web conférence Juridique n°3
La Réception des travaux par Antoine Guignard -- 29 juin 2010 --
1 / Définition et cadre légal de la réception La réception est l'aboutissement normal des travaux de construction. Elle constitue l'acte par lequel le maître de l'ouvrage accepte (avec ou sans réserves) les travaux réalisés et constate que les constructeurs ont accompli leurs engagements contractuels Il s’agit d’une notion d’ordre public à laquelle il n’est pas possible d’échapper ou de substituer par un quelconque autre événement. Elle est référencée à l’article 1792-6 du Code Civil : « La réception est l'acte par lequel le maître de l'ouvrage déclare accepter l'ouvrage avec ou sans réserves. Elle intervient à la demande de la partie la plus diligente, soit à l'amiable, soit, à défaut, judiciairement. Elle est, en tout état de cause, prononcée contradictoirement » A compter du 1er janvier 1979, la réception est devenue l’acte juridique unilatéral constituant le point de départ unique de la responsabilité décennale et autres garanties des constructeurs et assureurs. La réception unique permet en effet d’avoir une seule date de départ des garanties légales.
1 / Définition et cadre légal de la réception La réception permet au maître de l'ouvrage de vérifier la qualité apparente du travail fourni et d'exiger des réfections si les travaux : - ne sont pas conformes aux stipulations du marché ; - ne sont pas exécutés suivant les règles de l'art. Distinction de notions voisines et connexes : La prise de possession des lieux : c’est un élément constitutif de la réception, elle est nécessaire mais pas suffisante. La livraison de l’ouvrage : cette notion est seulement utilisée dans le cadre des contrats de Vente d’Immeuble à Construire; cette notion ne doit donc pas être utilisée dans le cadre des travaux CAMIF Habitat. La déclaration d’achèvement de travaux n'est pas assimilable à un procès-verbal de réception.
2 / Modalités de la réception expresse A/ La préréception Comme évoqué préalablement, la réception est unique. Néanmoins, dans un objectif qualitatif, il est recommandé de procéder à des préréception par lots. La préréception par corps d’état est souhaitable car elle constitue un acte préparatoire à la réception finale. Le nouveau contrat client CAMIF Habitat tend à favoriser le recours à la préréception dans l’objectif de remédier dans les meilleures conditions aux imperfections que le Maître d’ouvrage pourrait éventuellement constater sur les ouvrages réalisés par chacun des intervenants. Ainsi, un examen est réalisé en présence de la ou des entreprises concernées, du Maître d'ouvrage et du Maître d'œuvre. A l’issue de l’examen sera signé un constat mentionnant les éventuelles anomalies relevées et auquel l’entreprise devra remédier. Le Maître d’ouvrage sera invité, après mise en œuvre des travaux nécessaires, à procéder à un nouvel examen et à en donner quitus. En tout cas, il y a lieu de préciser que ces différentes préréceptions ne remplacent pas la réception finale et n’empêchent pas le maitre d’ouvrage de prononcer des réserves concernant le lot pré-réceptionné. Néanmoins, la préréception a pour intérêt de purger un maximum de problèmes et vise à maximiser les réceptions sans réserve.
2 / Modalités de la réception expresse B/ Les intervenants Qui demande la réception ? La réception intervient à la demande de la partie la plus diligente. Le maître de l'ouvrage comme l'entrepreneur peuvent y avoir intérêt. Recevoir les travaux est une obligation du maître de l'ouvrage qui ne peut, sans motif valable, refuser de procéder à cette formalité. En cas de résistance abusive et injustifiée, les constructeurs sont en droit de mettre en demeure le maître de l'ouvrage de procéder à la réception et ce dernier s'expose à leur verser des dommages-intérêts Qui participe, qui signe ? Nécessité de convoquer les entreprises sous traitantes par souci de rendre opposable la réception. L'entrepreneur dont les travaux sont examinés doit obligatoirement être présent. A défaut, la réception lui est inopposable. Le PV doit être signé des 2 parties ; le maître de l'ouvrage n'est donc pas engagé par les procès-verbaux signés uniquement par le maître d'œuvre. Idem, le maitre d’œuvre n’est pas tenu de signer un PV s’il comporte des réserves qu’il estime infondées. Le rôle d’assistance et de conseil du maître d’œuvre lors des opérations de réception : Il procède à la vérification des travaux accomplis ; Il est tenu à un véritable devoir de conseil dont le non-respect peut entraîner la mise en jeu de sa responsabilité ; Si le maître d'œuvre connaissait les désordres et ne les a pas signalés lors de la réception, il viole ainsi délibérément et consciemment ses obligations contractuelles ; Il est amené à se prononcer sur la qualité et la conformité de travaux qu'il a lui même conçus, dirigés ou surveillés.
