépatique métabolite qui activent la formation de cholestérol et augmente la TA
Progestatifs Molécules Voie d’administration Toujours associées aux œstrogènes Au minimum 12 jours par mois Molécules Progestatifs de synthèse ( Surgestone® , Lutenyl®, Luteran® …) Progestérone naturelle micronisée ( Utrogestan® ) Voie d’administration Orale
Schémas séquentiels : avec règles Schéma séquentiel discontinu (simple, pas de calcul) J0 J12 J24 J28 J31 J0 E 24 à 26j P 12j règles Schéma séquentiel continu (atcd migraines cataméniales) J0 J12 J24 J28 J31 J0 E 31j P 14j règles
Schémas combinés : sans règles Schéma discontinu 25j J12 J24 J28 J31 P 25j E 25j J0 J0 Progestérone : ½ dose du schéma séquentiel Schéma continu 31j J0 J12 J28 J24 J31 E 31j P 31j
Contre-indications aux œstrogènes Le cancer du sein. Les autres tumeurs estrogèno-dépendantes connues ou suspectées (par exemple cancer de l’endomètre) Antécédents thromboemboliques : Artériel Veineux Autres : Hémorragie génitale sans diagnostic établi Affection hépatique aiguë ou chronique La présence de facteurs de risque coronarien (diabète, tabagisme, HTA) doivent amener à bien évaluer le rapport bénéfice/risque avant de prescrire un THM. (Le traitement hormonal , surtout utilisé par voie orale, est formellement contre-indiqué. Bien qu’officiellement contre-indiquée, l’estrogénothérapie par voie transdermique est probablement moins délétère que la voie orale dans la survenue d’évènements thromboemboliques d’après les études cas-témoins. Des études randomisées doivent être entreprises pour le confirmer ) Source :AFSSAPS
Principales études portant sur l’impact du THM WHI (Women Health Initiative) E3N (étude épidémiologique auprès des femmes de la MGEN) ESTHER (Estrogen and Thrombo Embolism Risk ) Étude MWS (Million Women Study )
Etude WHI Etude prospective (inclusion de 1993 à 1998) Étude des effets du THM contre placebo 18608 femmes ménopausées âgées de 50 à 79 ans Suivi: 5,2 ans 0,625 mg d’œstrogène conjugué équin (Prémarin®) associé à 2,5 mg de Medroxyprogestérone acétate® (MPA) Chlebowski et Al, JAMA 2003
Etude WHI Evènements HR IC - Acc cardio-vasculaire 1,29 1,02-1,63 - Cancer du Sein 1,26 1,00-1,59 - Acc Vasculaire cérébral 1,41 1,07-1,85 - Embolie Pulmonaire 2,13 1,39-3,25 - Cancer colorectal 0,63 0,43-0,92 - cancer endométrial 0,83 0,47-1,47 - Fracture col fémur 0,66 0,45-0,98 - DC (autres causes) 0,92 0,74-1,14
RISQUE ABSOLU PAR 10.000 PERSONNES / AN Etude WHI RISQUE ABSOLU PAR 10.000 PERSONNES / AN Infarctus myocarde + 7 AVC + 8 EP + 8 Cancer du sein + 8 Cancer colorectal - 6 Fracture de hanche - 5
remarques Schéma thérapeutique américain Âge moyen élevé (63-68 ans) Facteurs de risque CV élevés (tabac 50%, HTA 30%, obésité 30%, hypercholestérolémie 12%, diabète 4%) Augmentation du risque de cancer du sein non significative pour les femmes ne bénéficiant pas d’un THM avant inclusion Bras supplémentaire E seul chez les femmes hystérectomisées: RR de cancer du sein=0.77 mais IC95% [0,59-1,01]
Etude E3N Etude de cohorte prospective française (mutuelle générale de l’éducation nationale) portant sur environ 100 000 femmes volontaires françaises nées entre 1925 et 1950 et suivies depuis 1990. Évaluation des différents facteurs de risque de cancer du sein et notamment du type de THS. Questionnaire tous les 2 ans : Pour chaque femme : mode de vie , état de santé , âge à la première prise de THS, âge à la dernière prise de THS, durée de prise de THS, type de THS. Intérêt : type de THS ( Progestatif) Fournier et Al, Reprod Hum Horm 2005
RR de cancer du sein en fonction du THS 1,28 Estrogènes seuls 1,1 Estrogènes + progestérone micronisée 1,69 Estrogènes + progestatifs de synthèse Conclusion : estrogènes : 17 B œstradiol estrogènes et progestatifs naturels n’augmentent pas de manière significative le risque de cancer du sein 0,5 1 1,5 2 2,5 3
