La qualité de vie des malades et leurs difficultés La qualité de vie des malades et leurs difficultés psychologiques Anne-Gaëlle Le Corroller Soriano UMR 912: Sciences Economiques & sociales, Systèmes de santé, Sociétés INSERM / IRD/ Université de la Méditerranée
Les thèmes abordés L'ajustement mental face au cancer Sandrine Cayrou, Paul Dickes Le recours au psychologue Marie Préau, Anne-Déborah Bouhnik, Anne-Gaëlle Le Corroller Soriano La qualité de vie Alain Leplège Anne-Gaëlle Le Corroller Soriano, Anne-Déborah Bouhnik, Marie Préau, Pascal Auquier, Jean-Paul Moatti
Contexte Quel degré de morbidité psychologique des survivants? Des niveaux supérieurs à ceux de la population générale? La prévalence de psychopathologies sévères n’est pas supérieure? Contradiction due à des différences méthodologiques entre les études et des différences dans la définition de la survie. Survie aiguë Survie étendue Survie permanente. Plutôt des « aires de problèmes » ou des barrières à la qualité de vie que des symptômes psychologiques.
L’ajustement mental au cancer L’ajustement au cancer : réponses cognitives, comportementales et émotionnelles à la maladie cancéreuse Echelle MAC (Mental Adjustment to cancer) originelle de 40 items. Version Française de la Mini Mac (21 items) mesurant L’esprit combatif. L’impuissance désespoir. Les préoccupations anxieuses. Adaptation positive Adaptation négative : détresse
Variables socio-démographique et liées à l’état de santé Esprit combatif Détresse Femmes Age Niveau de revenu Niveau d’étude CSP + 2 enfants et après Psychotropes Qualité de vie physique Qualité de vie mentale Niveau de revenu Niveau d’étude CSP - Stade évolutif de la maladie Indicateur subjectif de l’état de la maladie s’éloigne de la guérison Séquelles (présence gêne et prise en compte) Psychotropes Qualité de vie physique Qualité de vie mentale
Variables de prise en charge et de vie familiale et sociale Esprit combatif Détresse Information Soutien affectif et moral des amis et de la famille Activité sexuelle Information Désir soutien psy Non satisfaits de leur suivi Voir leur médecin plus souvent Association de malade Services d’aide à domicile Soutien affectif et moral (surtout des amis) Détérioration du couple Activité sexuelle Discrimination ressentie Pratiques culturelles sportives et religieuses
Le recours au psychologue chez la personne atteinte d’un cancer 11% des personnes interrogées ont déclaré avoir bénéficié d’un soutien psychologique avec un professionnel au moment du diagnostic. Dans 65 % des cas, le soutien psychologique obtenu s’inscrivait dans le cadré d’un suivi global organisé dans l’établissement où la personne était soignée, et dans 35% des cas le soutien psychologique avait été obtenu à l’initiative de la personne elle-même. 18 % des personnes n’ont pas reçu de soutien psychologique mais auraient souhaité en bénéficier au moment du diagnostic. Au moment de l’enquête, soit deux ans après le diagnostic, 5,6 % des personnes interrogées bénéficient d’un soutien psychologique. Contrairement à la situation décrite au moment du diagnostic, le soutien psychologique a été dans 69% des cas mis en place à l’initiative du patient, et non dans le cadre d’un suivi organisé par l’établissement où il a été soigné. Enfin, deux ans après le diagnostic, 9,3 % souhaiteraient bénéficier d’un soutien psychologique par un professionnel mais n’y recourent pas. Si l’on rapproche les situations au moment du diagnostic et au moment de l’enquête, il apparaît qu’une personne sur dix n’a pas reçu de soutien psychologique alors qu’elle aurait souhaité en bénéficier au moment du diagnostic, et 6,7 % n’y ont pas eu recours, alors qu’elles auraient souhaité en bénéficier à la fois au moment du diagnostic et au moment de l’enquête.
Le recours au psychologue au diagnostic Facteurs communs aux personnes ayant recouru au soutien psy et à celles qui auraient souhaité y recourir : Femmes Âge < 70 ans Annonce brutale du diagnostic Facteurs spécifique aux personnes ayant recouru au soutien psy : Cancer VADS-poumon/hémopathies malignes Niveau étude > bac Facteurs spécifique aux personnes qui auraient souhaité y recourir Etre professionnellement actif au moment du diagnostic On a comparé les caractéristiques des personnes ayant bénéficié d’un soutien psychologique au moment du diagnostic, et celles des personnes qui auraient souhaité en bénéficier aux caractéristiques des personnes qui n’ont ni bénéficié ni souhaité bénéficier de soutien psychologique. Cette analyse montre que les personnes qui ont recouru au soutien psychologique au moment du diagnostic ou qui auraient souhaité y recourir sont plus fréquemment âgées de moins de 70 ans, sont plus souvent des femmes et estiment davantage que le diagnostic a été annoncé de manière trop brutale. Outre ces facteurs communs aux deux profils, les personnes qui ont bénéficié d’un soutien psychologique au moment du diagnostic avaient plus souvent un niveau d’études supérieur au baccalauréat, étaient davantage atteintes d’un cancer des voies aérodigestives supérieures (VADS) ou du poumon ou d’une hémopathie maligne. Être professionnellement actif au moment du diagnostic est aussi indépendamment lié à un besoin non satisfait de recours au soutien psychologique plus fréquent.
