PROGRAMME DE REVISIONS Lundi : La raison peut-elle rendre raison du réel ? (RAISON ET REEL) Mardi : Pour agir moralement, faut-il ne pas se soucier de soi ? (LA MORALE Mercredi : Le sujet est-il transparent à lui-même ? (LE SUJET) Jeudi : La politique est-elle une science ou un art ? (LA POLITIQUE) Vendredi : Une société peut-elle se passer de religion ? (LA CULTURE) Méthode : la conclusion
LA RAISON PEUT-ELLE RENDRE RAISON DU REEL ? NOTIONS : La raison et le réel, théorie et expérience, la démonstration, la vérité, la matière et l’esprit
INTRODUCTION Problème et enjeu de la question En cours : « Peut-on avoir raison contre les faits ? »
ANALYSE DE LA QUESTION Constat paradoxal : L’homme a toujours cherché à comprendre le réel, d’abord avec des mythes, puis avec sa raison. Mais la raison se heurte rapidement à de l’incompréhensible: peut-elle rendre raison du réel ? Raison : Etymologie : latin « ratio », calcul, mesure. au sens ordinaire, faculté de connaître (raison théorique) et de décider de sa conduite (raison pratique); « faculté de bien juger » (Descartes) La raison « pratique » : soit une raison qui s’oppose à l’irrationalité des passions, qui respecte la morale. Soit une raison instrumentale qui adapte les moyens en vue d’une fin. Justification : la raison de son attitude « Rendre raison » : donner la justification, expliquer, connaître. Réel : ce qui existe en dehors de nos représentations (du latin « res », chose) => Qu’est-ce qui est réel ? Ce que notre expérience nous présente ? Ce que la raison saisit ? (cf. EDDINGTON, la table ordinaire et la table scientifique).
PROBLEMATIQUE OUI : La raison est la faculté qui permet à l’homme de rendre raison du réel, d’en avoir des connaissances scientifiques. OBJECTION : Mais la raison peut-elle tout connaître ? Le réel peut-il être entièrement rationalisé ? QUESTION CENTRALE : comment analyser les relations de la raison au réel ? PASCAL, Pensées, 1670 : « Deux excès : exclure la raison, n’admettre que la raison ».
ENJEU Pouvons-nous atteindre la vérité : la raison peut-elle accéder au réel ? Définition classique de la vérité : accord de la pensée et de la réalité. La définition de l’homme : la raison est-elle sa caractéristique essentielle ? Le rôle de la science de nos sociétés.
Distinctions conceptuelles CROIRE / SAVOIR On peut croire quelque chose sans pouvoir le justifier. « Mes » raisons de croire peuvent ne pas être partageables. Degrés de croyance : de l’incertitude à la foi (conviction inébranlable) Savoir: croyance vraie justifiée Le savoir doit-il remplacer la croyance ? RATIONNEL / RAISONNABLE : Rationnel : calculé, efficace Raisonnable : sage … REEL / MATERIEL / CONCRET : ce qui est réel n’est pas nécessairement matériel (chez PLATON, ce sont les Idées intelligibles qui sont réelles), ni concret (ce qui est perçu par nos 5 sens). REEL ≠ IDEAL
I. LA CONNAISSANCE RATIONNELLE DU REEL N’y a-t-il pas identité entre l’ordre du réel et celui découvert par notre raison ? VOLTAIRE : « La raison finit toujours par avoir raison » La position RATIONALISTE
1) Les illusions du sensible Connaît-on par les sensations ou par la raison ?