ESTHER STUDY GROUP Étude française cas-témoin 155 patientes avec antécédents cardio-vasculaires et 381 sans antécédents . Effet de la voie d’administration des œstrogènes sur le risque thromboembolique Scarabin et Al, LANCET 2003
Risque thromboembolique Estrogènes par voie orale : RR : 3.5 [1.8-6.8] Estrogènes par voie transdermique : RR : 0.9 [0.5–1.6] Impact de la durée du traitement 1 à 12 mois : RR : orale 8,1 transdermique : 1.5 13 à 30 mois : RR : orale 5 transdermique : 0.6 31 à 48 mois : RR : orale 4 transdermique :1.3 >48 mois : RR : orale 2.5 transdermique :0.9 RR de l’utilisation de la voie orale / transdermique RR : 4
Recommandation de l’AFSSAPS « En l’absence de syndrome climatérique […], l’administration d’un THS n’est pas recommandée en raison d’un rapport bénéfice/risque défavorable. » « Le rapport bénéfice/risque du THS reste favorable dans les troubles du climatère perçus par la patiente comme altérant sa qualité de vie. Dans cette situation, le traitement peut être instauré, à la dose minimale efficace, pour une durée la plus courte possible. Toutefois, à l’instauration du traitement, les patientes doivent être clairement informées des risques inhérents à ce traitement. » « De plus, le traitement doit être réévalué régulièrement, au moins une fois par an, en prenant en considération l’évolution du rapport bénéfice/risque. » - suspension temporaire du traitement afin de contrôler la persistance du syndrome climatérique et sa sévérité. » -pas de limite à la durée d’un THS.
Beral et Al, Lancet 1997
Quelles alternatives pour traiter les symptômes climatériques? TTT non hormonaux (bouffées de chaleur) Abufene® , Effexor® TTT locaux par voie vaginale (sécheresse vaginale ) Estriol ( Trophicrème® ) Promestriène ( Colpotrophine® ) TTT hormonaux non substitutifs (libido, perte osseuse) Tibolone ( Livial ®) Phyto-œstrogènes Livial : stéroïde de synthèse de la 19 nortestosterone triple action : ostrogénique ,progestative et androgenique symptôme climatérique , libido, sécheresse vaginale Prévention de la perte osseuse ( equiv à THS ) MAIS poids , acné , pilosité Phyto : Ci si k du sein <2 ans
L’ostéoporose
OSTEOPOROSE Définition (OMS 1994) =définition ostéodensitométrique DMO < -2,5 écart-type du T-score Quelques chiffres 40% des femmes de 65 ans,> 60% après 80 ans une femme de 50 ans a 40% de risque de fracture ostéoporotique avant la fin de sa vie. 20 à 30% de décès dans l’année suivant une fracture du col fémoral… et 50% de handicaps pour les survivantes Définition oms 1994:↓ de la densité minérale osseuse mesurée par ostéodensitométrie Ostéopénie DMO entre -1 et -2,5 écart type de la valeur moy d’un adulte jeune (T-score) Ostéoporose DMO<2,5
Quand la dépister?
Indications remboursées de l’ ostéodensitométrie chez une femme ménopausée Atcd personnel de fracture par fragilité Atcd de fracture du col fémoral chez un parent du 1er degré (hors trauma) IMC<19 Pathologies inductrices d’ostéoporose (hypogonadisme prolongée, hyperthyroïdie, hyperparathyroïdie …) Ménopause avant 40 ans quelle qu’en soit la cause (chirurgicale, iatrogène, idiopathique…) Atcd de corticothérapie systémique > 3 mois consécutifs pour une dose > 7,5 mg/j d’équivalent prédnisone La moitié ne présenteront pas d’ostéoporose et parmi les femmes ayant une ostéoporose la moitié ne présente pas de FdR
Facteurs de risque fracturaire (en dehors des indications de l’ostéodensitométrie) Âge+++ Elévation des marqueurs biologiques de résorption osseuse Diminution de l’acuité visuelle Troubles neuromusculaires ou orthopédiques Immobilisation prolongée Carence vitamino-calcique Mauvais état de santé
Comment prévenir et traiter?
