Autrui
Problèmes de définition ou d’approche : un autre (c’est-à-dire : un deuxième, comme le premier) ou un autre (différent). D’emblée, le problème se pose de savoir comment nous considérons autrui : comme un ennemi, un opposant, comme un allié, comme un aide, comme un ami, comme un modèle?
1. Autrui peut être pensé comme un opposant L’histoire semble poser l’autre comme un ennemi : histoire des peuples : histoire de guerres, de conquêtes, d’assujettissements, de dominations, de meurtres, de tortures, d’esclavage Autrui fait peur. On souhaite le dominer. Mais on ne sort pas forcément vainqueur de cette domination. On devient dépendant de lui. Dialectique du maître et de l’esclave
2. Mais cette opposition est structurante. Hegel La Phénoménologie de l’Esprit « On ne se pose qu’en s’opposant. » Chaque nouveau mouvement artistique se détermine en s’opposant à celui qui précède. Le petit enfant sait dire non avant de dire oui. Un des premiers actes de cette structuration du sujet pensant est de déterminer des limites, de les tracer et cette délimitation n’est pas seulement un fait de guerre, c’est aussi un fait de chaque instant dans nos relations avec autrui : se structurer, c’est, avant tout, pouvoir dire « non » à propos, pouvoir refuser quelque chose.
3. Qui sort vainqueur ? De cette guerre, le vainqueur n’est pas vraiment l’homme mais l’humanité, l’Esprit, la connaissance, la raison, indépendamment des conflits et à l’insu des protagonistes. Nous sommes en quelque sorte les jouets de l’Esprit. Kant « l’insociable sociabilité de l’être »
4. La nature humaine et le conflit Le conflit peut sembler être à l’origine de toute relation humaine. Hobbes pense que si les hommes se sont regroupés en sociétés, c’est parce qu’à l’origine, ils devaient veiller les uns sur les autres pour pouvoir dormir. Le Citoyen. Pour Hobbes, la relation sociale est donc, à l’origine, une nécessité vitale. Nous serions donc amenés à approcher autrui pour nous préserver nous-mêmes. Il ne s’agirait pas de préservation de l’espèce mais bel et bien de préservation de soi.
5. Mais nous ne sommes pas toujours en conflit avec autrui Nous oublions quelquefois notre souci de nous-mêmes pour approcher autrui. L’approche d’autrui transforme notre monde, notre vision des choses. La société influence la nature humaine, nous pousse à nous intéresser à autrui et à avoir souci de lui. Si le respect, la tolérance, la générosité, l’altruisme ne sont pas à l’origine naturels à l’homme, ils peuvent sans doute créer en lui une seconde nature, un être idéal (Freud dirait : « un idéal du moi ») qui nous permettrait d’espérer, d’avoir en une éthique différente Kant, Lévinas, Sartre.