Sociologie des organisations Vincent SIMOULIN IEP Toulouse 2ème année
II Les nouveaux courants théoriques. A) L’approche de la « population ecology ». B) Le neo-institutionnalisme. C) La sociologie de l'action organisée (Friedberg). D) L’analyse en termes de configuration (Musselin).
A) L'approche de la « population ecology ». Michael T. HANNAN, John H. FREEMAN. "The Population Ecology of Organizations". American Journal of Sociology 1977, pp 929-964. "Structural Inertia and Organizational Change". American Sociological Review 1984, pp 149-164.
Un objectif explicite Appliquer les lois de la sélection naturelle aux organisations, en étudiant de façon très mathématisée des populations d'organisation, en reliant les taux de naissance et de décès aux évolutions de l'environnement dans divers secteurs de la vie économique et sociale.
Le postulat de l’inertie structurelle des organisations Il y aurait une incapacité de celles-ci à changer rapidement leurs structures ou même à les changer de façon graduelle. Elles seraient victimes de leur succès et auraient en fait énormément de mal à percevoir les évolutions de leur environnement et à renoncer à une structure qui a longtemps bien marché. Comme avec Darwin, on en arrive à l'idée que l'évolution se fait un peu au hasard.
B) Le neo-institutionnalisme. a) La théorie de l'isomorphisme institutionnel. b) L'hypocrisie institutionnelle (Brunsson).
a) La théorie de l'isomorphisme institutionnel. Walter W. POWELL, Paul J. DiMAGGIO. The New Institutionalism in Organizational Analysis. Chicago : University of Chicago Press, 1991.
Les contraintes de l’environnement Il y a des institutions (modèles de comportement contraignants capables d’imposer des sanctions). Elles sont désormais tellement nombreuses qu’elles forment des “ champs organisationnels ” qui contrôlent les organisations en structurant leur environnement. Les structures organisationnelles se ressemblent de plus en plus, sont de plus en plus isomorphes.
Les 3 isomorphismes Coercitif (contraintes légales pour minimiser la pollution, permettre la concurrence, etc). Mimétique (pour limiter les incertitudes liées aux technologies, par le fait d’imiter les solutions des concurrents qui semblent le mieux réussir, etc). Normatif (associations professionnelles qui diffusent les modèles normatifs, cabinets de conseil qui prônent partout les mêmes solutions, universités et écoles qui créent des personnes interchangeables, etc).
b) L'hypocrisie institutionnelle. Nils, BRUNSSON. The Irrational Organization. Irrationality as a Basis for Organizational Action and Change. Chichester : John Wiley & Sons, 1985
L’hypocrisie La capacité des organisations et des acteurs à développer vis-à-vis de l'extérieur une image de leur action et de leurs objectifs qui correspond à ce qu'en attend l'environnement global … … mais qui n'a que peu de rapport avec leur fonctionnement réel et leurs objectifs véritables.
Une théorie de la réforme Il y a certes adaptation de l'organisation à son environnement, mais qui reste relative et assez ouverte dans ses déterminations. Cette perspective met l'accent sur la mise en œuvre de réformes dont chacune échoue largement mais qui produisent un effet par l’accumulation. Le changement est vu comme un processus collectif et continu, une adaptation graduelle des structures cognitives et des routines organisationnelles.
C) La sociologie de l'action organisée (Friedberg). a) L'évolution des organisations. b) Des évolutions théoriques. c) Une réponse aux critiques.
C) La sociologie de l'action organisée. Erhard FRIEDBERG. Le Pouvoir et la Règle. Paris : Seuil, 1993.
a) L'évolution des organisations. Les organisations sont devenues plus souples et tolérantes, moins contraignantes. Les administrations et entreprises se sont ouvertes sur leur environnement. Le nombre de niveaux hiérarchiques a diminué et les contrôles ont perdu de leur emprise. L'employé fonctionnaire est remplacé par un joueur.
La sociologie de l’action organisée Il n'y a plus de raison de maintenir un clivage traditionnel entre sociologie des organisations et sociologie des mouvements sociaux car : Toute organisation est irréductible à son ordre formel et pose toujours des problèmes de mobilisation. On ne peut pas réduire les mouvements sociaux à leur part spontanée et inorganisée. Il y a aussi dans toute action collective de la contrainte, de la négociation et du pouvoir.
b) Des évolutions théoriques Un raisonnement en termes d'ordre local pour abandonner l'idée de formalisation qui est liée à l'idée d'organisation. Deux directions de recherche : Le contexte de la prise de décision L'explication des préférences des décideurs
Des organisations aux ordres locaux 1) degré de formalisation et de codification de la régulation. 2) degré de finalisation de la régulation (buts). 3) degré de prise de conscience et d'intériorisation de la régulation par les participants. 4) degré de délégation explicite de la régulation.
Le contexte de la prise de décision Conditions organisationnelles et sociales (règles, procédures, équilibres de pouvoir, etc). Organisations comme programmes d'action routinisés qui guident allocation de l'attention des membres de l'organisation (Simon, Cyert, March). Recherche française sur la technologie invisible (Berry, Riveline, etc). Règles comme des investissements de forme (Thévenot).
L'explication des préférences des décideurs Travaux de Festinger sur la dissonance cognitive. Les valeurs ne commandent pas aux comportements ni l'inverse. Les préférences peuvent être postérieures à l'action et créées par elle. Elles sont soumises à des manipulations.
c) Une réponse aux critiques. - Jobert - Leca : la sociologie de l'action organisée n'éclaire qu'un bout de la réalité mais il vaut les autres. - Boltanski - Thévenot : Friedberg leur reproche un certain angélisme, de ne pas voir que les acteurs peuvent mentir. - Callon - Latour : Friedberg reconnaît qu'il faut sans doute prendre davantage en compte les objets. Mais il faut le faire dans une perspective stratégique, et ne pas en venir à considérer les humains comme des objets.
D) L’analyse en termes de configuration (Musselin).