Aristote Xème partie
Aristote ne cesse d’articuler l’exercice de la philosophie avec celui de la science, la recherche de la sagesse et de la vérité avec l’étude scientifique des êtres. L’homme est bien un « animal politique », c’est-à-dire un être dont il convient de dompter l’animalité pour lui permettre de vivre dans la cité. L’homme doit connaître ses passions pour tâcher d’être vertueux.
Il lui faut rechercher avant tout la tempérance, l’équilibre, nécessaires à une pensée juste et libre. Mais il doit aussi apprendre à conduire son raisonnement, à l’organiser. La finalité de cette action politique est le bonheur, non pas personnel mais du plus grand nombre. Aristote a longtemps été très proche du pouvoir et simultanément maintenu à l’écart de l’action politique, à Athènes par exemple. Mais ailleurs, il a aussi participé à la vie politique.
Il a vécu une époque de guerres et de troubles, et ses rêves de paix manifestent tout autant son idéal de politique éclairée que la critique à peine voilée du monde dans lequel il se trouve. La recherche de l’harmonie et de l’équilibre dans la vie personnelle et politique ne sont qu’un premier mouvement dans une autre recherche plus importante, celle de la sagesse. Elle ouvre la voie de la connaissance des premiers principes qui sont comme détachés de notre monde parce qu’ils sont l’origine, la cause de celui-ci.
La philosophie première Aristote pose que le moteur du monde est immobile, qu’il est éternel, c’est-à-dire tout ce que n’est pas notre monde puisqu’il en est séparé. Ce moteur est Dieu lui-même. Mais ce n’est pas parce qu’il est le moteur du monde, à l’origine de son mouvement, de ses changements, qu’il est pour autant le créateur du monde. Sur ce point, Aristote ne se prononce pas.
Le premier enseignement d’Aristote reste donc la morale. Elle n’est pas une discipline particulière mais bien une méthode pour conduire nos actions, nos pensées. C’est par une pratique que l’homme peut se parfaire. L’expérience nous confronte à nous-mêmes. Ainsi, nous apprenons à nous connaître pour devenir meilleurs. Nous aspirons tous au bonheur que ce soit en recherchant la richesse ou le plaisir, ou même en étudiant, en observant la nature.
Mais la finalité de cette recherche nous dépasse. Ce n’est pas de notre bonheur personnel qu’il s’agit mais bien avant tout de celui de tous qui influencera ensuite le nôtre. Nous avons à affronter l’existence avec dignité et noblesse. Nous avons, en quelque sorte, à composer : il nous faut réaliser le meilleur possible autour de nous et nous en satisfaire parce qu’ il n’y a pas d’absolu accessible.
Ce n’est pas à Platon qu’Aristote s’adresse mais à nous. Les idées, même parfaites, ne sont que des idées, c’est-à-dire des moyens en puissance. C’est par notre raison en acte, et par notre vie en accord avec notre raison que nous pouvons exercer notre liberté.