2 / Modalités de la réception expresse C/ La date Principe : un ouvrage achevé L'achèvement est établi par des éléments de fait caractérisant le moment où l'immeuble est en état d'être affecté à l'usage auquel il est destiné. En toute hypothèse, il importe de ne pas retarder la réception des ouvrages car CAMIF Habitat n’est pas assuré aussi longtemps que celle-ci n’aura pas été prononcée. Que faire face à un maître d’ouvrage qui refuse abusivement de procéder aux opérations de réception ? Recevoir les travaux est une obligation du maître de l'ouvrage qui peut être sanctionné par des dommages et intérêts en cas de refus abusif de recevoir. Tout constructeur peut exiger la réception des ouvrages terminés. Le maître d’ouvrage qui refuserait de manière injustifiée cette réception engagerait sa responsabilité.
2 / Modalités de la réception expresse Une vraie réserve doit être précise et pertinente Les réserves doivent être précises pour permettre leur levée et ne pas semer le doute envers les entreprises concernées; Les réserves peuvent viser des malfaçons ou des défauts contractuels ; Dénonciation des vices apparents: Le maître d'ouvrage doit signaler lors de la réception tous défauts de conformité et désordres apparents. Ce caractère d’apparence doit s'apprécier au regard du seul maître d'ouvrage. Ce caractère d’apparence ne peut pas être interprété au regard du maître d'œuvre, bien qu’il ait été mandaté pour procéder à la réception. A défaut de réserves concernant un vice apparent, le maitre d’ouvrage ne pourra pas en demander la réparation. On dit qu’il y a « Purge des désordres apparents ». Si la réception des travaux couvre les vices apparents, il en va autrement lorsque ces vices étaient visibles pour un profane mais paraissaient bénins lors de la réception et se révèlent par la suite dans toute leur ampleur et leur gravité au point de porter atteinte à la solidité de l'immeuble ou de le rendre impropre à sa destination
3 / Les autres formes de réception A/ La réception tacite Solliciter la réception tacite revient à démontrer que le maître de l'ouvrage à accepter de recevoir les travaux - Quels sont les éléments constitutifs d’une réception tacite ? La jurisprudence considère que les dispositions de l’article 1792-6 ne font pas obstacle à ce que la réception puisse être tacite. Néanmoins, il est très difficile d’exploiter cette notion. En effet, cette constatation est appréciée au cas par cas. Les éléments constitutifs sont notamment les suivants et nécessitent d’être cumulatifs : -prendre possession des lieux, -payer le solde des marchés, -ne pas formuler de réserve ni ne produire de lettre de contestation. Or, il est quasi impossible qu’un chantier combine l’ensemble de ces paramètres. Il est impossible de mentionner une réception tacite quand l’ouvrage est inachevé, sauf volonté non équivoque du maître de l'ouvrage de le recevoir.
3 / Les autres formes de réception B/ La réception judiciaire Prévue à l’article 1792-6 Code civil, la voie judiciaire constitue le moyen pour les parties d’obtenir le prononcé d’une réception qui n’est pas intervenue alors que toutes les conditions étaient réunies. Ce régime prévoit qu'à défaut d'accord amiable entre les parties, la réception intervient judiciairement. La réception judiciaire constitue, en quelque sorte, une réception forcée prononcée en justice afin de suppléer principalement à la négligence ou à la mauvaise volonté du maître de l'ouvrage qui n'a pas procédé à cette formalité alors que l'immeuble était en état d'être reçu. Conditions exigées pour le prononcé d'une réception judiciaire : Immeuble en état d'être reçu , le juge doit rechercher à quelle époque l'immeuble était en état d'être reçu et c'est à cette date que doit être fixée la prise d'effet de la réception. C/ La réception suite à un abandon de chantier L’achèvement de l’ouvrage n’est pas une condition nécessaire à la réception. Ainsi l’abandon de chantier n’empêche pas la réception. La réception d'un ouvrage inachevé est possible en cas d'abandon de chantier : Un constat contradictoire des finitions et des malfaçons peut être dressé par les parties, constat qui, en principe, est considéré comme valant réception des travaux avec réserves .
