Intoxication aux pesticides Aurélie Mahr Interne DES AR Lyon DESC Réanimation Médicale Montpellier, février 2009
Epidémiologie Grande mortalité dans les pays en voie de développement (50-70%) Eddelston, Q J Med 2000;93:715-31 220 000 morts/an Eddelston, Lancet 2002;360:1163-7 Intoxications volontaires >> intoxications professionnelles Eddelston, BJA 2008;371:597-607 > 60% des décès par TdS en Asie du Sud-Est Eddelston, BMJ 2004; 328:42-4 En occident, mortalité moindre (10-20%) Intoxication volontaire, à l’origine de 3 sur 10 décès des 2827 TdS hospitalisés à Louvain entre 1993-96 Bruyndonckx, Eur J Emerg Med 2002; 9:238-43 Risque de bioterrorisme avec les organophosphorés neurotoxiques Buckley, BMJ 2004; 329:1231-3
Classifications OMS des pesticides 15 formes chimiques Des centaines de produits 3 classes de toxicité
Les organophosphorés Intoxication : digestive (96%) inhalation (2%) par la peau iv (4%) Sungur, Crit Care Med 2001;5:211-5
Physiopathologie Crise cholinergique Inhibition irréversible des estérases Dans le plasma, butyrylcholinesterase : pas d’effet en aigu Dans la synapse, acétylcholinestérase : Stimulation excessive des récepteurs à l’acétylcholine Récepteurs muscariniques -du SN para Récepteurs nicotiniques du SN du SN para du SNC de la plaque motrice Crise cholinergique
Clinique Crise cholinergique Mort par ACR hypoxique Syndrome muscarinique Crise cholinergique Syndrome nicotinique Mort par ACR hypoxique Syndrome central Syndrome musculaire
Syndrome intermédiaire Apparaît entre la 24 et 96ème heure, après traitement de la crise cholinergique par atropine Atteinte des muscles proximaux des membres, fléchisseurs du cou et des paires crâniennes chez un patient conscient Responsable d’une insuffisance respiratoire aiguë secondaire Régression spontanée en 4 à 18 jours probablement lié à un excès persistant d’acétylcholine au niveau de la plaque motrice
À long terme Polyneuropathies retardées induites par les organophosphorés Par démyélinisation des nerfs périphériques Apparaît 1 à 5 semaines après intoxication aiguë Paresthésie + paralysie de progression ascendante Responsable d’une insuffisance respiratoire aiguë ou de difficultés de sevrage ventilatoire Troubles cognitifs Baisse des performances intellectuelles Anomalies EEG aspécifiques Atrophie corticale au TDM
Diagnostic biologique Activité enzymatique de la butyrylcholinestérase dans le plasma Bon marqueur d’exposition aux organophosphorés Bon marqueur de l’élimination des organophosphorés Activité enzymatique de l’acétylcholinestérase dans le sang (GR) Bon marqueur de la fonction synaptique Bon marqueur des besoins en atropine Marqueur de gravité Tests d’interprétation difficile car grande variabilité de l’activité des enzymes Attention : refroidir immédiatement le prélèvement
Critères de gravité Davies, QJM 2008; 101:371-9
Principes de traitement Réanimation initiale : Respiratoire : oxygénothérapie ± IOT+VM, Cardiovasculaire : remplissage,… Neurologique : ttt convulsions Traitement étiologique : Anticholinergiques : atropine Réactivateurs des cholinestérases : oximes
Réanimation respiratoire Oxygénothérapie à haut débit dès que possible Intubation et ventilation mécanique si : Glasgow ≤ 8 IRA ACR Eddleston, Crit Care 2004; 8:R391 Eddelston, BJA 2008;371:597-607
Réanimation hémodynamique Vasoplégie intense Remplissage (SSI,…) ± amines vasopressives Cibles thérapeutiques Fc > 80/min PAS > 80 mmHg Diurèse > 0,5 ml/kg/h En cas d’échec, recherche d’une dépression myocardique (ETT, Picco, Swan,…) Eddleston, Crit Care 2004; 8:R391 Eddelston, BJA 2008;371:597-607
