Les archives ouvertes et les enjeux du libre accès

Origines et chronologie du débat

L’accroissement du coût des abonnements aux revues savantes Une hausse tarifaire de 10% par an de 1975 à 2000, de 6 à 9% par an depuis 2000 Des prix fixés en fonction de la renommée de la revue et non des coûts de production Des abonnements pluriannuels qui empêchent de tenir compte d’éventuels changements économiques Achat d’un accès et non d’une ressource: la question des abonnements discontinués Une tarification basée sur le public potentiel et non sur le public réel (= les étudiants de licence paient pour les doctorants et les chercheurs)

Abonnements revues électroniques Abonnements revues électroniques Quelques exemples de budget consacrés aux ressources électroniques (2010) Universités de sciences humaines et sociales: Universités de sciences, techniques et médecine: Abonnements revues électroniques Abonnements BDD Paris 1 83 322 € 101 219 € Paris 2 10 090 € 136 810 € Paris 3 NC 307 164 € Paris 4 98 201 € 87 963 € Paris 8 119 334 € 96 946 € Paris 10 113 141 € 185 349 € Abonnements revues électroniques Abonnements BDD Paris 5 190 185 € 207 427 € Paris 6 661 005 € 132 472 € Paris 7 293 737 € 192 366 € Paris 11 256 106 € 266 445 € Paris 12 330 426 € 193 541 €

Grandes dates de l’open access 1991: création d’ArXiv, 1re archive ouverte (physique) 1994: « Proposition subversive » de Stevan Harnad 2000: Naissance de HAL (Hyper-Articles en Ligne) 2001: Budapest Open Access Initiative 2003: Déclaration de Berlin 2006: Lyon-2 est la première université française à se positionner clairement en faveur du libre-accès 2006: Recommandations de la Commission européenne 2008: Archive ouverte avec mandat de dépôt ORBi (université de Liège) 2012: La Commission européenne réitère ses recommandations 2013: Archive ouverte avec mandat de dépôt à l’université d’Angers 2015: Au moins 60% des programmes de recherche financés par l’UE devront avoir déposé leurs résultats en libre accès 2020: 100% des résultats des programmes de recherche UE en libre accès ?

Mais au fait, qu’est-ce que l’open access ? (à part « un accès ouvert » / « un accès libre »…)

La voie Gold ou Dorée Diffusion immédiate, libre et gratuite des productions scientifiques Avec ou sans peer-reviewing Revues classées ou non (même si dans les faits, peu de revues classées ont franchi le pas du libre accès) Les revues ou ouvrages publiés selon ce modèle sont financés en amont de la publication : par des subventions (institutionnelles, privées) par les auteurs eux-mêmes (modèle auteur-payeur), qui peuvent faire prendre en charge leurs dépenses par leur institution de rattachement Diffuser sa thèse immédiatement sur internet est une forme de libre accès voie Gold

La voie Green/Verte ou auto-archivage Première diffusion des œuvres par le biais « classique » (notamment revues accessibles sur abonnement) Seconde diffusion par l’auteur lui-même, via des circuits parallèles, au moyen de l’auto-archivage : dépôt du texte dans un réservoir d’archive dédié (réservoir institutionnel, thématique, national etc.) Il peut arriver que le texte archivé par l’auteur ne soit pas la version finale telle que préparée par l’éditeur (pas de mise en page etc.) En revanche, la version diffusée doit, autant que possible, être la version corrigée et validée par le comité de lecture s’il y en a un (postprint), ou par l’éditeur, afin de garantir la pertinence scientifique de l’œuvre. Le dépôt des prépublications (preprints mis à la disposition des lecteurs avant validation par les pairs) reste possible mais doit être identifié comme tel. L’auto-archivage des thèses : le portail TEL, et dans une moindre mesure, la diffusion sur internet via les serveurs de l’université mais après une période d’embargo

Des recommandations de la Commission européenne En 2007 et en 2012 « Europe 2020, une stratégie pour une croissance intelligente, durable et inclusive » Assurer à la recherche financée par des fonds publics une large diffusion par la publication de données et d’articles scientifiques en libre accès Faire du libre accès aux publications un principe général applicable aux projets financés par les programmes-cadres de recherche de l’Union européenne

Des mesures concrètes Veiller à ce que les publications issues de la recherche financée par des fonds publics soient librement accessibles, de préférence immédiatement, sinon, dans tous les cas: Au plus tard 6 mois après publication en sciences dures Au plus tard 12 mois après publication en SHS Revoir le système d’octroi de licences en encourageant les chercheurs à conserver leurs droits d’auteur tout en concédant des licences aux éditeurs Adapter les systèmes de recrutement et d’évaluation de carrière des chercheurs, ainsi que le système d’évaluation pour l’octroi de subventions de recherche, de manière à récompenser les chercheurs qui adhèrent à une culture de partage de leurs résultats de recherche Mener des négociations conjointes avec les éditeurs pour obtenir les meilleures conditions possibles d’accès aux publications, y compris l’utilisation et la réutilisation

