Quel siège d’arbitrage choisir ?

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Transcription de la présentation:

Quel siège d’arbitrage choisir ? Jérôme Barbet Avocat Associé Avocat à la Cour Solicitor, England & Wales Conférence de l’Association des Juristes Franco-Britanniques 7 novembre 2013 7 novembre 2013

La favor arbitrandum du Droit français La faveur pour l’arbitrage (« favor arbitrandum ») du système juridique et judiciaire français est bien connue. Les qualités du droit français de l’arbitrage international peuvent être résumées en quelques mots-clés : clarté, précision, souplesse, autonomie, efficacité, rapidité. La favor arbitrandum du système juridique et judiciaire français se manifeste de plusieurs façons. 7 novembre 2013

La favor arbitrandum du Droit français Un Droit lisible : Trente ans après la révolution du droit français de l’arbitrage, réalisée par les décrets de 1980-1981, le décret du 13 janvier 2011 est venu préciser et clarifier ce droit. Alors que, dans certaines juridictions, les juges continuent d’avoir recours à la méthode du conflit de lois afin de résoudre certaines questions (questions de validité et d’efficacité de la convention d’arbitrage par exemple), le juge français a, dans un souci de favoriser l’arbitrage, adopté très tôt, des règles matérielles applicables dès lors que la juridiction française est saisie, sans avoir recours à la méthode du conflit de lois (règles matérielles favorables à l’arbitrage). 7 novembre 2013

La favor arbitrandum du Droit français Engagement à l’arbitrage : une conception large Confiance des juridictions françaises en l’arbitrage : les juridictions françaises ont une conception libérale, voire extensive de l’engagement à l’arbitrage (arrêts Gosset, Galakis, Uni-Kod, Dow-Chemical, ABS etc…). La convention d’arbitrage n’est soumise à aucune condition de forme (art. 1507 CPC). L’article 1507 du CPC constitue une dérogation à l’article II de la Convention de New-York, dans le sens d’une plus grande faveur à l’arbitrage. Affaire Dallah c/ Gouvernement du Pakistan : une approche différente des juges anglais et français. Sous l’impulsion de la jurisprudence française, le champ de l’arbitrage et la compétence des arbitres se sont élargis. 7 novembre 2013

La favor arbitrandum du Droit français La non-interférence des juridictions étatiques françaises Principe de compétence-compétence : Effet positif du principe. Effet négatif du principe. Exception à l’effet négatif du principe de compétence-compétence seulement en cas de nullité ou d’inapplicabilité manifestes de la convention d’arbitrage. Compétence exceptionnelle du Juge étatique : uniquement pour ordonner des mesures d’instruction ou ordonner des mesures provisoires et conservatoires, et sous réserve de justifier d’une urgence (pour le référé-provision et la demande de mesures d’instruction in futurum, il faudra en outre que le Tribunal arbitral ne soit pas encore constitué). 7 novembre 2013

La favor arbitrandum du Droit français L’appui des juridictions françaises à l’arbitrage Compétence du Juge d’appui lorsque l’arbitrage se déroule en France (ou lorsque : (i) les parties sont convenues de soumettre l’arbitrage à la loi de procédure française, ou (ii) les parties ont expressément donné compétence au juge français, ou (iii) l’une des parties est exposée à un risque de déni de justice). Le régime des voies de recours à l’encontre des décisions du Juge d’appui marque la faveur du droit français pour l’arbitrage : Irrévocabilité des décisions du Juge d’appui, lorsqu’il nomme un arbitre (sauf excès de pouvoir). Appel possible lorsque le Juge d’appui refuse de nommer un arbitre. 7 novembre 2013