Le recours au psychologue deux ans plus tard Facteurs communs aux personnes ayant recouru au soutien psy et à celles qui auraient souhaité y recourir : Insatisfaction des informations Augmentation de la consommation de psychotropes Discriminations liées à la maladie Facteurs spécifique aux personnes ayant recouru au soutien psy Femmes Niveau étude > bac Activité professionnelle Maladie évolutive Contact avec les associations de malades Facteurs spécifique aux personnes qui auraient souhaité y recourir Âge < 55 ans Pas de partenaire Radiothérapie Séquelles de la maladies vécues comme gênantes Cette même analyse réitéré sur le soutien psychologique deux ans plus tard montre que l’insatisfaction des informations reçues sur la maladie et ses traitements, l’augmentation de la consommation de psychotropes et le sentiments de discrimination sont des caractéristiques communes aux personnes ayant recouru au soutien psychologique et à celles qui auraient souhaité y recourir. Les personnes qui ont eu recours à un soutien psy au moment de l’enquête sont également plus souvent des femmes, ont un niveau d’étude élevé, une activité professionnelle, une maladie en phase évolutive et sont plus souvent en contact avec des associations de malades. On a le sentiment que ce profil d’individu correspond d’une part à des personnes « informées » et qui ont pu mettre en place une prise en charge « autonome » de leur difficulté psychologique et d’autre part des personnes qui en raison de l’état de leur maladie sont encore en lien avec le système de soin et ont pu bénéficier d’une prise en charge organisée. Les personnes qui ne sont pas suivies mais qui auraient souhaité l’être lorsque nous les avons interrogés, sont plus jeunes, ne vivent pas en couple ont plus fréquemment reçu un traitement contenant de la radiothérapie et considèrent leurs séquelles comme gênantes. Ce profil de personnes devrait être identifié lors des consultations de suivi post-thérapeutique et un soutien psychologique devrait être mis en place à ce moment là.
La mesure de la qualité de vie en cancérologie Quantifier l’impact des maladies ou des traitements sur la vie quotidienne des patients du point de vue des intéressés eux-mêmes. La « qualité de vie » est une mesure de santé calculée à partir de réponses à des questionnaires standardisés. En réalité le statut de santé ou la santé perçue est l’une des composantes importante de la qualité de vie, mais ce n’est pas la qualité de vie elle-même. Le SF-36 est constitué de 36 questions divisées en 8 domaines: l’activité physique, les limitations dues à l’état physique, la douleur, la vie relationnelle avec les autres, la santé psychique, les limitations dues à l’état psychologique, la vitalité, la santé perçue. Dans le secteur de la santé, le nombre de publications relatives à la mesure de la qualité de vie s’accroît rapidement. Les mesures de qualité de vie ont pour ambition de quantifier l’impact des maladies ou des interventions de santé sur la vie quotidienne des patients du point de vue des intéressés eux-mêmes. Ces mesures sont calculées à partir des réponses à des questionnaires standardisés, développés selon des méthodes psychométriques. Finalement, ce qui est mesuré c’est le statut de santé ou la santé perçue qui est certainement l’une des composantes importantes de la qualité de vie, mais qui n’est pas la qualité de vie elle-même. Ce n’est pas pour autant qu’il faut « jeter le bébé avec l’eau du bain » et abandonner l’idée que la perspective du patient doit être prise en compte quand il s’agit d’évaluer les résultats des interventions de santé. Nous avons choisit dans l’enquête ALD-Cancer d’avoir recours au questionnaire de qualité de vie (ou plutôt de santé perçue) le plus utilisé dans le monde et auquel le SF-36. Le SF-36 est, comme l’indique son acronyme, constitué de 36 questions qui portent sur les quatre semaines précédant l’entretien, et qui sont réparties en huit dimensions : l’activité physique, les limitations dues à l’état physique, la douleur physique, la vie relationnelle avec les autres, la santé psychique, les limitations dues à l’état psychologique, la vitalité et la santé perçue. Ces huit dimensions permettent de calculer deux scores résumés: le score composite physique (PCS) et le score composite mental (MCS) autour desquels nos analyses ont été centrées. Il est important de souligner que le SF-36 est un questionnaire dit « générique » ou généraliste qui peut être administré à des sujets souffrants de problèmes de santé très variés, voire à des sujets en bonne santé, comme lors de la récente Enquête décennale santé de l’INSEE. Cet outil permet ainsi de comparer diverses pathologies à une population en bonne santé et facilite l’interprétation des scores recueillis. Cela explique en partie pourquoi le SF-36 est rapidement devenu le standard international de la mesure de la qualité de vie.