Le réel est-ce le sensible ? Qu’est-ce qui est réel ? Ce que nous voyons ? Ce que nous voyons paraît évident. Quelque chose de caché ? Le réel – du latin « res », chose – ne se réduit pas au sensible (ce que nous sentons au moyen de nos 5 sens) Exemple du bâton dans l’eau qui paraît brisé. LA FONTAINE, « Un animal dans la Lune » : « Quand l’eau courbe un bâton, ma raison le redresse : la raison décide en maîtresse ». Il semble donc que notre expérience soit trompeuse et que nous accédions au réel par la raison. Mais comment la raison parvient-elle à saisir le réel ? Réalité ≠ vérité (accord pensée et réalité)
Un exemple célèbre : le morceau de cire DESCARTES, fin de la 2ème méditation métaphysique Connaît-on mieux l’esprit ou la matière ? Esprit : substance pensée (substance : ce qui fait qu’une chose est ce qu’elle est) Matière : substance étendue Dualisme On connaît mieux l’esprit que la matière. La preuve : soit un morceau de cire. Si celui-ci fond, nous savons qu’il s’agit de cire. La cire a beau changé de forme, je conçois toujours qu’il s’agit de cire. Ce n’est pas la sensation qui permet cette identification, puisqu’elle a changé. Ce n’est pas non plus l’imagination, car elle est incapable de se représenter l’essence de la cire. L’essence de la cire, comme celle de toute matière : l’extension. L’extension est saisie par un jugement de mon entendement, et non la sensation ou l’imagination. La perception suppose toujours « une inspection de l’esprit », autrement dit un jugement.
Le problème de l’erreur De même, si je vois à la fenêtres des chapeaux et des manteaux, je jugent que je vois des hommes. C’est ma raison, et non mes sensations, qui me donne accès au réel Rationalisme de Descartes : nos connaissances viennent de la raison, non de l’expérience (empirisme). Raison contre la tradition : la tradition est source d’erreurs. Mais comment expliquer que je me trompe ? N’y a-t-il pas des hommes ayant davantage de raison que d’autres ? Cf. Leçon 2 : « Peut-on penser par soi-même ? » Tous les hommes disposent d’une raison égale La raison est « le bon sens », ou la capacité à distinguer le vrai du faux Tout dépend de la façon dont on conduit sa raison : de la méthode
2) La méthode de la science COMMENT PARVENIR A LA VERITE ?
Le critère de la vérité : l’évidence Conséquence : on ne peut pas définir la vérité (cercle vicieux : la définition de la vérité doit être une vraie définition …), seulement l’éprouver. Évidence : certitude (remettre en cause ce qui est douteux), clarté et distinction (éviter la prévention et la précipitation); l’expérience sensible paraît évidente, mais elle est en réalité confuse. Critère de l’évidence contesté. L’homme est moralement responsable de ses erreurs, car son entendement voit toujours ce qui est vrai : il se trompe lorsqu’il juge trop vite. Erreur ≠ Illusion. On pourrait penser que l’homme se trompe parce que son entendement est limité. La raison ne se limite pas au raisonnement (enchaînement discursif de jugements) : elle est aussi intuition de la vérité. REPERE : INTUITIF (immédiat) / DISCURSIF (médiat, par étapes)
Le modèle mathématique Projet d’une « mathématique universelle » : non pas convertir toutes les sciences en mathématiques, mais rendre les sciences aussi certaines et évidentes que les mathématiques. La science repose sur la démonstration (raisonnement montrant la nécessité d’un enchaînement entre deux propositions) ARISTOTE : toute science est démonstrative Modèle de la démonstration : le syllogisme (raisonnement tirant une conclusion vraie à partir de deux prémisses vraies) DESCARTES : le syllogisme est stérile. Il faut le remplacer par la démonstration mathématique, qui peut être une méthode d’invention. La démonstration implique deux mécanismes de la raison : L’INTUITION (la saisie immédiate des principes) LA DEDUCTION, ou le fait d’inférer une proposition à partir d’une proposition déjà connues
L’unité des sciences La même méthode est applicable à toutes les sciences. L’unité de la science procède de l’unité de l’esprit humain. L’arbre de la connaissance : racine (métaphysique), tronc (physique), arbres (morale, mécanique, médecine). La science repose sur la métaphysique.
Science et métaphysique La science doit donc rechercher les premiers principes (fondements), puis en déduit un ensemble de propositions vraies. DESCARTES, Discours de la méthode, 4ème partie Le doute méthodique : sensations, raisonnements, toutes mes pensées La première certitude : « je pense, donc je suis », et je suis mes pensées Problème : le « cogito » : déduction ou intuition ? La seconde certitude : l’existence divine => 2 preuves : L’idée de parfait en moi : comme je doute, je suis imparfait, je ne peux donc être l’origine de cette idée, qui vient d’un être absolument parfait. Par définition, si l’être divin est parfait, il ne peut lui manquer l’existence. Conséquence : comme il est bon, il ne peut vouloir me tromper. J’ai une « certitude morale » que mes sensations ne sont pas des hallucinations (sans avoir de connaissances).