4 / Incidences de la réception A/ Le transfert de garde et des risques Tous les dommages (vols ou incendie par exemple) qui viennent à se produire avant la réception sont présumés provenir du maitre d’œuvre. La réception transfère la garde de l'ouvrage au maître de l'ouvrage qui se voit, alors, tenu de pourvoir à l'entretien et à la conservation de l'immeuble. B/ La réception sans réserve Elle entraine l’extinction totale des obligations nées du contrat, hormis la garantie de parfait achèvement et le paiement intégral du solde du marché. Elle exonère le constructeur de toute responsabilité pour les désordres apparents, hormis l’aggravation de ces désordres. C/ La consignation d’une retenue de garantie en cas de réserves La retenue de garantie est le pendant de la garantie de parfait achèvement. C’est la loi du 16 juillet 1971 qui régit l’application de cette garantie financière, dans les marchés privés. Elle consiste pour le maître de l'ouvrage à amputer sur les acomptes versés à l'entrepreneur au cours du marché une somme égale au plus à 5 % de leur montant. L'objet de cette retenue est strictement limité à la reprise des réserves faites à la réception et non à la bonne fin du chantier. Les sommes retenues doivent en principe être consignées auprès de la CDC ou toute banque. Réception >> sans réserves
4 / Incidences de la réception D/ La levée des réserves Les délais nécessaires à l’exécution des travaux de parachèvement ou de réparation sont fixés d’un commun accord par le maître d’ouvrage et l’entrepreneur concerné. A défaut, le contrat prévoit 90 jours. Ces travaux visent à traiter les imperfections ou les malfaçons qui, soit ont fait l’objet des réserves formulées à la réception des travaux, soit ont été révélées pendant la période de garantie de parfait achèvement (un an à compter de la réception des travaux) et notifiées par écrit à CAMIF Habitat par le maître d’ouvrage. En cas d’inexécution dans les délais fixés, les travaux de parachèvement ou de réparation peuvent, après mise en demeure par le maître d’ouvrage restée infructueuse, être exécutés aux frais et risques de l’entrepreneur défaillant, en application de l’article 1792-6 du code civil. Dans ce cas, le maître d’ouvrage pourra prélever les sommes nécessaires à la réparation sur le montant de la retenue de garantie. E/ Point de départ des garanties légales de l’entrepreneur La garantie de parfait achèvement : Les constructeurs et entrepreneurs sont légalement tenus de fournir une garantie de parfait achèvement d’une durée d'un an à compter de la date de la réception des travaux. La garantie de parfait achèvement, à laquelle CAMIF Habitat est tenu pendant le délai d'un an à compter de la réception, s'étend à la réparation de tous les désordres signalés par le maître de l'ouvrage soit au moyen de réserves mentionnées au procès-verbal de réception, soit par voie de notification écrite pour ceux révélés postérieurement à la réception (C. civ., art. 1792-6, al. 2).
4 / Incidences de la réception F/ Les garanties post-contractuelles : - La garantie de bon fonctionnement : Elle concerne les menus ouvrages d’une construction d’habitation dissociables, c’est à dire pouvant se détacher du gros œuvre. - La responsabilité décennale : La garantie décennale s’applique dès lors que les travaux sont réalisés par une entreprise et protège le maître d’ouvrage contre les vices et malfaçons affectant le sol, le bâtiment, et la non conformité à certaines normes obligatoires. Toute entreprise dont l’objet est la réalisation de tels travaux a pour obligation légale de souscrire une assurance décennale. La responsabilité de CAMIF Habitat est engagée lorsque les malfaçons compromettent la solidité d'un ouvrage ou le rendent impropre à l'usage auquel il est destiné (Code Civil art. 1792). Aucun critère d’esthétisme n’est retenu par la garantie décennale.