De la formation d'enseignants à la formation d'équipes. Paul Arthaud Université de Technologie de Belfort-Montbéliard
choix théoriques des pratiques Un dispositif d’enseignement-apprentissage de l’anglais dans une école d’ingénieurs, dispositif qui intègre une utilisation des TIC choix théoriques des pratiques Je donne ici l’exemple d’un dispositif d’enseignement-apprentissage de l’anglais dans le cadre d’une UV, LE02, dans une école d’ingénieurs, l’UTBM. Ce dispositif, terme qui est pris ici dans le sens que lui donne Pothier (2003), intègre une utilisation des TIC. Ce dispositif a été graduellement mis au point au cours des années précédentes et nous avons montré qu’il fonctionne (Arthaud 2007). Ce dispositif a une valeur d’exemple et non de modèle à reproduire. Je traite ici des rapports qui se tissent entre, d’une part, le savoir théorique (Ellis 1997), la didactique des chercheurs (Bailly 1997), et, d’autre part, la pratique sur le terrain et le savoir que confère cette pratique. (Ellis 1997) Je montre comment, dans un environnement spécifique, des choix théoriques ont induit des pratiques et des modalités de fonctionnement des apprenants et des enseignants très précises. Je donne ainsi un exemple supplémentaire de la nécessité de maîtriser des connaissances théoriques pour améliorer la pratique. Mon analyse porte plus précisément sur les enseignants. Il s’agit de : mieux cerner les savoirs, les savoir-faire, les compétences donc, qui leur sont nécessaires pour que fonctionne ce dispositif ; se demander comment ces compétences ont été acquises ou comment elles peuvent être acquises. Mon regard est rétrospectif mais il est aussi prospectif. L’analyse du fonctionnement du dispositif suggère des modifications à apporter aux supports utilisés mais également aux procédures mises en œuvre. Une nouvelle organisation du travail se dessine, elle implique notamment un travail d’équipe. Que recouvre exactement le terme d’équipe ? Savons-nous travailler en équipe ? Pouvons-nous nous y préparer ? De quelle façon ? XV Congrès RANACLES
Sommaire Description du dispositif Identification des compétences nécessaires à l’enseignant Redéfinition de la fonction de l’enseignant et formation d’équipes Dans un premier temps, je décris le dispositif mis en place et justifie les décisions qui ont été prises et les choix qui ont été opérés. Dans une deuxième partie, je m’emploie à identifier les compétences, celles qui ont été nécessaires à la mise en œuvre de ce dispositif et celles qu’il serait nécessaire d’acquérir pour son éventuelle amélioration. Dans une dernière partie, je montre comment ce dispositif conduit à redéfinir la fonction de l’enseignant et à envisager un travail d’équipe. Je tenterai de mieux cerner les conséquences que ce travail d’équipe pourrait avoir sur les compétences nécessaires et je m’interroge sur les modalités d’acquisition de ces compétences. XV Congrès RANACLES
De la théorie à la pratique Dispositif UV d’anglais, élèves-ingénieurs, (B1) Utilisation des TIC Définition d’un cadre théorique Apprentissage par tâches (Ellis 2003) Quatre phases (Narcy-Combes 2005) Spécificités de chaque phase Ce dispositif a été mis en œuvre dans le cadre d’une unité de valeur d’anglais, l’UV LE02. Cette UV s’adresse à des étudiants, élève-ingénieurs, dont le niveau de langue correspond au niveau B1 du CECR. Elle prépare les étudiants à l’UV LEO3 qui, elle, est indispensable pour l’obtention du diplôme d’ingénieur. Chaque semestre 22O étudiants suivent cette UV. Ils se répartissent en 10 groupes de TD et 20 groupes de TP dans lesquels interviennent entre 6 à 10 enseignants. Le travail de ces enseignants est coordonné par le responsable de l’UV, moi-même en l’occurrence. Parmi les supports utilisés se trouvent des ressources pédagogiques sur support numérique mises en ligne par l’intermédiaire d’une plateforme, WEBCT. Elles sont accessibles par Internet. Ces ressources ont un nom : Nooks and Crannies, (NAC). Elles ont été créées par moi-même. Comment ce dispositif a-t-il été mis au point ? Dans un premier temps un cadre théorique a été défini : nécessité de donner un sens à l’apprentissage, nécessité d’une prise de recul pour toute acquisition de connaissances, nécessité d’acquérir la L2 dans le cadre de situations de communication authentique, prise en compte des contraintes propres au fonctionnement de la mémoire et attention, prise en compte des deux modes d’acquisition et de production d’une L2, le mode mémoriel et le mode computationnel, prise en compte du phénomène de nativisation, développement de deux savoirs, le savoir implicite et le savoir explicite. Ce cadre nous a conduit à opter pour un apprentissage / enseignement par tâches qui intégrerait l’utilisation des TIC. Cet enseignement par tâches est structuré en 4 phases dans lesquelles s’articulent macro-tâches et micro-tâches (Narcy-Combes, 2005), développement du savoir explicite et développement du savoir implicite, centration sur l’input, centration sur l’output. XV Congrès RANACLES