La physique GALILEE, L’Essayeur, 1623 : « L’univers est écrit en langage mathématique ». DESCARTES : héritier de GALILEE La nature va être analysée comme un espace géométrique (grandeurs, figures, mouvements : mécanisme) Les vérités mathématiques et les lois de la nature sont des créations divines Elles ont été imprimées par Dieu en nous (« semences de vérités ») Il y a coïncidence entre l’ordre de la raison et l’ordre de la nature.
3) Raison et action LA CONNAISSANCE DE LA RAISON NE PERMET-ELLE PAS D’AGIR SUR LE REEL ?
Avoir raison sur le réel Rationaliser le réel permet à l’homme d’agir sur lui avec davantage d’efficacité (anticipation). Il ne faut pas opposer le déterminisme naturel (existence de lois nécessaires) et la liberté humaine : en connaissant les lois du réel, l’homme peut les mettre à son profit. LA LIBERTE ALAIN : exemple de la navigation et de la connaissance de la météo. A. COMTE, dans son Cours de philosophie positive, résumait : « Science, d’où prévoyance ; prévoyance, d’où action » : la connaissance des lois naturelles nous permet d’anticiper et d’agir sur le réel.
Raison et technique La science permet les innovations techniques. Pour Descartes, Discours de la méthode, 6ème partie, la science doit être utile et doit, par la découverte de nouvelles techniques, rendre l’homme « comme maître et possesseur de la nature », et contribuer au bonheur de l’humanité. LA TECHNIQUE On parle ici de raison instrumentale (qui calcule quels sont les meilleurs moyens pour atteindre une fin. Parce qu’elle rend raison du réel, la raison intervient sur le réel.
Agit-on rationnellement ? L’homme est un être irrationnel : il a une raison, mais aussi des passions, des sentiments. La raison peut-elle maîtriser les passions ? Peut-elle comprendre les actions humaines ? DESCARTES, Traité des passions : connaître les passions en physicien permet de les maîtriser et donc d’agir plus librement. Mais il ne s’agit pas de supprimer les passions, d’agir de manière purement rationnelle, mais de les rendre « sujettes à la raison », et donc d’agir raisonnablement. Mais la raison ne m’empêche-t-elle pas d’être libre ? N’est-elle pas contraignante ? La liberté avec raison est supérieure à l’indépendance (faire ce qu’on veut)
conclusion Tous les hommes ont une raison, mais il faut apprendre à l’utiliser (enfance, âge irrationnel, source de préjugés) et mettre en œuvre une méthode. La raison est capable de rendre raison de l’intégralité du réel (métaphysique et science). La raison procède par intuition (principes) et par déduction (conséquences). La raison permet à l’homme d’agir plus librement. Transition : nous ignorons malgré tout beaucoup de choses … La raison peut-elle vraiment rendre raison de tout ?
II. Les limites de la raison MAIS LA RAISON NE DERAISONNE-T-ELLE PAS QUAND ELLE PRETEND TOUT SAVOIR ?
1) Les premiers principes LA RAISON PEUT-ELLE TOUT DEMONTRER ?
Peut-on vraiment prouver les premiers principes ? Métaphysique : science des principes. Démonstration : on admet les premiers principes (indémontrables) par intuition. Échec de l’axiomatisation de la géométrie d’Euclide : un axiome reste indémontrable. PASCAL, Pensées : C’est le cœur, et non la raison qui sent les premiers principes. PASCAL n’est pas sceptique : il pense que la raison peut connaître, mais dans certains domaines. La connaissance du cœur est aussi certaine que celle de la raison. Premiers principes : espace, temps, mouvement, nombres … Elle est la condition de la connaissance rationnelle : « Le cœur sent qu’il y a trois dimensions dans l’espace et que les nombres sont infinis et la raison démontre ensuite qu’il n’y a point deux nombres carrés dont l’un soit le double de l’autre. Les principes se sentent, les propositions se concluent et le tout avec certitude mais par différentes voies […] »
La démonstration parfaite La raison doit admettre la nécessité de la révélation (la vérité religieuse) PASCAL, De l’esprit géométrique, 1658 : la véritable démonstration consiste à tout prouver et à tout définir Or, c’est impossible => régression à l’infini « D’où il paraît que les hommes sont dans une impuissance naturelle et immuable de traiter quelque science que ce soit, dans un ordre absolument accompli » = la raison ne peut naturellement pas rendre raison de tout. Il faut alors se contenter de la démonstration géométrique, laquelle se tient « dans ce milieu de ne point définir les choses claires et entendues de tous les hommes, et de définir toutes les autres; et de ne point prouver toutes les choses connues des hommes, et de prouver toutes les autres ».