La favor arbitrandum du Droit français Indépendance et impartialité des arbitres : des garanties renforcées   Obligation, pour l’arbitre, de révéler tous éléments de nature à provoquer dans l’esprit des parties un doute raisonnable quant à l’impartialité de l’arbitre et à son indépendance. La Cour de cassation veille à ce que les juges du fond recherchent en quoi la circonstance non révélée aurait été de nature à provoquer un doute raisonnable dans l’esprit des parties quant à l’impartialité de l’arbitre et à son indépendance (Cass., Civ. 1ère, 12 octobre 2012, Neoelectra Group SAS c/ Sté Tecso EURL). 7 novembre 2013

La favor arbitrandum du Droit français Des voies de recours limitées et non suspensives d’exécution (1) Voies de recours limitées à l’encontre de la sentence et de l’ordonnance d’exequatur en matière d’arbitrage international : tribunal s’est déclaré à tort compétent ou incompétent, tribunal arbitral irrégulièrement constitué, non-respect de sa mission par le tribunal arbitral, violation du principe de la contradiction, reconnaissance ou exécution de la sentence contraires à l’ordre public international. Pas de révision au fond de la sentence, même en cas d’erreur manifeste d’appréciation (réelle ou supposée), de l’arbitre sur le fond du litige. Le droit français est encore plus favorable à l’arbitrage, que la Convention de New-York, puisqu’il permet la reconnaissance et l’exécution en France d’une sentence annulée dans le pays du siège de l’arbitrage (arrêts Hilmarton et Putrabali). Possibilité accordée aux parties, de renoncer à tout moment (même avant la naissance du litige) au recours en annulation (innovation du décret du 13 janvier 2011). 7 novembre 2013

La favor arbitrandum du Droit français Des voies de recours limitées et non suspensives d’exécution (2) Le recours en annulation et l’appel de l’ordonnance d’exequatur ne sont pas suspensifs d’exécution des sentences rendues en France en matière d’arbitrage international et des sentences rendues à l’étranger. Il est toutefois possible de demander au Juge français d’arrêter ou d’aménager l’exécution, mais seulement si cette exécution est susceptible de « léser gravement » les droits d’une partie. 7 novembre 2013

Illustration : l’affaire Dallah c/ Gouvernement du Pakistan Affaire Sté Dallah c/ Gouvernement du Pakistan : une illustration de la différence d’approche entre les juridictions françaises et anglaises Question de l’extension de la clause compromissoire à des parties non-signataires du contrat. Dans cette même affaire, les juges anglais et français, qui étaient saisis des mêmes faits, ont rendu des décisions diamétralement opposées : alors que le juge anglais a considéré que le Gouvernement du Pakistan n’était pas lié par la convention d’arbitrage ; le juge français a, au contraire, considéré que le Gouvernement du Pakistan était lié par la convention d’arbitrage. 7 novembre 2013

Illustration : l’affaire Dallah c/ Gouvernement du Pakistan Faits (1) Une société de droit saoudien dénommée « Dallah » signe, en 1995, un Memorandum of Understanding avec le Ministère des Affaires Religieuses du Pakistan, concernant la construction et la location de logements destinés à héberger des pèlerins pakistanais à La Mecque. Un an plus tard, Dallah signe avec un Trust, constitué quelques mois plus tôt par le Gouvernement du Pakistan (Awami Hajj Trust), un contrat relatif à la construction de logements pour 45.000 pèlerins à La Mecque et leur location pour une durée de 99 ans par Dallah au Trust. Ce contrat contient une clause d’arbitrage CCI. Postérieurement à la signature du contrat, le Trust cesse d’exister (du fait du non-renouvellement de l’ordonnance présidentielle pakistanaise ayant institué le Trust). 7 novembre 2013

Illustration : l’affaire Dallah c/ Gouvernement du Pakistan Faits (2) Un fonctionnaire de l’Etat pakistanais, à la fois secrétaire du Ministère des Affaires Religieuses du Gouvernement du Pakistan et secrétaire d’un organe du Trust, écrit à la société Dallah, sur papier à en-tête du Ministère des Affaires Religieuses du Pakistan, pour dénoncer la violation de ses obligations contractuelles par Dallah et résilier le contrat. La société Dallah saisit un Tribunal arbitral, siégeant à Paris. Le Tribunal arbitral rend une première sentence, aux termes de laquelle il juge que le Gouvernement du Pakistan est lié par la clause compromissoire et se déclare compétent. Suivant deux autres sentences, le Tribunal arbitral retient ensuite la responsabilité du Gouvernement du Pakistan à l’égard de la société Dallah et le condamne à verser la somme de 18.907.603 USD à titre de dommages-intérêts. 7 novembre 2013