De la théorie à la pratique Le recours aux TIC Ressources pédagogiques sur support numérique : Nooks and Crannies (NAC) Les TIC ont été utilisées dans le dispositif pour dégager du temps d’enseignement/apprentissage en présentiel, c’est-à-dire lorsque l’apprenant se trouve en présence d’un spécialiste de la L2, afin de favoriser la production de langue. Cet enseignement-apprentissage en présentiel est particulièrement bien adapté à la mise en œuvre d’activités de type communicationnel qui favorisent la production de L2 et multiplient les occasions de traitement en profondeur des données. Le schéma qui est donné sur cette diapositive, fait apparaître les quatre phases de l’apprentissage par tâches. On se rend compte que la phase 0 et la phase 3, qui sont plutôt centrées sur l’output, nécessitent un apprentissage en présentiel. En revanche, la phase 1 et la phase 2, qui sont plutôt centrées sur l’input et le développement du savoir explicite, et qui sont constituées de micro-tâches, peuvent être parcourues par les apprenants en dehors de la présence d’un enseignant, en dehors des horaires de l’UV et en dehors des locaux de l’UTBM. L’utilisation des ressources pédagogiques NAC, vient ainsi s’ancrer dans la structuration en quatre phases de l’apprentissage et elle renforce cette structuration. XV Congrès RANACLES
De la théorie à la pratique Organisation de l’apprentissage Le schéma, présenté ici, permet de comparer le dispositif actuel, qui inclut l’utilisation de NAC avec celui qui l’a précédé et qui, lui, n’incluait pas ces ressources. Dans les deux cas, le volume horaire d’enseignement en présentiel par étudiant est le même : 18O minutes. Néanmoins, dans le dispositif initial, 45 minutes pouvaient être accordées à chacune des phases. Dans le dispositif actuel, les micro-tâches des phases 1 et 2 sont accomplies en semi-autonomie par les étudiants en dehors des horaires de l’UV, ce qui laisse 90 minutes en TD et TP pour chacune des phases 0 et 3. Si l’on se tourne maintenant vers les enseignants qui contribuent au fonctionnement de ce dispositif, on peut s’interroger sur leur rôle et leurs fonctions. XV Congrès RANACLES
Identification des compétences nécessaires à l’enseignant Rôle et tâches de l’enseignant. Médiatiseur Médiateur Apprenant – savoir Utilisateur – ressources pédagogiques sur support numérique Enseignants – techniciens Redéfinition du rôle et des tâches de l’enseignant. Les tâches professionnelles de l’enseignant sont un peu différentes selon qu’il est responsable de l’UV ou intervenant. Disons pour simplifier que le responsable a plus de tâches à effectuer que l’intervenant. Parmi ces tâches professionnelles, il revient au responsable de l’UV celle de créer des micro-tâches d’apprentissage qui ont un support numérique. En ce sens il est médiatiseur (Toma 1996). Dans ce dispositif ce n'est plus l’enseignant qui est la source des connaissances que l’apprenant doit acquérir, son rôle consiste plutôt à accompagner l’apprenant dans son acquisition de connaissances et de compétences. En ce sens il est médiateur (Narcy-Combes 2005) entre l’apprenant et la L2. Il participe au guidage de l’étudiant. Il intervient au niveau de l’input (il le choisit et le modifie) et il intervient au niveau de l’output qu’il complexifie ou normalise. Chacune de ces interventions a sa spécificité. Les modalités d’intervention de l’enseignant dépendent de la phase d’apprentissage dans laquelle se trouve l’apprenant qu’il se propose d’accompagner. Le responsable de l’UV est aussi médiateur entre le dispositif qu’il a échafaudé et les différents utilisateurs de ce dispositif. Ces utilisateurs peuvent être les apprenants mais aussi les enseignants. Il revient donc au responsable d’expliquer le fonctionnement du dispositif, de faciliter son utilisation et de guider son usage. Il est aussi médiateur entre les utilisateurs de ces ressources et les techniciens qui s’occupent du fonctionnement de ces ressources sur le serveur qui les héberge. XV Congrès RANACLES