2) l’expérience L’EXPERIENCE SE SOUMET-ELLE A LA RAISON ?
Que puis-je apprendre de l’expérience ? Expérience : connaissance acquise par les sensations Sensations : trompeuses Ambiguïté de l’expérience : les faits ne parlent pas d’eux-mêmes Cf. les voyages de DESCARTES, qui l’ont fait douter encore plus. Fragilité de l’induction : dégager des lois générales à partir de l’observation des faits Comment légitimer la généralisation d’une observation sur des faits limités ? Général (exceptions possibles) ≠ universel Faut-il alors éliminer tout recours à l’expérience ?
Rôle de l’expérience chez Descartes Descartes, Discours de la méthode, 6ème partie : Trouver les principes à partir de « certaines semences de vérité qui sont naturellement en nos âmes » En déduire leurs premiers « effets » Pour les choses « plus particulières », faire des expériences Lorsqu’un phénomène peut être expliqué par différentes causes, « je ne sais point d’autre expédient que de chercher derechef quelques expériences » pour trancher. Les expériences scientifiques servent à expliquer le détail des phénomènes naturels. DESCARTES remarque qu’elles confirment toujours les principes trouvés par la raison.
Mais si l’expérience contredit les principes ? Un dogme scientifique jusqu’au 17ème siècle : le vide n’existe pas Pourquoi ? Autorité de la tradition : « La nature a horreur du vide » ARISTOTE DESCARTES : matière = étendue Il ne peut y avoir d’étendue vide, sans matière Un fait « polémique » : Le problème des fontainiers de Florence : pourquoi n’est-il pas possible de pomper l’eau à plus de 10,33 m ? Galilée : « la nature a horreur du vide jusqu’à 10 m »
L’expérience de Torricelli Dispositif expérimental de Torricelli : plonger un tube de mercure (initialement bouché) dans un bac de mercure Mercure à la place de l’eau (densité x 14) Apparition d’un espace vide dans le tube Hypothèse : c’est la pesanteur de l’air qui détermine la hauteur de la colonne de mercure
L’expérience de PASCAL Comment savoir si cette hypothèse est vraie ? Expérience de Périer au Puy-de-Dôme, le 19 septembre 1648 Hypothèse : la hauteur du tube de mercure ↘ si pression de l’air ↘ Nombreuses mesures Conclusion : l’hypothèse est confirmée, la hauteur du mercure est plus grande en bas du Puy-de-Dôme. C’est bien la pression de l’air qui crée le vide La nature n’a pas horreur du vide polémique
Expérience et expérimentation Expérimentation : interrogation méthodique des phénomènes, pour vérifier une hypothèse ≠ simple observation : hypothèse de la raison Production artificielle, volontaire des phénomènes (épurés et isolés) Intervention d’instruments (tubes de verre) Expérience cruciale : expérimentation qui tranche entre deux hypothèses La science s’oppose à nos habitudes de pensée tirées de l’expérience ordinaire La science se heurte aux « obstacles épistémologiques » (BACHELARD) de l’expérience première. Toute connaissance est « dans son essence polémique ».