Au plan neurologique IOT + sédation (BZD) en cas de : Coma (Glasgow ≤ 8) Agitation extrême Traitement des convulsions BZD iv (diazepam) Au 1er plan en cas d’intoxication par organophosphorés neurotoxiques Lutte contre l’hyperthermie Refroidir le patient par manœuvres externes Eddleston, Crit Care 2004; 8:R391-7
Les anticholinergiques : l’atropine Antagoniste compétitif de l’acétylcholine au niveau des récepteurs muscariniques Buts du traitement précoce : Réversion du syndrome muscarinique Amélioration rapide des fonctions cardiaques et respiratoires Peut être débuté avant oxygénothérapie Eddleston, Crit Care 2004; 8:R391-7
Les anticholinergiques : l’atropine Indications : Myosis Sudation excessive Bronchorrhée/bronchospasme gênant la ventilation Bradycardie Hypotension Eddleston, Crit Care 2004; 8:R391-7 Effets secondaires : Délirium anticholinergique Hyperthermie
Les anticholinergiques : l’atropine Posologie initiale Bolus 1-3 mg iv selon la sévérité, à renouveler toutes les 5 min en doublant la dose Bolus à répéter jusqu’à obtention des cibles thérapeutiques Cibles thérapeutiques Auscultation libre non spastique Fc > 80/min PAS > 80 mmHg Disparition du myosis serré (retardée) Creux axillaire secs Eddleston, Crit Care 2004; 8:R391-7 Patient atropinisé
Les anticholinergiques : l’atropine Posologie d’entretien Atropine PSE 10-20% dose d’atropinisation 3-5 mg/h À stopper 30-60 min en cas de signes de toxicité Surveillance Efficacité : Fc, PA, pupille, sueur, auscultation Toxicité : confusion, hyperthermie, disparition des BHA et rétention urinaire Eddleston, Crit Care 2004; 8:R391 Eddelston, BJA 2008;371:597-607
Les oximes Réactivation des acétylcholinestérases inhibées par l’organophosphorés Agonistes plus spécifiques Recommandations OMS : Indication : recours à l’atropine lors des intoxications aiguës par OP Pralidoxine chloride Bolus 30mg/kg en 10-20 min PSE 8-10 mg/kg/h Pendant 7j ou jusqu’à arrêt de l’atropine depuis plus de 12-24h
Méta-analyse Cochrane 2008 1 essai randomisé contrôlé de 1997 Pas de bénéfice Mortalité Recours à la ventilation
Les oximes Bénéfice controversé dépendant de l’organophosphoré du type d’intoxication de la gravité délai de PEC dose d’oxime Eddelston, Lancet 2005;366:1452-59
Décontamination digestive Lavage gastrique Souvent le seul traitement disponible Indiqué si ingestion < 1h AACT-EAPCCT J Toxicol Clin Toxicol 2004; 42:933-43 d’une grande quantité d’OP Eddelston, BJA 2008;371:597-607 Devrait être administré une fois le patient intubé Eddelston, Clin Toxicol 2007;45:136-43 Bénéfice non prouvé Sirop d’Ipeca Contre-indiqué (inhalation)
Autres thérapeutiques Sulfate de magnesium Diminue le relargage présynaptique d’acétylcholine Réduction de la mortalité dans un essai non randomisé Pajoumand, Hum Exp Toxicol 2004;23:565-69 Clonidine Bénéfique en association à l’atropine (souris) Liu, Toxicol Lett 1991;56:19-32 Bicarbonate de sodium Méta-analyse Cochrane 2005 Un essai contrôlé randomisé Pas de bénéfice EER Bénéfice de l’hémofiltration ? Peng, Acta Pharmacol Sin 2004; 25:15-21
Traitement de l’armée Principaux organophosphorés neurotoxiques de guerre Sarin, soman, Vx ou A4 Auto-traitement d’urgence 1 anticholinergique : atropine 1 réactivateur de cholinestérase : pralidoxime 1 anticonvulsivant : avizafone (prodrogue du diazepam) 1 injection simultanée des 3 antidotes lyophilisés
Répercussions cliniques Activité biologique Réponse au traitement Mortalité
Conclusion Multitudes intoxications aux pesticides Toxicité importante surtout neurologique Surmortalité dans les pays en voie de développement à cause du manque de moyen de traitement