3-1-5 Autres peintres de la première Renaissance La seconde génération: Pierro della Francesca, Andrea del Castagno, Mantegna La première renaissance au nord de l’Italie: le paysage lyrique et le néoplatonisme Bellini, Botticelli

Souvenez-vous: La renaissance en peinture arrive après la renaissance en architecture et en sculpture. Elle est avant tout un retour à l’observation directe de la nature, car peu de peinture antiques ont subsisté. Cette observation va permettre la découverte des lois de la perspective linéaire, ainsi que de la perspective atmosphérique, ce qui permettra aux peintres de représenter le monde tel que nous le voyons. L’espace, fond uni dans l’icone médiévale, devient l’espace réel. L’architecture peinte met en évidence les lois de la perspective linéaire, alors que le paysage montre la connaissance de la perspective atmosphérique. Le corps est à nouveau représenté dans sa réalité physique (poids, volume, mouvement, raccourci) mais aussi dans sa nudité, dans sa beauté…

Masaccio (1401-1428) C’est un peintre nommé Masaccio (1401-1428), qui lance le nouveau style en peinture, en appliquant, le premier avec consistance, les lois de la perspective linéaire et atmosphérique. Mais Masaccio va mourrir très jeune...

Piero della Francesca (1412/20- 1492) Après la mort prématurée de Masaccio, il faudra attendre la seconde génération d’artistes de la première renaissance, pour retrouver un autre maître de sa taille, Piero della Francesca. Élève de Veneziano à Florence, qu’il quitte quelques années plus tard La découverte de la vraie croix (1452-59), fresque, Saint François, Arezzo

Dans l’œuvre de della Francesca, nous voyons une recherche rigoureuse de la perspective (Brunelleschi, Alberti), mais aussi la monumentalité des personnages (Masaccio), et l'utilisation de la lumière et des couleurs pâles de son maître Domenico Veneziano. fresque, Saint François, Arezzo, Italie centrale Piero della Francesca, La découverte de la vraie croix (1452-59), fresque

La flagellation du Christ, 1469 Piero della Francesca est dans son temps aussi connu comme géomètre et mathématicien… Dans cette œuvre nous voyons un espace profond, rendu en perspective linéaire rigoureuse. Huile et tempera sur bois La flagellation du Christ, 1469

Piero della Francesca, Résurrection, fresque, 1463 Alors qu’il obtient l’impression de solennité, l’aspect intemporel de ses personnages en traitant le corps humain en assemblage de corps géométriques (sphères, cylindres, cônes) sur lesquels il applique les règles de la perspective mathématique… Piero della Francesca, Résurrection, fresque, 1463

Dans ce double portrait nous voyons aussi son utilisation de la perspective atmosphérique. L’espace, pour la première fois, se prolonge jusqu’à l’horizon… Della Francesca, Portraits de Federico da Montefeltro et son épouse Battista Sforza, 1465/66

Andréa del Castagno La Cène, vers 1445/50, fresque, Ste Apollonia, Florence

La Cène, vers 1445/50, fresque, Ste Apollonia, Florence Andréa del Castagno peint sa fresque représentant la Cène (le dernier repas de Christ) de façon à prolonger l’espace réel du réfectoire de Ste Apollonia à Florence, un procédé que nous verrons beaucoup par la suite. La Cène, vers 1445/50, fresque, Ste Apollonia, Florence

Padoue: Mantegna (1431-1506): Le Christ mort Mantegna va explorer les cas extrêmes de cette perspective linéaire maintenant acquise par les peintres: il peint son Christ mort d’un point de vue inhabituel qui le montre très raccourci, insoutenable dans la réalité physique de son corps d’homme, mort… sujet aux imperfections de notre œil charnel… Terminologie: Raccourci (ce qui est rendu plus court): procédé, correspondant aux lois d’optique, qu’utilisent les peintres et les sculpteurs pour représenter les corps et objets en perspective, quand ils sont perpendiculaires au plan du tableau (skraćenje).

…alors que son Saint Jacques conduit au supplice, présente un point de vue inhabituel, la scène est vue d’en bas. Mantegna, Saint Jacques conduit au supplice, 1455, fresque détruite pendant la Seconde guerre mondiale

Mantegna, Saint Sébastien, vers 1455/60 Dans son Saint Sébastien, nous retrouvons tout le programme de l’art de la première Renaissance: la colonne à laquelle le Saint est attaché est antique, le dallage est rendu en perspective (linéaire) et le corps du saint chrétien est vigoureux, sculptural, un corps d’athlète… Au fond, un paysage paisible, presque lyrique contraste avec le drame du Saint Sébastien martyre. C’est que Mantegna travaille à Padoue, près de Venise… Mantegna, Saint Sébastien, vers 1455/60

Venise et le paysage lyrique: Giovanni Bellini (1431-1516) Ces paysages lyriques sont caractéristiques de la Renaissance à Venise. Le jeune Bellini peint ici saint François, pieds nus , tout petit dans le paysage, et en extase mystique devant les beautés de ce monde, nous invitant à les admirer: c’est une nouveauté. Giovanni Bellini, Saint François en extase, 1485

Le paysage lyrique et le néoplatonisme Le néoplatonisme se basant sur le mysticisme de Platon, considère que la vie de l’univers en général est lié à Dieu. Ainsi le néoplatonisme abolit les limites entre le sacré et le profane. Dans cette conception de l'Univers le sensible (=qui peut être senti) symbolise l'intelligible (= qui peut être compris), la beauté des choses provient de la splendeur divine. Cette idée platonicienne, que le Beau est aussi le Bien, permet aux peintres d’admirer la beauté d’un corps, mais aussi d’un paysage. Giovanni Bellini, Saint François en extase, 1485