Le refus de l’autorité Refus de la tradition en physique : opposition de deux types de sciences, PASCAL, Préface du Traité du vide, 1651 Les sciences dépendant « seulement de la mémoire » et qui sont historiques : seule l’autorité fait foi Les sujets « qui tombent sous le sens ou sous le raisonnement » Respecter les Anciens : les surpasser en les imitant Progrès cumulatif des sciences « De sorte que toute la suite des hommes, pendant le cours de tous les siècles, doit être considéré comme un même homme qui subsiste toujours et qui apprend continuellement »
Le refus de toute fondation Parmi les sciences « qui tombent sous le sens ou sous le raisonnement » : Les mathématiques reposent sur la géométrie Les expériences sont « les seuls principes de la physique » L’autorité n’a aucune valeur dans ces sciences. La physique est une science d’hypothèse : Elle peut trier les hypothèses : invalider (un seul cas suffit)s ou corroborer (montrer que l’hypothèse théorique est compatible avec les faits observables qu’on peut prévoir comme conséquences de la théorie) Elle ne peut pas vérifier une hypothèse (établir définitivement sa vérité) « Dans toutes les matières dont la preuve consiste en expériences et non en démonstrations, on ne peut faire aucune assertion universelle » Préface Traité du Vide Vérité scientifique : toujours provisoire, hypothétique, historique
Le pourquoi et le comment A. COMTE, dans son cours de philosophie positive, limite les prétentions de la raison : elle doit décrire le COMMENT des phénomènes, en établissant des lois, c’est-à-dire des relations constantes entre les phénomènes observés, et non expliquer le POURQUOI, la cause (métaphysique), inaccessible à la raison. L’état positif est l’âge adulte de la raison, par opposition à l’état théologique et métaphysique. Les 6 points de l’état positif : il s’attache au réel, il est utile, certain, précis, constructeur, relatif et opposé à toute croyance en l’absolu. La connaissance scientifique est toujours relative (à une époque) et partielle. COMTE n’est pas sceptique, car il pense qu’il y a un progrès de la science, qui s’approche de plus en plus de la vérité, et suffit à la prévision.
La méthode expérimentale L’expérimentation de PASCAL anticipe la « méthode expérimentale » mise au point par Claude BERNARD dans son Introduction à l’étude de la méthode expérimentale, 1865. Constatation d’un fait Hypothèse Élaboration d’une expérimentation Observation des phénomènes, etc… La science repose à la fois sur la théorie et l’expérience, mais débute et finit par une observation.
3) La croyance à la raison PEUT-ON RENDRE RAISON DE NOTRE CONFIANCE EN LA RAISON ?
Le mythe de la raison Faire de la science le modèle du savoir, n’est-ce pas témoigner d’un culte de la raison, lui-même irrationnel ? ALAIN, Le culte de la raison comme fondement de la République, 1901 « Il est donc juste de dire que nous devons à la Raison un culte, que nous devons la servir, l’estimer, l’honorer par-dessus toute chose, et que notre bonheur, nos biens et notre vie même ne doivent point être considérés, lorsque la Raison commande. » « La Raison, c’est bien là le Dieu libérateur ». Les Lumières : projet d’émancipation des hommes par la destruction des mythes au nom de la raison. ADORNO et HORKHEIMER, La dialectique de la raison, 1944 « désenchantement du monde » : la science vide le monde de sa signification au profit d’une modélisation mathématique. Aliénation de l’homme, étranger au monde. Mécanisation de la pensée. La raison est totalitaire (domination, instrumentalisation du monde). La raison repose sur un mythe : rationaliser l’inexplicable. Elle s’oppose à la magie, non au mythe.
L’irrationalité de la vocation scientifique Max WEBER, conférence sur le métier et la vocation de savant, 1919 La science est une conduite rationnelle dont le but est d’atteindre à des jugements de fait universellement valables. Neutralité axiologique de la science. Mais la vocation de savant repose elle-même sur un choix subjectif, irrationnel : la recherche de la vérité. La décision de faire de la science repose sur un jugement de valeur, la supériorité de la science du point de vue de la vérité. Cf. le « démon » de SOCRATE, à l’origine de sa vocation philosophique. L’action du savant est une combinaison d’action rationnelle par rapport à un but, et d’engagement irrationnel par rapport à une valeur, la recherche de la vérité.
Sommes-nous guidés par notre raison ? HUME : ce sont nos passions qui nous font agir, non notre raison. « Il n’est pas contraire à ma raison de préférer la destruction du monde à une égratignure sur mon doigt ». Par conséquent les hommes agissent de façon irrationnelle. Mais faut-il renoncer à tout usage de la raison ?