Identification des compétences nécessaires à l’enseignant Approche systémique Savoirs de la discipline (anglistique) Compétences didactiques Quelles compétences sont nécessaires à ce responsable mais aussi à tous les intervenants? Une compétence (Guittet 1995 : 11) représente la mise en œuvre efficace de savoirs et de savoir-faire pour la réalisation d’une tâche. La compétence résulte d’une expérience professionnelle, elle s’observe objectivement à partir du poste de travail et elle est validée par la performance professionnelle. Afin de retrouver les savoirs et savoir-faire nécessaires à l’enseignant, je vais passer par les tâches que doit accomplir cet enseignant qui prend part à ce dispositif. Pour concevoir le programme de l’UV, les séances de TD et TP, mais aussi pour intervenir de façon efficace dans ces séances, il faut adopter une approche systémique (Morin 1994), nécessaire pour concilier le respect de certaines données théoriques avec les contraintes spécifiques de l’établissement. Il faut avoir une vue globale du système et de toutes les parties prenantes, percevoir les contraintes et les limites qu’il impose mais aussi les possibilités et la latitude qu’il offre. Il faut maîtriser les savoirs « anglistiques » (linguistique, littérature, civilisation, langue des spécialités). Il s’agit pour l’enseignant non seulement d’acquérir un savoir, la L2, mais également un savoir sur ce savoir qui se traduit en la maîtrise d’un métalangage. Il s’agit pour lui de pouvoir mener une réflexion sur la langue. Autrement dit, il doit savoir parler la langue et parler sur la langue. La maîtrise de ce métalangage peut être considérée comme la preuve d’une « prise de recul ». Par exemple, il ne suffit pas pour aider l’apprenant à améliorer sa prononciation de la L2 que l’enseignant ait une bonne prononciation. Il convient qu’il possède en plus un savoir phonologique explicite. La connaissance explicite des domaines que recouvre l’anglistique en laisse apparaître la complexité. Cette prise de conscience de la complexité conduit ainsi l’enseignant à mieux mesurer ses ambitions et donc ses objectifs d’enseignement. Le défi qu’il faut alors relever est celui de simplifier sans altérer ni dénaturer. Il faut aussi à l’enseignant des compétences didactiques. XV Congrès RANACLES
De la théorie à la pratique Données théoriques Pratiques induites Psycholinguistiques Compréhension orale Production orale Production écrite La mémoire et l’attention Eviter les pratiques contre-productives Dans les deux tableaux, présentés dans les diapositives qui suivent, je pars des données théoriques, c’est-à-dire de certaines conclusions de la didactique universitaire et je montre les pratiques qui résultent des choix théoriques qui ont été faits. Dans le domaine de la psycholinguistique, les connaissances que l’on a des phénomènes de la compréhension et de la production orales et écrites, du fonctionnement de la mémoire ou de l’attention, aident l’enseignant à mieux repérer les pratiques contre-productives et donc à les éliminer. XV Congrès RANACLES
De la théorie à la pratique Données théoriques Pratiques induites Communication signifiante Intéresser l’apprenant Utiliser une langue authentique Situation de communication authentique Approche socio-constructiviste ZPD Scaffolding, feedback, pushed output Corriger l’apprenant Aider l’apprenant à complexifier ses énoncés Dans ce tableau-ci, je procède comme précédemment. Je pars des données théoriques et je montre comment elles peuvent aider l’enseignant dans sa pratique. Ainsi, au concept de communication signifiante, correspond, dans la pratique, la nécessité d’intéresser l’apprenant, d’utiliser une langue authentique dans des situations de communication, aussi authentiques que possible. Tous les concepts qui se regroupent sous l’approche socio-constructiviste - étayage (scaffolding) correction immédiate (feedback), complexification des énoncés (pushed output) donnent à l’enseignant les moyens de déterminer quand et comment corriger et améliorer les productions des apprenants. XV Congrès RANACLES