L’essor de l’open access en France

Sept actions pour soutenir l’accès à la connaissance scientifique Discours de Geneviève Fioraso lors des 5e journées open access, en janvier 2014: Développer la voie verte en engageant une concertation nationale sur les durées d’embargo (différenciées selon les disciplines) Accompagner l’évolution de la voie dorée par la négociation des licences et le contrôle des coûts Promouvoir le développement d’une troisième voie innovante, la voie platine, sur le modèle du Freemium Optimiser la plateforme HAL en incitant les chercheurs à y déposer leurs publications, ou dans des archives institutionnelles interfacées avec HAL Proposer aux chercheurs-auteurs un modèle national de contrat de publication, conforme au respect du droit d’auteur Engager une réflexion sur la place des productions scientifiques dans les modes d’évaluation de la recherche Soutenir les éditeurs, aider la traduction des co-éditions et préserver un minimum de diversité éditoriale

Quelques chiffres sur HAL (2013) 213 319 articles scientifiques en texte intégral, dont: 42 276 documents liés aux SHS 32 549 thèses (plateforme-fille TEL) Plus de 600 000 auteurs référencés En 2012: 2 763 transferts vers ArXiv, 1 736 vers RePEc et 465 vers PubMed 94 portails et 2 563 collections: Paris-8: 1 911 documents en texte intégral, 6 604 références bibliographiques Paris-Est Créteil: 4 340 documents en texte intégral, 10 613 références bibliographiques

Persée et les archives ouvertes Persée et la numérisation des archives des revues de SHS: Portail créé en 2005 Sous la tutelle d’une UMS (université de Lyon-Saint-Etienne + ENS Lyon + CNRS) Barrière mobile de 2 à 5 ans pour garantir la commercialisation de la production courante Archivage pérenne Diffusion partielle sous licence CC-BY-NC-SA Coopération avec d’autres portails (Revues.org) 127 collections complètes fin 2013, bien davantage en cours

Le Cleo et OpenEdition Centre pour l’édition électronique ouverte, laboratoire associant le CNRS, l’EHESS, l’université de Provence et l’université d’Avignon, créé en 2007, intégré au TGE Adonis et au projet BSN. Label « Investissements d’avenir » en 2012. Missions principales: Développement édition numérique en libre accès Diffusion des usages et compétences liés à l’édition électronique Recherche et innovation autour des méthodes de valorisation et de recherche d’information induites par le numérique OpenEdition, un portail, quatre plateformes: OpenEdition Books: collections de livres Revues.org: périodiques Hypothèses: carnets de recherche (blogs) Calenda: événements (colloques, appels à communication etc.)

Le projet Episciences.org Un avatar de la voie Gold Plate-forme technique d’examen par les pairs (peer-reviewing) « Epi-revues » en libre accès Alimentées par des articles déposés a priori dans des archives ouvertes comme HAL ou ArXiv Caution scientifique d’un comité éditorial Alternative aux modèles économiques existants Aucune cession de droit, y compris patrimonial, des auteurs

Un travail de longue haleine

Des progrès restent à faire OpenAccess Button (Berlin 11, novembre 2013): Plug-in à installer sur son navigateur Pour signaler chaque fois qu’on rencontre un paywall Pour obtenir de l’aide pour accéder à l’article s’il a été déposé en open access Etablir une carte de la frustration pour soutenir la cause de l’open access et faire réfléchir les éditeurs Repenser complètement le modèle éditorial? Trouver de la valeur ajoutée chez les éditeurs ?

L’open access en question(s): récapitulatif Critique Défense Les recommandations de la Commission concernent surtout les STM et non les SHS « Publier n’est pas éditer »: la question de la valeur ajoutée, de « l’intelligence éditoriale » Les revues en OA sont de moins bonne qualité que les revues sur abonnement (cf. expérience de Science) Des textes en OA sont plus facilement plagiés Pourquoi les SHS devraient-elles être isolées du reste de la recherche scientifique ? Il n’est pas question de supprimer le travail éditorial mais de le financer autrement Revue en OA ne veut pas forcément dire revue sans comité de lecture Les dérives sont liées au modèle auteur-payeur plus qu’au principe de la voir Gold La voie Verte est un bon compromis : diffusion dans des revues payantes puis en OA avec barrière mobile Le fonctionnement des logiciels de détection du plagiat repose justement sur la diffusion des textes sous droits

Des outils pour rassurer Connaître les politiques des éditeurs pour lutter contre l’auto- censure injustifiée: SHERPA/RoMEO (UK/International) SHERPA/JULIET (UK/International) Héloïse (FR) Dulcinea (ESP) plus de 60% des éditeurs référencés autorisent les chercheurs à déposer une copie de leurs articles dans une archive ouverte, parfois après une période d’embargo Faire la publicité des bonnes pratiques: Directory of Open Access Journals (DOAJ) pour la voie Gold Directory of Open Access Repositories (OpenDOAR) pour la voie Green

Un portail HAL pour Paris Ouest ? Beaucoup d’institutions ont déjà leur portail institutionnel propre sur la plate-forme HAL: Paris-1, Paris-Diderot, Tours, l’EPHE… Des unités de recherche de Paris Ouest y ont créé des collections: MoDyCo, ISP, IDHE… 14 261 dépôts en lien avec Paris Ouest, mais aucun accès centralisé Une vitrine pour l’établissement Des paramètres personnalisés (apparence, périmètre de dépôt etc.)

Merci pour votre attention ! Pour recevoir une copie de cette présentation ou des conseils bibliographiques/webographiques: jancelin@u-paris10.fr