Illustration : l’affaire Dallah c/ Gouvernement du Pakistan Décision du Juge anglais : Le juge anglais décide d’appliquer le droit français, loi du lieu du siège de l’arbitrage désignée par la règle de conflit de lois anglaise, à la question de savoir si le Gouvernement du Pakistan est lié par la convention d’arbitrage. Faisant application du droit français, le juge anglais estime, dans cette affaire, que le Gouvernement du Pakistan ne peut pas être considéré comme étant lié par la clause compromissoire figurant dans le contrat conclu entre Dallah et le Trust. Le juge anglais refuse donc de donner force exécutoire aux trois sentences arbitrales au Royaume-Uni (v. England and Wales Court of Appeal, [2009] EWCA civ 755 ; [2010] 1 AER 592 ; UK Supreme Court, décision du 3 novembre 2010 [2010] UKSC 46). 7 novembre 2013

Illustration : l’affaire Dallah c/ Gouvernement du Pakistan Décision du Juge français : A l’inverse, le juge français (Cour d’appel de Paris) a considéré, un an plus tard, dans la même affaire, que le Gouvernement du Pakistan, non signataire du contrat, était lié par la clause compromissoire. En conséquence, la Cour d’appel de Paris a rejeté les recours en annulation formés à l’encontre des trois sentences. Elle a jugé que « l’implication du Gouvernement de la République, Ministère des Affaires Religieuses, sans qu’il soit fait état d’actes accomplis par le Trust, comme son comportement lors des négociations pré-contractuelles confirment que la création du Trust était purement formelle, et que le Gouvernement du Pakistan, Ministère des Affaires Religieuses comme Dallah en convenait s’est comporté comme la véritable partie pakistanaise lors de l’opération économique » (Cour d’appel de Paris, Pôle 1, Chambre 1, 17 février 2011). 7 novembre 2013

Illustration : l’affaire Dallah c/ Gouvernement du Pakistan Pourquoi une telle divergence ? Le droit anglais ne connaît pas de jurisprudence similaire à celle développée par le juge français, sur l’extension de la clause compromissoire à des parties non-signataires du contrat. La confiance du Juge anglais pour l’arbitrage serait-elle moindre que celle du Juge français ? La jurisprudence française, relative à l’extension de la clause d’arbitrage à des parties non-signataires, date de plus de trente ans. Elle a été consacrée, pour la première fois, dans la célèbre affaire « Dow Chemical » (Cour d’appel de Paris, 1ère chambre, 21 octobre 1983, Rev. arb. 1984, note A. Chapelle), puis dans de nombreuses affaires subséquentes, notamment, « Korsnas Marma », « Orri »… 7 novembre 2013

Illustration : l’affaire Dallah c/ Gouvernement du Pakistan Dès l’origine, le critère d’extension posé par la Cour d’appel de Paris était quelque peu objectif, puisque la seule constatation qu’une partie non-signataire du contrat était directement impliquée dans l’exécution dudit contrat, « commandait » de lui étendre l’application de la clause compromissoire, sous réserve que la « situation contractuelle » de cette partie et « ses activités » puissent faire « présumer » qu’elle avait « accepté la clause d’arbitrage ». Si l’extension de la clause compromissoire à une partie non-signataire du contrat était fondée, en apparence, sur un critère tiré de la volonté - l’acceptation tacite de la clause d’arbitrage par la partie non-signataire -, cette acceptation était en réalité présumée à partir d’éléments objectifs, tirés du comportement de la partie non-signataire avant, pendant et/ou après l’exécution du contrat (le critère essentiel étant celui de l’implication directe de la partie non-signataire dans les pourparlers pré-contractuels, l’exécution et/ou la résiliation du contrat contenant la clause compromissoire). 7 novembre 2013