De la théorie à la pratique Données théoriques Pratiques induites Nativisation Utilisation de la L1 et focalisation sur la forme Interlangue Définition du programme de contenus Définition des écarts acceptables Mode mémoriel et mode computationnel Grammaire-Lexique-Phonologie Le concept d’interlangue permet, par exemple, au praticien de mieux définir les savoirs et savoir-faire qu’il propose à l’apprenant d’acquérir - ses objectifs en d’autres termes - et de mieux définir les écarts acceptables ou inacceptables dans les productions de L2 des apprenants, de corriger l’apprenant en d’autres termes. Les concepts de nativisation, de savoir implicite et explicite, de prise de recul, permettent, entre autres choses, à l’enseignant de mieux définir quand et comment utiliser la L1 dans l’apprentissage de la L2 et quand et comment se concentrer sur la forme de la L2, quand et comment parler « sur » la langue. Enfin les données théoriques sur les deux modes d’acquisition et de production de la L2 sont d’une grande utilité, pour définir, par exemple, le contenu, l’importance et les modalités de ce que l’on nommera, d’une façon volontairement simplifiée ici, l’enseignement du lexique et de la grammaire. Prise de recul (noticing, noticing the gap) Focalisation sur la forme Savoir explicite et savoir explicite Parler sur la langue XV Congrès RANACLES
De la théorie à la pratique Compétences de médiatiseur Compétences d’utilisateur Compétences relationnelles La prise de recul Si l’on se penche maintenant sur les compétences relatives à la création ou à l’utilisation de ressources pédagogiques sur support numérique, sur les compétences de médiatiseur (Toma 1996) (Bertin 2001 ). Il revient à l’enseignant-médiatiseur de définir le champ d’action de l’utilisation des TIC et donc percevoir la limite de son propre savoir-faire. Quel type de ressources est-il capable de concevoir ? Quel est leur degré de technicité ? Dans le domaine, le recours à l’expert se révèle nécessaire. Le bricolage des premiers temps doit alors céder le pas à l’expertise. Il lui revient de gérer et d’assurer la maintenance de ces ressources, leur mise à jour, leur modernisation. Il lui revient de mieux guider les utilisateurs, apprenants mais aussi enseignants. Pour ces derniers il lui incombe d’expliquer comment ces ressources fonctionnent. Il revient aux enseignants-utilisateurs de ces ressources de comprendre comment ces ressources fonctionnent. Dans le domaine aussi, il convient d’éviter le recours à l’application de règles, ou de recettes sans aucun sens : il convient de percevoir le sens de l’opération. Remarque : A l’ origine de la crainte de la machine se trouve ainsi un sentiment d’impuissance devant une force que l’on ne contrôle pas. Il s’ensuit que, a contrario, la connaissance de la machine devient facteur d’épanouissement et de libération de l’individu, ce qui confère à l’étude des sciences et techniques ou de la technologie, une dimension humaniste qui n’est pas négligeable. Selon un tel raisonnement, tout emploi de machine dans l’apprentissage d’une langue implique que les utilisateurs aient une connaissance du fonctionnement de cette machine. Il convient donc que téléviseurs, magnétoscopes et a fortiori, ordinateurs, ne demeurent pas pour les utilisateurs d’insondables boîtes noires. Le responsable de l’UV doit aussi posséder des compétences relationnelles. Dans mon exposé, il s’agit uniquement de remarques, d’observations, il s’agit de champs de recherche que je perçois mais pour lesquels je n’ai conduit aucune investigation. Je rattache en particulier à ce domaine la nécessité dans laquelle se trouve l’enseignant d’établir une communication authentique avec l’apprenant. Une interrogation essentielle me semble être : peut-on établir une communication authentique sans réelle empathie ? Et alors, peut-on recevoir une formation en empathie ? En ce qui concerne le rôle du responsable de l’UV, médiateur, médiatiseur il faut qu’il veille au fonctionnement du dispositif, qu’il anime ou coordonne les activités des différentes personnes impliquées dans l’UV. Nous nous trouvons alors dans le domaine de la gestion des groupes. Commune à toutes ces compétences se trouve la prise de recul, qui nécessite l’analyse. Cette analyse implique une approche globale, systémique, elle implique également la possession d’un savoir théorique. Il s’agit pour l’enseignant, qui possède déjà un savoir issu de la pratique, practical knowledge (Ellis 1994) d’acquérir un savoir théorique sur sa pratique, technical knowledge, (ibid.) En conclusion, on peut dire que pour le responsable de l’UV, mais aussi pour les intervenants, la tâche est lourde. Peut-être trop ? Le remède se trouve-t-il dans la division du travail ? XV Congrès RANACLES