Botticelli, La Naissance de Vénus, vers 1480 Dans la Renaissance il devient à nouveau possible de peindre les épisodes de la mythologie gréco-romaine, car le néoplatonisme considère que tout l’univers, et donc l’homme aussi, est liée à Dieu, de sorte que toutes les révélations de l’esprit humain, et non seulement la Bible, ont une valeur d’enseignement. Botticelli, La Naissance de Vénus, vers 1480

Nous avons vu que des thèmes classiques étaient parfois employés dans l’art du Moyen Age, mais les mythes classiques étaient réinterprétés comme allégories chrétienne. Les artistes ne pouvaient s’inspirer du répertoire classique de poses, gestes, expressions qu’en changeant l’identité de leur sujet: ainsi Bacchus devenait Jésus, les philosophes les apôtres, Hercule Samson… Dionysos, Crète, Christ bon pasteur, catacombes romaines . Nous avons parlé du décalage entre le fond et la forme classique. Dionysos, Crète Christ bon pasteur, catacombes romaines

Avec la pensée néoplatonicienne il est à nouveau possible de peindre les épisodes de la mythologie gréco-romaine : ainsi Botticelli peint cette Naissance de Vénus, vers 1480.

Le Néoplatonisme et Botticelli (1444-1510) À présent, les néoplatoniciens parlent de la « Venus céleste » pour parler de Vierge Marie, qui est source « d’amour divin ». Cette Venus céleste reste dans le domaine spirituel, alors que sa sœur jumelle, la Venus ordinaire, engendre l’amour humain. Détail, Venus, Botticelli, La Naissance de Vénus, vers 1480

…elle est aussi Eve d’avant le péché, l’amour divin réapparaissant sur Terre, la nouvelle église chrétienne qu’une fois sur Terre, et habillée, elle va symboliser, et finalement cette renaissance dont l’époque revendique le nom… Botticelli, La Naissance de Vénus, vers 1480

Botticelli (1444-1510), Le sacre du Printemps

Détail, Flore

La fin du quattrocento florentin, la première renaissance florentine… La fin du XVème siècle est marquée par des événements politiques qui influenceront beaucoup les arts: à Florance, c’est la chute des Médicis et l’arrivée au pouvoir du moine dominicain Savonarole (exécuté en 1498), connu pour ses sermons fanatiques et apocalyptiques. Après l’autodafé de Savonarole, Florence redevient une république, au sens des cités-État. Avec l'influence des Cinq cents nobles et les plus importants personnages de la cité c’est plutôt une ploutocratie. C’est Rome qui est dorénavant le nouveau centre de patronage artistique, avec la papauté qui reprend sa puissance politique en Italie… C'est à cette époque que Machiaveli écrit son œuvre majeure le Prince, pour instruire l'un des princes Médicis, qui mettront trente ans à reprendre grâce aux yeux des Florentins.

Rome et la reprise de pouvoir politique par la papauté La papauté reprend sa puissance politique en Italie et Rome devient un important centre de patronage artistique. Le but: que les monuments de la Rome chrétienne surpassent la beauté de la Rome païenne. Le projet le plus ambitieux de l’époque: la décoration de la chapelle Sixtine au Vatican à laquelle la plupart des grands artistes de l’époque vont participer. Nous allons voir ici la fresque La remise des clefs de Pietro Perugino, qui au niveau du thème traite l’épisode fondatrice de la papauté, alors qu’au niveau formel elle présente un manifeste sur l’art de la première Renaissance.

Pietro Perugino, La remise des Clefs, 1485, fresque, Chapelle Sixtine, Le Vatican

Le manifeste sur l’art de la première Renaissance: l’espace profond montre la connaissance de la perspective linéaire et atmosphérique, les corps sont rendus de façon sculpturale, nous y retrouvons les caractéristiques de la sculpture de la première renaissance, alors que l’architecture peinte montre les idéaux de l’architecture de la première renaissance : deux arcs de triomphe à l’antique, et au centre une église au plan centré à coupole (le cercle et les figures dérivées du cercle sont la forme la plus naturelle, la plus parfaite, et de ce fait l’image de la Raison Divine (le néoplatonisme)). Pietro Perugino, La remise des Clefs, 1485, fresque, Chapelle Sixtine, Le Vatican

Le Néoplatonisme: le sensible symbole de l’intelligible, la beauté des choses provient de la splendeur divine, le Beau est le Bien… La renaissance redécouvre les textes latins et grecs, et entre autres la philosophie de Platon, qui exercera un impact considérable sur l'art de la Renaissance. Se basant sur le mysticisme de Platon, le néoplatonisme considère que la vie de l’univers en général, et de l’homme en particulier, est lié à Dieu, de sorte que toutes les révélations de l’esprit humain, et non seulement la Bible, ont une valeur d’enseignement. Ainsi le néoplatonisme abolit les limites entre le sacré et le profane, la beauté des choses provient de la splendeur divine, le Beau est aussi le Bien. Ces idées néoplatoniciennes vont permettre la représentation des corps dans leurs beauté physique, l’admiration des paysages, mais aussi la représentation des épisodes de la mythologie gréco-romaine… philosophie de Platon et de Plotin Cosme de Médicis, grand mécène des artistes et penseurs florentins, incite un de ses protégés, Marsile Ficin...

Ainsi nous arrivons à la Haute Renaissance, dont nous parlerons dans la suite de notre cours… l’art de la Rome papale, de Florence et de la république de Venise de 1500 à 1530, Léonard de Vinci (1452-1519), Michel-Ange (1475-1564) et Raphaël (1483-1520), à Venise Giorgione et le Titien. Léonard de Vinci (1452-1519), Michel-Ange (1475-1564) et Raphaël (1483-1520), le Titien