Illustration : l’affaire Dallah c/ Gouvernement du Pakistan Le critère objectif de l’extension l’a emporté devant la Cour de cassation, qui a jugé, en 2007, que « l’effet de la clause d’arbitrage s’étend aux parties directement impliquées dans l’exécution du contrat et les litiges qui peuvent en résulter » (Cass., Civ. 1ère, 27 mars 2007, Sté ABS et AGF IART c/ Sté Amkor Technology & a. : JCP I, 168, note Ch. Séraglini). Dans son arrêt « ABS », la Cour de cassation ne fait pas référence à une « ratification » du contrat, ni à une analyse subjective de la volonté de la partie non-signataire, d’être liée par la clause compromissoire. 7 novembre 2013

Illustration : l’affaire Dallah c/ Gouvernement du Pakistan De son côté, le juge anglais s’est essentiellement attaché à rechercher si, par son comportement, le Gouvernement du Pakistan avait manifesté une volonté tacite d’être lié par la clause compromissoire. C’est après une analyse à la fois du comportement des deux parties, mais également de leurs volontés, réelles ou supposées, que le juge anglais a décidé que l’extension de clause n’était pas justifiée. 7 novembre 2013

Illustration : l’affaire Dallah c/ Gouvernement du Pakistan A l’inverse, la Cour d’appel de Paris a, quant à elle, fondé sa décision sur une analyse objective du seul comportement du Gouvernement du Pakistan, pour constater qu’il était impliqué dans les pourparlers pré-contractuels, l’exécution et la résiliation du contrat et en tirer la conséquence que la clause compromissoire devait lui être étendue. En relevant que « l’implication du Gouvernement de la République, Ministère des Affaires Religieuses, sans qu’il soit fait état d’actes accomplis par le Trust, comme son comportement lors des négociations pré-contractuelles confirment que la création du Trust était purement formelle, et que le Gouvernement du Pakistan, Ministère des Affaires Religieuses comme Dallah en convenait s’est comporté comme la véritable partie pakistanaise lors de l’opération économique », la Cour d’appel de Paris sanctionne, non pas la volonté tacite du Gouvernement du Pakistan d’être partie au contrat, mais la situation créée par le comportement objectif du Gouvernement du Pakistan, qui « s’est comporté comme » la véritable partie au contrat. 7 novembre 2013

Illustration : l’affaire Dallah c/ Gouvernement du Pakistan A l’inverse du juge anglais, la Cour d’appel de Paris n’a pas analysé le comportement de la partie signataire (la société Dallah) et ne s’est pas embarrassée d’une quelconque référence à la recherche d’une « volonté commune » des parties (la Cour d’appel de Paris se contente de relever que la société Dallah « convenait », quant à elle, que le Gouvernement du Pakistan s’était « comporté comme la véritable partie pakistanaise lors de l’opération économique »). 7 novembre 2013

Conclusion En conclusion : L’affaire Dallah c/ Gouvernement du Pakistan n’est qu’un exemple, mais un exemple qui laisse le sentiment que la faveur des juridictions françaises pour l’arbitrage est unique en son genre. Le juge français a tendance à apprécier le champ de compétence des arbitres, de façon beaucoup plus large, que le juge anglais. C’est bien le juge français qui a consacré, à la suite des arbitres, la théorie de l’extension des clauses compromissoires à des parties non-signataires et c’est encore lui qui l’applique de la façon la plus large et la plus libérale, en ayant recours à une analyse objective du comportement de la partie non-signataire. Cette favor arbitrandum du système juridique et judiciaire français, qui se retrouve dans l’ensemble de la jurisprudence développée par les tribunaux français au cours des cinquante dernières années, fait de Paris, la place de référence en matière d’arbitrage international. 7 novembre 2013