Redéfinition de la fonction de l’enseignant et formation d’équipes Le groupe et l’équipe L’équipe intelligente Dysfonctionnements du dispositif actuel Le groupe ou l’équipe ? Dans l’exemple dont nous traitons l’enseignant ne travaille pas seul. Il fait partie d’un groupe d’enseignants. Le problème se pose alors de la division du travail. Comment le travail est-il organisé? La littérature spécialisée sur le sujet fait une différence entre le groupe et l’équipe. Le groupe est un ensemble d’individus interdépendants et ayant une conséquence, une influence les uns sur les autres (Lewin 1948). Pour Allard-Poesi, une équipe est un ensemble d’individus interdépendants dans leurs tâches et qui partagent la responsabilité de leurs résultats. (Allard-Poesi 2003 : 12) Une vraie équipe, c’est en réalité un équipage dont chaque membre est indispensable et solidaire, membres qui sont liés pour le meilleur et pour le pire par une communauté de destin. (Audebert-Lasrochas 1999 ) Dans un équipage, les règles du jeu ne sont pas les mêmes que dans une équipe notamment, on peut très difficilement exclure un membre sans mettre en péril tout l’équipage. Il existe plusieurs types d’équipes : équipe de travail, équipe parallèle ou consultative, équipe projet, équipe managériale. Allard-Poesi (2003) fait une différence entre la fonction et le rôle des membres de l’équipe. Les rôles définissent les comportements attendus d’une personne dans une position particulière. Une distinction est opérée entre les rôles centrés sur la tâche, c’est-à-dire sur la résolution du problème et ses aspects opérationnels et les rôles socio-émotionnels qui sont centrés sur la satisfaction des besoins émotionnels et interpersonnels des membres ; ils permettent de réguler les conflits et facilitent le vécu émotionnel du groupe. Cet auteur identifie plusieurs réseaux de communication qui peuvent s’établir entre les membres de cette équipe. A la suite des travaux de Lewin (1948), on décrit les groupes non plus uniquement à partir des éléments les composant mais en termes de propriétés globales qu’ils démontrent. Les groupes ont des propriétés et comportements particuliers qui ne peuvent être prédits à partir de la simple connaissance des membres du groupe. Quel sont les facteurs et acteurs clés des équipes intelligentes ? Pour Audebert-Lasrochas (1999) une bonne équipe est fonction de ce qu’elle est (sa composition), des principes et des valeurs qu’elle va respecter en fonction de l’exigence réciproque de chacun de ses membres, de ce que l’entreprise ou l’organisation fait pour que l’équipe soit performante, de la capacité de l’équipe à résister à la frustration et à l’échec et de sa persévérance et de sa capacité de rebond. D’autres auteurs (cités dans Audebert-Lasrochas 1999) soulignent la présence indispensable d’un bon coordinateur et puis aussi d’un homme à idées, d’un critique et d’un juge pour contrôler l’homme à idées. D’autres encore, Margerison et Mc Cann (ibid.) soulignent la présence indispensable d’un coordinateur qui s’adapte à plusieurs types psychologiques. Parmi les qualités généralement exigées chez un bon chef de projets, on trouve la capacité de changer de rôle et de mode de management. Proche de ses collaborateurs, ouvert à leurs craintes et attentes, il devient un négociateur acharné ou un habile diplomate. Selon Petit (cité par Audebert-Lasrochas 1999) ce qui est important chez le leader c’est la capacité à adapter son comportement en fonction du niveau de maturité de ses collaborateurs, c’est-à-dire essentiellement de leur niveau de compétences et degré de motivation pour réaliser une activité donnée. Si l’on revient maintenant au fonctionnement de notre UV et de ses intervenants, on s’aperçoit que les différents intervenants et le responsable forment plutôt un groupe qu’une équipe. En effet dans un tel dispositif le travail est, d’une certaine façon, divisé et les enseignants fonctionnent en parallèle sous la conduite d’un responsable. Tous s’occupent de l’input, tous s’occupent de l’output, tous s’occupent des quatre phases. Si l’on tente de repérer et d’identifier les dysfonctionnements qui sont apparus dans le dispositif on peut citer: un