Qualité de vie : un cancer ou des cancers? Beaucoup de localisations cancéreuses sont peu documentées en matière de qualité de vie. Pas d’études sur l’impact conjoint des facteurs sociodémographiques et cliniques sur la qualité de vie des survivants du cancer. Le but de notre étude était d’évaluer l’influence relative des facteurs médicaux et sociodémographiques sur la QdV des survivants. Quel rôle de la localisation cancéreuse sur la Qualité de vie des survivants. Maladie en phase non-évolutive.
La qualité de vie physique La variation entre individus de la qualité de vie physique est expliquée : Pour 16% par les caractéristiques socio-démographiques. Pour 9% par le ressenti des séquelles Pour 4% par les variables médicales La qualité de vie physique est meilleure pour: Hommes + Age - Niveau d’étude > collège Revenus plus important + Cadres et professions intellectuelles supèrieures+ Ouvriers – Actifs qui travaillent + En congé maladie - Chirurgie + Indice pronostic + Cancer du Sein, cancer de la Prostate + VADS et hémopathies malignes - Séquelles +
La qualité de vie mentale : La variation entre individus de la qualité de vie mentale est expliquée : Pour 7% par les caractéristiques socio-démographiques. Pour 10% par le ressenti des séquelles Pour 1% par les variables médicales La qualité de vie mentale est meilleure pour: Hommes + Vie en couple + Enfants à charge - Niveau d’étude > collège Revenus plus important + Actifs qui travaillent + En congé maladie - Séquelles +
La qualité de vie des femmes atteintes de cancer du sein : une Analyse par classe d’âge Objectif de l’étude : identifier parmi des facteurs cliniques, socio-démographiques et psychosociaux ceux qui sont associés à la qualité de vie des femmes atteintes de cancer du sein depuis 2 ans. Le cancer du sein est le cancer le plus fréquent en France avec 41845 nouveaux cas (estimés en 2000). 1286 femmes atteintes de cancer du sein répondantes, 306 femmes 50 ans ; 599 femmes >50 ans et 65 ans ; 302 femmes >65 ans
Trois groupes différents dans leurs caractéristiques Plus les femmes sont jeunes, plus leurs traitements sont lourds. Les femmes de plus de 65 ans sont moins nombreuses à avoir été traitées par mastectomie. Plus les femmes sont âgées, moins elles ont bénéficié de la combinaison des trois traitements. Plus les femmes sont jeunes, plus elles se disent gênées ou très gênées par les séquelles de la maladie. Sur le plan sociodémographique, des différences: les femmes de moins de 65 ans ont un niveau d’études plus élevé, sont plus souvent en couple, ont un revenu mensuel plus élevé et ont plus souvent des enfants à charge. Enfin, le soutien affectif et le soutien matériel diminuent avec l’âge.
Scores résumés de la qualité de vie (SF36)
Facteurs explicatifs de la qualité de vie Moins de 50 ans Entre 50 et 65 ans Plus de 65 ans Variables associées à une détérioration de la dimension physique Maladie évolutive Ménopause induite Séquelles Age + Niveau d’étude - Soutien affectif - Maladie évolutive Séquelles Revenus du foyer- Séquelles Age + Revenus du foyer- Variables associées à une détérioration de la dimension mentale Séquelles Niveau d’étude- Soutien affectif- Maladie évolutive Séquelles Niveau d’étude- Soutien affectif- Chirurgie+chimio+ radiothérapie Séquelles Niveau d’étude- Revenus du foyer- Soutien affectif-
Conclusions L’esprit combatif est associé au cycle de vie et au statut social du ménage et la détresse davantage liée au statut social. La détresse est également associée à une représentation pessimiste de la maladie de l’état de santé voire du réseau social. La qualité de vie en phase de réhabilitation associée à des variables de type socio-démographiques sur lesquelles le système de soin ne peut que faiblement agir, en particulier chez les femmes de plus de 65 ans atteintes de cancer du sein. Chez les femmes de moins de 50 ans, ce sont les variables inhérentes à la maladie et à ses traitements qui affectent la qualité de vie. Les séquelles ressenties par les patients ont un rôle fondamental sur la qualité de vie deux ans après le diagnostic (objectif N°2 de la consultation de suivi). Manque d’information et d’orientation sur les différentes formes de soutien psychologique (objectif N°3 de la consultation de suivi)