Maintien d’une activité physique en charge Apport suffisant en calcium (1200 à 1500 mg/j) et vit D (100 000 UI/ trimestre) Traitement médicamenteux Bisphosphonates (alendronate,ibandronate…) THM SERMs (raloxifène seul commercialisé) Ranélate de strontium PTH ( Teriparatide) Bisphosphonates inhibiteurs puissants de la résorption ostéoclastique SERMs modulateurs sélectifs des récepteurs aux œstrogènes (agonistes sur os et foie, antago sur sein et utérus..) Ranelate de strontium activité originale inhibe les ostéoclastes et active les ostéoblastes
DCI Nom commercial Dose Durée de traitement Alendronate Fosamax® 10 mg/j PO 70 mg/sem 4 ans Ibandronate Bonviva® 2,5 mg/j PO 150 mg/mois 3 ans Raloxifène Evista® 60 mg/j PO Teriparatide Forsteo® 20 µg/j SC 18 mois Ranelate de strontium Protelos® 2 g/j PO
Effets sur les fractures vertébrales RR THM 0,67 [0,45-0,98] (Togerson et Al, JAMA 2001) Alendronate 0,53 [0,41-0,68] (Black et Al, JAMA 2006) Ibandronate 0,38 [0,25-0,59] (Delmas et Al, Osteoporos. Int. 2004) Raloxifène 0,7 [0,50-0,80] (Ettinger et Al, JAMA 1999) Teriparatide 0,35 [0,22-0,55] (Greenspan et Al, Ann Intern Med 2007) Ranelate de strontium 0,55 [0,39-0,77] (Reginster et Al, Int. J. Clin. Pract. 2007)
Effets sur les fractures non vertébrales RR THM 0,60 [0,40-0,91] (Togerson et Al, JAMA 2001) (0,45 si avt 60 ans) Alendronate NS (Black et Al, JAMA 2006) Ibandronate 0,3 [0,12-0,70] (Delmas et Al, Osteoporos. Int. 2004) Raloxifène NS (Ettinger et Al, JAMA 1999) Teriparatide 0,47 [0,25-0,88] (Greenspan et Al, Ann Intern Med 2007) Ranelate de strontium 0,84 [0,70-0,99] (Reginster et Al, Int. J. Clin. Pract. 2007)
Et quand traiter?
Recommandations AFSSAPS 01/2006 Ostopénie (entre -1 et -2,5 DS) Pas de traitement systématique Traitement recommandé si fracture vertébrale ou du col fémoral Ostéoporose Traitement systématique si fracture porotique En l’absence de fracture, le traitement est à discuter en fonction des facteurs de risques fracturaires (âge+++, …)
Recommandations AFSSAPS (2)
Recommendations AFSSAPS « Chez les femmes ménopausées ayant des facteurs de risque d’ostéoporose : dans la prévention du risque fracturaire, le rapport bénéfice/risque du THS, quel que soit le produit envisagé, est défavorable sur la base des données actuellement disponibles. L’administration d’un THS pourra être envisagée chez la femme ménopausée qui a un risque élevé de fractures, uniquement lorsqu’elle présente une intolérance à un autre traitement indiqué dans la prévention de l’ostéoporose et après une évaluation individuelle précise et soigneuse du rapport bénéfice/risque... » Divergence de l’AFEM quant à l’opportunité du THS en prévention de l’ostéoporose
En pratique
1ère consultation Examens complémentaires : Interrogatoire : antécédents familiaux et personnels carcinologique, métabolique et vasculaire, facteurs de risques fracturaires ,traitements en cours , mode de vie , signes de carence ostrogénique Examen clinique général (poids, taille ,TA , état veineux ) Examen gynécologique et mammaire Examens complémentaires : FCV Mammographie ( datant de moins d’1 an , avant mise sous THM ) Bilan glucido-lipidique de référence
Règles hygiéno-diététique Maintien d’une activité physique en charge ( 30 à 45 minutes de marche rapide par jour) →prévention des risques cardio-vasculaire et osseux . Hygiène alimentaire : calcium (1200 à 1500 mg/j) vitamine D (uvedose printemps et automne) Eviction du tabac
En conclusion La ménopause Une étape physiologique Des complications souvent gênantes, parfois graves Des traitements possibles mais non anodins D’où la nécessité d’en évaluer le rapport bénéfice/risque: chaque patiente est particulière!