dysfonctionnement lié à l’attitude qu’ont envers l’utilisation des TIC les différents intervenants. Guichon (2004) donne une typologie de ces attitudes. Un autre problème de fonctionnement majeur vient du lien fort qui existe entre les phases d’apprentissages. Ce lien implique, par exemple, que tous les intervenants aient une bonne connaissance du contenu des pages de NAC et de tout le programme. Il apparait que tous n’ont pas cette connaissance, car son acquisition nécessite du temps : NAC contient environ 800 pages à ce jour. Il manque également du temps pour la création des ressources, ainsi que pour leur mise à jour et leur modernisation. Les intervenants n’ont pas tous les connaissances théoriques nécessaires, notamment en didactique, pour percevoir la cohérence recherchée dans le dispositif. Les intervenants n’ont pas le même type de savoir sur la L2 et la C2. XV Congrès RANACLES
Redéfinition de la fonction de l’enseignant et formation d’équipes Nouvelle répartition des rôles et des tâches Uniformité des compétences, hétérogénéité du niveau de ces compétences Meilleure utilisation des compétences de chacun Nouvelle définition du service de l’enseignant Dans la situation actuelle, un travail d’un même type est divisé (de façon inégale) entre les différents intervenants et le responsable. Tous les intervenants sont alors censés posséder les mêmes compétences (peut-être le responsable de l’UV a-t-il des compétences supplémentaires ?) Si l’on s’oriente vers une véritable équipe, telle qu’elle a été définie plus haut, le travail est, dans un premier temps, décomposé en différents types et ces différents types sont attribués aux différents membres de l’équipe. En se plaçant dans une telle hypothèse, on peut concevoir qu’il y aurait des spécialistes de l’output, des spécialistes des phases 0 et 3, du développement du savoir implicite. Il y aurait, d’autre part, des spécialistes de l’input, des micro-tâches, du développement du savoir explicite. Le travail d’un quelconque membre de l’équipe vient alors préparer ou compléter celui d’un autre membre de l’équipe. Les membres de l’équipe travailleraient alors plus en série qu’en parallèle. Afin d’éviter les écueils d’une spécialisation à outrance, d’une certaine taylorisation et aussi afin que chaque enseignant puisse avoir cette vision et cette approche systémique des situations d’apprentissage, il convient de préférer à une complémentarité des compétences une complémentarité des niveaux de compétences. Il s’agit pour tous de posséder toutes les compétences mais à des niveaux différents. Il s’agit de viser à une uniformité des compétences mais à une hétérogénéité du niveau de ces compétences. L’avantage d’une telle répartition des tâches réside certainement dans le fait qu’elle permet de tirer un meilleur parti des compétences, des aptitudes et des préférences de chacun. Parmi les autres atouts d’une telle réorganisation, on peut mentionner le sentiment, chez les intervenants, de travailler de façon moins isolée, avec des tâches et des objectifs peut-être plus clairement définis. Dans une telle organisation du travail, il y aurait donc : un coordonnateur ; un ou plusieurs créateurs de micro-tâches, spécialistes de l’input et des activités hors présentiel, des enseignants plutôt orientés vers le développement du savoir explicite ; des spécialistes de l’output orientés vers le développement du savoir implicite ; des spécialistes de la L2 (grammaire, civilisation, phonologie, etc.). Il est à prévoir que les spécialistes de l’input et des micro-tâches aient à travailler en collaboration avec des techniciens spécialistes de la médiatisation. Le fonctionnement d’un tel dispositif implique que soit redéfini le service des enseignants. L’heure d’enseignement en présentiel n’est plus la seule référence. La création de micro-tâches, des ressources sur support numériques, la médiation avec les techniciens ou les utilisateurs sont autant de tâches à prendre en compte dans la définition du service d’un enseignant. XV Congrès RANACLES
Redéfinition de la fonction de l’enseignant et formation d’équipes Acquisition des compétences nécessaires Formation initiale Objectif de l’équipe Reddition de comptes Recherche-action Comment l’enseignant peut-il se préparer à ce genre de travail d’équipe ? Répondre à cette question conduit à parler de la formation de l’enseignant. Tous les enseignants ont reçu une formation initiale. Mais d’une part les compétences acquises dans le cadre de cette formation vieillissent, d’autre part les situations d’apprentissage évoluent. Il convient donc de mettre les compétences à jour et d’en acquérir de nouvelles. Il semble que le travail d’équipe permette de créer les conditions pour que l’acquisition de nouvelles compétences soit perçue comme inévitable. En effet, s’il revient à l’équipe de fixer elle-même ses objectifs, il lui revient aussi de se doter des moyens d’atteindre ces objectifs. Au nombre de ces moyens, se trouve l’acquisition de nouvelles compétences. La formation de chacun est nécessaire au fonctionnement de l’équipe toute entière. Il en va de la responsabilité (et c’est là une référence à Lévinas) de chacun. De surcroît, dans un tel dispositif, l’enseignant est, comme cela a été vu, médiateur, accompagnateur de l’apprenant. Dans ces conditions, il est incontournable qu’il soit en mesure d’expliciter ses démarches, justifier ce qu’il demande de l’apprenant. Il a des comptes à rendre. Il ne peut le faire que s’il dispose des éléments théoriques nécessaires à la justification de sa démarche. La reddition de comptes nécessite la possession avérée de compétences et de savoirs théoriques. Cette reddition de comptes a un avantage supplémentaire. L’explicitation des démarches de l’enseignant contribue au développement du savoir métacognitif de l’apprenant. Enfin, la recherche-action entreprise par l’équipe est propre à créer les conditions favorables à l’acquisition de nouvelles compétences. En effet, le travail d’équipe implique une analyse constante des pratiques. Cette analyse peut se faire dans le cadre d‘une recherche-action qui favorisera le recours à la théorie, la mise en question des pratiques existantes, et très certainement l’acquisition de nouvelles compétences. XV Congrès RANACLES
Conclusion La nécessité et les avantages de travailler en équipe La nécessité de l’analyse La nécessité de posséder un savoir théorique L’exemple dont il vient d’être question montre la nécessité, les avantages et les modalités du travail d’équipe. Il ne s’agit que d’un exemple. Il ne peut être transposé sans une analyse préalable de la situation d’apprentissage. Cette analyse est indispensable et elle ne peut être menée sans avoir recours à un savoir théorique. Le recours au savoir théorique, à la didactique universitaire me semble essentiel. Il devient dès lors un élément incontournable de la formation de l’enseignant. XV Congrès RANACLES
Merci de votre attention. XV Congrès RANACLES
Bibliographie réduite Allard-Poesi, Florence. 2003. Management d’équipe. Paris : Dunod. Audebert-Lasrochas, Patrick (dir.). 1999. Les équipes intelligentes. Paris : Editions d’Organisation. Bertin, Jean-Claude. 2001. Des outils pour des langues. Multimédia et apprentissage. Paris : Ellipses. Ellis, Rod. 2003. Task-based Language Learning and Teaching. Oxford : Oxford University Press. Guichon Nicolas. 2004A « Zone de dialogue entre didactique et médiatisation », Cahiers de l’Acedle n°1 Guichon Nicolas. 2004B. « La survie sociale d’une innovation », Alsic, vol. 4, 2004, p. 71-83. < http://alsic.u-strasbg.fr>. Site consulté en octobre 2006. Narcy-Combes, Jean-Paul. 2005. Didactique des langues et TIC. Vers une recherche responsable. 2005. Paris : Ophrys. Pothier, Maguy. 2003. Multimédias, dispositifs d’apprentissage et acquisition des langues. Gap : Ophrys. Toma, Antoine. 1996. Du multimédia et des hommes. Paris : Martorana. Bibliographie complète Allard-Poesi, Florence. 2003. Management d’équipe. Paris : Dunod. Arthaud, Paul. 2007. Création et utilisation de ressources pédagogiques sur support numérique pour l’enseignement de l’anglais dans une école d’ingénieurs. Modalités d’intégration et étude d’impact. Thèse de doctorat. Université de la Sorbonne Nouvelle – Paris III. Audebert-Lasrochas, Patrick (dir.). 1999. Les équipes intelligentes. Paris : Editions d’Organisation. Bailly, Danielle. 1997. Didactique de l’anglais. Volume 1. Paris : Nathan pédagogie. Bertin, Jean-Claude. 2001. Des outils pour des langues. Multimédia et apprentissage. Paris : Ellipses. Ellis, Rod. 1997. SLA Research and Language Teaching. Oxford : Oxford University Press. Ellis, Rod. 2003. Task-based Language Learning and Teaching. Oxford : Oxford University Press. Guichon Nicolas. 2004. « La survie sociale d’une innovation », Alsic, vol. 4, 2004, p. 71-83. < http://alsic.u-strasbg.fr>. Site consulté en octobre 2006. Guichon Nicolas. 2004A « Zone de dialogue entre didactique et médiatisation », Cahiers de l’Acedle n°1 Guichon Nicolas. 2004B. « La survie sociale d’une innovation », Alsic, vol. 4, 2004, p. 71-83. < http://alsic.u-strasbg.fr>. Site consulté en octobre 2006. Lewin, Kurt. 1948. Resolving Social conflicts : Selected Papers on Group Dynamics. New York : Harper. Morin, Edgar. 1994. La complexité humaine. Paris : Champs-L’essentiel Flammarion. Narcy-Combes, Jean-Paul. 2005. Didactique des langues et TIC. Vers une recherche responsable. 2005. Paris : Ophrys. Pothier, Maguy. 2003. Multimédias, dispositifs d’apprentissage et acquisition des langues. Gap : Ophrys. Toma, Antoine. 1996. Du multimédia et des hommes. Paris : Martorana XV Congrès RANACLES
De la formation d'enseignants à la formation d'équipes. Paul Arthaud Université de Technologie de Belfort-Montbéliard
Définition d’une tâche (Ellis 2003 ) est un plan de travail ; implique en premier lieu une centration sur le sens ; implique la mise en œuvre d’une langue authentique ; implique la mise en œuvre d’une ou plusieurs des quatre compétences de base (CO, PO, CE, PE ); implique une activité cognitive ; donne toujours lieu à une activité de communication. Suite XV Congrès RANACLES
Macro-tâches Demaizière et Narcy-Combes (2005) La macro-tâche est le point de départ de la séquence pédagogique. Elle se définit comme un ensemble d’actions constituant une forme de « mise en scène » de la réalité, ou d’un type de fiction à laquelle les apprenants pourront adhérer. Elle conduit à une production langagière non limitée à l’univers scolaire. Suite XV Congrès RANACLES
Micro-tâches Demaizière et Narcy-Combes (2005) […] plus circonscrites et moins réalistes [elles] doivent inclure gestion du sens et focalisation de l’attention sur des phénomènes importants, [elles] sont analytiques mais ne peuvent pas être déconnectées de toute mise en œuvre dans une situation d’énonciation si l’on veut que se déclenchent les processus qui activent l’acquisition langagière. On postule que si ces micro-tâches parviennent à faire vivre de « mini-SPA » aux apprenants, elles seront efficaces. (ibid.) Retour XV Congrès RANACLES
Cadre théorique Tout apprentissage nécessite un recul épistémique. Toute activité d’apprentissage doit avoir un sens pour l’apprenant, sens qu’il perçoit. La langue ne peut être dissociée de la communication. Il est indispensable que toute procédure d’enseignement/apprentissage d’une L2 tienne compte du phénomène de nativisation. Il est indispensable que toute procédure d’enseignement/apprentissage d’une L2 tienne compte des modalités de fonctionnement de la perception, de l’attention et de la mémoire. Suite XV Congrès RANACLES
Cadre théorique L’apprentissage d’une L2 repose sur le développement de 2 types de savoir, le savoir implicite et le savoir explicite. Le savoir implicite est absolument nécessaire mais il est difficile à acquérir. Le savoir explicite est plus facile à acquérir, mais il ne se transforme pas directement en savoir implicite. Son rôle est néanmoins important dans la mesure où il facilite la mise en place du savoir implicite. Il existe deux modes de production des énoncés : le mode computationnel ou d’application de règles et le mode mémoriel ou d’utilisation de blocs lexicalisés. L’enseignement/apprentissage par tâches semble proposer une démarche qui tient compte des points précédents. Retour XV Congrès RANACLES
PHASE 0 PHASE 1 PHASE 2 PHASE 3 Prise de conscience des obstacles et des écarts. Création de besoins relais . Sensibilisation ou rappel. Mise ou remise en place d’un savoir explicite adéquat. Pratique contrôlée. place de processus contrôlés. Tentative de Production. Retour à une micro-tâche. Communication mais avec mesure de l’efficacité du recul. Plutôt centrée sur la production. Prise de conscience des données nécessaires à l’accomplissement d’une tâche. Output focused . Input focused. Plutôt centrée sur l’acquisition de données. Input/output focused. Centrée sur l’acquisition et la restitution de Output focused. Centrée sur l’utilisation adéquate de données. Savoir implicite. Retour Savoir explicite. Du savoir explicite au savoir implicite. Savoir implicite. Avec retour au savoir explicite en phase de correction immédiate ou de possibilité de complexification.
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